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samedi, 27 janvier 2024

Concert " La force des fleurs"

-3453984669346626425.jpg3544237744788176575.jpgUn spectacle à 20h  le lundi 29 janvier avec deux chanteuses de qualité . 

C'est au 8,12 rue Bertin Poiré dans le premier arrondissement de Paris

jeudi, 25 janvier 2024

Un chapeau de paille d’Italie

 Qui aurait dit qu’un cheval qui mange un chapeau de paille d’Italie aurait provoqué autant de folles réactions sur scène…

L’idée qui vient de l’auteur dramatique Eugène Labiche raconte le mariage qui va avoir lieu entre Fadinard et Hélène. Le matin de ses noces, Fadinard voit son cheval perturber une femme mariée alors perdue dans les bras d’un militaire…

Il va se lancer dans une recherche effrénée pour retrouver le même chapeau. 

Folles réactions effectivement avec des comédiens tellement déjantés qu’ils donnent vraiment l’impression d’avoir bu un coup de trop. Ils s’agitent dans tous les coins, font un peu n’importe quoi et réalisent tout ce qui leur passe par la tête… 

Le mouvement et les facéties corporelles n’arrêtent pas et même si ça n’a plus grand chose à voir avec la pièce citée par Henri Bergson comme exemple d'effet " boule de neige" dans son ouvrage " Le rire"., ce qui est un peu dommage, on se laisse malgré tout prendre par cette sorte d’hystérie collective.

Cela donne de grands rires dans la salle et à la fin les peluches valsent.   Nous aussi on a presque envie de boire plusieurs verres de vin et pourquoi pas de fumer un peu de cannabis… 

Agnès Figueras-Lenattier

Plus d'infos

Théâtre du lucernaire rue Notre-Dame-des-Champs

Métro : Notre-Dame-des-Champ, Vavin

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mardi, 23 janvier 2024

Mon travail à " Radio OIympiades" Agnès Figueras-Lenattier

https://on.soundcloud.com/dDgEB

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lundi, 22 janvier 2024

Café littéraire de l'association Le CEL à Locquirec : Conférence sur le corps

Tous les mois a lieu ce café littéraire organisé par Michel Priziac écrivain spécialiste de la Bretagne et président de l'Association des écrivains bretons 

Le 19 janvier 2024 c'est Agnès Figueras-Lenattier qui a parlé. La voici ici à Locquirec, un endroit plein de charme où les amoureux sont les bienvenus... Sa conférence est résumée ici :

IMG_20240119_152718.jpgAgnès Figueras-Lenattier ex-joueuse de tennis professionnelle (n°8 française et championne d’Europe des moins de 21 ans), journaliste pigiste dans le domaine du sport, de la culture et du médical, et auteure, a tout d’abord rappelé les bienfaits du sport sur la santé de chacun(e), quel que soit l’âge. La sédentarité étant source de nombreuses maladies comme les maladies cardio- vasculaires, le diabète, l’obésité... il suffit d’adapter l’exercice sportif à ses capacités personnelles. Mais bon nombre d’activités sportives sont favorables au bien-être de tous, tels la marche, la marche nordique, le yoga, le taï-chi-chuan, le qi gong... la marche nordique et la marche dans l’eau étant largement conseillées pour lesproblèmes d’arthrose.
La pratique régulière d’un sport participe également à l’équilibre mental, elle diminue le stress et permet de chasser les pensées négatives qui peuvent mener à la dépression.
Il est aussi prouvé que le sport atténue les effets secondaires d’une chimiothérapie.

Quant à la grossesse, elle ne constitue pas une contre-indication et notre invitée le confirme en nous confiant sa propre expérience.

Individuel ou collectif, le sport contribue à une meilleure sociabilisation, à mieux vivre les rivalités tant au niveau du succès que de l’échec.

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Certains médecins commencent à prescrire le sport sur ordonnance, nous relatant l’exemple du Dr Alexandre Feltz, médecin généraliste et adjoint à la mairie de Strasbourg, considéré comme le pionnier du sport santé sur ordonnance. Il a publié un ouvrage « Le sport santé sur ordonnance. Manifeste pour le mouvement ».
Le sport un véritable médicament, mais attention à l’overdose, ce qui peut se produire dans le cadre du sport de haut niveau, sur lequel Agnès Figueras-Lenattier lève le voile.

Si elle commence à jouer au tennis toute jeune, suivant les traces de sa mère qui le pratiquait en amateur, c’est à 19 ans qu’elle abandonne ses études de philo, alors qu’un entraîneur la remarque et l’invite à entrer dans le monde de la compétition. S’ouvre alors une voie qu’elle n’envisageait pas d’emblée, mais qui la hisse à un haut niveau, où elle remportera de belles victoires.

Elle découvre alors tout un univers singulier avec les rencontres en équipe, les joies du partage, la solidarité, les victoires... mais aussi les dérapages (harcèlement sexuel, maltraitance, privation de nourriture...), le dopage (parfois à l’insu du joueur), et le fait de ne pas vivre une adolescence comme les jeunes de son âge. Elle se plie à un entraînement intensif de tous les jours, où la relation avec l’entraîneur est importante, évitant le sentiment de solitude qu’un joueur professionnel peut ressentir.

Des horaires de lever et coucher rigoureux empêchent toutes soirées entre amis et une hygiène alimentaire scrupuleuse, bref une discipline des plus strictes s’impose. Dans ce monde de compétition, il est extrêmement difficile de nouer des relations amicales, les rivalités planent en permanence.

Il faut faire constamment preuve d’extrême volonté pour résister dans ce milieu, la notion de dépassement de soi est présente en permanence, le découragement menace parfois.

Avant un tournoi, il faut se préparer physiquement mais aussi mentalement pour visualiser le triomphe, ce qui demande une importante concentration avec nécessité de s’isoler, au risque de paraître désagréable aux yeux des autres.
Certains joueurs ont des rituels, comme commencer un match avec la balle qui leur a permis de gagner ou bien embrasser son petit ours en peluche, ce que Julie Halard faisait avant d’entrer sur le court.

Sur le terrain, il faut savoir user de stratégie selon l’adversaire. Ne jamais jouer de la même façon, tel le grand improvisateur qu’est Roger Federer.

Agnès aborde également les relations avec la presse qui ne sont pas toujours simples, et peuvent parfois heurter la sensibilité des joueurs, surtout en cas d’échec. Il est particulièrement difficile d’être Numéro 1 et de le rester.

Ce fut pour elle une sacrée école de la vie ! Même s’il s’agit là d’un monde hors des réalités...

Abandonnant la raquette à 25 ans, elle entame une carrière de journaliste-pigiste, collaborant notamment avec L’Équipe magazine, Tennis magazine, la revue Géo, Écrire magazine, Le quotidien du médecin...
En parallèle, elle s’adonne à l’écriture et publie plusieurs livres, dont Tennis People (Ed. Philippe Randa), Acteur et comédien, d’une passion à l’autre (Ed. L’Harmattan), Les stars et leur karma, De la raquette à l’encrier, Obsession, Textes et nouvelles sportifs, Duo littéraire (Ed. Thierry Saja).

Patricia Guillemain

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Le public attentif a apprécié d’entrer les coulisses d’un sport qui a tendance à se démocratiser pour qui souhaite fouler les courts de tennis et manier la raquette en dilettante.

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vendredi, 19 janvier 2024

"DUO LITTERAIRE"

En plus de bien taper dans la balle de tennis dès son plus jeune âge, Agnès Figueras-Lenattier ex joueuse de tennis professionnelle ( n°8 française) écrivait déjà des poèmes et des pensées. Après avoir abandonné ce genre d’exercices, elle s’y adonne de nouveau depuis environ deux ans. Ce livre représente donc à la fois son écriture de jeunesse et de femme mûre. Quelques nouvelles de son cru complètent ce travail...
Les écrits de son géniteur André Figueras qui fut un écrivain réputé sont également présentes dans cet ouvrage où père et fille sont réunis dans un moment très complice…
Pour commander s'adresser directement à Agnès Figueras-Lenattier : biche.af1996@gmail.com
 
 
 
 

 

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mercredi, 17 janvier 2024

Pierre Kechkéguian

PK portrait 8 juin 2023 - Sorcicel  (7).JPGimage003.jpgPierre Kechkéguian  5ème directeur du théâtre d’Auxerre a toujours travaillé dans l’organisation d’événements culturels. Pour lui, l’essentiel c’est de mettre le spectateur au centre, et il développe des initiatives dans ce sens. Ainsi met-il en place dans ce lieu  des temps de présence d’artistes  qui de plus, par le biais d’ateliers agissent en faveur d' une éducation culturelle et artistique dans les quartiers. 

Accordant une importance toute particulière au public, cet homme admiratif de Tchekov et de Vincent Lagaff côté théâtre et de Spielberg et Bernard Blier côté cinéma ne choisit pas les spectacles en fonction de ses goûts mais selon ce qu’il pense le plus interessant pour ceux qui y assistent. «  Notre public explique t-il correspond à un développement favorable de la culture dans une ville moyenne. Peu de jeunes vivent à Auxerre et nous avons le même nombre de jeunes dans nos salles que ceux présents dans la ville… « 

Beaucoup d’actions sont entreprises dans cet endroit de service public comme les « lectures apéritifs » créées pour faire découvrir au public les différents événements. Tous genres de spectacles sont produits (theâtre, concerts, danses, cirque)  exceptés ceux se rapportant à la musique contemporaine. Peu de comédiens très connus font leur apparition sur la scène de ce théâtre. «  Ils sont trop chers et si l’on veut rester accessible, on ne peut en accueillir que très rarement. Le prix est souvent doublé, voir même quadruplé et passe de 25  à au moins 50 euros . Le public a t-il envie d’investir autant ? » Pour les parents, un système de gardes d’enfants est à leur disposition afin de leur éviter de payer un baby-sitter. 

Un regard bienveillant envers les personnes sourdes ou malentendantes est de rigueur. «  Il nous arrive de créer des événements  en langue des signes et nous proposons des spectacles en audio-description personnalisée avec une personne qui indique au spectateur la manière dont se déroule la pièce… « Un système de casque est également à disposition des malentendants avec des représentations amplifiées.

De temps à autre, le monde du cinéma et du théâtre sont réunis avec la mise en place d’une pièce de théâtre d’un côté et la projection d’un film de l’autre soit en rapport avec le sujet représenté, soit totalement différent. C’est ainsi qu’en février sera projeté «  Soleil trompeur » de Nikita Nikhalkov et quelques jours avant « La mouette de Tchékov » sur le même thème. 

«  Midi au théâtre »  a lieu le temps du déjeuner  produisant une véritable représentation artistique  et tous les mois le samedi un bar à poème est organisé  pour les poètes et les amateurs de cet art…

Et que dire de l’association « Les Amis du théâtre » qui met en place de nombreux ateliers pour les adhérents qui peuvent exploiter leurs divers talents artistiques. Bref, on ne chôme pas dans cet endroit riches d’ initiatives culturelles et qui donnent à la ville d’Auxerre déjà belle en soi un charme supplémentaire. Il serait temps que la population rajeunisse pour faire vivre encore davantage les quartiers … 

Agnès Figueras-Lenattier

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vendredi, 12 janvier 2024

Pascal Fauvel

IMG_0679.PNGPascal Fauvel est poète, et a exercé le métier d’infirmier psychiatrique.  Actuellement à  la retraite, il continue à suivre quelques patients individuellement. Gardien de but, dans sa jeunesse,  il s’est blessé à 17 ans et n’a pu reprendre ses études qu’à 25. « Lorsque j’étais en 1ère mécanique générale, j’ai du interrompre ce cursus. J’étais donc très loin de la poésie et de la psychiatrie. Cette blessure  m’a coûté beaucoup de temps…." Pascal Fauvel a édité son premier livre à compte d’auteur, et il a à présent  plusieurs bouquins publiés à son actif. Régulièrement édité dans diverses revues poétiques, on a  notamment comparé son écriture à celle de René Char. 

« Au départ, j’ai été très mal orienté. J’étais bon dans tous les domaines, mais pas très laborieux dans le travail et l’on m’a donc orienté en cycle technique.   Dans les années 70 c’était à la mode et beaucoup de jeunes lycéens intégraient des écoles techniques. Mais comme j’avais un oncle cadre supérieur dans le grand hôpital psychiatrique local et que je connaissais le domaine car beaucoup de gens de ma famille travaillaient dans ce domaine, j’ai été intégré entant qu’auxiliaire des hôpitaux. Un an après, je passais le concours pour être infirmier que j’ai tout de suite réussi. Au départ, je voulais être chirurgien, j’avais lu beaucoup de choses sur le sujet, mais une fois diplômé, j’ai beaucoup aimé ce métier. J’avais trouvé ma voie et aussitôt la poésie s’est imposée en réponse à la douleur psychique. « 

 

 

Avant d’être infirmier psychiatrique écriviez-vous déjà beaucoup?

J’ai commencé vers 16, 17 ans, j’aimais beaucoup. Tous mes amis de mon âge me demandaient de parler car j’avais le verbe facile et la formule qui convenait à tout le monde. J’avais un peu des fonctions de porte-parole même dans mon travail. Pendant les cours, j’écrivais beaucoup, je remplissais des cahiers d’un tas d’émotions; de sensations. Après, j’ai pris l’habitude d’avoir un carnet sur moi. Je me trouvais confronté aux difficultés des schizophrènes, des personnes âgées et des psychotiques et je sentais une expérience humaine qui m’agitait. S’approcher de la souffrance psychique englobe l’extrême dans  les émotions, et a fait pulser quelque chose en moi, une possible réponse.  Ecouter ces personnes, les regarder faire et accomplir des choses me faisait l’effet d’une oeuvre d’art. Des signaux m’étaient envoyés qui me donnaient envie de répondre à la hauteur de la situation. Par des formules qui me venaient dans la tête sur la condition humaine, sur la condition du vivant. Des formules métaphoriques au départ puis de plus en plus serrées, en opposition contrastée comme le ver poétique. Mais  le langage me semblait faible, et les mots trop petits par rapport à l’expérience du vivant. Il me fallait renforcer le langage, agrandir sa puissance afin de répondre dignement. 

 

Quel effet a eu la psychiatrie sur votre écriture? 

Cette spécialité m’a tout de suite donné envie d’écrire et j’ai conduit des ateliers de poésie à l’intérieur des hôpitaux psychiatriques et surtout en extra-hospitalier de 1994 à 2017.  J’ai fait 50 séances qui ont très bien fonctionné notamment auprès de jeunes de 14 à 18 ans anorexiques. Les patients avaient la sensation de pouvoir s’exprimer  sans retenue et j’ai fait deux recueils avec eux. C’était expérimental, à l’époque le médecin chef était psychanalyste et il voulait ouvrir l’hôpital.  C’étaient les premières expériences thérapeutiques auxquelles j’ai participé et ce médecin exigeait mes comptes-rendus à chaque fois. Il les soulignait car j’écrivais au stylo et ils ont contribué à ses recherches. Je rapportais une ou deux pages à chaque fois. Il m’arrivait aussi de manger avec les patients à l’extérieur.  Les effets? Je n’ai pas de recul sur tous. Il y en a un qui devenu artiste est venu me voir. Il m’a laissé sa carte et m’a dit «  Vous m’avez ouvert la voie à autre chose; ça m'a libéré. » Il existe un retentissement, un écho et pour certains ça affaiblit le jugement moral. 

 

 

Pourriez-vous parler plus précisément de ces ateliers poésie!

Le moteur principal était lié à la composition poétique, la façon dont la poésie fonctionne. Elle n’exprime pas un langage conventionnel avec du sens. Donc le mot est utilisé comme un son, une image et comme une unité séparé dénuée de tout sens, les mots étant frottés entre eux et associés d’une manière inhabituelle. Ca crée de l’émotion dans la folie. En effet, un sens précis dans la demande, dans les injonctions, les obligations  de produire des objets ou des résultats implique un sens persécution, interprétatif pour les gens. Et le fait d’utiliser les mêmes mots mais dans un désordre culturel permet d’apaiser beaucoup le langage conventionnel. C’est l’intérêt de la poésie. Dans mes ateliers, les patients atteints de maladies chroniques ont pu réaliser que les mots deviennent de l’imaginaire, des mots où l’on peut trouver sa propre place. Cela diminue  la persécution du patient et c’est très important car c’est là où réside le noeud. Les patients ont des moments plus heureux et réalisent qu’ils ont aussi un savoir en eux. Ils arrivent à écrire et en sont étonnés. Tous les ateliers thérapeutiques ont des avantage et permettent aux patients d’avoir un regard sur eux-mêmes différent.  Ils ne se sentent  plus uniquement comme une personne malade mais comme une personne entière, globale. I.  

 

 

Et le sport?

Grâce au karaté et ensuite avec la psychanalyse, j’ai fait sauter le verrou de l’inhibition, jet j’écris maintenant des poèmes en un quart d’heure. J’ai fait 6 mois du karaté 6 heures par semaine avec travail sur la respiration et ça me libérait vraiment beaucoup pour écrire. Le tennis de table a également été  un bon complément au karaté. C’st très précis, très technique, avec des heures de frottement avec la balle. Je me sentais beaucoup mieux, j’étais moins dans le jugement sur moi, moins dépendant des modèles.  Les lectures m’ont aussi beaucoup enrichi. Un professeur suite à un devoir sur Rhinocéros m’a dit que j’étais plus doué pour la littérature que pour les maths. On m’a dit aussi que j’avais une voix et qu’il fallait la développer. Donc j’ai écrit sans ambition de publication à ce moment là. L’éventualité d’une publication est venue à l’âge de 30,32 ans.

 

 

Au départ était-ce uniquement de la poésie ou d’autres genres littéraires aussi?

Au départ, c'était des formules rapides donc de la poésie. Je cherchais des formules ramassées, des images, des tensions. J’avais débuté un roman que je n’arrivais pas à poursuivre. Puis un roman d’héroic fantaisie «  le marchand de sable ». C’était très très imaginaire . Maurice Nadeau l’éditeur qui a découvert Houellebeck l’avait trouvé interessant mais n’a pas voulu le publier car il trouvait que cela ressemblait trop à un auteur américain que je n’avais d’ailleurs jamais lu. Pour mes poèmes c’est la même chose, on m’a dit que cela s'apparait  trop à René Char que je n’ai pas lu non plus.  Tout cela est très aléatoire. Après, j’ai écrit un petit conte pour enfants lors d’ un concours «  L’enfant arc en ciel » qui a passé la première sélection mais qui n’a pas gagné. Un personnage fils de la pluie et du soleil…

 

 

Et vos textes sur les poètes et la folie?

Ils sont tirés de mon  expérience par rapport à la psychiatrie et de ce que j’ai lu sur la folie. Je faisais des gardes de nuit à l’époque, et je sortais souvent mon cahier.  J’ai écrit un poème «  Le mur des fous » publié et commenté par Jean-Marc Strecker sur France Inter. Il a énoncé 3,4 vers. Ma lettre a été aussi publiée et j’explique qu’être face à une personne fragile,  fait l’effet d’un livre que vous écrivez, car ces gens là ont un langage très libre. Il n’existe  pas de convention, donc devant un schizophrène qui vous parle c’est comme être devant un livre de poésie ou se placer devant une forte abstraction. Comme une sorte de continent rempli d’étrangeté, de singularité très grande qui en même temps distrait. Quand on vit en société contemporaine aujourd’hui, écouter un fou ça bouscule et ça vous pousse un peu dans vos retranchements. La souffrance n’est ni localisée, ni fixée dans l’image ce qui  fait donc appel à l’imaginaire de l’aidant. 

 

 

A l’époque de Socrate, les fous n’étaient pas enfermés. On les laissait vivre dans la rue!…

Tout à fait et c’était beaucoup mieux. J’ai participé au courant que l’on appelle l’anti psychiatrie qui voulait ouvrir les hôpitaux, les chambres et qui avait une autre idée des soins psychiatriques Cela a commencé dans les années 70 et la psychiatrie française était admirée dans le monde entier. Surtout le monde occidental qui trouvait que la France avait une approche très adaptée, très humaine et pas du tout hermétique. Ce fut très bien jusque dans les années 90, 95. Après on a diminué les moyens et l'on a créé des ARS (agences régionales de santé). Je me souviens de conversations avec un psychiatre avec qui je m’entendais très bien qui avait dit qu'on était en train de créer des ARS donc des préfectures surtout dans le domaine du soin. Et que c’était très inquiétant. Il faut savoir que les hôpitaux auparavant avaient la liberté de gérer leur budget annuel alloué sans aucune restriction d’année en année. Quand ils ont fait la tarification à l’acte tout a changé. Les hôpitaux ont été obligés de rendre des comptes aux agences régionales et c’est à partir de ce moment que c’est devenu complexe. Avant, les services publics de la santé n’étaient pas liés à une productivité, à un rendement, à une performance. On ne faisait pas ce travail à comme des commerciaux, comme une entreprise qui a besoin de créer de l’acte pour vivre. Ce n’était pas du tout dans l’esprit des soignants. A partir des années 2000, 2005, l’argent a gagné tous les terrains.

Les choses positives de la psychiatrie actuelle? Il n’y en a pas. Je situe le séisme à partir de 2007 qui est lié à la directrice de l’OMC sur la réglementation de l’espace public. J’ai assisté à Paris à de grandes rencontres  pour lutter contre ce que l’on voyait arriver; le démantèlement progressif de l’aide. Les psychiatres sont partis dans le privé, les lits ont fermé, la déchéance. L’amélioration de la situation du patient  a disparu, avec abus de médicaments, contentions, patients isolés. Plus de clinique, plus de réponse humaine. Les aides sociales diminuent , la folie n’est plus prise en charge avec de plus en plus de passages à l’acte…

 

 

Vous écrivez donc de la poésie, des romans, divers textes. Qu’est-ce que chaque domaine vous apporte?

Une expérience, une recherche, un étonnement aussi. En effet, écrire c’est ne pas savoir ce qui va sortir, enfin pour moi. C’est aller un peu à l’aveugle car je laisse faire cette partie non contrôlée de la jonction entre le conscient et l’inconscient. Je m’appuie sur les connaissances invisibles et non répertoriées et j’écris avec une force cachée. Tout artiste est habité par ce processus. On appelle cela le gai savoir, le savoir libre. Les romans réalisés par des poètes sont très différents de ceux écrits par les romanciers. En général, un romancier n’est pas un poète et son tyravailplus structuré, plus chapitré, plus construit avec une stratégie.  Chez un poète, c’est beaucoup plus libre, plus fantaisiste, avec des changements de direction, des imprévus. Ce n’est pas du tout le même travail.  L’écriture qu'elle qu’elle soit représente un plaisir très particulier, une sorte de navigation sans boussole et c’est très jouissif.  On se laisse bercer par ce qui se passe dans le stylo! D’ailleurs dans mon cahier, je rends hommage aux couleurs des stylos. Le noir, le rouge, le vert, le bleu. Chacun a son langage.

 

 

Vous avez écrit un recueil sur les relations amoureuses, sur la position féminine au sein des relations amoureuses «  la femme d’écume ». Qu’avez-vous voulu montrer?

Ìl faut reprendre le terme d’intentionnalité, la poésie n’en a pas. Je n’ai pas cherché à vouloir montrer quelque chose, j’ai voulu explorer.  J’ai toujours réfléchi aux effets de la muse dans la relation. Au-delà de la relation, surviennent des effets symboliques, Avec la personne qui émane d’elle-même et dont elle ignore aussi beaucoup de choses. Nombre de ces relations ne sont pas maîtrisables, identifiables immédiatement. Elles ne sont pas explicables rationnellement.  C’est ça l’amour : beaucoup d’émotion, de subjectivité.  A partir de cette très grande force qui existe dans l’échange, j’ai voulu placer la femme comme une sorte de prisme entre le monde et moi. Comme si on mettait devant ses yeux une sorte de petit objet kaléidoscopique à la lumière du jour et de soi-même et qu’on le fasse tourner en différentes images. Je me suis appuyé là-dessus, pour écrire des scènes, des tableaux. Ma femme à Venise, ma femme à Florence avec la relation érotique et tout ce que cela comporte.  Que voit-on avec ma femme si l’on monte sur la dernière terrasse du Mont Saint-Michel sans savoir où j’arrive. 

 

 

Vous avez mis un poème de Paul Eluard en introduction!

Oui, je voulais suivre un peu ce qu’il avait écrit dans un de ses poèmes «  Notre année » et effectivement ce texte m’a un petit peu ouvert la voie. Je trouvais que dans l’extrait cité représentait un peu l’enjeu de cette relation. Comme si j’avais trempé mon pinceau dans les verts de Paul Eluard, que j’avais mis un peu d’eau dans le pigment et que j’avais dilué le tout.

 

 

`Vous disiez que la poésie ne cherche pas à montrer quelque chose. Mais certains poètes défendent des causes!

J’ai défendu la parole de la psychose puisque j’ai créé des ateliers d’écriture et j’ai fait deux recueils avec la parole des fous. Et j’ai quand même fait un recueil  pour moi très important qui s’appelle «  La surface de glace », une sorte de critique de l’image contemporaine. Je ne défends pas des causes directement mais je critique quand même le travail de notre société. Mon roman «  L’ autre là » est  un roman d’anticipation qui répond aussi aux séances du monde contemporain. Je vais lire des poèmes dans les Ehpad et je participe à pas mal de choses avec un groupe. J’ai fait des conférences sur les ateliers d’écriture aussi... 

 

 

Vous avez eu l’occasion de rencontrer des gens comme Hubert Haddad, Michel Tournier, Bernard Noël. Que vous ont-ils apporté?

Déja, je les avais lu avant et ce qu’ils faisaient me plaisait. J’aimais beaucoup la poésie de Bernard Noël, je la dévorais et je m’étais dit que je lui écrirais et qu’il me répondrait certainement. Je pensais avoir une connivence avec son écriture. J’ai voulu avoir un peu son avis, et il me l’a effectivement donné. Huber Haddad, je l’avais entendu sur France Culture, j’adorais sa voix et les extraits de ses romans. Je lui ai envoyé mon deuxième roman, j’ai acheté un de ses livres que j’ai beaucoup apprécié. Il a aimé et j’étais plutôt très fier.  En plus, c’est un spécialiste de Julien Gracq que j’adorais. Et pour Tournier, c’est pareil. J’avais lu quasiment toute son oeuvre et dans le même principe de connivence , je lui avais demandé s’il pouvait accepter mon roman. Il n’a pas accepté, mais il m’a écrit une très belle lettre. Celle-ci me disait que ma propre lettre était magnifique et que je devais faire confiance à mon texte  et qui se défendrait tout seul. Même mes amis et collègues étaient épatés que j’ possède une lettre manuscrite de lui, une page… Cet ensemble m’a stimulé et je l’ai pris comme une reconnaissance de ma démarche.  C’est un peu compliqué avec les éditeurs. Hubert Haddad l’auteur phare des éditions  Zulma a donné mon manuscrit  " l'autre là en leur demandant de le publier, ils ont refusé ce qui m’a soufflé d’autant plus que c’est un travail très important pour moi… «  l’autre là » j’ai beaucoup travaillé en laissant chaque chose arriver sans me précipiter avec un petit fil conducteur sous-jacent et j’y ai pris beaucoup de joie. Je voulais faire une sorte de Faust moderne. Ce n’est pas très long mais plein d’intention, c’est l’intensité qui compte. 

 

 

Vous avez pris votre retraite mais vous continuez de manière individuelle!

Côté psychanalyse personnelle, je n’y vais plus que toutes les trois semaines. Avant il m’arrivait d’y aller 2 à 3 fois par semaine. Ma psy est aussi ma contrôleuse. Quand on a un souci avec une personne que l’on accueille en cabinet,  et que l’on est dans une impasse, c’est bien d’en parler à un tiers. Mais je n’ai pas beaucoup de patients atteints de troubles psychiatriques. J’ai de tout, même des jeunes de 15 ans. Je fais entre 15 et 20 consultations par semaine, avant c'était plutôt une cinquantaine. 

Lors d’une psychanalyse, il ne faut pas être absorbé par le problème de l’autre. Etre le plus objectif possible sans être inhumain pour autant. Enlever sa subjectivité, mettre son émotion dans un coin, ne pas se sentir directement concerné Ce sont de grosses exigences par rapport à ce que l’on est soi-même, car l’on se situe par rapport à l’écoute de l’autre ou dans l’accompagnement. Cela n'implique pas que de l’écoute, c’est aussi partager des choses ensemble. Faire des courses, la cuisine. J’ai participé aux expériences de l’anti psychiatrie de manière très poussée. A Caen le médecin chef des psychanalystes avait émis le projet d’ouvrir des appartements thérapeutiques, cela consistait à louer des appartements en banlieue caennaise.  A proposer aux patients hospitalisés à plein temps de faire l’expérience du dehors. Dormir dehors, vivre ensemble. J’avais 22 ans à l’époque, le médecin chef ne voulait pas me prendre car il me trouvait trop jeune mais le garde de santé m’a imposé. J’encaissais très bien , et c’est moi qui suis resté tout le temps pendant 5 ans. Certains collègues ne voulaient pas se risquer dans ce domaine;  ils avaient peur des responsabilités. J’écrivais déjà et le médecin chef trouvait matière à sa réflexion. Je relatais tous les détails et le médecin chef  soulignait toutes mes phrases. Son point de vue sur ma personne avait totalement changé… 

 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

 

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mardi, 09 janvier 2024

Nouvelles de l'Académie de Poésie

L'Académie de la Poésie Française recevra au Café du Pont Neuf 14 Quai du Louvres 75001 Paris -Metro Pont Neuf, ligne 7)    mercredi 10 janvier 2024 à 15 h

Isabel GIRARDOT nous donnera une conférence sur Pablo Neruda

 L'information vous est communiquée sur le site de l'académie  http://www.academiedelapoesiefrancaise.fr

 

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mercredi, 03 janvier 2024

Mario Urbanet

334936_2065557810575_1371113275_o.jpg300762534_3328922190717666_5431673679863156838_n.jpgMario Urbanet français d’origine italienne est poète, conteur. Il a notamment obtenu le prix Leopold Sedar Senghor pour ses poèmes sur le Sénégal particulièrement sur  l’île de Goré et sur  la présence d’un mendiant dans une rue. Il intervient souvent dans les écoles pour donner le goût de la poésie aux enfants et même à des personnes voulant se familiariser avec cet art. Agé de 88 ans, il fait partie de plusieurs associations et possède une grande énergie intellectuelle et créatrice. Il continue à écrire beaucoup. Dire des contes et des poésies en musique dans différents endroits aux alentours  de Trappes là où il réside fait aussi partie de ses activités régulières…

 

 

Lorsque vous avez quitté l’école à 14 ans écriviez-vous déjà poèmes ou contes ?

J’écrivais ce que l’on me demandait d’écrire à l’école. J’avais d’ailleurs de très bonnes notes en français et en rédaction malgré mes origines italiennes et une enfance dans un autre pays. J’en suis venu à l’écriture car j’avais un excellent instituteur qui rentrait d’ailleurs des camps et qui m’a donné le goût des mots.  Il nous lisait des textes qui me plaisaient beaucoup, des classiques et j’aimais particulièrement Marguerite Audoux. Il me rétorquait « Ton père est une tête de mule, je lui ai demandé de t’envoyer au Lycée, il ne veut pas donc le soir je te prêterai des livres. Cela m’a permis de découvrir la littérature, la poésie et autres…

 

 

A quel moment alors l’écriture a-t-elle rejoint votre âme ?

J’ai commencé par écrire de petits bouts de texte plutôt courts que j’entassais dans un coin car je n’avais pas de loisirs pour les exploiter. Cette période là a d’ailleurs duré toute mon existence, puis j’ai écrit des lettres lorsque l’on m’a envoyé contre mon gré en Algérie. De retour, j’ai écrit, écrit, mais je n’avais vraiment pas l’intention de publier mes textes. Pour moi, un auteur représentait quelqu’un d’intouchable. J’avais fréquenté de grandes personnalités et avec mon petit certificat d’étude primaire, je ne me sentais pas de taille.  La révélation est venue suite à un poème que j’avais écrit sur l’Algérie intitulé « Mur de sable ».  Un fameux souvenir sur ces murs de sable en Algérie qui vous enveloppent en quelques instants. Lors de l’expérience de la bombe du général, le mur de sable est arrivé. Nous n’y prenions pas garde mais tous les indigènes, les animaux se terraient, se camouflaient.  Nous avons alors vu comme un mur avancer et en quelques instants on en avait partout, dans les poumons, dans la gorge, dans les moteurs, les armes et plus rien ne fonctionnait.  Cela m’avait donné la prémonition qu’un jour nous retraverserions la grande bleue. Je disais ces poèmes écrits 40 ans après, lors de soirées entre amis et un soir est venu Gérard Noiret un poète contemporain important qui représentait la France dans les congrès mondiaux de poésie. Il m’a demandé si j’en avais d’autres de ce style et je lui ai répondu « Dans ma tête sûrement ». Il m’a alors conseillé de les publier pour laisser une trace. Un an et demi plus tard, je lui ai montré un ensemble de poèmes et il m’a donné trois adresses où les envoyer. Au bout d’une semaine, j’ai eu trois réponses positives.  Dans revue "Aujourd’hui poèmes"  des extraits de mes poèmes ont été publiés en 1ère page de cette revue hebdomadaire à l’époque, Dans « Ecrits du Nord" une très belle revue qui existe toujours une dizaine de pages m'ont été consacrées et mon livre a été publié  chez l'éditeur " Le temps des cerises". J’étais très surpris et très content et ce fut le début d’une aventure.

 

 

 

Cela vous arrive t-il de relire vos poèmes du début. Quel effet cela vous fait-il ?

Je les lis avec un certain plaisir et je m’aperçois que tout ce que j’écris c’est ce que j’aime lire. J’essaye d’écrire des choses qui me plaisent. J’en jette énormément, je travaille beaucoup les textes que j’écris souvent en marchant. Je réfléchis sur un thème où j’ai quelque chose en route et en marchant les idées viennent plus facilement. Le sang circule plus vite, je prends des notes et en rentrant j’écris toujours les premiers jets au stylo. Je tape et ensuite je corrige au stylo deux fois, cinq fois, dix fois, quinze fois. Je lis à haute voix jusqu’à ce que le prononcé de ce que j’écris me plaise à l’oreille. J’ai fait pas mal d’ateliers d’écriture avec des gens comme Gerad Noiret, Jeanne Benameur, Jean-Lou Guérin. Ce dernier m’a dit un jour « Tu en mets trop, ce n’est pas la peine de redire ce que tu viens d’énoncer sous une autre forme." A l’époque je me disais « Il m’emmerde, c’est mon texte, » mais finalement je lui rendais hommage en public à chaque occasion y compris en sa présence. En effet, j’ai compris qu’écrire c’est réécrire.  Un homme politique avait dit cela de manière différente : « L’alambic c’est le mou d’un fruit qui se transforme en vapeur d’alcool dont la part des anges, celle qui n’est pas récupérable «. C’est une très belle image.

 

 

Et pour les contes c’est la même chose !

En fait, j’ai commencé lorsque j’ai eu le droit de faire ce qui me plaît. Je travaillais à l’époque dans une société de contrôle d’accès sécurité. C’était les 15 pires années de ma vie car le milieu des commerciaux est absolument invivable et du point de vue du contenu des conversations c’est déplorable. Du jour au lendemain mon patron m’a annoncé ceci que je devais partir.  Comme cadeau de départ, il m’a offert un ordinateur et j’ai pu pour la première fois voir de visu ce que j’écrivais, ce que cela donnait sur une page imprimée. La vision a été assez déterminante. Comme j’avais du temps, je me suis d’abord demandé ce que j’allais faire. J’avais encore une fille à Sciences Po et il me fallait subvenir à mes besoins et je savais que ma retraite n’allait pas suffire. J’avais vraiment l’impression qu'après  une longue traversée, j'étais arrivé à l’autre rive et un peu désemparé comme Robinson.  J’avais une amie qui m’a proposé de rejoindre son groupe pratiquant le soutien scolaire au sein d’une association de trappistes protestants, où j’étais allé trois fois. Mais visiblement, je n’avais pas les armes pour aider utilement les enfants.

 

La découverte du conte

 

 

J’allais aussi régulièrement à la bibliothèque de Trappes et le directeur adjoint m’a dit « Pourquoi ne viens-tu pas avec nous dire des contes aux enfants ?" J’ai répondu "Parce que je ne sais pas." « Ce n’est pas grave, nous allons t’apprendre" et j’ai été conquis. J’ai fait là aussi plusieurs formations et le chemin dure depuis à peu près 28 ans et j’en suis toujours heureux. J’ai travaillé avec une musicienne bulgare arrivée en France à l’âge de 20 ans qui m’accompagnait. Nous allions dans les restaurants, les médiathèques. Elle jouait de plusieurs instruments, ce qui permettait de faire des intermèdes musicaux entre les contes. Un jour elle m’a proposé d’écrire des contes bulgares en Français sur les aventures de Hitar Petar « Pierre le rusé » très connu là-bas et inconnu en France. Elle m’a traduit approximativement, et au début  je trouvais ces textes misogynes au possible, anti turc, anti sémite. Elle m’a alors expliqué que son pays avait été occupé cinq siècles par les turcs. Finalement, j’y ai trouvé des ressorts intéressants, des situations d’humour, et je les ai réécrits à ma façon. Puis un jour elle m’annonce qu’Albin Michel est d’accord pour les publier dans la "Collection sagesse et malice" une édition cartonnée superbe qui existe toujours. C’était ma première parution de contes et cela me paraissait incroyable.

 

Cela a du vous aider pour publier par la suite !

Oui, Après, j’ai publié chez Milan, Glenat, Père Castor mais peu chez cet éditeur car je me suis aperçu au 2ème envoi que les épreuves ne correspondaient pratiquement pas à mes textes. Le directeur m'a affirmé : « Vous comprenez, vous employez des mots que les enfants ne vont pas comprendre, des mots durs," .  Je réponds "Monsieur la vie est dure, il faut bien que ça se retrouve dans les contes." "Non ce sont des mots trop difficiles". "Et bien moi j’ai appris des mots dans les livres et si on les enlève de la littérature, je ne vois pas où les enfants vont les trouver." Et ce fut  la fin de notre collaboration. C’est dommage car mes enfants ont été élevés avec les histoires de Père Castor et c’était une belle maison. C’est une tendance en littérature jeunesse de simplifier la langue ce qui me crispe à chaque fois.

 

L'insolence et non l'irrévérence

 

 

J’ai eu la même aventure chez Milan où l’on m’a carrément changé un titre qui était « Petits contes irrévérencieux » en « Petits contes insolents ». J’ai alors rétorqué que les deux titres n’ont aucun lien entre eux et que je suis prêt à défendre l’irrévérence mais pas l’insolence. Vous vous souvenez d’Alexandre Jardin qui avait lancé une initiative intéressante, celle de mettre des caisses de livres dans les écoles maternelles et primaires, et d’envoyer des auteurs défendre leur travail. L’Académie de Versailles m’avait envoyé dans une vingtaine d’écoles des départements et ce fameux petits contes insolents était présent sur place.  A chaque fois, je demandais aux gamins s’ils savaient ce que voulait dire insolence. « Oui monsieur c’est quand on ne dit pas merci, quand on parle mal."  "Très bien. Et l’irrévérence?" Pratiquement aucun enfant ne connaissait le terme. Je vais vous expliquer : « C’est simple autrefois devant les riches, les puissants, les seigneurs on choisissait ou non de faire la révérence.. Et quand on rechignait à la faire, on était irrévérencieux". "Ah oui" s’exclamaient -ils! Alors, je vais dire à la directrice de collection que vous êtes moins sots qu’elle ne le pense.

J’ai toujours écrit sans faire de concession sur la langue française employant  des mots que les enfants ne comprennent pas. Et quand j’ai des gamins devant moi qui me demandent  ce que veut dire un mot, je leur explique.. De toute façon, quand ils ne comprennent pas un mot, ils saisissent quand même le sens général. Et puis leurs parents ou le dictionnaire peuvent les aider. C’est une constante chez moi…

 

 

Vous ne semblez pas avoir connu la chasse aux éditeurs ?

Si après, avec d’ailleurs beaucoup de rechutes. C’est parfois très compliqué. Chez Glenat, l’aventure s’est ma terminée car la directrice de collection Karine Leclerc qui aimait ce que je faisais est partie et la relève était moins sensible à mon travail. Mais j’en ai quand même fait une quinzaine chez eux, et je me souviens qu’un jour Karine m’a dit « Ecoute j’ai quelque chose à te demander, je voudrais que tu me fasses un livre sur l’histoire des anges." "Ce n’est pas exactement ma tasse de thé mais pourquoi" lui ais-je rétorqué. «   « J’ai eu dans m vie des problèmes et ma belle-sœur m’a prêté un jeu de cartes des anges. Et j’ai pu résoudre le problème. Par quel miracle je ne sais pas." Et elle m’a affirmé que ce jour là, en descendant dans le métro, elle a vu un ange blanc. Un comédien qui était là pour promouvoir une pièce de théâtre . Je lui ai dit d’accord mais tu me permettras de parler aussi des anges déchus. J’ai donc réalisé  "La vie secrète des anges » 

Mes expériences chez Glenat ont été très positives.  Après j’ai du effectivement me battre davantage et j’ai eu plus de refus, ce qui est normal. Ainsi, certains contes  m’ont-ils été refusés chez de grand éditeurs parce que trop engagés. J’en ai parlé à une amie poète et éditrice qui malheureusement a fermé après avoir dirigé longtemps « Le Serpolet ».  Elle m’a dit de lui envoyer  les contes non publiés et elle m’a édité deux fois.  Le déclencheur avait été lorsque je dis « C’est une étoile qui apparaît dans le rêve d’un enfant et il reconnaît sa grand-mère. Une femme qui avait quitté notre terre par la fumée d’une cheminée pour devenir l’étoile jaune que des barbares avaient accrochée à sa poitrine."  "Vous vous rendez compte dire cela aux enfants" avais-je entendu… . Et j'ai surenchéri «  Les parents  les mettent devant la télé avec des horreurs tous les jours et vous ne pouvez pas leur dire qu’il a existé des périodes comme cela qu’on souhaiterait ne jamais revivre." C’est fou…

 

 

Les titres vous les trouvez facilement ?
Non, je réfléchis beaucoup, et je n’arrive pas trop à trouver des titres courts. Par exemple au Serpolet j’avais publié « Lieux communs où l’on patiente ». Cette idée m’était venue suite à un problème rencontré par ma femme qui s’était cognée la tête sur le haillon de la voiture et qui brusquement ne voyait plus rien.  Je l’ai emmenée aux urgences à Poissy pour voir une ophtalmo et dans la salle d’attente on n’avait rien d’autre à faire qu’attendre. Or, une femme était là avec sa petite fille et le médecin lui demande ce qui se passe. "Ma fille a avalé 3 pièces de monnaie, nous  l’avons  secouée et elle n’en a rendu qu’une." Je me suis dit que ses parents étaient quand même pingres et j’ai fait un petit texte là-dessus. Et j'ai pensé intérieurement que j’allais essayer de trouver d’autres petites histoires dans des lieux où l’on a rien d’autre à faire que d’attendre. Un livre englobant des histoires courtes est né…


Quand écrivez-vous de la poésie et quand écrivez-vous  des contes ? La différence entre les deux ? 

Le conte écrit s’assimile à une boîte de conserve dans laquelle on le met. C’est de l’écriture orale, je peux par exemple vous dire 300 contes sans problème, mais je n’en connais aucun par cœur. C’est une autre technique. C’est en tout cas ce que Ralph Nataf m’a appris. Je fais un synopsis de l’histoire avec un important travail en amont d'après le très riche patrimoine mondial des contes. Mais qui ne me convient pas toujours car souvent le conte transmet une idéologie dominante que je ne partage pas toujours. Ainsi a-t-on créé des générations de petites filles qui attendent le prince charmant. Non pas qu’il n’existe pas, j’en suis la preuve vivante, mais nous sommes très peu nombreux et je transforme donc ces contes en gardant ce que je trouve intéressant.  Ce que je souhaite, c’est transmettre des valeurs auxquelles je crois et les partager. Après on est libre d’y adhérer ou pas. Que ce soit de tous petits enfants, des collégiens, des adultes, je m'adapte et emploie des mots différents à chaque fois, mais toujours avec une trame. Alors que pour les poèmes, je me hasarde davantage à les dire par cœur, parce que quand survient un trou, le mot d’après ne vient pas. Je préfère lire même si je connais mes écrits et j’ai toujours le texte sous les yeux sur un pupitre. En outre c’est un effort qui à mon âge me dépasse un peu.

 

Apprendre par coeur m'est insupportable

 

 

 

D’ailleurs, j’ai toujours eu horreur d’apprendre par cœur à l’école. J’avais de mauvaises notes parce que je n’apprenais pas mes leçons. Mais mon nom me permettait de patienter car le U vient tout à la fin. Cela me donnait l’opportunité d’écouter les autres élèves qui eux avaient appris leur leçon et au bout du compte je le savais. Sauf quand le prof me jouait le mauvais tour de commencer par la fin. Là j’étais un peu bloqué. J’avais l’habitude de dire ce que comptait le résumé à ma façon et j’ai toujours pensé que l’important c’est de comprendre ce qui est écrit et de le redire de façon compréhensible pour soi. Alors que le par cœur me sort par tous les pores de ma peau. Je ne supporte pas.  Le conte représente pour moi la liberté. Mais en poésie, cette liberté je la puise dans l’écriture et une fois que le poème est fini je le considère utile à dire tel quel. Et comme disaient autrefois les enseignants, je lis  en y mettant le ton. Ca m’amuse beaucoup..

 

 

La marche vous inspire. D’autres sports également ?

J’ai joué au foot comme tout le monde parce que mes cousins en faisaient. Je jouais arrière-gauche mais c’était assez brutal et je n’aimais pas trop. Après, j’ai fait énormément de vélo, j’avais un cousin entraîneur de club mais je n’ai jamais fait de compétition car mon père italien oblige, avait une peur bleue que je me blesse. Je participais aux  entraînements, aux  sorties et ensuite j’ai fait beaucoup de cyclotourisme avec deux, trois copains. Je suis allé en Bretagne, au Nord, sur les bords de Loire. Sur le moment, ce n’était pas vraiment une source d’inspiration car je n’écrivais pas encore beaucoup à cette époque là. Mais j’ai toujours eu un pied dans mon intérieur, et j’ai constamment imaginé des histoires. Par exemple mon premier métier c’était peintre en bâtiment et évidemment lorsque l’on peint un plafond, quand on ponce un mur, on a du temps pour rêver…  Et quand je ponçais, les taches qui s’effaçaient, représentaient des pays, des paysages. Toutes ces expériences m’ont nourri et quand j’ai commencé à écrire, le tout est ressorti et a alimenté mon écriture.

 

 

Pour Einstein, c’est l’imagination qui prime. Vous en avez une bonne quantité !

Oui, j’ai l’impression que j’ai un puits d’où je peux tirer des seaux et des seaux.  L’inspiration vient spontanément, mais souvent ce sont des commandes. Ainsi chez Glénat, j’ai fait beaucoup de petits contes, « Petits conte pour voyager, pour rêver... ». Côté poésie c’est souvent sur un fait d’actualité, une image, ou de l’écriture concernant des œuvres artistiques, peintures, sculptures. On m’avait d’ailleurs publié « Impressions ». Cela découlait évidemment de Monet et ce sont des mots que je cueillais dans les expos parisiennes sur tous les grands peintres. Un jour j’étais au Musée Maillol avec une exposition sur Séraphine de Senlis une femme de ménage et peintre. Le film m’avait intéressé mais ce que l’on montrait des œuvres ne m’avait pas trop attiré. En revanche, lorsque j’ai vu l’exposition j’ai eu un choc énorme devant les toiles "en vrai". Les artifices dont elle s’était servie pour fabriquer les couleurs m’ont enthousiasmé.

 

Ecrire n'est pas forcément être journaliste

 

 

Alors que je prenais des notes, une dame habillée d’un manteau de fourrure s’est approchée et m’a demandé si j’étais journaliste.  J’aime écrire sur les œuvres pour en faire des poèmes lui ais-je répondu. Elle était vidéaste, vivait entre New York et Paris et elle réalisait des vidéos sur les grandes expos se déroulant dans le monde entier.  Pour elle si j’écrivais c’’était forcément que j’étais journaliste…  Les œuvres picturales et autres m’inspirent beaucoup.  Je fais partie d’une association qui a fêté ses 50 ans dernièrement « Regard, parole » avec des peintres, sculpteurs, photographes et j’interviens pour la parole. Et à chaque expo, je prends la plume. J’ai publié plusieurs ouvrages avec notamment des photographies de Patrice Le Terrier qui avait bravé les interdits de la grande tempête de fin de siècle afin de photographier les dégâts dans les forêts, dans la région de Rambouillet. Je le connaissais de réputation et j’ai vu son exposition 17 fois. Je lui ai montré ce que j’avais écrit et il m’a proposé de faire un livre aux éditions de  l'Amandier.  Le  fondateur nous a dit  "J'aime beaucoup le titre« la douleur des arbres ». J’ai moi-même perdu un arbre qui m’était cher. Ce fut une rencontre intéressante mais malheureusement il avait déjà 95 ans. C’est le moment où il a cédé l’affaire à son fils qui malheureusement n’avait pas les mêmes qualités que son papa et qui a un peu bâclé le livre. D’ailleurs en 2 ans, il a liquidé la boutique. 

 

De belles expériences

 

 

 

J’ai publié chez Jean Foucaud à Amiens. C’était un être extraordinaire qui avait une idée à chaque minute et il m’a fait faire des choses assez incroyables. Sur la Somme dans un petit canoë qui tanguait dans tous les sens au mois de novembre avec 5 m de fond, ce que j’ignorais, j’ai dit des poèmes alternativement avec lui. Les spectateurs étaient sur la berge.. A Amiens, 4 poètes dont moi étaient invités au cirque Jules Verne, un très bel édifice à Amiens. Chacun avait une invitation pour un spectacle, il fallait écrire dessus et il a publié les textes. C’était une très belle expérience. 

Ce sont des choses que j’aimais bien faire, des commandes mais en même temps avec libre cours.  Je me souviens d’un peintre qui avait exposé, à l'endroit où j ai fait des concerts car j’ai longtemps chanté avec les cœurs de la Pléiade. Un jour, je visite l’expo du jour, les toiles étaient éclairées et j’ai eu un choc. J’ai donc écrit. C’était des paysages mais sans aucun personnage ni animaux. Juste des traces visibles de toutes sortes construites et démolies. Et quand j’ai vu ce peintre il m’a dit « Comment avez-vous fait pour rentrer dans ma tête ?" J’étais content. Ce sont de petites réflexions comme ça, de petites aventures d’opportunisme qui sont un bonheur pour moi car il existe une concrétisation. ? Après, il faut évidemment  publier...

 

 

Comment se passent vos interventions ?
Je fais partie d’une association toujours existante composée  d’un groupe de retraités et de quelques personnes plus jeunes. Nous allons régulièrement sur demande dans les écoles de Trappes et de la ville nouvelle. Malheureusement le Festival du conte qui durait trois semaines a disparu et nos actions se cantonnent à Trappes. Nous disons des contes dans l’auditorium de l’école de musique, et produisons des spectacles. Nous allons aussi dans les classes de maternelle, de primaire, du collège. Les enseignants sont demandeurs et nous donnent un thème. Le thème de 2023 c’étaient les chimères, un sujet qui ne m’inspire pas plus que cela.  J’ai fait beaucoup d’ateliers poésie dans les écoles maternelles, primaires, lycées. Pendant plusieurs années, j’ai été partie prenante de l’initiative intéressante de l’Académie de Rouen.  Chaque année ils organisaient des voyages en ville. J'avais six jours d'atelier durant l'année scolaire. Unartiste et une tierce personne intervenaient également  dans une classe en cours d’année.  Un photographe et une chorégraphe, un peintre ou une danseuse se sont joints à moi. 

 

 

 

J’aime faire des ateliers poésie dans de nombreuses écoles de la région de Rouen. Une année où j’étais en maternelle, le premier prix a été obtenu grâce à la collaboration d’ institutrices et de mamans qui aidaient les camarades à écrire leurs idées. Je dis toujours à mes élèves que la poésie fait partie de la vie de tous les jours. Par exemple je leur écris un A au tableau, un A majuscule en caractère d’imprimerie  et je leur dis "Que voyez-vous là ?"  "Une échelle, un toit." Ensuite je mets le A sur le côté. "Et là ?"  "Une pointe de crayon, un bec d’oiseau." Puis je renverse complètement le A "Et là ? "Un cornet de frites." Le poète c’est celui qui considère les choses autrement et cet œil particulier éveille déjà chez eux une façon de raisonner. " Si l’on n’a pas de mots qu’est-ce que l’on fait pour se faire comprendre ?" . "On fait des gestes." Je me frotte alors  le ventre et je fais le geste de manger, et leur demande ce  que je veux dire? "C’est bon, j’ai faim." "Très bien, vous comprenez donc que j’ai faim et vous me faites des pâtes à l’eau sans sel, sans sauce etc… Je vais les manger mais est-ce que je serai content ? " Généralement ils ne disent  "Non pas trop."  "Si par contre, j’ai les mots et que je vous demande de me faire des pâtes al dente avec une bonne sauce et que vous me le faites est-ce que là je serai content ?"  "Oui." " Pourquoi? Parce que j’utilise des mots pour vous le demander. Je vais vous dire deux secrets : "Dans la langue française 200.000 mots sont répertoriés. Certains ont disparu, d’autres apparaissent . 

 

Racine et ses 6000 mots

 

Racine a écrit tout son théâtre avec 6000 mots, mais généralement les gens se contentent de 1500 mots souvent moins. Et je vais vous dire un autre secret, les mots sont gratuits, pas besoin de les acheter, il suffit de les prendre là où ils sont. Dans les livres, dans la tête de vos enseignants, de vos parents, de vos amis.."

Je me souviens d’un lycée ou l’on m’avait fait venir  pour des volontaires qui voulaient se familiariser avec la poésie. Dans ce groupe  était présente une jeune fille venue avec sa copine mais qui visiblement n’était pas enthousiaste. Alors que je disais des textes, je lui ai demandé son opinion. "De toute façon, je n’aime pas la poésie » « Pourquoi « ?  "Parce qu’elle a recours à des mots compliqués alors qu’il existe des mots simples." " Oui, je peux comprendre. Mais par exemple, je peux te regarder et te dire juste que tu es une fille. Mais si en te regardant je te dis tu as une jolie coiffure, un beau bijou autour du cou, de beaux yeux,  c’est quand même mieux que de te dire simplement que tu es une fille."  "Ah oui peut-être."  "Tu vois, voilà des mots.  C’est cela le but de la poésie. Comprendre et surtout se faire comprendre." J’ai le souvenir d’un môme qui après avoir entendu mes contes, vient me voir et me demande par quelle école il devait passer pour être conteur. J’ai trouvé la question magnifique!. Un autre plus jeune au premier rang lors d’une séance tout public, avait des yeux qui étincelaient. Il ne m’a pas quitté du regard et alors que je me dirigeais vers ma voiture, j’ai pu constater que j’étais garé à côté de la dame qui l’avait accompagné. Je lui fait alors part de l’intérêt de ce garçon. . Oui, il adore les histoires m’affirme t-elle. Je le regarde alors et il me dit : « "Tu sais quand je serai grand, je serai historiste comme toi… »

 

 

 

Vous avez aussi dirigé des ateliers poésie avec des prisonniers ?
Oui et c’est à la fois passionnant et très dur. La première fois c’était dans une prison de femmes et c’était terrible. On m’a fait entrer dans une pièce contenant des barreaux aux fenêtres. Les détenues entraient une à une, certaines avaient des regards totalement vagues et étaient accompagnées de leurs enfants. . J’ai commencé à leur dire des histoires et de temps en temps la porte s’ouvrait. Quelqu’un en appelait une non pas par son prénom mais par son patronyme pour subir la fouille. Elle sortait, revenait.  A la fin, je leur dis de venir me voir et elles ont manifesté le regret que je n’aie pas été présent avant.. En tout cas, j’ai été choqué par la manière dont on les traitait et je suis allé voir les surveillants pour leur faire part de ma stupéfaction et leur demander s’ils ne pouvaient pas les interpeller avant ou après la séance…

Je me souviens également d’un autre établissement, ou je suis entré dans la chapelle entourée de grilles partout. Le gardien est reparti et a refermé à clé. »S ’il se passe quoi que ce soit, vous faites le 4 et je viendrai » m’expliqua t-il. Je me mettais toujours dans un angle, c’était l’été, je vois arriver des gaillards qui me regardent étonnés ; et je pense « Pourquoi ais-je accepté ? » Mais il fallait me lancer et j’ai débuté par une histoire sur un gardien tourné en ridicule. C’est alors qu’un type avec d’énormes bras et des tatouages partout a commencé a rétorquer avec sa grosse voix que ce n’était peut-être pas le lieu pour évoquer ce sujet . Je continue et à la fin je le regarde et il me dit « Vous n’en auriez pas une autre des fois » et  je suis resté. Une autre fois je suis intervenu auprès des prisonniers en longues peines.  Je lis les poèmes dont certains tirés de « "Mur de sable » et à la fin un homme vient vers moi et m’explique qu’il était présent là-bas aussi. « Cela fait 15 ans que je suis enfermé là et pour la première fois, j’ai eu l’impression de m’évader un peu. « Ce sont des remarques qui  font plaisir et l’on a le sentiment bien agréable de servir à quelque chose…

 

 

 Avec le recul, regrettez-vous d’avoir quitté l’école à 14 ans, ou est-ce qu’au contraire cette absence vous a donné un aperçu de la vie plus original, et qui sort un peu des sentiers battus !

Avec le recul, je me dis que j’ai suivi une autre école. Mais sur le moment, j’ai vraiment regretté. Je n’étais pas mauvais élève, à l’époque je vivais dans un petit village et rares étaient les enfants qui allaient au lycée. Hormis les enfants de riches, de médecins, la plupart partaient en apprentissage. Menuisiers, cultivateurs, etc.  Mais à ce moment là, j’avais envie d’apprendre, et j’ai trouvé des tas d’astuces pour me cultiver, notamment comme je l’ai dit mon instituteur qui m’a cédé sa bibliothèque. Et puis j’ai entrepris des cours  par correspondance ; j’avais même une tante très croyante présente  à la messe midi et soir qui m’avait trouvé un monastère où il m’était possible de faire des études. Elle m’avait donné toute la documentation, et même si j’étais élevée dans la religion , je me suis dit que cet état d’esprit  ne me correspondait pas vraiment. Mais j’ai fait toutes mes communions, privées, solennelles, confirmation etc… Quand je suis parti en Algérie, il existait le pèlerinage de Lourdes pour les militaires et ma tante Lisette m’a conseillé de le faire, et m’a affirmé que ce pèlerinage allait me protéger. Elle m’a donné un peu d’argent pour le voyage et j’y suis allé. Devant la cathédrale, se trouvait un immense espace avec des parachutes bleu, blanc, rouge tout autour. Nous étions des centaines de militaires et l’Evèque nous a appelé pour aller combattre l'infidèle au-dela de la Méditerranée, ce que je ne souhaitais pas. Et quand je suis arrivé en Algérie, je suis tombé sur un aumônier ancien trappiste qui racontait qu’il n’avait pas le droit de parler à la Trappe et qu’il n’en pouvait plus. Tout en expliquant que c’est la raison pour laquelle il se trouvait ici ; il arborait ses galons de capitaine… Ce fut la fin de ma période italienne bien pensante…

 

Agnès Figueras-Lenattier



 

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