mardi, 17 novembre 2020
Fabienne Delacroix
Fabienne Delacroix est la fille du peintre naïf Michel Delacroix et a repris le flambeau en trouvant sa voie avec selon les dires un brin de féminité en plus. C'est une peintre émérite de la Belle époque, illustratrice, représentant des scènes de la vie parisienne ou campagnarde, les bords de mer, les châteaux de la Loire. Elle a peint des séries comme les 24 vues de La Tour Eiffel, et a représenté les quatre saisons de Notre Dame de Paris. Dotée d’un grand coeur, contribuer à la collecte de fonds au profit de grandes causes a beaucoup de sens pour elle». Elle a par exemple soutenu l’action contre le sida en partenariat avec l’AMFAR (American Foundation for Aide research) et la recherche contre le cancer en partenariat avec les joueurs de hockey de la NHL (National Hockey League… ). Ce qui a lui a donné l’occasion de rencontrer la famille Kennedy et Arnold Schwarzenegger. Possédant plusieurs cordes à son arc, elle a également un passé dans le domaine du théâtre et de l’adaptation de grandes oeuvres littéraires. Elle a été présidente de plusieurs compagnies de théâtre, a collaboré à de nombreux spectacles à Paris et en province et à Madagascar où elle a habité de 2005 à 2014, elle a également été très présente théâtralement avec la création de la Compagnie Arts and Events et l’organisation de nombreux spectacles pour enfants et adultes…
C’est votre père peintre reconnu qui vous a initié à la peinture?
Plus ou moins mais avec beaucoup de liberté. Je n’ai fait aucune école et suis complètement autodidacte. Je me raccroche souvent à l’école des naïfs, avec toutefois de petites nuances car l’on m’a qualifiée de « naïf raffiné « . En effet, la peinture naïve ignore la lumière, la perspective et tout un tas de règles qui constituent l’art de peindre.. J’aime bien le terme « figuratif poétique » …J’aime énormément cette idée de rêve, c’est d’ailleurs une époque un peu rêvée même si je n’ai évidemment pas de souvenirs. Je dis souvent que je rêve pour les autres…
Pourriez-vous parler de votre manière de peindre?
C’est difficile d’expliquer, c’est un grand mystère d’inspiration. Bien sûr je suis influencée par mes lectures, sur ce que je peux faire et puis l’inspiration vient naturellement Je travaille avec des pinceaux très fins pour aller dans le détail. J’ai peint à l’huile, mais pour des raisons d’odeurs très fortes; j’ai basculé vers l’acrylique. Cela sent très mauvais, et un jour j’ai été chez mon dentiste qui m’a dit « Vous avez bu du white spirit ou quoi? Je me suis rendue compte que j’inhalais cela à haute dose. Avec l’acrylique, l’on arrive maintenant à avoir un peu de matière ce qui n’était pas le cas il y a 30 ans. On ne trouvait pas toutes les nuances. Il n’y a aucune odeur et le séchage est instantané. Il m’arrive d’écouter des livres audio quand je peins notamment ayant rapport au sujet que je traite de manière picturale. Par exemple, j’ai réalisé un triptyque, trois toiles qui communiquent entre elles autour du grand magasin « Le Printemps » et j’ai réécouté « Le bonheur des dames » de Zola . J’ai fait une affiche pour Annie Vergne directrice du théâtre du Guichet Montparnasse en liaison avec son adaptation d’ » Une vie » de Maupassant, et j’ai réécouté l’histoire. J’écoute aussi de la philosophie. et suis une philosophe de la joie… Spinoza et Montaigne par exemple sont des amis même si je n’ai pas forcément toutes les capacités intellectuelles et la patience de lire « L’ »Ethique » . Quant à Montaigne c’est un personnage si humain. Il existe des versions magnifiques comme l’enregistrement des essais de Montaigne par Michel Picolli. Je suis dans la philosophie toute la journée et m’intéresse aussi à la littérature et à l’histoire.
Est-ce vital pour vous de peindre?
Oui et quand je ne peins pas, cela me manque. J’en ai besoin; c’est ma vie et je suis heureuse car je fais vraiment ce que j’aime. Je suis comblée par mon travail et mes trois enfants. Désirer ce que l’on a c’est cela le bonheur. Je suis complètement ailleurs, et il m’arrive de ne pas sortir pendant plusieurs jours. C’est mon petit chien en fait qui me force à sortir… C’est tellement calme, j’ai la lumière, les plantes. Cela fait 25 ans que j’ai cet atelier et jamais je ne m’en séparerai. Je me sens chez moi. Dans mes tableaux, ce que je cherche à faire ressortir, c’est la joie. Ma manière de peindre est tellement instantanée; rien ne transparaît à part la joie. C’est d’ailleurs le retour que l’on me fait. Mes clients me disent qu’ils ont un rapport amical avec mes tableaux, que des fenêtres s’ouvrent qui les rendent joyeux et leur procurent du bien-être. Pour moi, ma mission est accomplie et contrairement à beaucoup de peintres, je n’ai aucune ambition particulière et ne cherche aucunement à faire passer des émotions ou des messages. Ma seule crainte c’est de ne plus pouvoir peindre. Quand j’étais plus jeune, j’ai eu des périodes où je n’arrivais jamais à rien. J’avais la toile blanche. Il faut de la patience et de l’assiduité et je travaille tout le temps.
Au niveau des couleurs vous avez forcément des préférences!
Oui, et je dois un peu me forcer à mettre du bleu. C’est un peu étrange d’ailleurs car c’est une couleur magnifique. Tout le monde aime le bleu, c’est le ciel, c’est l’infini. Quand on lit « Le dictionnaire amoureux » de Michel Pastoureau, le bleu représente la couleur de l’infini. Mes bleus sont plutôt pâles, je ne vais pas dans du cobalt, mais j’aime le ciel, la mer. Sinon je travaille toutes les couleurs, même si je ne suis pas dans les couleurs pop comme le violet. Mais c’est parfois amusant de mettre un petit grain de folie. Une petite touche de couleur qui va faire toute la toile finalement dans un univers très uniforme.
La musique vous inspire t-elle?
Mon rapport à la musique est totalement déconstruit et c’est l’art qui me donne le plus d’émotions soit dans les pleurs, soit dans l’allégresse. En ce moment, vu mon état psychique personnel , la musique me fait trop d’effet et je n’arrive plus pour l’instant à en écouter. Je suis une modeste pianiste et j’ai quand même rapporté mon piano de Madagascar sur un bateau. Mais là aussi, je suis incapable de jouer en ce moment.
Comment cela se passe t-il côté exposition?
J’expose environ 1fois par an et à chaque exposition, c’est comme si je passais mon bac.. Je mets tout sur la table, et c’est ma seule source de revenus. Imaginez donc si mes tableaux ne se vendent pas… Après cette exposition annuelle qui dure un mois, je participe à une exposition collective. Lors de mes expositions j’ai carte blanche mais les galeries aiment bien que je présente quelques vues de Boston ou de New York. Maintenant que j’ai pris l’habitue de le faire; je le fais volontiers. A Boston et New York, j’ai une chance extraordinaire car là ou j’expose, ce sont des galeries magnifiques placées sur West Broadway, un emplacement de rêve.
L’art naïf ne plait pas en France?
Je ne sais pas. Je pense que les Américains achètent avec leur coeur, alors qu’en France souvent on achète beaucoup avec ses oreilles. Il faut être simple et retrouver une âme d’enfant pour aimer l’art naïf. Ce n’est pas une démarche forcément naturelle en France. J ’ai fait signe aux musées d’art naïf français notamment celui de Nice le musée Jacovsky. Mais ça ne s’est pas concrétisé pour l’instant. Nul n’est prophète en son pays; ce n’est pas très grave.
Et en Europe? Je pense qu’il existe des possibilités en Allemagne et en Suisse. Aussi beaucoup en Europe de l’Est, c’est pour cela que je suis au musée en Bulgarie le Musée d’art naïf et intuitif à Belogradchik avec quatre toiles. Je fais partie de la collection permanente du Musée.
Et au Canada?
Il y a un beau musée d’art naïf à Magog au Québec (Mian Musée international d’Art Naïf), et j’en fais aussi partie avec deux toiles. Le directeur du Musée est très gentil avec moi et il est d’ailleurs cité dans l'un de mes catalogues d'exposition.. « Paris, jours heureux » C’est lui qui m’a qualifiée de » naïf évoluée » car il se demandait si en présence de mon oeuvre on était encore dans l’ art naïf. Je suis un peu à la frontière de la peinture figurative traditionnelle et de l’art naïf. Il existe aussi une belle école d’art naïf canadienne par exemple.
Vos influences?
Séraphine, le douanier Rousseau auquel on ne peut être indifférent, Henri Rivière qui était assez proche des estampes japonaises que j’aime aussi beaucoup, . Puis Bruegel, et les impressionnistes évidemment puisque c’est ma période, même si ma patte n’est pas du tout impressionnistes. On peut voir dans la manière dont je traite l’eau un peu de pointillisme. Personne n’échappe aux influences, on n’est que le produit de son passé, de son histoire et des événements auxquels on a été exposés.
Vous avez sorti en 2018, un livre édité chez Hervé Chopin « Paris, jours heureux ». Cet éditeur est-il de la famille du musicien. Et vous qui portez le nom de Delacroix êtes-vous de la famille d’Eugène Delacroix?
Non, Hervé Chopin n’a rien à voir avec le musicien. En ce qui concerne notre famille, , nous ne savons pas vraiment si nous sommes de la même famille qu’Eugène Delacroix. mais c’est possible. Comme il n’a pas eu d’enfants, c’est difficile de savoir. Ce livre sur Paris est à la fois en français et en anglais. Cela me rend bien service et me permet de vendre aux Etats-Unis. J’ai aussi illustré chez le même éditeur « Les malheurs de Sophie » . C’est Sophie de Ségur arrière, arrière, arrière petite fille de la comtesse qui a signé la préface du livre. Ce qui donne donc Ségur, Chopin, Delacroix!… Quand j’étais enfant, je n’avais pas été particulièrement sensible à l’histoire des malheurs de Sophie mais plus récemment la rencontre avec la comtesse de Ségur a été comme une révélation. En tant que femme je me suis sentie finalement assez proche d’elle notamment lorsque je me suis rendue au musée de la comtesse. Elle a commencé à écrire à peu près à l’ âge que j’ai maintenant . Je vais vous confier quelque chose qui me tient à coeur. Concernant cette collection sur les malheurs de Sophie j’avais une trentaine de peintures et je ne savais pas quoi en faire. Les responsables du musée les ont gardés et je devais les exposer mais la Covid est arrivé et le musée a fermé. Ne voulant pas les vendre pièce par pièce, j’ai eu l’idée de faire une vente au profit de Madagascar où j’ai passé de longues années. L’argent récolté serait destiné à construire une petite école qui s’appellerait « L’école de la comtesse de Ségur ». Il me faudrait trouver un partenaire; j’ai deux ans pour ce projet; c’est le timing que je me suis fixée. J’ai des pistes de galeries, de ventes aux enchères. C’est un projet qui me tient à coeur; c’est tellement pauvre là-bas. Mais malgré le dénuement total, la joie est de mise . C’est tellement différent de chez nous et de notre société de consommation. C’est une belle leçon de vie et j’espère que ce projet verra le jour. Je compte retourner à Madagascar dans deux ans. Là-bas, il y a des gens que j’aime beaucoup, des gens très simples et pour mes 50 ans, je veux y retourner. C’est le cadeau que je veux me faire...
y a t-il un écrivain que vous aimeriez illustrer?
Mon rêve est d’illustrer Marcel Pagnol qui est un amour de toujours et même si ça ne s’est pas encore réalisé, mon éditeur est tout à fait partant. J’ai même été en contact avec Nicolas Pagnol son petit fils, mais la famille a sa propre maison d’édition avec différentes versions. J’espère vivement que ça se fera. . Au bout de 70 ans, cela tombe dans le domaine public et je ne quitterai pas ce monde sans avoir illustré Pagnol. Je suis née en 1972, il est mort en 73 ou 74 et j’attendrai 70 ans!…C’est un univers fait pour moi… Une différence entre la peinture et l’illustration? Pour moi c’est similaire même si parfois je me demande si je ne vais pas davantage du côté de l’illustration ou si je reste du côté de la peinture. Je n’ai pas poussé intégralement la réflexion, mais parfois je suis entre les deux. Ça me va bien.
Il y a aussi les illustrations avec le chocolat de poche, les puzzles!
Je fais ces projets surtout pour les rencontres même si l’on a tous besoin de sécurité et avec la Covid je diversifie. La peinture c’est très solitaire er rencontrer des gens est important pour moi. C’est enrichissant, et ça crée une émulation. Quand je travaille sur des projets collectifs, je travaille vraiment bien; ça me stimule.
Le chocolat de poche est une histoire d’amitié!
Oui c’est un peu mon défaut , et je travaille toujours ainsi. J ’ai eu un coup de coeur pour le produit. Je trouvais ce chocolat délicieux, et aimait la poésie qui en émanait. J’aime beaucoup aller chercher des extraits pour illustrer des peintures; ça m’a emballée. Le créateur explique que tout le monde lui piquait ses tablettes, du coup il a eu l’idée de les cacher dans sa bibliothèque et s’est alors lancé dans la conception de tablettes dont l’emballage imite la couverture de livres. Ce sont des tablettes de chocolat qui se dévorent comme un livre, avec un pur beurre de cacao, sans OGM ni graisses hydrogénées. Il existe aussi une transmission de savoir en matière de gastronomie, d’art et de littérature. Le fondateur est un grand passionné d’art, de littérature, de peinture qui a fait une reconversion. Il vient du milieu de la banque; il a pris les chemins de traverse et l’on s’entend très bien . On collabore régulièrement sur de nouvelles tablettes et puis on se stimule intellectuellement. Et c’est formidable.
Les puzzles
C’est une autre société située dans le 14ème arrondissement. « Les puzzles Michèle Wilson ». On a commencé avec deux sujets, c’est tout récent : le château d’Azay-Le- Rideau et le Moulin Rouge. J e m’interroge parfois sur la valeur de mon travail : Est-ce que l’image est bien respectée, pas trop banalisée? A partir du moment où le produit est un travail d’art en lui-même, c’est juste une chance de faire cela…
Vous avez aussi une carrière interessante dans le théâtre. Comment avez-vous débuté dans ce domaine?
Le théâtre a toujours été ma grande passion et monter des pièces que j'inventais, lorsque j'étais enfant constituait mon jeu préféré. Je tendais un rideau à un fil, quelques éléments de décor que je peignais et tout pouvait commencer. N'ayant pas du tout le don du jeu. je laissais mes camarades jouer et préférais diriger… Puis à l'âge adulte le destin a provoqué de belles rencontres au sein de ce milieu. Je me suis formée sur le terrain comme c'est souvent le cas en étant assistante.
Votre séjour à Madagascar a favorisé cet amour du théâtre!
Oui, c’est là que j'ai commencé "à voler de mes propres ailes" passant de l'écriture à la mise en scène. Rapidement les choses ont pris de l'ampleur grâce à un partenariat avec l'Institut Français. Je me suis tournée vers l’adaptation, car écrire pour le théâtre est un long travail qui suppose une maturité que je n'avais pas et n’ai toujours pas. Mais c'est une très belle aventure que de rentrer dans une œuvre de cette manière. Un mariage entre esprits avec l'auteur peut presque se mettre en place. Celui-ci devient un grand ami, le compagnon de projet, on peut même dire de vie, au moins le temps de l'écriture. Et lorsque l’on est en expatriation, dans une culture toute autre, cela fait énormément de bien. Ce qui me tient le plus à cœur dans l'adaptation c'est la fidélité au texte.
Voyez-vous une ressemblance entre le théâtre et la peinture?
Le théâtre est une peinture vivante. Un tableau qui se met en mouvement. Ce sont les mêmes ressorts créatifs qui sont à l'œuvre, la magie s'opère de la même manière. Dans un cas on passe du blanc de la toile à la couleur, dans l'autre du noir à lumière, mais c'est la même émotion de la création.
Que devient votre rapport au théâtre depuis que vous êtes revenue à Paris?
J’étais très abattue moralement suite à un drame personnel lorsque je suis revenue à Paris. Il fallait en plus que je me réhabitue à la vie en France après presque 10 ans à l'étranger et que je relève bien des défis. Mes contacts avaient poursuivi leur chemin, tout est en somme à recommencer. J’en ai alors surtout profité pour aller au théâtre selon mes envies, cela m'avait tellement fait défaut. Des rencontres ont eu lieu à nouveau comme cette belle amitié qui est née avec Annie Vergne directrice du Guichet Montparnasse. Les projets sont comme les désirs, ils existent toujours, notamment autour de Balzac et de Maupassant. Le contexte sanitaire va forcément les ralentir. Mais j’espère vivement remettre un pied dans le milieu du théâtre et peut-être faire encore plus se correspondre les deux univers en instaurant les toiles sur scène, à moins que ce ne soit la scène dans les toiles.
Agnès Figueras-Lenattier
13:39 Publié dans Interviews | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peintre, art naïf, interview
dimanche, 08 novembre 2020
Thierry Sajat
Thierry Sajat qui travaille au Ministère de l’Intérieur préside l'Académie de la poésie française depuis qu’il s’est installé à Paris .…Ayant écrit son premier poème à l'âge de 15 ans, il a publié de nombreux recueils et a obtenu plusieurs prix. Egalement éditeur et responsable de deux revues de poésie, c’est un homme passionné et généreux qui n’hésite pas à s’investir à fond dans ce qu’il fait…
En tant qu'amoureux des livres quel est le premier qui vous a marqué et quel âge aviez-vous?
Ce sont les deux premiers livres que l'on m'a offerts car avant je ne lisais pas. C'était Hervé Bazin avec " Vipère au poing" et " Lève-toi et marche". J'ai beaucoup aimé les deux , et par la suite je me suis mis à lire sans m'arrêter… J'avais 9,10 ans.
Vous avez écrit votre premier recueil à 19 ans, et votre premier contact avec un éditeur a été un échec!
Oui, je me suis fait escroquer , mais c'est un mal pour un bien car à partir de ce moment là, j'ai décidé d'être mon propre éditeur. Mais les débuts furent épineux et réalisés de manière artisanale. Je collais moi-même les ouvrages, les cousais. J'ai commencé par le faire pour moi, puis j'ai aidé un ami à faire son premier livre. Ensuite, d'autres personnes sont arrivées chez moi, et le côté artisanal a peu à peu disparu, le professionnalisme prenant le dessus. J'ai longtemps cherché un imprimeur compétent car les livres se décollaient, et je n'étais pas très content. C'est en province que j'ai trouvé.
Tous vos propres recueils sont donc publiés au sein de votre propre maison d'édition!
Oui, environ 24 ou 25 recueils dont des anthologies. J'en publie régulièrement et j'en ai d'ailleurs une en préparation sur Montmartre. C'est un bouquin qui devrait sortir dans deux ans et je recherche des poèmes d'aujourd'hui ainsi que des illustrateurs même si bien sûr nos aînés auront leur place. Quant à ma poésie, elle est classique, rimée…
Et les poèmes extérieurs que vous publiez sont-ils tous rimés?
Je m’occupe de deux revues. L'une « L’Albatros" revue de « l’Académie de la poésie française» ne contient que des poésies rimées. Avec une poésie néo-classique admettant que certaines règles ne soient pas respectées comme les hiatus et autres. Alors que dans « Le Journal à Sajat » , ma propre revue, tous les styles sont présents. Je suis notamment très sensible à l'assonance lorsque je lis un poème. Je publie aussi parfois des romans, des nouvelles et des livres de photos. Je le fais généralement lorsque je connais l'auteur et ce qu'il fait. Sinon, il faut apprendre à le connaître, bien lire et accepter ou pas…
Pourriez-vous en dire davantage sur ces deux revues
On fête cette année les 70 ans de l'Albatros édité à 140, 150 exemplaires. En dehors des poésies, sont présents des articles sur la poésie en particulier, des critiques de livres. Louis Delorme qui nous a quittés récemment écrivait de magnifiques articles sur la poésie. Parfois également l’on retranscrit une conférence. Ainsi en a t-on par exemple publié une sur François Villon. J'ai également un site où généralement je publie le poème du mois et je cherche d'ailleurs quelqu'un pour s'occuper de ce site. Le journal à Sajat existe depuis 1983,84 et j’en suis au 117ème numéro. A l'époque, je travaillais dans un centre de tri postal et j'avais un collègue poète qui avait créé au sein de ce centre une revue intitulée « L’hippocampe" un très joli nom. Je commençais à correspondre avec des poètes de toute la France et j'avais moi aussi envie de fonder une revue. L'idée de départ c'était de publier sur un papier de journal mais je n'ai jamais réussi à le faire. Je cherchais un nom original et en attendant de le trouver on parlait du Journal à Sajat. C'est finalement resté. On peut dire que le titre comporte une faute mais je ne le considère pas comme tel. C'est juste une liberté.. Le tirage est de 300 exemplaires. avec 180 pages. J'en suis souvent un peu de ma poche mais étant le seul maître à bord, je me moque un peu de perdre de l'argent. Très peu de poèmes de moi se trouvent dans ces deux revues. Je laisse ma place et le fais surtout pour donner une chance à d’ autres.
Qu'est-ce que L'Académie de la poésie française?
C'est l'ancienne Académie des poètes classiques de France qui avait changé de nom avant que je ne la reprenne. Je l’ai reprise comme telle, j’ai juste ouvert au néo-classicisme sans oublier les classiques purs que nous avons toujours avec de très bons poètes classiques. Au début de mon arrivée, plus personne ne venait aux réunions et j'ai voulu essayer de faire venir d'autres personnes. Ce sont d’abord les montmartrois qui sont venus à l'Académie et grâce à eux, d'autres personnes nous ont rejoints. Nous organisons une conférence d'une heure au café Le François Coppée sur un poète ou parfois sur un auteur tous les deuxièmes mercredis du mois puis nous terminons par une scène ouverte où chacun peut dire un poème. Si jamais nous n'avons pas de conférenciers, la scène ouverte dure deux heures…Il nous arrive aussi de faire une fois par an quand nous le pouvons un petit voyage. L'an passé nous étions allés chez Ronsard et cette année nous avons visité le château de Condé. Nous devions nous arrêter chez La Fontaine mais nous n'avons pas pu. Nous avons d'autres projets comme d’aller à Villequier l'année prochaine chez Victor Hugo. L'adhésion est de 40 euros par an et donne droit à recevoir les quatre numéros de l'Albatros et la possibilité de publier ses poèmes.
Vous faites aussi des rencontres à Montmartre!
Oui, mais cela ne fait pas partie du programme de l'Académie mais des amis de la poésie. Je suis en plus ambassadeur de la république de Montmartre qui s'occupe des vendanges et fait le bien dans la joie. De ce fait, je suis très présent là-bas, environ 2 à 3 fois par semaine. Nous organisons une rencontre de poètes chaque premier jeudi du mois à " La Crémaillère" de 10h à 12h et déjeunons ensemble après. On accueille aussi des chanteurs. Aucune conférence n’a lieu. On est juste tous ensemble, avec une scène ouverte dans un esprit montmartrois. Beaucoup qui viennent pour la première fois ne nous quittent plus ensuite… On veut simplement que ce soit de la poésie française et si c'est écrit dans une autre langue, on demande automatiquement la traduction. A Montmartre nous sommes une quarantaine et au François Coppée aussi.
Vous avez publié des gens comme Ferrat, Nougaro, Duteil
Oui j'ai eu la chance de publier Ferrat dans un numéro spécial sur l'enfance mais pas dans l'Albatros. Jean Ferrat avait écrit " Nul ne guérit de son enfance" et m'a permis de reprendre cette chanson. On a même signé un contrat à O francs car je n'avais pas les moyens de payer les droits d'auteur. Yves Duteil c'était au début quand je commençais. Quant à Nougaro c'était hélas l'année de sa disparition.
D'ailleurs Jean Ferrat a bercé votre enfance!
Ah complètement! Dès que je l’ai entendu chanter, notamment Aragon, ce fut un émerveillement. On ne peut pas être indifférent. Je me souviens aussi de Georges Moustaki, le premier que j'ai entendu. J'avais des professeurs qui nous avaient apporté "« Le métèque". Ah là là j'étais ébahi, déjà j'aimais les mots…
Refusez-vous parfois de publier certains poèmes? Si oui, pourquoi?
Oui, quand la qualité n'est pas vraiment là. Certains poèmes ne veulent rien dire se contentant d’aligner des mots les uns sur les autres. A l'Académie, un Comité de lecture (deux personnes plus moi) sélectionne les poèmes. C'est rare que l'on ne soit pas d'accord sur le choix d'un poème et cela constitue toujours un coup de cœur. Quand un poème n'est pas bon, je suis certain de le retrouver dans ceux qui sont mis de côté. Mais parfois je suis un peu plus tolérant surtout dans ma propre revue. Il arrive que l'on fasse retravailler l'auteur pour le numéro suivant et cela fonctionne très bien. J'ai besoin de regarder la prosodie, mais également l'émotion qui se dégage. Vous avez des poèmes très classiques qui sont très bien écrits mais sans dégager de véritable émotion … Il faut que je sois touché…
Quel est le ou la plus jeune et le ou la plus âgé que vous ayez publié?
La plus jeune il me semble est une jeune fille qui avait 14,15 ans; elle écrivait très bien. J'ai aussi publié des enfants dans ma revue. Quand un enfant m'envoie un poème, je ne dis jamais non. Le plus ancien, il est toujours là, il a 97 ans. Gérard Laglenne un poète très connu à l'Académie. On a des personnes très anciennes comme par exemple la vice-présidente Marie-Thérèse Arnoux 99 ans. On ne la voit pas souvent mais elle vient régulièrement à notre Assemblée générale. L'an dernier, elle nous avait concocté un poème pour ses 100 ans qu'elle n'a pas encore… Il y a je crois à peu près le même nombre d'hommes et de femmes mais je ne fais pas très attention à ce genre de choses. Cela dit, c'est vrai qu'avant la présence féminine était réduite par rapport à celle des hommes…
Voyez-vous une différence entre la poésie féminine et la poésie masculine?
Je n'en vois pas vraiment. Peut-être les thèmes, mais je ne me rends pas réellement compte. Parfois, une femme écrit peut-être avec davantage de finesse. Mais cela dépend surtout de l'émotion de chacun.
Vous êtes aussi membre de jurys de concours!
Plus maintenant, mais j'ai présidé pendant 5 ans un jury important à Maisons Laffite le prix Calliope, nom d'une muse. Je trouve d'ailleurs que trop de prix existent qui ne valent rien et partout où je peux j'écris que la poésie n'a pas de prix. Nous avons un prix au sein de l'Académie que nous décernerons pour la deuxième fois l’année prochaine.
Vous avez eu vous-même des prix notamment le prix Renaissance!
Oui et je le considère comme un vrai prix car c'est un prix que l'on ne demande pas et l'on ne présente rien pour l'avoir. Je vais vous dire pourquoi je suis réticent aux prix quelquefois. J'ai obtenu mon tout premier prix à 19 ans. Or l’on m'a demandé une certaine somme d'argent que j'ai envoyée et j'ai reçu une belle croix de bronze. Etait-ce réellement pour la qualité de ma poésie ou plutôt pour l’argent? Combien j'ai connu d'associations où l'on donnait le prix à la copine, au copain. Je sais que cela existe toujours.
En vous basant sur votre expérience, quels conseils pourriez-vous donner aux jeunes poètes souhaitant se faire publier?
Faire attention. Lorsque je suis arrivé à Paris à 19 ans, j'ai donc envoyé mon manuscrit à une maison d'édition que je ne nommerai pas et cité sur RTL tous les jours. On me demandait beaucoup d'argent pour me publier mais je n'avais pas les moyens. 6 mois plus tard, on m’a relancé et demandé la moitié de la somme. Je me suis déplacé pour avoir un entretien et l'on m'a affirmé que j'étais un très très bon poète. On me mentait, on évoquait mes grandes capacités, mais ce n'est pas ces qualités là que je rechercherais aujourd'hui dans mes poèmes. Il ne faut pas se faire avoir et il est important de venir à des réunions comme celles que nous organisons le mercredi et le jeudi. Les jeunes poètes peuvent alors nous montrer ce qu'ils font et dans les scènes ouvertes, on se rend bien compte si c'est de la poésie ou pas…
Où faut-il aller pour prendre des cours de poésie?
Nous avons quelqu’un au sein de l’association qui s’en occupe en Bourgogne. Personnellement je n'en serais pas capable, il faut pouvoir le faire. Mais avec elle, cela fonctionne très bien et nous allons d'ailleurs la couronner l'année prochaine. C'est comme pour les ateliers d'écriture, il faut vraiment un enseignement de qualité. J'ai parfois participé pour observer ce qu'il se passait et le résultat est parfois très moyen. Si la personne ne sait pas elle-même écrire un joli poème et qu'elle apprend aux autres, c'est un peu étrange. Mais cela existe et n’importe qui peut faire un atelier d'écriture ou apprendre à faire une poésie…
Les français apprécient-ils la poésie à sa juste valeur?
Oui, elle a bien sa place. Ce sont les médias qui ne la mettent pas en valeur. Dernièrement j'étais à Asnières , j'ai rencontré une amie qui habite en Province et nous sommes allés boire un verre dans un café. Un charmant couple était assis à côté de nous et cette amie qui fait partie de l'Académie leur a demandé s'ils aimaient la poésie. Elle avait un poème d'amour à leur dire. Ces jeunes étaient émerveillés. Les enfants aussi adorent la poésie. Un pays où la poésie est bien considérée c'est le Canada. En France, du fait que la presse n’en parle pas, c’est difficile de vendre , et l’on est beaucoup d'auteurs à donner nos livres.
Quels sont vos souhaits?
J'aimerais bien que l'on me propose une conférence sur la poète Marie Noël, et également sur Renée Vivien. Elle était homosexuelle mais quelle plume! De magnifiques poèmes d'amour… J'ai un projet mais je n'en parle pas de manière très précise car j'avais arrêté à cause du confinement. J'aimerais bien reprendre. Ce serait de créer dans un café parisien tout un dimanche une séance de dédicaces d'auteurs ayant publié chez moi uniquement, avec des animations musicales notamment. Si une dizaine d'auteurs venaient ce serait déjà très bien. Ils pourraient faire venir des amis et créer une véritable émulation… Je souhaite continuer car c'est un domaine qui m'est cher. J'aime ce que je fais et l'édition est devenue un plaisir, une passion. On rentre vraiment dans la vie de l'auteur, dans ce qu'il fait. En lisant un poème de cette manière, on discerne des choses que l'on ne verrait pas en étant simple lecteur. C'est merveilleux…
Agnès Figueras-Lenattier
18:13 Publié dans Interviews | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : interview, poète, édition
samedi, 07 novembre 2020
L’audition DVD
Un film de Ina Weisse
Films du Losange
L’électricité est dans l’air. C’est ainsi que l’on pourrait qualifier l’atmosphère de ce beau film où les émotions fortes pullulent. Sans compter de très beaux airs de musique classique que le violon constamment présent met en relief. Anna Bronsky (Nina Hoss) professeur de violon au Conservatoire croit fortement en Alexander élève dont elle va s’occuper contre l’avis de ses collègues et le préparer à l’examen de fin d’année. . Plus le temps va passer, et plus elle va devenir exigente envers lui, ce qui va provoquer la jalousie de son fils lui aussi violoniste qu’elle finit par délaisser. Tous les comédiens sont excellents et la manière de filmer est agréable, bien construite, avec de temps à autre de brèves scènes un peu hors du sujet principal venant pimenter le scénario. Le stress de plus en plus présent chez Alexander avant le jour J est bien marqué grâce d’une part à la bonne interprétation de l'élève et d’autre part grâce également à l’angoisse d'Anna également bien interprétée par Nina Hoss détentrice du prix d’interprétation féminine pour ce rôle. C’est un film haletant, pas toujours facile à avaler psychologiquement et c’est ainsi jusqu’à la fin. L’on pourrait même dire encore plus lors de la conclusion du film. C’est une fin qui peut laisser certains sur leur fin, mais qui pour d’autres insiste justement avec astuce sur le sujet évoqué et nous le rend encore plus marquant et plus convaincant… On ne peut rester indifférent à un tel film…
Agnès Figueras-Lenattier
13:58 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : violon, audition, stress
dimanche, 01 novembre 2020
Antispecisme
L'animal moral
Editions l'Harmattan
Autodidacte et passionné de philosophie, Romain Steffenoni éducateur de la petite enfance évoque dans son livre " Antispécisme" le droit des animaux comparé à celui des hommes et s'interroge longuement sur la pensée animaliste. Tous les êtres sensibles sont-ils égaux? Peut-on mettre en place une égalité morale entre l'homme et l'animal? Pour étayer son analyse, il se base sur de nombreux philosophes (Platon, Socrate, Nietzsche, Calliclès... ) décortiquant au moyen d'un esprit plutôt critique plusieurs livres traitant du sujet.
Pour lui par exemple, l'origine supranturelle de la morale antispeciste est évidente. Ce livre permettra t-il d'avancer sur le sujet et de mieux connaître ce qui motive les véganes? En tout cas un débat est proposé et libre à chacun d'approuver ou pas la conclusion.
A.F.L
A noter une nouvelle collection " Les cahiers de la Réussite CDLR" créée sur demande de plusieurs associations nationales de Jeunesse et d’éducation populaire. Avec de nombreux correspondants et conseillers à Paris et en province.
Son objectif est de promouvoir la culture générale et le développement personnel dans une optique de
coopération intergénérationnelle et de promotion sociale dans l'esprit de la méritocratie républicaine.
Egalement d'évoquer les valeurs de progrès en France et dans le monde.
21 ouvrages sont prévus pour 2021 grâce au Lien :
https://happyfreebutterfly.wixsite.com/leadership/your-blog/categories/les-cahiers-de-la-r%C3%A9ussite
http ://www.Lauvah.com
edition@lauvah.com
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