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lundi, 31 octobre 2022

Tennis et théâtre

Tennis et théâtre

Lucie et Pauline à Disney

Pauline et Lucie sœurs jumelles de dix ans vont assister à un tournoi de tennis où participent des personnages du monde de Walt Disney. Elles sont toutes excitées et trépignent d’impatience. Les voilà arrivant sur place dans la propriété de Winnie l’ourson. C’est le jour de la finale homme :

Pauline : Regarde ce beau château et ce jardin avec ces fleurs de toutes les couleurs. Il y a trois courts de tennis. Et puis toutes ces ruches sur les côtés.

Lucie : C’est pour Winnie. Tu as vu, il est en train de se gaver de miel. Pas étonnant que son ventre soit si rond !.

Pauline : Sais-tu qui est en finale ? Ah j’aperçois Esméralda avec ses boucles d’oreille étincelantes.

Lucie : Et moi je vois que Mowgly est tête de série n° deux du tableau masculin. C’est indiqué sur le grand tableau là-bas.

Pauline : Oh là là tous ces journalistes et tous ces photographes, c’est incroyable ! J’aimerais bien avoir une photo de Peter Pan

Lucie : Et moi du petit chaperon rouge. On va leur demander s’ils pourraient nous donner une photo. J’espère qu’ils ne nous demanderont pas d’argent.

Et les voilà parlant avec les photographes. Puis le match débute. Nombreux sont les spectateurs malgré un temps bien maussade.

Pauline : Ça commence. C’est Quasimodo contre Mowgly.

Lucie : Comme Mowgly joue mal. Quasimodo en revanche quelle pêche !.

Pauline : Ça va vite, déjà un set pour Quasimodo.

Lucie : J’espère que la partie va être plus disputée au 2ème.set. Sinon ce n’est pas drôle.

Pauline : Non, Mowgly est toujours aussi nul. Je me demande s’il va vraiment rentrer dans la partie

Lucie : Je ne sais pas ce qu’il a. En attendant ça fait encore 5/2 contre lui.

Pauline : Maintenant deux balles de match. Ah en voilà deux de sauvées.

Lucie : Il a l’air de jouer un peu mieux. Il est même en train de remonter. 5 /4.

Pauline : Ah là là un set partout. C’est fou !

Lucie : Pour qui es-tu ?

Pauline : Pour Mowgly. Et toi ?

Lucie : Plutôt pour Quasimodo.

Pauline : Super ; Mowgly mène 2/0. Je n’en reviens pas comme il joue bien maintenant.

Lucie : Oh là là 2/2. Allez Quasimodo, bats-toi.

Pauline : Monte au filet Mowgly. Voilà, tu vas l’éclater.

Lucie : Arrête Pauline. Maintenant Quasimodo ne met plus une balle dans le court. Ça y est il a perdu. Tu peux être fière de toi.

Elles s’en repartent ; Lucie fait un peu la tête. Elles reviennent le lendemain pour la finale entre Esméralda et Cruella.

Lucie : Comme elle a l’air méchant Cruella. J’espère qu’elle va perdre.

Pauline : Moi aussi. Tu as vu comme Esméralda est jolie avec son bel ensemble bleu. Et puis quel coup droit ravageur !

Lucie : Regarde les copines de Cruella. Elles sont en train d’applaudir les fautes d’Esméralda. C’est dégueulasse.

Pauline : Oui balle de set pour Esméralda. Voilà 6/3.

Lucie : Ça fait les pieds à Cruella. J’espère qu’Esméralda va la massacrer au 2ème set.

Pauline : Oh un dalmatien. C’est vraiment beau comme chien.

 C’est alors que le dalmatien entre sur le court. La partie est interrompue, le temps que l’on chasse le chien.

Lucie : Dommage qu’il ne puisse rester sur le court ; c’était marrant.

Pauline : J’aurais bien aimé voir deux dalmatiens l’un contre l’autre avec des raquettes et des balles.

Lucie éclate de rire. Esmeralda vient de gagner. Toutes deux l’applaudissent très fort.

Pauline : Tu viens, on va lui demander un autographe.

Et les voilà, attendant leur tour. Jusqu’au moment du bal où Mowgly et Esmeralda vont danser ensemble. Mowgly est tout ému de danser avec une si jolie fille. Il tremble, est tout rouge. C’est le tango qui va être à l’honneur. Nos deux héros très sensuels s’enlacent sous les yeux admiratifs de nombreux enfants.

Puis Winnie fait son discours de clôture. Il remet la coupe en forme de serpent aux deux participants. Avec en plus comme cadeau un chèque de trente euros et deux boîtes de miel. Il donne rendez-vous au public l’année prochaine et annonce que le tournoi passera pour la première fois sur France II. Une salve d’applaudissements se fait entendre alors que nos deux héros quittent le court avec majesté.

Complicité fratricide

Sylvie ancienne championne de tennis est assise à son bureau. Elle est en train de lire. Pas loin se trouve l’amie avec qui elle partage l’appartement.

Sylvie : Tu sais, cette biographie de la patineuse Catherine Maroni me rappelle des souvenirs du temps où j’étais joueuse de tennis professionnelle. Tu te rends compte que son entraîneur lui donnait des gifles et l’enfermait quand il n’était pas content d’elle. Il lui arrivait même de la traiter de « grosse truie » ou de « vilain roquet ».

Virginie : Est-ce ce que tu as vécu ?

Sylvie : Pas moi directement, car le courant passait vraiment bien avec mon coach. Mais je m’entraînais avec une fille qu’il trouvait molle et qu’il traitait de « gros veau ». Un jour il l’a d’ailleurs dit à la mère et ce fut la rupture. Ça ne m’a pas trop gêné car la mère et la fille avaient vraiment le melon.

Virginie : Ce sont de drôles de méthodes quand même.

Sylvie : Oui mais nous les sportives de haut niveau on peut être un peu maso !

Virginie : Tu en as d’autres comme ça !

Sylvie : Ce qui me fait écho, ce sont les réflexions de cette patineuse sur la misogynie. Je te cite sa phrase : Si je laisse tomber des affaires, les patineurs ne se donneront même pas la peine de les ramasser. Ils se disent chacun ses problèmes et puis comme ce ne sont pas vraiment des femmes à quoi bon les aider. » Moi aussi, j’ai été victime de la misogynie. Un jour il m’est arrivé une chose révoltante. J’avais battu une des meilleures joueuses mondiales, après une lutte acharnée de plus de trois heures. Or le juge-arbitre m’a demandé de jouer le lendemain et je n’ai pas pu récupérer. Et j’ai perdu sans vraiment me battre. Chez les hommes ça ne serait jamais arrivé.

Virginie : Je ne connais pas grand-chose au sport mais c’est vrai qu’en général on parle beaucoup moins des femmes que des hommes.

Sylvie : Oui y a qu’à voir la Fed Cup, l’équivalent de la Coupe Davis. On n’en parle presque pas. Enfin c’est comme ça. Bon il faut que je me prépare pour interviewer cette patineuse. Tu m’as dit que tu m’accompagnais.

Virginie : Oui à quelle heure dans l’après-midi ?

Sylvie : A 16h. J’ai besoin de me concentrer un peu pour préparer mes questions.

Virginie : Ok. Je vais faire un tour et je t’attendrai en bas avec la voiture.

On voit Sylvie très concentrée écrire ses questions. Puis elle se lève et rejoint Virginie. Les voilà toutes deux en voiture. C’est Sylvie qui conduit.

Sylvie : Oh là là ce n’est pas vrai. Il manquait plus que les embouteillages. On va arriver en retard si ça continue.

Elle trépigne et regarde sa montre.

Sylvie : Enfin nous voilà. On a 20 minutes de retard.

Elles arrivent à la patinoire et se dirigent vers la patineuse.

La patineuse pas très aimable : C’était à 6h et non pas à 6h20.

Sylvie : Je sais mais on a été bloqué par la circulation.

La patineuse : Il faut que je me prépare un peu. Mon gala est à 8h30, je peux vous accorder un entretien à 7h30.

Sylvie : D’accord.

La patineuse s’en va et se met à faire des étirements et à traîner.

Sylvie s’éloigne avec Virginie.

Virginie : C’est curieux. Cette patineuse a l’air disponible.

Sylvie : Oui mais elle est très orgueilleuse et elle a voulu montrer qu’elle n’était pas à notre disposition. Et puis avant un gala elle est plus nerveuse qu’à l’accoutumée. J’espère qu’à 7h30 elle ne se fera pas prier car sinon nous allons avoir une altercation.

Durant l’attente, Virginie pose des questions à Sylvie sur sa carrière :

Tu peux me raconter des anecdotes sur tes fans 

Sylvie : Je recevais souvent des lettres d’amour, et puis parfois des insultes de gens m’ayant vu battre leur favorite. Et puis je jouais à l’époque où l’homosexualité a commencé à envahir le circuit. Il arrivait que certaines joueuses m’envoient des fleurs, si tu vois ce que je veux dire….

Virginie sourit et dit à Sylvie : Ça va être l’heure.

Sylvie : Oui allons-y.

Sylvie s’approche de la patineuse et lui pose la première question :

Qu’est-ce que ça vous faisait lorsque votre entraîneur vous enfermait ?

La patineuse : Je n’ai pas à me justifier sur cela.

Sylvie : Pourquoi pas ? A ce moment là il ne fallait pas en parler.

La patineuse : Cela me regarde et je crois qu’il faut mieux arrêter là. Je dois me préparer, me maquiller et prendre une douche. Et puis votre amie n’a pas à être là.

La patineuse s’en va et Sylvie outrée lui crie :

Vous avez peur et vous n’êtes pas du tout à l’aise avec ce gala. Et je vous ai gênée avec mes questions, je vous ai poussé dans vos retranchements.

Sylvie et Virginie s’apprêtent à partir alors que l’agent de la patineuse arrive : « Ça s’est mal passé ».

Sylvie : Comme entre deux sportives de haut niveau.

L’agent sourit et lui demande ses coordonnées.

Sylvie et Virginie remontent dans la voiture. A un moment donné Sylvie sur les nerfs se trompe de chemin. Elle souffle et s’énerve : Excuse-moi dit-elle à Virginie mais je suis super énervée.

Virginie : Je comprends, ce n’est pas une personne très agréable.

Sylvie finit par retrouver son chemin et elles pénètrent dans l’appartement.

Sylvie : J’ai vraiment envie de balancer mes chaussures.

Virginie : Calme toi.

Sylvie : Oui tu as raison. En fait ça me rappelle quand j’étais joueuse. C’est vrai qu’avant une compétition je pouvais être un peu comme ça. Irascible et électrique. En fait, on s’est comprise tout en se heurtant. Peut-être qu’un jour j’aurai des nouvelles de sa part.

 

Ces deux petites scènes que j'ai écrites me donnent envie d'évoquer le tennis et le théâtre de manière comparative. Existe t-il une analogie entre les deux? Que ce soit mon avis ou ceux des comédiens, il en ressort qu'il existe effectivement des similitudes. Je peux en parler car en plus de ma carrière de joueuse de tennis professionnelle, j'ai fait un peu de théâtre. Ce qui m'a d'ailleurs donné l'envie d'écrire un livre sur la différence entre le jeu au théâtre et le jeu au cinéma. Je vais beaucoup au théâtre, au cinéma et mon oeil s'est aguerr. J'ai donc pu en interviewant les acteurs qui font du théâtre et du cinéma assez bien traiter le sujet il me semble. Même si on pourrait en parler encore plus longuement encore. Et comme j'ai aussi interviewer des comédiens et comédiennes sur la ressemblance entre la carrière théâtrale et la carrière tennistique pour mon livre " Tennis People", je pense être en mesure de faire quelque chose de bien. 

La première chose dont je voudrais parler c'est la préparation avec un spectacle et avant un match de tennis. Dans les deux cas enfin moi en tout cas, j'avais besoin d'être seule pour bien me préparer au rôle, bien me concentrer et il ne fallait pas trop m'embêter avant sinon je risquais de ne pas être très aimable. Beaucoup de comédiens se concentrent dans leur loge ou ont un rituel auquel je pense ils sont attachés. Même si certains ou certaines dérogent à cette règle. 

Savoir bien respirer est important aussi. Aussi bien entre les points pour se ressourcer, souffler afin que le point d'après soit de bonne qualité  que sur une scène. 

Là et c'est surtout féminin je pense (il faudrait que j'interroge aussi des hommes sur le sujet...), quand on se sent jolie que ce soit sur un court ou sur une scène de théâtre on a plus de chance d'être performante. Séréna Williams en parle d'ailleurs dans sa biographie : " Quand je me sens avantagée physiquement, cela se ressent dans mon jeu. C'est pour cela que je n'écoute que d'une oreille quand on critique le temps que je passe à travailler mon apparence. " Remporter un succès avec sa ligne de vêtements lui donne l'impression d'avoir le monde à ses pieds...

Parfois aussi quand je perdais un match de tennis, je pouvais être triste ou de mauvaise humeur ou au contraire quand je gagnais je pouvais être très satisfaite de moi et heureuse. Sans doute que les comédiens en fonction de leur prestation devaient aussi être plus ou moins contents...

Il y a aussi les phénomènes physiques qui peuvent surgir dans les deux notamment le mal au ventre du trac etc...

Et puis un comédien ou un sportif peut s'énerver lors d'un entraînement ou lors d'une répétition. 

Pour compléter ces quatre aspects là, je vais retranscrire ce que j'ai écrit dans l'introduction de mon livre " Acteur et comédien d'une passion à l'autre. " :

" Les deux disciplines peuvent servir de thérapie mais de façon différente. Au final, la tête se vide et se libère des problèmes de la vie. En fait, théâtre et sport sont très complémentaires. Lorsque je jouais au tennis, j'ai vécu des états seconds extraordinaires, et je sais quand on est à fond dans un rôle, c'est le même principe. Je le devine et les acteurs me l'ont confirmée. J'aurais beaucoup aimé ressentir cette sensation sur scène. Ce qui est similaire aussi, c'est le fait de dépasser la douleur. Dans le sport, on arrive à l'oublier par la volonté, quitte à la retrouver dès que la compétition est finie. Au théâtre, on peut paraît-il, avoir 40 de fièvre et jouer sans en ressentir les effets. Et après, les voir ressurgir également. 
Une fois, j'ai eu une sensation énorme de fatigue après un gros effort au théâtre. Je devais jouer " Mademoiselle Julie", l'histoire d'une femme confrontée à un pervers. J'étais à ce moment là en plein dans ces souvenirs et un peu avant de jouer mon rôle, je me suis sentie très mal. Je suis sortie quelques instants de la salle. Je me suis assise et n'arrivais plus à décoller. J'ai failli quitter le court, puis ma volonté a pris le dessus et je suis revenue la larme à l'oeil. J'ai refait mon entrée deux fois sur scène, puis à la troisième j'ai joué et ressenti pour la première fois comme un oubli de moi-même. Une fois rentrée chez moi, je me suis allongée sur le fauteuil. J'étais complètement vidée comme après un match de tennis. Je m'étais vraiment surpassée, et j'avais la sensation d'avoir remportée une victoire sportive. Je dois dire que le peu de théâtre que j'ai fait m'a donné la même impression que le tennis : une remise en question de soi à chaque fois. Je n'étais jamais la même sur cène, et jamais non plus la même sur un cours. Tout dépendait si j'avais bien ou mal dormi, si j'étais de bonne ou mauvaise humeur, si j'avais des problèmes ou si tout allait bien dans ma vie. Et puis cela dépendait de mon partenaire avec une adaptation en fonction de sa personnalité. Au tennis, je ne jouais pas non plus de la même façon si mon adversaire était une attaquante ou si elle renvoyait. 
Avant mes cours de théâtre, je me demandais toujours si j'allais être bonne ou pas et au tennis aussi. Il arrivait que je me sente en pleine forme avant un match, et finalement de mal jouer. Et inversement. Au théâtre, cela doit être pareil.

 

Evoquons maintenant les témoignages des comédiens et comédiennes. D'abord quelques bribes recueillies un peu partout avec les paroles de Marie-Anne Chazel : " Sur une scène , ce n'est jamais pareil. Au bout de cent représentations on se surprend à découvrir le sens d'une phrase qui tout d'un coup résonne différemment dans les oreilles. " Même son de cloche pour Sylvie Testud : " J'essaye de ne pas refaire ce que j'ai fait la veille. Certains soirs je me dis : " Je vais essayer telle ou telle chose. J'ouvre les pistes et c'est vivant comme de la dope. "  Au tennis, même chose avec une remise en question permanente, et une variété dans les matches de tennis qui ne sont jamais les mêmes non plus...

Puis vont défiler des témoignages avec parfois des commentaires de ma part : 

Jean-Loup Dabadie : " En simple, je retrouve ma solitude d'artiste, les mêmes plaisirs secrets, les mêmes surprises bonnes ou mauvaises, mais en tout cas intimes et personnelles. En double, je redécouvre tout le plaisir d'être en société, mon goût de la fraternité, de l'humour. Les combinaisons avec le partenaire, les coups où on se comprend, où on croise de travers, où on éclate de rire. Enfin, l'extraordinaire joie des vestiaires, et parfois une force de fraternité et d'amitié qui ressemble à l'enfance." C'est exactement la même chose en ce qui me concerne. En simple, on vit seule des tas d'émotions intérieures. En ce qui concerne le double, cela me rappelle les matches par équipe au TCP avec le plaisir de partager des succès ou des défaites, avec de la convivialité et l'esprit d'équipe que l'on doit acquérir... 

 

Françis Huster : " Selon moi, il existe une ressemblance entre le monde du théâtre et le tennis car, même si le public n'est pas présent quand on joue dans un club, on est soi-même son propre spectateur. Même si on n'a pas de texte, on a des règles bien précises à suivre. De surcroît, si on fait la moindre faute, on le paye. Au théâtre c'est pareil. Autre analogie : au tennis, pour vraiment progresser, il faut jouer le plus possible en fonction de l'adversaire. Et si on y arrive vraiment, c'est comme si on jouait sur scène avec son partenaire. C'est pour toutes ces raisons, que le tennis est une bonne école pour un comédien." Au tennis, on fait son auto-critique aussi. Yannick Noah me l'a dit aussi qu'(il s'observait sur scène. Ce n'est pas du théâtre mais c'est artistique aussi. Dans un match si on fait une faute sur la balle de match ou sur un point important, c'(est soit fatal, soit très embêtant pour la suite du déroulement d'une partie.

 

Christophe Malavoy : " Extérieurement, je suis très calme, mais en réalité, la nervosité fait partie intégrante de ma personnalité. Mais le judo m'a appris à canaliser mes émotions et à acquérir une grande maîtrise de moi-même. Ce sport m'a également beaucoup appris au niveau des sensations que peut ressentir un acteur. A savoir le trac, le public, la solitude de l'athlète face à lui-même, sa réussite, sa défaite. Le tennis m'aide également dans mon métier, car il existe dans ce sport une remise en question permanente qui ressemble beaucoup à celle d'un comédien." Le contrôle de soi tout est là pour un sportif de haut niveau et en fonction des sports , il est plus ou moins important. Au tennis, il est très important car le résultat se joue sur très peu de choses et il titille les nerfs. De plus, il faut savoir ne rien montrer afin de ne pas donner 'indications à l'adversaire. Même s'il existe des joueurs comme Benoît Paire qui explose à la moindre occasion. Je me demande d'ailleurs si ça stimule ou si ça perturbe l'adversaire en face.

 

Pierre Mondy : " Le tennis m'est apparu comme un pur reflet des moments de ma vie et j'ai constaté qu'on ne réalisait jamais la même partie de semaine en semaine. Ainsi, lorsque j'allais jouer avant de monter un spectacle, je mettais toutes mes balles dehors ou dans le filet. Mes soucis professionnels m'empêchaient d'avoir l'esprit libéré. Il existe aussi des moments où on se sent très bien et où on joue mal et puis d'autres où on croit être en mauvaise forme et où on réalise de très bonnes parties. " Effectivement, les événements que l'on vit jouent lors d'un match de tennis. Ils peuvent stimuler ou perturber. Si par exemple on s'est disputé avant avec son petit ami ça a forcément un impact sur sa manière d'affronter le match. Soit en motivant davantage, soit en enlevant de l'énergie. 

 

Daniel Auteuil  qui dit avec humour que ce qu'il sait le mieux faire c'est serrer la main de son adversaire : " " Sur un court, le fait de jouer au tennis représente pour moi une activité sérieuse... En effet, si j'enlève l'importance du jeu, je n'éprouve plus le même plaisir. Exactement comme sur une scène de théâtre. Du point de vue connaissance de soi, le tennis est une discipline assez complète car il faut faire appel à la fois au psychisme, à la technique et au physique. C'est un sport qui quelque part, peut être assimilé au milieu du spectacle. Au tennis, lorsqu'on s'entraîne avec quelqu'un qui joue bien, on joue mieux. Au théâtre c'est pareil. Il existe aussi un mental, une concentration particulière a acquérir. On n'est pas concentré uniquement sur soi-même et on doit tenir compte d'un certain nombre de paramètres comme le partenaire, le soleil, la lumière, le public ui va rire ou tousser. " Connaissance de soi effectivement car c'est comme une sorte de développement personnel. Il faut apprendre à connaître ses réactions, ses points forts faibles afin de mieux les gérer lors d'un match. Pour le public tout dépend s'il est pour ou contre soi. C'est un enjeu majeur lors d'un match. Important aussi aussi si l'on joue en extérieur ou dans une salle, s'il y a ou non du vent, s'il fait beau ou s'il pleut, la surface. Bref tout un tas d'éléments extérieurs avec lesquels il faut jongler..

 

Claude Brasseur : " Ce qui me plaît dans ce sport, c'est l'objectivité du jugement. Ainsi lorsqu'un joueur participe à une compétition, il se classe tel ou tel numéro, et on ne peut ni critiquer, ni contester le résultat. En revanche, en tant qu'acteurs, nous sommes soumis à la subjectivité du public. Si un couple vient me voir jouer une pièce, il est possible que le mari aime beaucoup et que la femme déteste ma prestation. Et ils auront tous les deux raison même si la performance est extraordinaire. Mary Pierce par exemple a été n°3 mondiale et elle a mérité son classement. Ce n'est pas non plus parce qu'elle plaît ou qu'elle a de jolies jambes, mais parce qu'elle a du talent."  Effectivement en tennis on ne dépend de personne alors que dans la vie en général on est dépendant des autres. 

 

Michel Boujenah : " Mon comportement est le même sur un court et dans la vie. Je n'aime pas quand la situation est trop facile. Ainsi quand un de mes spectacles obtient trop de succès, j'éprouve des difficultés à maintenir la pression. Au tennis, le phénomène est le même : je joue très bien lorsque je suis dominé, mais quand je mène, j'ai fu mal à garder toute ma concentration. " C'est ainsi qu'il existe des joueurs qui préfèrent être menés au score alors que d'autres au contraire préfèrent mener. 

 

Michel Leeb : " Une partie de tennis ressemble un peu à un concert ou à un spectacle. Il faut séduire le public. Durant les premières minutes on s'étudie, puis on s'aperçoit tout à coup que la stratégie utilisée est la bonne. Un spectacle se déroule un peu dans cet esprit là. On essaye de saisir ce qui séduit le public et de continuer dans cette voie. Un match gagné signifie le public qui vous rappelle, qui vous applaudit très fort. 

Olivier Lejeune : «  Même si le plaisir n’est pas vraiment le même entre le théâtre et le sport, car le texte joue un rôle primordial, il peut parfois régner la même dramaturgie au cours d’une partie très disputée. Ainsi une finale comportant un fort suspens, peut s’assimiler à un drame antique composé de protagonistes. 

 

 

 

Jean-Louis Barrault par exemple admire le sport : « Notre métier dit-il est une manière de le traiter et de le vivre. Nous essayons d’utiliser notre corps comme un instrument. Le sport est aussi une étude de comportement. Il donne la plus belle image du dépassement de soi, et représente également l’acquisition du second souffle. Réussissent ceux qui savent contrôler leur concentration, réfléchir, se relayer. C’est en cela que notre métier est si proche du sport. Si vous avez Scapin à jouer, c’est entre le 800 et le 1500 m. Vous partez sur un rythme de 200 m et vous devez tenir  800 m. Hamlet c’est un 500m. »

 Enfin, Cyrielle Claire la seule femme que j'ai pu réellement interroger sur le sujet : " Pour moi, il n'existe rien de comparable entre le fait de se trouver sur un court et sur une scène de théâtre. En effet, au théâtre on ne joue pas contre son partenaire mais avec lui. Mais il est un fait que certains acteurs jouent les uns contre les autres. Lors d'un match disputé, on vit à fond, on respire, on retient son souffle. La respiration haletante du public est merveilleuse et dans ces moments aussi intenses, il existe effectivement une analogie entre un match de tennis et une pièce de théâtre. Sur les points décisifs, le public est suspendu et porte quelque peu le joueur. Et sur scène lorsque notre interprétation émet des ondes pleines de force, une symbiose avec le public s'installe engendrant de fabuleuses sensations. C'est la raison pour laquelle, je respecte profondément le public venu nous aimer, nous soutenir et partager d'intenses moments avec nous." J'ai relevé dans un petit catalogue réalisé par Florence Guédy une phrase de Nicolas Mahut qui dit : on ne joue pas uniquement contre son adversaire mais aussi avec son partenaire." Différence entre simple et double. Le double peut contrecarrer ce que dit Cyrielle Claire..Et puis une phrase d'Anne Roumanoff qui confirme ce que je disais au début à savoir l'importance de l'habillement : " Sur un court, j'aimais bien porter une petite jupe blanche et m'imaginer que j'étais une grande joueuse qui allait disputer Roland Garros.... "

 

' Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Evoquons maintenant les témoignages des divers comédiens et comédiennes :

 

 

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