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lundi, 11 octobre 2021

Taha Mansour

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Au Théo théâtre et à La Comédie Saint-Michel se jouent  en ce moment deux spectacles interessants : « La mystérieuse histoire de Thomas Polgarast"  (Théo Théâtre jusqu'au 15 décembre et reprise en 2022), un spectacle de mentalisme où les personnages de la pièce sont choisis parmi le public. Taha Mansour l’auteur en avait conçu un autre avant, intitulé « L’effet papillon « classé meilleur spectacle de magie, mentalisme qui se joue également en ce moment à La Comédie Saint-Michel jusqu'au 2 février . Taha Mansour a plusieurs cordes à son arc. Ingénieur de formation, mentaliste, il suit des managers en entreprise et donne des cours de gestion en entretien d’embauche dans différentes écoles. Il adapte aussi les techniques de mentalisme et d’hypnose en préparant à la prise de parole en public. Il s’est également formé à la musique en chant particulièrement. Il explique ici quelque peu son parcours…

 

 

Vous êtes mentaliste. Qu’est-ce qu’un mentaliste et quelle formation faut-il suivre?

Il existe plusieurs définitions. Pour moi, c’est un mélange de différentes techniques psychologiques destinées à lire dans la pensée des gens, influencer, prédire des événements. On peut dire que finalement c’est la magie de l’esprit. Côté formation, je suis un peu autodidacte. Lycéen, j’ai commencé à beaucoup m’intéresser à la psychologie, au comportement humain, et à essayer de comprendre le langage non verbal des gens. Puis j’ai étudié longtemps l’hypnose, les techniques de PNL, tout ce qui tourne autour de la cognition et j’ai ensuite mis en pratique le côté théorique. J’ai mis plus d’un an à obtenir des résultats. Au début, je n’y parvenais pas du tout. Ayant fait un peu de magie, ça m’avait aidé pour rencontrer des gens, mais les pensées que je leur attribuais étaient inexactes. Je leur disais alors qu’on allait faire autre chose. Je testais plusieurs choses, puis avec le temps, j’ai tiré des leçons de mes erreurs et ça a fini par fonctionner…

 

Quelle sorte d’hypnose avez-vous apprise ?

J’ai d’abord suivi des conférences se rapportant à l’hypnose dédié au spectacle, et ensuite j’ai étudié toutes formes notamment l’hypnose thérapeutique, j’ai lu des livres, et au fur des années, je me suis entraîné et ai expérimenté sur différents modèles psychologiques. Et je suis en train de passer une certification d’hypnose thérapeutique.

Avez-vous été vous-même hypnotisé ?

Oui, et je suis très réceptif !...

 

Un mentaliste est par définition un manipulateur!

Oui en quelque sorte, mais un manipulateur gentil. Quelque chose me tient particulièrement à cœur, c’est le côté honnête ou pas. Ainsi, je fais beaucoup d’influence et il existe une différence avec la manipulation. Quelqu’un qui influence, c’est quelqu’un qui va être loyal avec la personne en face. Les spectateurs qui viennent voir un spectacle de mentalisme savent qu’ils vont être manipulés. C’est un peu  le contrat établi au départ. Alors que les manipulateurs dans la vraie vie vont essayer de modifier la pensée des gens et autres  à des fins personnelles. Cela fait naître beaucoup de mensonges, de déceptions, de trucages.

 

Vous avez également une formation dans la musique! Et en comédie ?

Oui et mon expérience musicale m’a beaucoup aidé quand j’ai débuté dans la comédie. En effet, de nombreux concepts se traduisaient d’un monde à l’autre et je me suis beaucoup amusé à trouver des liens entre le chant et la comédie. J’ai eu plusieurs professeurs de musique au lycée qui m’ont accompagné et stimulé ; j’ai fait partie d’une chorale. Je chante depuis que je suis tout petit et j’interviens dans des scènes ouvertes, lors de concerts. Surtout de la musique pop rock. J’ai fait pendant longtemps de l’improvisation théâtrale et j’en fais toujours, ce qui me donne de la présence sur scène. C’est la première fois pour «  La mystérieuse histoire de Thomas Polgarast que je compose. J’ai écrit la musique et les paroles de la chanson que j’interprète…

 

Avant d’écrire «  La mystérieuse histoire de Thomas Polgarast, vous avez conçu un autre spectacle « L’effet papillon qui a obtenu un vrai succès !

C’est mon premier spectacle et également ma première expérience en tant que comédien. J’ai mis à peu près trois ans à l’écrire car en parallèle je faisais une prépa et disposais de peu de temps. La première fois que je l’ai joué c’était en 2017 dans le théâtre de mon école d’ingénieur et l’année d’après, je l’ai proposé au sein de salles parisiennes. Je suis franchement content et je ne m’attendais pas à un tel retour. Il a 10 sur 10 sur Billet Réduc et a été éligible en 2020 aux Petits Molières. Mais avec le Covid, la saison a été annulée. La cérémonie devrait avoir lieu cette année et je verrai si le prix a été remporté ou pas…

 

Comment avez-vous conçu ce spectacle ?

Lorsque j’ai commencé à être de plus en plus à l’aise avec le mentalisme, j’ai découvert le phénomène de l’effet papillon qui m’a fasciné : de petites choses se passent autour de nous qui ont un grand impact. Ce qui m’avait marqué c’est que ce thème revenait souvent dans les films ou dans l’art mais qu’il était surtout axé sur l’événement final, la tornade et non pas sur l’événement initial le petit papillon. J’ai alors pensé « Et si dans notre vie de tous les jours on était de petits papillons qui battaient nos ailes et que l’on ne se rendait pas compte de l’immense impact que l’on avait sur le monde. A partir de ce phénomène là, j’ai créé le numéro central du spectacle, un numéro où je prends différentes personnes avec différents choix en créant un peu le chaos. Mais au final, tout ceci nous mène à une seule sortie, celle qui avait été prédite à l’avance… Le but du spectacle était de partager des messages et des sens poétiques qui me touchaient beaucoup. Dans notre société d’aujourd’hui, on est tellement focalisé sur nos tâches, nos tâches que l’on ne prend pas le temps d’avoir du recul sur la vie et l’on passe à côté d’énormément de petis mystères se déroulant dans notre quotidien. C’est un peu le message final du spectacle, ces petites choses que certains appellent des ondes, d’autres des énergies , ou encore des coïncidences. Quoi qu’il en soit, cela me provoque un sentiment d’émerveillement et le plus important pour moi ce n’est pas la raison pour laquelle ça existe mais le fait que cela nous fasse vivre et agir…

 

Dans «  L’histoire mystèrieuse de Thomas Polgarast, contrairement à « L ’effet papillon », vous jouez un personnage et la séance d’hypnose est plus travaillée. Quant à la musique, elle  est belle et accentue bien l’atmosphère que vous avez voulu dégager !

Oui.  Mon ami Antoine Piolé que j’ai rencontré en 1ère année d’école d’ingénieur est un passionné de musique et très compétent. Lorsqu’il m’a montré ce qu’il faisait, j’ai tout de suite compris que son style conviendrait parfaitement à mes spectacles. Il a aussi travaillé sur « L’ effet papillon ». Je lui ai expliqué l’histoire que je voulais raconter, les sentiments qui prendraient forme. Il m’a proposé quelque chose, nous l’avons peaufiné ensemble et nous nous entendons super bien…

 

 

Dans ce spectacle au Théo Théâtre, vous invitez des spectateurs à venir sur scène et vous raisonnez en fonction de leur attitude, de leurs gestes. Dans la vraie vie vous fiez-vous ainsi au comportement silencieux d’une personne pour vous faire une première idée sur sa personnalité ?

Absolument. C’est quelque chose que j’utilise beaucoup. Pas une intuition psychique, mais  l’intuition d’un expert qui en cas de problème se fie à son savoir. Une espèce de petite voix le guide et lui indique ce qu’il faudrait faire. Effectivement, quand je vois quelqu’un, des pensées le concernant me viennent à l’esprit. Celles-ci sont quelquefois erronées, mais dans la majorité des cas, j’arrive déjà à avoir un excellent point de départ qui en approfondissant ma vision de cette personne va me permettre de l’influencer et de l’emmener où je souhaite…

Agnès Figueras-Lenattier

dimanche, 25 avril 2021

Michel Pastoureau

interview,tennis,michel pastoureauLes couleurs ont une réelle influence sur les zones de notre cerveau mais l’impact diffère si ce sont des couleurs froides ou chaudes. Ainsi, les couleurs froides comme le bleu sont apaisantes alors que le jaune couleur chaude est censée apporter une certaine énergie. En fonction de la couleur perçue, le cerveau secrète un certain nombre de messages qui vont agir sur l’organisme. Ceci est valable dans tous les domaines notamment dans les médecines traditonnelles chinoises et indienne. Là en l’occurence, il s’agit de sport et plus particulièrement de tennis.

 A Winbledon, le plus vieux tournoi du circuit, la couleur est proscrite depuis 1963. Il consacre ses champions dès 1877. On peut y voir les uniformes violet et verts des ramasseurs de balles, le gazon si vert, les costumes et les robes de gala. Les vêtement de tennis pour hommes apparaissent vers 1874-1876. Ce sont les  mêmes que pour le cricket. Seuls les hommes pratiquent le tennis : pantalon de toile, ceinture large de soie, chemise à manches longues, chapeau, chaussures de toile et cravate obligatoire avec le thé entre deux changements de côté. Le blanc  devient obligatoire dans les années 1890. Le short  apparaît seulement en 1933 avec Bunny Austin. Pas de blanc mais des rayures. Avec l’apparition de la compétition en 1877 les tenues changent. Lacoste en 1920 se lance dans le textile arrêtant la compétition pour raison de santé. Au tournoi de tennis des jeux de Londres à Winbledon, le blanc n’est pas de rigueur. 172 joueurs arboreront les couleurs de leur pays avec le rouge pour Federer «  Ce sera un peu bizarre mais ça ne me déplaît pas." La balle de tennis telle qu’elle est aujourd’hui a vu le jour en 1978. Certains joueurs et joueuses ont eu maille à partir avec la couleur : 

Eugénie Bouchard a eu  une pénalité car une bretelle de son soutien gorge trop noire dépassait.  Deux ans plus tard, le coach de Benoît Paire a été  prié de quitter le cours d’entraînement car  il portait une veste de survêtement noire.  Des joueurs et joueuses se sont distingués comme Ann White en 1985 avec sa tenue transparente en lycra blanc, Agassi en 1992 mode grunge. .   . Navratilova  à l'Open d’Ausrtralie  porte une robe éclatante et fleurie de Ted Tinling . Je l'aimais explique Navratilova car elle me ressemblait." S'incline contre Chris en une belle demi-finale. En 1981 devient plus féminine : " J'aimais bien jouer devant la foule des spectateurs dans mon nouvel ensemble orange avec un peu de couleur sur les pommettes. Maquillée, blonde, avec des vêtements qui m'allaient bien. J'aimais bien mon nouveau look."

J’ai eu une longue conversation avec Michel Pastoureau le grand spécialiste des couleurs qui s’exprime sur le sujet de manière brillante et précise. Ecoutons le parler d’un domaine qui visiblement le rend heureux quand il en parle et sur lequel il est incollable. Mais avant voici quelques témoignages de personnes qui donnent leur avis en fonction de leu vie et de leur personnalité. Voici tout d'abord l'argumentaire de    Alexandre Katenidis  qui a lu beaucoup de ses livres et qui donne ses impressions. Il fait des critiques sur le site " critiques libres" sous le pseudonyme de Veneziano. 

A propos des ouvrages de Michel Pastoureau, j'ai apprécié leur enrichissement historique, l'importance donnée à la charge symbolique de chaque couleur, aux conséquences psychologiques sur leur emploi. Ces livres me sont apparus très porteurs d'enseignements, et ils montrent l'apport "psycho-sociologique" d'un phénomène qui ne peut pas totalement rester rationnel. Comme réserve partielle, j'aurais apprécié un prolongement plus appuyé vers l'époque contemporaines, avec l'emploi des couleurs dans l'art contemporain, la publicité, les dessins animés, par exemple.

Sur ma perception des couleurs, j'ai toujours connu une préférence pour le jaune et l'orange, et une relative déception subséquente à la faible popularité de ces teintes. J'apprécie également l'ensemble des bleus, le violet vif, et avoue un attrait bien moindre pour le noir et les couleurs sombres, outre le rouge Hermès.
Je porte du bleu marine, du gris anthracite et du noir, par convenance sociale, regrettant le peu de choix chromatique réservé aux hommes en termes de choix de couleurs dans le domaine vestimentaire.
Je suis peu sportif et l'effort ne diffère pas des autres moments de détente ou extra-professionnels, pour le choix des couleurs, portant vers les couleurs vives et claires.
 

Trini Derbesse vient des Philippines. Elle est très croyante et retraitée. Elle  fait partie d’un groupe opérant bénévolement pour la paroisse Saint-Albert dans le 13ème arrondissement de Paris :

 

Croyez-vous à l’influence des couleurs :

Oui. J’adore le bleu depuis toujours; ça me donne un effet calmant. J’aime le blanc aussi car je trouve que c’est la couleur qui me va le mieux. Le vert ça va aussi. Le jaune et surtout le rouge. A chaque fois que je porte du rouge, j’ai du succès. Mais on ne peut pas porter cette couleur tous les jours. D’autant plus que je n’aime pas attirer le regard à chaque fois. Mais pourquoi pas les jours où il fait beau et où je suis en forme. A une époque, je portais beaucoup de blanc mais un peu moins maintenant si j’aime toujours beaucoup cette couleur. Je n’en mets pas l’hiver. J’aime beaucoup le jaune et j’avais une très robe de cette couleur quand j’avais 8 ans. Quand je vois ma tante, elle m’évoque toujours ce moment. 

 

 

Pourquoi le bleu? 

A cause du ciel et de l’océan. Lorsque je vais à Cannes, dès que j’arrive je regarde le bleu de la mer et ça a déjà un effet sur loi. La première nuit c’est déjà bien puis au fur et à mesure la mer est de plus en plus présente. La lumière envahit toute la vue. Dès que je suis en bas; c’est l’espace infini…

 

Et le blanc?

C’est beaucoup par symbolisme à cause de la Vierge Marie donc de la pureté. Mais rien de plus. Je regarde les choses sur le plan psychique et psychologique et en même temps pour le visuel. Le blanc c’est la lumière aussi. Dès que le soleil se lève tout change. 

 

 

Et quand vous pensez à Dieu quelles couleurs vous viennent à l’esprit?

Le blanc et le bleu; pas d’autres couleurs.

 

Et le rouge du sang du christ?

Je ne sais pas. J’ai été tellement habituée à voir sur le christ sur la croix depuis mon plus jeune âge. Et le rouge ne m’est pas apparu en fait. C’est plutôt l’effet du christ crucifié que le sang.   Il y a peut-être un de violence avec le rouge. Quand j’étais petite, dans la rue je voyais des enfants qui se battaient et dès qu’il y a du sang ça me glace un peu. 

 

Existe t-il pour vous une couleur de la souffrance?

Le noir. C’est triste, ténébreux. Ce que je regrette un peu c’est qu’en France en hiver tout est noir. C’est une couleur que je n’aime pas, mais j’en mets de temps en temps pour changer. Pour le Vendredi Saint par exemple j’étais presque toute en noir. J’avais juste un tee-shirt avec un petit peu de blanc. Il faut un peu doser pour le noir. J’ai été étonnée de la remarque d’une dame âgée de la paroisse qui m’a fait la remarque que j’étais habillée en noir. Ça veut dire que j’ai l’image de quelqu’un qui ne porte pas beaucoup de noir. 

 

 

Les gens qui vont à la messe quels couleurs portent t-ils? 

Le bleu marine, le gris et le noir. Les gens qui portent des couleurs sont rarement français. Il y a des Africains, des Asiatiques. Je connais une indonésienne qui adore le rouge et qui en en porte tout le temps. J’aime les couleurs suggérées mais pas vraiment éclatantes.

 

Pour la couverture de la Bible avez-vous une couleur préférée?

Non, ça m’est égal. Ce qui compte c’est ce que je lis et le message qui en découle. 

 

 

Vous dites ne pas trop aimer l’orange car vous l’avez beaucoup porté!

Lorsque j’étais jeune, je suis allée exprès acheter du tissu et je me suis fait une robe orange que j’ai beaucoup portée. Et je me suis lassée. Certains oranges sont violents, d’autres plus doux. La couleur mandarine par exemple ça me va et ça donne un peu de lumière. Le jaune j’aime beaucoup et il m’arrive d’acheter des vêtements juste pour la couleur. 

 

 

Etes-vous sensible à la grisaille parisienne?

Je suis habituée, mais comme je suis tellement dans ls spirituel que je vois la lumière dans ce que je vis. Et puis aussi avec les gens que je fréquente. On est tous dans la même direction; ça me porte. Et puis avec toutes mes activités, je n’ai pas le temps de penser à la grisaille parisienne.

 

 

Aux Philippines quelles sont les couleurs les plus répandues?

On adore la variété et les couleurs. On a été colonisé par les Espagnols qui étaient proches du Maroc. Les Philippines ont été aussi administrées par le biais du Mexique qui influence beaucoup notre pays. 

 

Pour les danses philippines?

Pas de couleurs particulières mais du multicolore. Au lieu de porter une couleur pour un costume on utilise plein de couleurs alors qu’en France c’est très rigoureux. Chez nous ce sont un peu des couleurs de la fête. 

 

 

Quand vous chantez quelle couleur adoptez-vous?

Si je dois chanter Ave Maria pendant la fête de la Vierge, je vais me mettre tout en blanc. Ou bien un blanc avec une touche de bleu… 

 

 

Quelle est la couleur de l’enterrement aux Philippines?

On se met en noir, de plus en plus de noir et de blanc. C’est devenu à la mode de porter du blanc en Asie, mais à mon époque c’tait très strict et tout était en noir. 

 

 

Côté sport, quel est le sport le plus important? 

Nous sommes des champions de boxe avec Mani Pacquiao qui est très connu. Il y a quelques années j’étais à New York et je suis allée faire une course. Quand on a vu que j’étais des Philippines on m’a parlé de ce boxeur. Il est tellement connu qu’il a présenté sa candidature pour être sénateur et il a été élu. Il continue à poser quand cela se présente. 

 

 

Vous avez fréquenté des metteurs en scène philippins? Ont-il des habitudes vestimentaires?

Ils ont une tenue noire spéciale quand ils vont à Cannes. Ils se distinguent des acteurs et actrices en s’habillant tout en noir ou tout en blanc. 

 

 

Et au Canada?

Les gens viennent d’un peu partout. En Amérique du Nord et aux Etats-Unis, la population est multi-raciale. Beaucoup portent des couleurs et c’est plus simple qu’en France où la rigueur est présente. Il y a un style et aussi un choix de couleurs. Au Canada, on regarde moins comment on s’habille. Les gens sont plus décontractés. Je suis moins regardante pour m’habiller qu’ici. Les gens sont choqués quand tu mets des couleurs qui flashent. 

 

Pour finir parlons de votre silhouette. Vous n’êtes pas très grande. Cela joue t-il dans votre manière de vous habiller?

Oui, j’essaye de porter une couleur toute droite sans trop de contrastes. Par exemple je ne mets pas du bleu et du rouge… 

 

Georges fonctionnaire 
Vous faites des arts martiaux depuis 30 ans. Quelles sont les couleurs spécifiques de ces disciplines?
Le blanc et le noir lorsque l’on a dépassé une certaine initiation. Quand on porte une ceinture noire, cela veut dire que l’on a été initié à un art martial. Il y a l’alpha et l’oméga. L’alpha c’est le blanc pour les débutants qui peut dans certains arts martiaux être la couleur de la maîtrise totale. Quand on est dans le noir; ça veut dire que rien n’est clair, que l’on maîtrise un peu l’art martial mais que l’on n’est pas encore abouti. Le blanc peut être à la fois l’alpha et l’oméga. 

 


Le noir ne représente donc pas le grade le plus haut!
Ca dépend des arts martiaux, au judo c’est le rouge. Ce sont les grands maîtres qui sont en rouge, une ceinture rouge. Je ne sais pas s’ils retournent au blanc. 

 


Quelles sont les tenues pour les arts martiaux? 
On porte une espèce de pantalon toujours bleu  le hakama pour l’aïkido et les broderies. Le haut pour les grands maîtres c’est blanc. 

 


Et au début que portiez-vous? 
J’avais une ceinture blanche avec un pantalon blanc et une veste blanche. C’est ce que portaient les paysans dans les rizières. Un pantalon qui monte jusqu’aux mollets et une veste dont les manches ne sont pas trop longues qui se terminent juste avant les poignets. Et quand on pense que tu es capable de poursuivre la discipline on t’autorise avec la ceinture blanche à porter le hakama. Ça correspond à la ceinture bleue au judo. L’équivalence entre chaque art martial ce sont les kyu. Le premier grand dam c’est le grade des débutants. Comme si tu avais appris à lire et que maintenant tu lis. Tu restes débutant tant que tu n’as pas quelques années de pratique. Le blanc signifie que tu as fait un tour. 

 


Pourquoi ces deux couleurs là? 
 Le blanc c’est la purification, le noir l’obcur. Plus tu montes, plus c’est difficile jusqu’au moment où tu a atteint un tel niveau que tu peux ouvrir ton école et faire des livres sur la discipline. Cela fait 30 ans que j’en fais et suis 3ème dan. Dans les arts martiaux, il y a les plus et les moins. Les plus se rapportent aux dans et les moins aux kyu. Les plus signifient que tu maîtrises les fondations de la discipline et que tu as pris conscience de la puissance respiratoire.  Le premier dan s’adresse à quelqu’un qui a saisi les fondations de l’aïkido et est capable de les mettre en pratique à une vitesse disons raisonnable. Avoir son 2ème dan c’est être capable de maîtriser la technique avec une vitesse un peu plus véridique.  Le 3ème dan implique que tu puisses dégager de l’énergie qui vient de ton ventre lorsque tu fais des projections.  Quant au 4ème dan cela représente une maîtrise technique plus élaborée avec des connaissances étendues. Et puis tu maîtrises également bien les armes. Kawashi maître japonais au judo a compris que pour les Occidentaux, il fallait créer des paliers et inventer un système basé sur l’éducation nationale. . Et que comme nous sommes cartésiens, il fallait nous faire progresser par étapes et successives. C’ est la raison pour laquelle il a créé des couleurs qui n’existaient pas au Japon. Il y avait la ceinture blanche, après une marron et après la noire. Kawashi  a crée en plus la jaune, l’orange, la verte, la bleue et la marron. C’est un traitre au Japon. Il s’est adapté à l’esprit européen alors que les Japonais estimeront toujours que le judo doit conserver son esprit japonais; cela fait partie de la culture japonaise. C’est considéré par certains orientaux comme une hérésie. C’est grâce à cette initiative que la compétition a pu se mettre en place dans le judo. On l’a vu avec David Douillet qui a remporté les jeux Olympiques face à un japonais et après Teddy Riner. J’ai connu un maître japonais qui après la ceinture noire est repassé à la blanche. C’est une ceinture blanche un peu plus épaisse, plus large. Ça veut dire qu’il a fait une spirale, un tour complet. 

 

Et le 4ème dan?
Il y a plus d’examens techniques et c’est une reconnaissance de ce que tu fais par la fédération. Après, cela consiste à aider la Fédération, à faire partie des jurys d’’examens. Avant d’atteindre l’initiation il faut du temps et il faut compter une année pour un kyu. Comme il y en a 6, il faut compter 7 ans pour être ceinture noire. C’est pour les arts martiaux modernes.

 

Dans la vie de tous les jours cette évolution vous porte t-elle?
C’est compliqué. L’aikïdo c’est destiné à faire évoluer l’être humain, les arts martiaux sont soi-disant faits pour éduquer l’homme, pour qu’il s’améliore. Donc si l’on parle d’éduquer l’homme, on parle d’école d’art martiaux. Une école où en fait il n’existe pas d’unité et où chaque professeur fait sa sauce dans son coin, prêche le bon enseignement à sa manière. Donc progresser au sein d’un club n’est pas évident. Un club ne consiste pas seulement à évoluer techniquement. Il doit aussi s’occuper des autres notamment des débutants, les aider à progresser. Cela implique d’être altruiste, de faire partie d’un jury d’examens pour faire passer les kyu ce qui demande du temps. Et pendant que tu t’occupes des autres tu ne progresses pas ou moins vite. De plus, il n’existe pas de concertation entre les professeurs pour donner des cours de haut niveau. Les gens qui possèdent un haut niveau sont peu nombreux et on ne peut pas faire spécifiquement des cours de haut niveau si seulement trois haut gradés sont présents. Des réunions de professeurs c’est possible mais cela demande encore plus de disponibilité si l’un habite à Paris, l’autre à Antony… Je ne suis pas dans une secte mais c’est devenu une entreprise. Napoléon l’a dit «  « Une association est une entreprise ». Je fais progresser les gens , je progresse à mon niveau. J’ai les genoux un peu abîmés à cause de l’arthrose et c’est vrai que si j’étais bien pourtant, je progresserai plus vite techniquement. Il arrive aussi un moment où il y a la vie professionnelle, privée, les loisirs et il faut faire la part des choses. J’ai également fait une introspection sur moi-même. Je me suis demandé ce qui a déclenché mon envie de faire de l’aïkido. En fait, je cherchais un sanctuaire de paix, à faire la paix avec moi-même car j’avais été déçu par des gens. Ou parce que j’étais dans un milieu où gravitaient des gens peu scrupuleux. Je sortais du milieu scolaire où j’avais fréquenté des potaches qui ne me plaisaient pas du tout, et le milieu professionnel où j’évoluais n’englobait pas forcément des gens altruistes. En tout cas, je ne pense pas que les arts martiaux soient une école de la vie même s’ils détiennent des fondations très hautes basées sur la loyauté, sur le code des samouraïs avec la politesse, la piété, la courtoisie, la fidélité. Un code par rapport aux autres maîtres qu’ils défendaient à l’époque et qui est toujours présent. Mais est-ce vraiment une école de la vie. Pas sûr. Est-ce que les grands maîtres ont réellement changé? Je pense qu’ils ont développé au sein d’eux-mêmes un instinct de conservation, mais ont-ils moins de défauts? L’instinct de conservation compense un peu leurs défauts et ils ont acquis une certaine souplesse, et plus d’anticipation . Pour ma part, j’ai acquis plus de souplesse avec les gens. Quand j’ai commencé j’étais habité par une petite misanthropie même si je ne suis pas quelqu’un de méchant ni d’agressif. Mais les vraies valeurs que je cherchais sont trop compliquées à mettre en oeuvre pour chaque école. C’est de plus en plus compliqué de faire évoluer les gens lorsqu’ils ont atteint un certain niveau. Ce que j’ai remarqué chez les gens qui pratiquent l’aîkido, c’est leur côté asocial. Je connaissais une femme assez haut gradée qui venait aux repas annuels de fin de saison. Il fallait tout le temps qu’elle vienne avec son petit copain. Et 95% du temps, elle ne parlait qu’avec lui. En revanche on trouve peu de caractériels. 

 

Vous pensez  qu’ils font de l’aïkido car au départ ils avaient ce côté asocial?
C’est très possible. Je connais quelqu’un d’hypocondriaque. Il n’ouvre jamais son téléphone car il a peur des ondes pouvant le rendre malade. Par contre en 29 ans d’aîkido, je n’ai jamais rencontré quelqu’un  de mysogine, ou qui rejetait les femmes. C’est un point positif. 

 


Les femmes aussi ont ce côté asocial?
Oui. Il y a cet instinct de protection destiné à se protéger. C’est vrai que quelqu’un de timide qui va affronter quelqu’un lors d’un combat va devenir plus courageux et sans doute moins timide. Mais jusqu’à quel niveau?  Personnellement, l’aîkido m’a rendu plus volontaire, et m’a quand même permis d’aller au devant des problèmes. 

 

Vous vous intéressez au surnaturel. Quand on parle de ce domaine, y a t-il des couleurs qui vous viennent à l’esprit plus particulièrement?
Le rouge. Si je mets trop de rouge, je peux devenir agressif, colérique. Si je mets du bleu, je me protège beaucoup. Pour moi, c’est une couleur de protection, le jaune  est une couleur de lumière mais je n’en mets pas souvent. Sinon je vais devenir un peu mégalomane. 

 

Et les couleurs susceptibles de jeter un mauvais sort?
Je ne suis pas sûr. Le noir protège des mauvaises influences; les banquiers y ont beaucoup recours. Mon ancienne banquière en portait tout le temps. Les prêtres aussi pour ne pas être influencés par les paroles des autres s’habillent en noir. Les Touaregs sont tout le temps en noir.  On ne les verra jamais en blanc. car c’est le noir qui les protègerait des rayons du soleil.  Je connais beaucoup de gens qui reçoivent du personnel qui sont en noir. Pour moi, la couleur de la communication c’est l’orange. D’ailleurs lorsque l’on joue aux cartes la couleur du facteur, c’est l’orange. C’est le valet de carreau. On t’apporte de la communication. On met de l’orange quand on est altruiste. 

 


Quelle est la ou les couleurs auxquelles vous pensez quand vous évoquez les hommes politiques?
Cela me fait penser à François Mitterrand qui dans le film de Georges Benhamou «  Le promeneur du champ de mars » disait que la couleur de la France c’était un gris couleur lavande. Chaque pays a sa couleur et pour moi la couleur de la France c’est le gris. 

 

Vous vous  intéressez aussi aux hommes politiques. Il paraît que Trump a souvent une cravate rouge. Qu’est-ce que cela vous inspire?
Il se met souvent en colère. Quelque part, c’est un négociateur et le rouge c’est la couleur de celui qui fonce. Face à la fermeture de la Corée, il leur est un peu rentré dedans.  C’est le seul président des Etats-Unis à avoir été invité en Corée du Nord. Il en impose et donne des coups de poing sur la table. Dans l’armée, les saints-cyriens sont toujours en pantalon rouge, c’est pour impressionner. Ils ont un costume qui impressionne.  En judo, il y a beaucoup de gens qui se blessent et qui sont obligés d’arrêter. En aïkido, il n’y a pas de compétition donc on se blesse moins. J’ai donné des cours à un judoka ceinture noire. Pourquoi faisait-il du judo? A cause de la compétition. Il avait un bureau de direction. Les arts martiaux sont faits pour utiliser les valeurs qu’ils prônent dans la vie de tous les jours et demandent une recherche personnelle de tous les jours. C’est un travail sur soi. Cet homme aimait les valeurs de la compétition dans le judo, et pouvait les transmettre dans la vie de tous les jours.  Mais le jour où il n’a plus pu faire de compétition, il est venu à l’aïkido pour acquérir d’autres valeurs et mettre en application une technique basée sur la droiture, la position des corps basée sur la respiration, le fait de garder ses distances. Mais il recherchait la compétition et l’on a arrêté.  La compétition existe aussi dans les entreprises , dans les start up. Il règne beaucoup de compétition dans les sociétés de service face aux autres entreprises. Pourquoi? C’est possible que l’entrepreneur qui  reçoit recrute en interne. Il va chercher le meilleur parmi les prestataires.  En aïkido, il n’y a pas de compétition; quelque part c’est une lacune. Mais en ce qui me concerne ça va peut-être m’avantager par rapport à mon poste de fonctionnaire où la compétition est moins rude… 

 

 

Jocelyne 

 

 Aujourd’hui, vous portez une veste rouge. Est-ce un hasard ou croyez-vous à l’influence des couleurs sur l’être humain ?

Non, pour moi ce n’est pas du hasard et le rouge représente la couleur de l’énergie. Quand je me sens fatiguée instinctivement, je mets du rouge. On sent les choses à l’intérieur de soi. Normalement, le rouge se porte en bas du corps car c’est une couleur qui correspond au chakra racine qui se trouve au niveau du périnée. Mais ça me fait du bien quand même… Même si l’on n’y croit pas, les couleurs jouent sur notre humeur. Les gens qui choisissent certaines couleurs le matin, même s’ils n’y connaissent rien et ne savent pas l’exprimer, ont besoin de cette couleur sur l’instant. On est né avec selon moi, et l’on est en liaison avec les couleurs plus ou moins tout au long de sa vie.

 

 

Que pouvez-vous dire sur votre rapport avec les couleurs ?

Quand j’étais plus jeune, il y avait des couleurs comme par exemple l’orange que je ne supportais pas. Et maintenant, ce n’est plus le cas. J’ai dû résoudre certains problèmes car les couleurs correspondent à des organes vitaux. L’orange correspond au système de reproduction le bas ventre et se rapporte au plaisir aussi bien sexuel qu’alimentaire. Tous les plaisirs. Je devais avoir un blocage de ce côté-là que je suis arrivée à surmonter.  Je me suis même achetée un ciré orange que je porte souvent lorsque je vais voir ma sœur à Cabourg et je suis bien dedans…Avant, je n’aurais jamais pu…C’était la même chose pour le vert, qui correspond au chakra du cœur, symbolisant l’ouverture, l’amour. Je ne pouvais pas mettre de haut vert. Je m’étais achetée plus jeune un beau chemisier vert et je ne l’ai jamais mis. Je ne sais pas exactement ce que j’en ai fait, peut-être l’ais-je vendu. Je ne sais pas vraiment pourquoi. A l’époque, je n’étais branchée comme maintenant. Quoi qu’il en soit, là aussi c’est bon actuellement. Cela prouve que l’on avance et d’un certain côté c’est rassurant. C’est comme une séance de psychothérapie, on un éveil de conscience.

 

 

Il n’y a donc plus aucune couleur que vous ne supportez pas !

J’ai encore du mal avec les hauts noirs. Beaucoup disent que ce n’est pas une couleur mais pour moi si. Moi qui aime bien communiquer ; je me sens enfermée.  J’ai une voisine plus jeune que moi, mais je ne pense pas que ce soit une question d’âge qui s’habille toujours en noir de la tête au pied. En plus, elle a de longs cheveux très noirs. Je le connais un peu mieux maintenant, et elle ne va pas bien du tout aussi bien physiquement que psychologiquement. Elle ne sait sans doute pas faire autrement. Ma fille avant s’habillait beaucoup en noir. Et depuis qu’elle est devenue maman, elle met davantage de couleurs. Un haut rouge, un beau vert… Il me semble que lorsque l’on est un peu renfermé, on porte du noir. On est comme dans une armure et on a l’impression que rien ne passe. C’est aussi la couleur du deuil, mais heureusement on en sort un peu ; tant mieux…  Il existe également des phénomènes de mode et dans les magasins parfois c’est tristounet. Beaucoup de couleurs sombres, noires, marrons. Je ne me vois pas m’habiller tout en marron, tout en gris, j’ai besoin de couleurs plus gaies. Le gris d’ailleurs ne correspond à aucun centre d’énergie et peut être le reflet d’une maladie. J’aime bien les bracelets de montre rouge. Mais la prochaine fois j’en achèterai un en métal, car avec la transpiration, il s’use assez vite…

Les chakras sont représentés par les couleurs de l’arc en ciel !

Oui, et par les notes de musique de la gamme de sol. On en a sept connus mais paraît-il qu’il en existe d’autres. Ils ont tous un rôle distinct jouant directement sur notre physique, notre système nerveux, notre comportement et nos émotions. Pour que les énergies circulent bien, ils doivent être ouverts et en parfaite synergie.  Le 1, le chakra racine  (jambes, pieds, système osseux) est représenté par le rouge, le deux le chakra lombaire (zone lombaire, abdominale, système de reproduction)  par l’orange. Le trois, chakra du plexus solaire (zone du plexus solaire) par le jaune la belle couleur du soleil. Lorsque l’on met du jaune, j’en mets rarement ; c’est que l’on rayonne, c’est magnifique.  Le 4  le chakra du cœur (zone thoracique) par le vert, le 5 chakra de la gorge (gorge, bras et mains) par le bleu ciel, le 6 le chakra du front (zone du visage) par l’indigo et le 7 le chakra couronne par le  mauve/ blanc.

 

On a chacun une aura et des couleurs à l’intérieur de soi ! Mais comment le savoir ?

Quelquefois quand je me concentre et que sur mes mains se profile une couleur un peu sombre, je vois un petit peu de verre. Cela veut dire qu’on possède cette couleur verte de guérison. On a tous en soi ce genre de choses même si c’est plus ou moins développé d’une personne à l’autre. Il paraît que les couleurs auriques changent constamment selon notre état d’esprit. C’est ce que disent les bouddhistes qui au fur et à mesure de la journée changent d’humeur. Quelquefois ce sont mes pieds qui dégagent du jaune...

 

 

Le vert c’est la couleur de la guérison n’est-ce pas ?

Contrairement à ce que l’on dit, l’amour n’est pas un sentiment ; c’est une énergie très puissante de guérison qui correspond au vert. D’ailleurs, on dit souvent que les gens ont les mains vertes et ce n’est pas par hasard. Ma fille par exemple a cette particularité. Lorsqu’elle est partie en vacances, je me suis occupée de ses plantes. Celle-ci se sont tout de suite portées beaucoup mieux quand elle m’a remplacée. Elle a une énergie guérison dans les mains, l’énergie de l’amour.

 

 

Le jaune est une couleur qui n’est pas très aimée !

A une époque, c’était une couleur assez répandue et elle revient un peu à la mode. Ne porter que du jaune n’est pas facile. L’autre jour j’ai vu une robe jaune avec de petites fleurs en magasin, qui me plaisait bien. Je l’ai mise devant moi, elle était magnifique, et pourtant je n’ai pas pu l’acheter. Elle ne me correspondait pas, ; comme quoi les couleurs ont bien une influence…

 

Au niveau des éléments, vaisselle ou autres avez-vous des couleurs préférées ?

J’avais cassé une assiette verte appartenant à ma fille et je lui en ai racheté. Elle n’en a pas voulu, j’en ai donc hérité et cela me fait plaisir de manger dans des assiettes vertes. Chez moi, j’ai acheté pour mettre dans mon salon une magnifique tapisserie avec des masques à dominante jaune. La coïncidence veut que j’ai repeint mon salon en jaune très pâle. Et je m’y sens très bien, j’ai l’impression par moment que ça rayonne. C’est dû aux couleurs que j’ai autour de moi. Ma chambre à l’origine est bleue et je n’ai jamais voulu changer.  La chambre de ma fille est orange, et j’ai plus de mal. La couleur des murs de la chambre influe sur le sommeil et il ne faut pas mettre n’importe quoi. Même si ça m’est arrivée d’avoir des draps rouges !... J’ai une amie qui a peint un mur chez elle en rouge. Personnellement, cela ne me viendrait pas à l’idée.  J’ai déjà pensé à peindre un mur chez moi mais en vert.

 

 

Y a t-il des atmosphères en France ou ailleurs qui vous ont séduite de par leurs couleurs ?

Quand j’étais dans le Sud-Ouest avec ma fille, pourtant je ne suis pas spécialement branchée ni curé ni messe, j’étais attirée par une belle église. Dans cette église, se trouvait une espèce de hublot où le soleil prenait parfois racine et j’éprouvais le besoin de m’y glisser. Comme je me sentais bien. .. J’y allais pratiquement tous les jours et je me dis que de belles énergies devaient être présentes. C’était un vrai ressourcement ; j’ai vécu de petites expériences de ce genre…

 

 

Au sein des Ehpad savez-vous s’il existe des couleurs particulières ?

Ma mère atteinte de la maladie d’Alzheimer vivait en Ehpad et les murs étaient saumon très pâle. Sa chambre aussi. C’est surement étudié et je ne pense pas qu’ils choisissent les couleurs par hasard. Psychologiquement, c’est important de bien choisir les couleurs pour les personnes âgées.  Tout est d’ailleurs calculé. Le rouge par exemple ; ça met en appétit. Il y a un restaurant près de chez moi qui était rouge avant et qui m’attirait beaucoup. Il a changé de couleur et mon attrait pour lui est beaucoup moins important maintenant.

 

 

Vous avez un petit fils de 3 ans.  Manifeste t-il déjà de réelles préférences au niveau des couleurs ?

Oui pour le jaune. Quand il doit choisir un vêtement, un jouet, il va tout de suite vers cette couleur. C’est gai, lumineux ; ça prouve qu’il a ça en lui. Le 4 est son chiffre préféré. Or dans le tarot de Marseille, cela correspond à l’empereur. C’est un homme assis confortablement sur son fauteuil, un pied en avant et un sceptre dans la main.. Il domine et est sûr de lui. Cela représente le symbole de la puissance. C’est étonnant à son âge. En tout cas, c’est un bon présage pour le futur…

 



 

Michel PASTOUREAU :

 

Avant de commencer à parler des couleurs dans le tennis pourriez-vous expliquer ce qui vous a donné envie de devenir historien des couleurs?

Je viens d’une famille de peintres et du côté de ma mère j’avais trois grands oncles artistes peintres. J’ai donc fréquenté les ateliers d’artistes quand j’étais petit garçon. Ce sont de très beaux terrains de jeux quand on est enfant. Et puis du côté de mon père, c’étaient ses amis qui étaient peintres.  Aucun d’ailleurs n’arrivait à vivre de sa peinture mais là aussi c’étaient des terrains de jeux magnifiques. J’ai grandi dans la peinture et les couleurs m’intéressent depuis que je suis enfant. Devenu étudiant et historien, j’ai décidé d’en faire mon sujet de recherche. 

 

 

Votre couleur préféré c’est le vert!

Oui, depuis que je suis tout petit, sans que je puisse dire réellement pourquoi. Mais c’est resté jusqu’à aujourd’hui. J’aime tous les verts spécialement les verts foncés. Une personne sue deux a le bleu comme couleur préféré et une sur cinq le vert. C’est la couleur qui vient en deuxième. 

 

Scientifiquement, y a t-il eu des études sur l’influence des couleurs sur le cerveau?

Il y en a eu, mais c’est toujours assez fragile ou en tout cas c’est très culturel. Ce qui peut être valable pour l’Europe ne l’est pas tout à fait aux Etats-Unis et plus du tout en Asie ou en Afrique Noire.  La couleur n’est pas universelle mais culturelle. On a cru remarquer en rugby par exemple qu’une équipe qui joue en rouge a dès le départ un certain avantage si elle affronte une équipe qui joue en bleu, le rouge contenant une espèce de forte agressivité. En revanche, ce n’est plus le cas si cette même équipe joue une équipe qui joue en noir comme la Nouvelle Zélande par exemple. Ce n’est pas absurde mais c’est un peu fragile comme explication d’autant que dans les sports d’équipe il y a toujours le problème de savoir qui reçoit, qui visite. 

 

 

Au départ comment s’est décidé le choix des couleurs dans le tennis?

C’est une évolution de longue durée. Le tennis vient de loin, et les règles pour le tennis moderne se stabilisent à la fin du XIXè siècle. Le tennis est vraiment institué  dans les années 80. Il ressemble tout à fait à celui d’aujourd’hui pour les règles mais il ne se joue que sur gazon. Il y a encore chez les britanniques des gens qui pensent que le tennis qui n’est pas sur gazon ce n’est pas du tennis. Il faudrait trouver un autre nom. Mais sur gazon, on peut pas jouer toute l’année, ça demande un entretien extraordinaire donc rapidement d’autres surfaces sont apparues notamment la terre battue un peu plus facile d’entretien quand elle est de qualité. Après il y a eu le tennis en salle  sur des parquets et puis des matériaux plastifiés goudronnés. Quand j’étais enfant, on jouait souvent sur du goudron, le même que pour les routes. Le terrain était dessiné sur ces surfaces. On se faisait drôlement mal quand on tombait et comme manquait de souplesse on se tordait facilement la cheville. 

 

 

Quel est la différence entre le tennis amateur et le tennis professionnel?

Dans le sport amateur, il faut distinguer le sport amateur organisé avec de petits règlements et des compétitions et puis le sport amateur de pur loisir. Là, on fait absolument ce que l’on veut à partir du moment où l’on n’abîme pas le terrain. On peut mettre tout ce que l’on veut sur soi. Quand on est amateur mais que l’on appartient à un petit club, il existe peu de correction demandée  ou de respect des habitudes. Pour le sport professionnel, il existe beaucoup plus de règlements et de contraintes. Tout est organisé, légiféré, sinon c’est invivable. 

 

 

Et pour les enfants?

C’est un sport magnifique pour les enfants. Ma fille cadette a eu un petit niveau quand elle était ado et pré ado et j’ai fait le chauffeur pour l’accompagner ici ou là pour des matches entre enfants. Il faut commencer tôt, et il faut absolument que l’enfant aime ça. Il ne faut surtout pas le forcer et que ce soit un plaisir. Que ça déborde un peu le simple fait de jouer. Que l’enfant s’intéresse au tennis des autres, des aînés et un peu à la mythologie de ce sport et à son histoire.

Quand les enfants sont affiliés à un club, ils sont fiers de porter les couleurs de leur club si celui-ci possède des couleurs emblématiques. Autrement, ils sont davantage habillés selon le goût des parents. Ça dépend quel âge ils ont. A l’adolescence, ils commencent à avoir des idées bien à eux et imitent souvent tel ou tel champion ou championne . Parfois au contraire, ils n’’imitent personne. Le goût personnel est plus affirmé et puis le paraître joue un rôle important. Quand on a un petit niveau convenable à 14,15 ans, évidemment la tenue compte, les accessoires aussi avec tel logo plutôt que tel autre. Tout cela m’échappe maintenant, mais je sais que cela existe. J’ignore quels sont les logos à la mode, et quelles marques de chaussure fonctionnent bien.

 

 

 

Vous avez pratiqué le tennis. Quels couleurs aimiez-vous porter lors de ces moments là?

Je suis d’une génération où l’on jouait en blanc. C’était assez rare que l’on porte une autre couleur sauf s’il faisait froid. On mettait alors un survêtement avec un pull bleu ciel ou bleu marine. Il n’y avait pas vraiment de règlement écrit pour le sport amateur si je puis dire mais c’était une tradition. Or le tennis est un sport de tradition, ce qui lui a permis de traverser des décennies. Même dans les petits clubs de stations balnéaires ou de vacances, l’usage était de jouer en blanc ou à dominante blanc. J’ai joué entre 1957 et 1980 environ et le double était en vogue à l’époque. Par exemple, dans les grandes compétitions, le double mixte avait davantage de prestige qu’aujourd’hui. Les Australiens et les Américains en étaient particulièrement friands. Quand mes filles ont commencé à me battre j’ai su que ma carrière était finie. Elles avaient 12,13 ans. 

 

 

Vous avez également fait d’autres sports. Etait-ce toujours du blanc?

 J’ai joué aussi au football et l’ on avait les contraintes des couleurs de l’équipe de football et le goal que j’étais devait se distinguer de ses camarades pour être reconnaissable. C’est encore le cas à l’heure actuelle. Pendant 7 ans bizarrement, nous avons joué en noir et blanc, les couleurs du lycée. Puis en classe préparatoire au lycée Henri IV, c’était jaune et noir. J’étais gardien de but de l’équipe de handball , et puis je faisais de l’athlétisme au PUC. Là c’était violet et blanc , les couleurs traditionnelles du PUC pendant plus d’un siècle. 

 

 

 

 

Concernant les balles, elles étaient blanches au départ!

Je me souviens des polémiques avec les balles au milieu des années 70 pour des raisons télévisuelles. Les balles blanches ont commencé à devenir jaunes et la plupart des joueurs et joueuses étaient contre. Borg par exemple qui ne disait jamais rien s’est mis à parler. Il était assez hostile au jaune, ce qui implique qu’aujourdh’ui encore les balles blanches sont tout à fait acceptées et acceptables. On peut jouer à Roland Garros avec des balles blanches. C’est pareil pour les femmes, et il n’’existe pas beaucoup de différence entre les deux sexes. Sauf à un moment donné pour les prix accordés aux femmes qui étaient vraiment désavantagées. On pensait que certaines tenues convenaient mieux aux dames pas tellement pour des questions de décence, de peau nue, mais de transpiration qui apparaissait davantage sur le blanc. Dans les années 20,30 le fait de transpirer n’était pas absolument indécent pour un homme mais desservait la femme et mieux valait ne pas la voir transpirer.  Tout ceci est un peu dépassé à l’heure actuelle, mais c’était encore un peu ainsi lorsque j’étais petit garçon. 

 

 

Pour le tournoi de Winbledon c’était un des arguments en faveur du blanc!

Oui. Actuellement, le blanc n’est pas obligatoire, mais il doit y avoir une dominante blanche. De la tenue du joueur ou de la joueuse devait émaner un contraste coloré avec la couleur de la surface. Ça reste un principe mais ce n’est pas une règle absolue.  Si le sol est foncé, il est préférable de jouer en clair. Si au contraire le sol est clair, la couleur saturée est plus adaptée. Au début, en compétition, le blanc était la couleur imposée pat l’hygiène. Il n’y avait pas de machine à laver et comme on se salissait beaucoup en sport, il fallait faire bouillir le linge et le blanc était de mise. car la couleur ne tenait pas.  Tous les vêtements étaient blancs, ainsi que toutes les tenues de sport. La machine à laver a changé pas mal de choses aussi. Quand j’étais enfant, on jouait tous en coton. Puis les tissus synthétiques se sont imposés.. 

 

 

Quelle a été l’évolution des couleurs pour les tournois du Grand Chelem?

Maintenant, les équipementiers ont pris les choses en main et l’on voit tout et n’importe quoi si je puis m’exprimer ainsi. Une liberté totale régnait même si des hurlements survenaient lorsque Vénus ou Séréna Williams se présentaient en combinaison.  Non pas que leurs tenues étaient indécentes, mais plutôt inhabituelles. Le tennis est vraiment un sport de tradition et ce qui va à son encontre est censé nuire au tennis. Ce sport tient surtout à cause de ses traditions et c’est pour cette raison que les nouveaux sports ont beaucoup de mal à se faire une place. Un sport se doit d’être ancien et s’il est ancien il a du mal à émerger aux Jeux Olympiques ou ailleurs. En ski par exemple, on a multiplié les disciplines . Par exemple, le ski alpin avec la descente, , le géant, le slalom ça va mais les autres formes de ski ont du mal à percer.  Les titres n’ont pas la même valeur, et être champion olympique dans des disciplines tout à fait récentes n’a pas beaucoup d’impact au niveau du grand public. Aux Etats Unis quand l’Open était encore à Forest Hills, on a vu un peu de couleur apparaître aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Ce n’était pas un logo, mais les couleurs de la marque étaient représentées.  Puis à partir des années 1980,  Agassi s'est mis à porter des tenues volontairement provocantes. Des shorts en jean déchirés etc mais ça n’ a pas apporté grand chose au tennis. On est revenu un peu en arrière et une période un peu hippie est apparue  et a progressivement gagné du terrain.  Cela a d’abord consisté en un tee-shirt tout blanc avec le bord des manches bleu marine puis le bas du tee-shirt , puis le bleu marine a tout envahi.  Sont apparues des couleurs sages et assez respectées dans le monde du tennis avant que ça ne devienne le bariolage complet.  Il y a eu le blanc, puis le bleu ciel et blanc, le bleu marine et blanc puis le vert et blanc. Toujours blanc plus une couleur. Puis une couleur acceptée et une couleur raisonnable en quelque sorte. Puis le bariolage complet avec des vêtements extravagants comme des shorts à carreau, des shorts léopard. Seul Winbledon résiste un peu.  Ce n’est pas tant les joueurs d’ailleurs qui sont demandeurs d’une grande variété de tenues, ce sont leurs équipementiers. De même que dans les sports d’équipe, il y a toujours des problèmes non pas pour les maillots mais souvent pour les chaussures. Il y a des rivalités incroyables entre les marques de chaussures.  Concernant la Coupe Davis et la Fed Cup il y aussi quelques règles puisque c’est par équipe nationale. Les joueurs sont obligés de porter une tenue choisie par leur fédération et qui évoque plus ou moins les couleurs du drapeau du pays concerné. . Cette tenue varie à chaque édition de l’un ou l’autre événement. Mais là l’équipementier habituel ne joue plus aucun rôle. C ’est l’équipementier de la fédération qui prend la place. 

 

Pour Roland Garros, la répartition des couleurs ça dépend des partenaires!

Oui des équipementiers selon que c’est Adidas, Lacoste ou autres marques. Chaque année, cela change et le contrat passé avec telle ou telle marque plutôt qu’avec telle autre est important. La couleur ne fait pas logo, et il n’y a pas vraiment de couleur emblématique comme il peut y en avoir dans d’autres  domaines. En tout cas, le crocodile Lacoste restera toujours vert mais les vêtements prendront toutes sortes de teintes. 

 

Il ya des modes!

Oui avec aussi la volonté de se distingue du concurrent et des enjeux économiques derrière qui nous échappent.  Des couleurs excentriques ou inhabituelles apparaissent parfois mais ça ne dure pas car le succès n’est pas au rendez-vous. Le monde du tennis en général reste assez attaché à une certaine forme de sagesse et s’autorise des transgressions de temps à autre. Si la marque Adidas entend dire que Lacoste l’année prochaine va lancer des maillots avec beaucoup de rouge, elle va faire exprès d’imposer le bleu pour se distinguer. Est-ce qu’il y a a des accords entre les marques, je ne saurais vous dire. Mais c’est très important pour eux car à partir de la tenue d’un champion ou d’une championne se déclinent toutes sortes de vêtements sportswear’s qui vont être vendus par millions d’exemplaires dans le monde entier. Il ne faut donc pas faire de bêtises et c’est pour cela que l’excentricité se vend mal.. La plupart des gens acceptent une certaine fantaisie mais sans trop d’excès quand même. 

 

 

Pensez-vous que les marques calculent si c’est un attaquant ou un renvoyeur? 

J’ignore si cela rentre en ligne de compte ou pas. Pour les marques, ce qui compte c’est de vendre beaucoup d’exemplaires des tenues. D’ailleurs y a t-il encore des attaquants dans le tennis, je me demande. Comparé à l’époque de mon adolescence; il y en a de moins en moins.  Mon honnêteté m’oblige à le reconnaître, mais c’est pareil partout. En football, on marquait beaucoup plus de buts que de nos jours. Le score le plus fréquent aujourd’hui c’est 1 à zéro. Or quand j’avais 15 ans, 4 à 3 ,  5 à 4 c’était fréquent. En tennis c’est pareil, service volée on ne voit plus tellement. 

 

 

Quelle est la marque qui rencontre le plus de succès au niveau de la couleur?

Je pense que lorsque l’on a une marque trop répandue, elle se fait du tort à elle-même car elle fait un peu plouf, et déploie une image assez vulgaire. Donc Adidas, Nike, Reebook sont moins chics que Lacoste.  En matière de raquette par exemple, Wilson est mieux qu’Adidas. 

 

 

Profitons-en pour évoquer l’histoire de la marque Lacoste! Le logo est toujours vert!

Il existe deux traditions sur l’histoire du crocodile Lacoste. Lacoste a été un très grand joueur , mais pas un attaquant. Il renvoyait tout, ne lâchait rien et on disait que son jeu s’assimilait aux mâchoires d’un crocodile qui s’accrochait, s’accrochait. Il n’y avait pas moyen de le faire décrocher et c’est vrai que lorsque l’on analyse les scores, Lacoste va fréquemment au 5ème set. A l’époque, il n’y avait pas de tie-break ce qui impliquait des scores astronomiques et le surnom de crocodile lui a été donné alors même qu’il était encore joueur. Quand il est devenu homme d’affaires, créateur de vêtements et de sport, il en a fait intelligemment son logo devenu l’un des plus célèbres au monde. Pas la peine d’écrire Lacoste en dessous lorsque la réputation est là. En plus, c’est un animal, ce qui est encore mieux. Une autre tradition mais moins répandue raconte l’histoire d’une valise en crocodile très chère que l’entraîneur de  Coupe Davis  au début des années 30 avait promis à Lacoste s’il remportait son match. Il était amateur à l’époque, et il aurait gagné cette valise. Je crois que le surnom de crocodile lui convient lui qui ramenait tout. Il a créé sa firme de vêtements et c’est une des plus belles histoires de reconversion du sport. En plus, sa fille a été une grande championne de golf et lui-même a été à Roland Garros jusqu’à un âge très avancé. Mais il avait une sorte de maladie qui faisait qu’il avait toujours froid. On le repérait facilement car la plupart du temps lors des finales il fait chaud et il avait quasiment un manteau de fourrure. 

 

 

Le bleu marine est une des couleurs les plus demandées chez Lacoste!

D’une manière générale c’est la couleur la plus portée pour le vêtement en Occident en tout cas. Ce n’est pas le noir et pour les polos et les tenues de sportswear c’est le polo bleu marine car c’est le plus passe-partout, le plus facile à marier avec le reste. Aussi bien pour les hommes que pour les femmes. 

 

 

Quelle était la première couleur de la chemise ?

Blanche. Actuellement, il y a beaucoup de coloris et l’on n’arrive plus à mettre un nom dessus. Mais elles ne sont pas toutes disponibles en même temps. Il y en a que l’on ne retrouve plus aujourd’hui et de nouvelles teintes apparaissent. On cherche à diversifier. Les goûts n’étaient pas les mêmes selon les marchés asiatiques, américains ou européens et certaines gammes se vendent mieux en Europe, d’autres en Asie.  Mais pour ne pas tomber dans la routine, les décideurs de chez Lacoste changent régulièrement les nuances. Bien sûr il y aura toujours du rouge, du jaune, du vert mais tous les deux, trois ans on change la nuance de bleu, de rose pour renouveler et attirer l’oeil. 

 

 

Avez-vous vous-même une chemise Lacoste?

J’en ai eu, je n’en ai plus. Je ne sais pas pour les femmes, mais il faut reconnaître que pour les hommes c’est très mal coupé. Je ne comprends pas pourquoi les manches sont si courtes et si resserrées. Il y a quelque chose qui ne va pas aux manches ou alors c’est moi qui par goût quand j’ai des manches souhaite qu’elles ne soient pas trop courtes et aillent jusqu’au coude. Mais à moins d’être très mince ça ne fait pas une jolie silhouette. Au niveau du col aussi, il y comme une sorte de défaut. Je n’ai jamais aimé beaucoup ces chemises mais lorsque j’étais adolescent dans mon milieu, les classes moyennes on était tous habillés pareil. Un jean, une chemise Lacoste et un pull bleu marine.

 

Pensez-vous que c’est étudié lorsque les joueurs ou joueuses mettent telle ou telle tenue!

Eux-mêmes ne sont pas libres pour les compétitions de s’habiller comme ils l’entendent puisqu’ils sont sous contrat. Ils doivent porter tel short, tel tee-shirt. On le voit bien d’ailleurs quand en cours de partie aux changements de côté, ils changent de maillot et reprennent le même. Ils en ont 5 ou 6 à disposition de la même taille et avec le même dessin. 

 

Par exemple quand Kuerten vainqueur 3 fois  de Roland Garros a arboré des tee-shirts orange qu’avait-il comme idée selon vous?

Il a porté une couleur inhabituelle sur un terrain de tennis. De l’orangé, une couleur peu tennistique. En plus à Roland Garros sur terre battue; ça s’accorde très mal; ça jure. L’orangé et la couleur rouge brique ça fait bizarre. Il a expliqué qu’il était sud américain et qu’en Amérique du Sud l’orangé se voyait beaucoup dans la vie quotidienne et qu’il n’avait pas le même statut qu’en Europe. Ce qui était vrai d’ailleurs.  Du coup, cela a fait naître une petite mythologie Kuerten.  Mais ça n’a pas suffi pour lancer la mode de l’orangé qui est quand même assez difficile à porter en sport. 

 

 

Et Agassi quand il a mis ses jeans?

C’était pour provoquer. Agassi était un grand transgresseur et quand il était jeune il portait des cheveux  très longs. Il n’était pas d’une propreté extraordinaire et il portait des tenues quelque peu hippies. Son équipementier jouait sûrement là-dessus. C’était tout à fait nouveau dans le tennis. Il y a des gens qui ont hurlé « Je n’ai jamais vu ça, ça devrait être interdit. » Il n’avait pas 20 ans, c’était un gamin. Ce n’était pas très habituel dans le tennis européen et australien, c’était plutôt américain. C’est assez amusant parce qu’avec l’âge, il est devenu extrêmement propre. Il s’est fait raser le crâne et est devenu connu pour son élégance.  

 

 

Pour celui qui est en face quel effet cela produisait-il? 

Quelques joueurs se sont plaints de la couleur portée par leur adversaire, notamment quand le soleil tape très fort. Il y a des couleurs qui renforcent le côté aveuglant de la lumière comme les couleurs vives.  De ce fait, les couleurs neutres passent en général pour plus sportives. C’est la raison pour laquelle lorsque l’on joue la couleur on joue la bichromie blanc plus une couleur. Les équipementiers c’est blanc et rouge, blanc et bleu, blanc et vert, blanc et noir. Quelqu’un qui joue entièrement en orangé déja ça a l’air excentrique et ensuite ça peut gêner l’adversaire. 

 

 

Vous disiez que le joueur devait s'habiller de telle façon. Mais il a quand même le choix entre quelques tenues!

Oui, il a 4,5 tenues dans lesquelles il doit puiser. C’est vrai pour les sports d’équipe aussi. Une équipe un peu importante dans un sport professionnel a toujours 3,4 possibilités de tenue selon les couleurs de l’adversaire, selon s’il fait chaud ou froid. Les superstitions jouent un rôle aussi et un sportif ne remettra ps forcément telle tenue avec laquelle il a perdu. C’est la même chose pour les sports d’équipe.  Une équipe qui a un peu de prestige dans un sport professionnel a toujours 3,4 possibilités de tenue selon les couleurs de l’adversaire, selon la météo, les superstitions et ses différents résultats.

 

Federer avait ralé lors d’un tournoi à Londres car on lui a interdit de porter des chaussures où il y avait un peu d’orange!

Ce n’est pas un problème de couleur, c’est un problème de crampon, de type de semelle qui abîme certaine surface ou qui donne un avantage aux joueurs par rapport aux autres qui n’en sont pas dotés. On accuse l’apparence, mais ce n’est pas ça le vrai problème. . C’est le fait de l’accorder à un joueur et pas à un autre. Je me rappelle les cordages dans les années 70 lorsque les raquettes se sont agrandies de manière illimitée avant que chacun ne puisse prendre une raquette à son idée. Elles étaient  beaucoup plus petites quand je jouais au tennis, en bois et petit tamis comme on dirait aujourd’hui. Très petit tamis comparé à maintenant. Je crois que je ne pourrais pas jouer avec une raquette grand tamis. 

 

Les joueurs qui jouent en double, pensez-vous qu’ils se consultent avant d’entrer sur le court?

Oui et non car là aussi ils ont des obligations individuelles par rapport à leur équipementier et il se peut très bien qu’ils forment une paire avec deux équipementiers différents.  C’est très fréquent qu’en début de tournoi un joueur soit délaissé par son partenaire et prenne quelqu’un de disponible qui veuille bien jouer avec lui. ILs ne se sont donc pas consultés auparavant. Ils ont peut-être des liens amicaux, mais  peuvent être tout à fait disparates sur le terrain en matière de tenue. Pareil d’ailleurs pour les deux en face. Que ce soit un double homme, dame ou mixte.

 

 

Et parmi les vainqueurs  que ce soit en simple ou en double y a t-il des couleurs qui reviennent plus fréquemment?

Quelques superstitions existent là aussi, mais il y a toujours une dominante blanche. Si vous regardez bien les joueurs dans les tournois du Grand Chelem c’est rare qu’ils ne portent pas du blanc quelque part en plus de la couleur.

 

 

Le noir n’a jamais triomphé en tennis?

C’est difficile d’imposer le noir sur un terrain pour des raisons de tradition, de visibilité. Les gestes se voient moins bien. Par exemple, j’aime beaucoup regarder le tennis féminin car les gestes sont davantage décomposés pour le spectateur.  Si les joueuses étaient toute en noir ce serait moins perceptible qu’en blanc. 

 

 

Quelles sont les couleurs que vous aimez chez un joueur ou une joueuse?

Des couleurs claires. Si c’est sur terre battue que ça fasse un contraste avec la couleur du terrain. C’est cela qui me semble important. Un joueur ou une joueuse qui aurait un polo , un short ou une robe rouge brique ça n’irait pas. Il doit vraiment y avoir un contraste avec le sol quelque soit sa couleur. Donc, si c’est de la terre battue traditionnelle , le blanc, le bleu ciel, le jaune se voient mieux que les couleurs foncées. Sur gazon c’est important aussi. J’ai lu récemment que la reine d’Angleterre  quand elle va aux courses où à un match de polo ne s’habille jamais en vert. Il faut qu’on la repère, donc pas de vert sur un terrain où le vert est très présent. 

 

Que pensez-vous du tennis actuel?

JJe m’élève contre une idée qui circule qui dit qu’avec Djokovic, Nadal, Federer et quelques autres joueurs jamais le tennis n’a eu autant de grands champions. Ça n’est absolument pas vrai. Dans les années 50 et 60, le nombre de grands champions du même âge était beaucoup plus grand et les compétitions bien plus acharnées qu’aujourd’hui. Ceci y compris dès les 8ème de finale. Ce n’était pas comme aujourd’hui où les 4 meilleurs se retrouvent systématiquement en finale. 

 

Au niveau des spectateurs comment se passe le rapport avec les couleurs?

Il existe une démocratisation du public et une variété de classe sociale plus importante qu’autrefois avec une impression bien plus colorée que quand j’étais jeune.   Le tennis n’était pas vraiment un sport snob mais disons de classe sociale un peu aisée aussi bien sur le terrain que dans les tribunes. Surtout lorsqu’il faisait beau l’été , on voyait beaucoup de blanc dans les tribunes avec des tenues relativement sobres avant que ça ne devienne bariolé. A un moment donné, les Etats-unis étaient en avance sur le reste du monde au niveau des couleurs, du bruit. Un grand tournoi était un peu comme une messe, on n’entendait rien.  Avec la circulation, les pop corns c'était tout à fait autre chose. 

 

 

`Analysons le court. Il y a d’abord le filet

Il est règlementé et doit être foncé avec une bande blanche. On ne dit pas noir, mais les règlements disent bien qu’il doit être foncé. Hauteur 91 cm, tout ça est bien précisé. 

 

 

Au niveau de l’arbitre?

Rien n’est précisé dans le règlement mais le bon usage veut que l’arbitre ait une tenue qui fait que d’une part on le distingue des joueurs et d’autre part qu’il y ait quelque chose qui souligne non seulement sa place sur la chaise mais aussi lorsqu’il descend voir une trace de balle etc… Mais pas d’autre règle. 

 

Il paraîtrait à ce sujet peut-être pas dans le tennis que les arbitres seraient plus sévères avec des sportifs portant telle ou telle couleur!

Je n’y crois pas beaucoup. En revanche inversement, je crois beaucoup que les arbitres qui étaient en noir pour des raisons télévisées et qui ont laissé tomber pour porter de la couleur ont perdu une grande partie de leur autorité. Sur un terrain de rugby, c’est vrai que quand on voit un arbitre habillé en jaune ou en rose il a l’air moins sévère que s’il était vêtu de noir. Ça marche un peu de cette manière. Le monde des arbitres est un monde mystérieux. Comment dans un sport d’équipe et même individuel un arbitre peut-il être totalement neutre?  C’est un mystère.  Ce serait étonnant qu’il n’ait pas une petite préférence pour tel ou tel joueur. Il n’est pas tout seul, il y a les juges de ligne, le public. Mais il a un rôle important et il doit se montrer le plus neutre possible. Ce n’était pas toujours facile dans ma génération mais ça doit être la même chose maintenant. Dans le tennis complètement amateur, ce n’est pas rare que deux joueurs aient un arbitre. Est-il complètement impartial? On ne fait que s’amuser, il n’y a pas d’enjeu mais quand même…

 

 

Et pour les ramasseurs, les ramasseuses?

Ils doivent être habillés pareil. Je ne sais pas qui choisit mais en général c’est l’organisateur du tournoi pour les Grands Chlems. Les ramasseurs si possible doivent porter une tenue que les joueurs ne porteront jamais afin qu’aucune confusion ne puisse survenir. 

 

Au niveau des couleurs concernant les retransmissions télévisées comment cela a t’-il évolué?

La télé a joué un grand rôle au niveau des changements. Pas seulement dans le tennis mais dans tout le sport en général. Pour des questions de visibilité, ce qui était bien visible en noir et blanc l’était moins en couleur. Il a fallu changer certaines choses , certains contrastes. En football par exemple, la séance de tir au but s’est imposé par la télévision pour que le match ne dure pas trop longtemps. Quand j’étais moins jeune, ce n’était pas rare qu’un match nul soit rejoué deux jours après, le nombre de fois qu’il fallait.  Quand j’avais 20 25 ans il y avait encore des gens qui disaient qu’à partir du moment où le sport était télévisé, ça n’était plus du sport. Quand des nouveautés se mettent en place, il y a toujours d’un côté des résistances et de l’autre côté des partisans des nouveautés quelles qu’elles soient.

 

Pour finir, si vous aviez du être un joueur de tennis qui auriez-vous aimé être?

J ’ai longtemps beaucoup admiré Rosewall. Il n’a jamais gagné Winbledon et a été finaliste en 54 et 74 à 20 ans d’intervalle.  Mais c'est Rod Laver avec ses deux grands Chlems que je choisirais... 

 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

 

 

 

 

 

mercredi, 17 février 2021

Le pansement Schubert

musique,thérapie,interviewmusique,thérapie,interviewClaire Oppert fille d’un père médecin et d’une mère danseuse, manie le violoncelle avec une grande dextérité et donne notamment des concerts à travers le monde. Détentrice d’une licence de philosophie et d’un diplôme d’art-thérapeute, reconnue par le monde scientifique, elle se sert de toutes ses compétences pour soulager la douleur et l’anxiété des autistes, des déments, des malades douloureux, des personnes en fin de vie. Elle a écrit un livre riche et imagé «  Le pansement Schubert » où elle évoque son expérience de « soignante » en y intégrant le récit de rencontres avec ses divers patients… Elle travaille notamment à l’hôpital Rives de Seine à Puteaux, et à l’hôpital sainte Perrine à Paris

 

Quels sont vos souvenirs de votre premier contact avec la musique?

La musique était très présente au sein de notre famille et mon père était tout à fait conscient de son pouvoir thérapeutique. C’était naturellement inclus dans sa vision des choses. Avec aussi le théâtre. Mes parents n’étaient pas des professionnels de la musique mais tous deux des amateurs éclairés qui jouaient du piano. J’ai été bercée dans cet univers médical à travers cet instrument et ma première vraie rencontre choc c’est lorsque j’ai entendu le violoncelle pour la première fois.  Je suis allée au concert bien avant l’âge de 8 ans, et c’est là que j’ai eu une sorte de révélation, comme un gros coup de foudre pour cet instrument. Mon père et ma mère de par leur profession et leur façon d’être m’ont de toute évidence inspirée… 

 

Pourquoi le violoncelle en particulier?

C’est l’ instrument qui se rapproche le plus de la voix humaine et c’est cela qui m’a touchée lorsque je l’ai entendu la première fois. Avec mes 20 ans d’expérience, j’insiste toujours sur cet aspect qui m’a attirée petite et qui m’attire toujours.  D’ailleurs encore très récemment, une patiente m’a dit «  J’ai l’impression que votre violoncelle est un être humain qui me parle ». 

 

A quel moment avez-vous su que vous étiez faite pour vous servir de cet instrument comme moyen de soulager les malades?

Dès mon premier concert.  Un auditeur est d’ailleurs venu me voir et m’a dit «  Si vous aviez été médecin, vous m’auriez soigné…Ça a été le coup de tonnerre, comme une évidence.Vraiment très jeune, je suis allée jouer par çi par là. C’était complètement intuitif, ce qui ne m’:empêche par ailleurs d'être concertiste. La forme actuelle cadrée est venue progressivement. Il y a d’abord eu la rencontre avec Howard Buten et les autistes, puis ensuite les études avec l’acquisition d’outils et la possibilité de pouvoir entrer dans un protocole et conceptualiser. Cela m’a permis de faire des fiches d’observation mais ce travail je le faisais déjà quand j’avais 15 ans et que j’allais jouer pour les enfants atteints de trisomie 21 ou les personnes  démentes. Quelque part, je faisais la même chose qu’aujourd’hui. 

 

Selon vous est-ce que le violoncelle est l’instrument le plus propice à soulager les patients? 

Tous les instruments peuvent apporter quelque chose, mais ce qui est important aussi c’est la façon dont on va apporter la musique, et les compétences générales. C’est évident également que le violoncelle ou la harpe ou la voix humaine  peuvent s’adapter davantage à des contextes dans lesquels j’évolue comparé par exemple à un trombone.  Je m’adapte aussi beaucoup notamment au niveau du volume. Parfois, je joue très fort notamment pour les personnes dotés de problèmes auditifs. Mais je suis aussi capable de jouer très doucement pour ne pas heurter les patients. Et pour que les décibels ne soient pas trop nombreux. Parfois, les patients me disent qu’ils sont fatigués, parfois ce sont  juste des tonalités émotionnelles. «  Oh là là, je vous ai entendu à travers la porte, c’est trop triste ce que vous faites, je préfère que ce soit plus gai. Ça rejoint l’idée de la musique vivante non enregistrée. La question du répertoire est importante et avant d’aller à la rencontre de tous les patients en soins palliatifs, j’ai des informations  de l’équipe soignante sur le malade, notamment sa pathologie mais pas de façon très détaillée. .Aussi sur son origine, ses goûts. Ce sont soit des médecins, soit des infirmières, tout membre de l’équipe pluri-disciplinaire dont je fais partie. Il est bien de mentionner que je ne suis pas une animatrice, je ne viens  pas faire un concert à l’hôpital. C’est une posture particulière à visée thérapeutique. Je joue aussi pour les personnes dans le coma.

 

Modification du souffle

 

Cela fait l’objet d’une des études que je suis en train de mener  pour les familles à Puteaux sur le souffle des patients qui est modifié massivement. On l’a observé sur des patients sédatés ou qui sont dans un degré profond de coma avec des troubles de la vigilance. La musique continue de toucher mais dans des proportions très impressionnantes.  Je me suis occupée d’un homme chanteur de fado qui n’était pas dans un  coma profond mais dans une phase pré agonique. Il a été très impliqué toute sa vie dans la musique, a sorti des CD. On avait chanté ensemble et la semaine suivante sa femme et sa fille très affectées m’ont dit qu’il ne s’était pas réveillé. Elles m’ont demandé de le stimuler par tous les moyens possibles  et j’ai commencé à jouer le fado  de ce chanteur. IL a alors ouvert les yeux, a même levé légèrement le pouce, et a émis quelques bruits comme s’il chantait. Un léger sourire est apparu sur son visage  et ces deux femmes pour qui ce fut une joie extraordinaire m’ont chaudement remerciée. Elles ont eu le sentiment qu’il avait été en vie une dernière fois et cela leur a permis de prendre congé.  Et c’est souvent ce qui ressort. Je suis très engagée en tant que violoncelliste mais aussi en tant qu’art thérapeute et chercheuse. Je fais partie de groupes de recherche cliniques avec des professeurs de neuro-science, de médecine. Bien évidemment, je ne guéris pas les cancers ni les douleurs rebelles mais je travaille avec des gens qui ont déjà des doses de morphine bien adaptées permettant à Schubert d’agir. Il existe des diminutions radicales de la douleur. C’est un complément et cela s’adresse à ce qui est en dehors de la pathologie, à la partie saine.  Notamment pour les personnes démentes ou Alzheimer qui ont en eux une présence qui subsiste ,parfois extrêmement ténue. Même si c’est le dernier souffle, la vie est là et parfois, elle redouble d’activité.  De grands penseurs comme Michel M'uzan ont parlé de ce phénomène. Il existe  parfois une exaltation , une sorte d’appétence relationnelle qui renaît justement dans les derniers instants, les derniers jours avec l’ouverture de la musique.  Un contexte très clinique avec la mise en place de choses absolument extraordinaires…

 

Vous parlez dans votre livre du mot vibration qui revient très souvent d’après 450 paroles de patients!

Quatre mots sont vraiment prononcés très souvent. Vibration oui, car le violoncelle est un instrument extrêmement vibratoire. C’est pour cela qu’il pénètre les corps avant d’arriver à la tête. On le ressent plus qu’on ne le comprend dans un premier temps. Il y a aussi le mot coeur qui se devine vraiment chez les patients. Ils le montrent avec un mouvement de la main qui va du bas vers le haut, qui s’arrête au coeur. Le mot joie revient également souvent. Evidemment la musique n’enlève pas le tragique, mais souvent elle fait naître une joie résiduelle réelle quelquefois difficile à saisir. C’est propre aux soins palliatifs, propre au regard global posé sur un patient. Celui-ci est avant tout une personne avant d’être un malade et la musique l ‘atteste et en témoigne. C’est très fort.  Quatrième mot  : vie.  Des gens qui en fin de vie disent «  Je ne savais pas que c’était si vivant, là je sens la vie et ça me donne l’envie de vivre. C’est très fréquent que les personnes rejoignent une partie d’eux-mêmes vraie et lumineuse.

 

Quel que soit le genre de maladie, la musique agit-elle  de la même façon?

Je pense que ce sont d’abord les personnes qui sont plus ou moins réceptives à la musique. Et cela n’a rien à voir avec le fait d’en avoir ou non fait ni de la connaître.  Ce n’est pas non plus  lié à la pathologie car des expériences similaires sont menées auprès d’anorexiques, dans les milieux carcéraux, en psychiatrie. Ce qui va faire la différence c’est l’adaptation.  Certains des grands autistes par exemple avec qui j’ai travaillé étaient particulièrement sensibles à la musique et à la vibration vocale. D’autres étaient sensibles à d’autres formes. Il y en avait un qui était extrêmement olfactif. Il  sentait tout et  se repérait dans le monde par le biais de  son odorat. Il a été plutôt orienté dans un atelier sensoriel. Ce n’est pas la pathologie la partie dominante car j’ai travaillé avec des patients atteints de surdité totale. J’ai eu une rencontre incroyable que je n’ai pas citée dans mon livre en Ehpad avec une patiente âgée, démente et sourde e à 100% depuis 30 ans. Elle ne voulait plus vivre et avait décidé du jour de sa mort. 5 jours avant la date fatidique , elle avait fermé les yeux, les mains et ne s’alimentait plus. Sa famille m’avait dissuadée de jouer et ses proches  ne communiquaient qu’avec une ardoise. Or en fait lorsque j’ai joué pour elle, c’était faramineux. Elle a entrouvert les yeux, et la famille était carrément en état de choc heureux. Elle a aussi déserré les mains , a même parlé et a dit quelque chose de très drôle : «  Vous avez joué,  maintenant vous devriez aller à la cuisine ». Elle est décédée quelque temps après et son départ était totalement différent . La musique avait touché quelque chose en elle lui permettant cette dernière communication et cette incroyable réaction. Je lui avais joué «  La vocalise » de Serge Rachmaninov. Donc même là où il y a surdité, il peut y avoir réaction…

 

Il y a quand même des gens plus ou moins réceptifs!

Oui, et parfois on ne sait pas. C’était la grande question d’Howard Buten. Que ressentent ces autistes? Comment appréhender le ressenti qu’ils ont puisque nous on n’est pas autiste. Il disait toujours "Quelle est la différence entre leur souffrance et la nôtre?"  Il peut y avoir un déferlement de sensations qui ne ressemblent en rien à celles d’une personne qui va s’assoir dans une salle et qui écoute une symphonie. Un jour, un autiste a cassé mon violoncelle. Pourquoi? Qu’est-ce qu’il a perçu qui a engendré ce geste?  Il y a une étude un peu grossière qui disait «  Quand un autiste entend, il ne voit pas. » On avait remarqué en mettant des électrodes que quand on montrait une image à de jeunes autistes profonds et qu’à ce moment là un bruit se produisait ils ne voyaient plus et réciproquement.  Quand ils entendaient la musique et qu’on leur passait une image ils n’entendaient plus.  C’est vrai que neurologiquement, toutes les sensations ne sont pas particulièrement objectives et vécues comme cela peut être le cas lorsque l’on est dit «  normaux ». Je fabriquais justement  toutes sortes de bruits qui faisaient que cela pouvait être compris comme de la musique. Je tapais le violoncelle avec la baguette, je créais des crissements, des hurlements avec mon instrument. Ce que l’on appelle des modes de jeux ressemblant plus à des freins de voiture qu’à des harmonies musicales… L'on peut partir de sons parfois peu agréables pour faire un travail thérapeutique amenant vers quelque chose de plus apaisé.

 

Pourquoi Schubert tout particulièrement?

Cette première rencontre en 2012 très frappante où l’on assisté à cette radicale diminution de la douleur de Madame Kessler lors d’un pansement a inspiré et donné son nom à l’étude clinique «  Le pansement Schubert »  : 112 soins douloureux sur des patients en fin de vie. Au départ en hommage à cette femme  que j’ai accompagnée  jusqu’à sa mort. Elle était en Ehpad et a ensuite été transférée en soins palliatifs et je lui ai joué Schubert jusqu’au bout.  En dehors de cette rencontre, il y a le fait que Schubert possède en lui quelque chose de profondément humain. C’est un compositeur qui a réalisé énormément de leaders, plus de 600 et qui en quelque sorte a toujours mêlé la parole à la musique avec de la mélancolie. Sa recherche s’adresse toujours à un voyageur, englobe de la solitude, de l’errance, un récit de vie. On trouve aussi chez ce compositeur la quête d’un ailleurs supposé meilleur et cette obsession de la mort. Ce n’est pas un hasard si Schubert a cette capacité de diminuer la douleur mais c’est vrai aussi pour Bach, Beethoven, Mozart et toute la musique sans exception. Il y a peu de temps, une personne m’a demandée de lui jouer «  La jeune fille et la mort ». Elle ne voulait écouter que cette pièce là. Je regardais cette femme qui avait 94 ans et je me disais qu’elle incarnait tout à fait la jeune fille et la mort… Elle avait quelque chose dans sa demande qui était très juvénile. 

 

Est-ce que c’est arrivé qu’une personne ne supporte pas telle ou telle musique?

Oh oui. Ou alors beaucoup plus drôle encore une réflexion du genre «  Oh là là ça ne ressemble pas du tout. Il m’arrive par exemple quand on me demande du Jonnhy Halliday de ne pas prendre le bon tempo car je ne connais pas. Le tempo est beaucoup trop lent et parfois j’ai des critiques très drôles. J’ai aussi eu une patiente Madame Block qui ne voulait pas de musique craignant que cela lui procure trop d’émotions.  Elle préferait écouter à la porte pour ne pas être trop touchée.  Parfois  les larmes coulent  même si la plupart du temps c’est cathartique. Une reconnaissance s’établit  «  Merci de m’avoir permis de pleurer." Il faut traverser cette tempête  pour qu’à un moment donné l’apaisement surgisse. J’ai eu une réflexion amusante aussi d’une personne qui me demandait de faire le tri car toutes sortes d’émotions ressortaient. Le gai, le triste et elle désirait  que je fasse ressortir uniquement le gai. 

 

Justement la musique est sûrement celle qui parmi toutes les thérapies artistiques fait le plus appel aux sens!

Oui absolument et surtout sa grande force c’est de faire appel au sens auditif mais pas à l’intellect. Par exemple le fait de contempler un tableau demande déjà de pouvoir le regarder . Or les personnes qui ont les yeux fermés ne comprennent rien même pas les mots. La musique n’a pas besoin de mots car elle fait naître des sensations, des idées à un niveau d’intériorité qu’aucun langage ne peut atteindre. Et puis, encore plus fort que de toucher les sens, le fait de passer d’abord par le toucher. Tous les grands autistes ont touché mon instrument, et en absorbaient la vibration. Cela arrive que certaines personnes demandent à mettre la main sur le bois de l’instrument pour le sentir encore plus vibrer. On est effectivement dans un très grand élargissement sensoriel. 

 

Sait-on pourquoi parfois cela ne marche  pas?

C’est arrivé que ce soit difficile de mesurer une réaction mais en tout cas il n’existe aucune dégradation de l’état. Par exemple, c’est diffilcile de se rendre compte de l’effet sur des patients lors de comas profonds. Mais dans la majorité des cas, il existe une amélioration, une réaction, une détente. On l’observe au niveau de la relaxation musculaire, du pli du front, de la respiration. Ça m’est arrivée de jouer pour un patient vraiment en état de mort clinique un peu comme une dernière chance et il n’a pas réagi. C’est quand même une responsabilité. Est-ce parce qu’il n’avait plus de connexion pour pouvoir capter puisque l’on sait que la contrestimulation musicale stoppe l’influx de la douleur,. Les neurosciences mettent en lumière de plus en plus tout cela de façon évidente. Il est rare qu’il ne se passe rien, à cause de la part de suggestion positive qui augmente les chances de réussite. Ceux qui font le pansement Schubert y croient à fond. Ils chantent, dansent avec le patient. Tout est fait pour que ça marche et les soignants qui ne sont pas sensibles ne le font pas. Le patient lui-même est d’accord, c’est le moteur du soin même si parfois certains malades refusent. Cette dame qui m’a envoyée sur les roses en hurlant « sortez de ma chambre. Parfois il  peut y avoir au départ un mécanisme de défense et puis quand on repose la question, quand on parle un peu, ceux qui ont refusé le plus fortement sont souvent ceux qui réagissent le plus. Une fois, avec une patiente j'ai du arrêter car la musique  l’envahissait trop et elle ne le souhaitait pas. 

 

Vous arrive t-il de vous dire que vous avez pu nuire à une personne? 

Oui justement pour cette patiente  qui avait réagi avec ce torrent de larmes. Ceci de façon tellement massive que je me suis demandée si je n’étais pas en train de la faire souffrir. Je ne suis pas toujours convaincue, pas du tout. Mais cette patiente avait fini par être apaisée. Après, j’ai posé mon violoncelle, j’ai essayé de la faire revenir sans instrument et en parlant. Il faut s’adapter. Je peux parfois juste parler et chanter. Une patiente m’a dit une fois «  je ,ne veux pas de musique, je veux bien parler. On a parlé une dizaine de minute et elle m’a dit «  J’ai l’impression que l’on fait de la musique toutes les deux ». La musique ce n’est pas juste un air de Beethoven, il y a tout un travail derrière.  C’est une conversation qui peut devenir quelque chose d’harmonieux, et de musical. En tout cas c’était le ressenti de cette patiente. Quand il y a échec,  je ne suis pas fâchée car je ne voudrais pas que l’on me dise «  Ca marche trop bien ».  Quand quelqu’un m’envoie balader, je suis contente car cela montre que parfois ça ne fonctionne pas. Parfois ce n’est pas évident et c’est vrai qu’il y a des moments où je doute un peu.  Notamment pour les personnes dans le coma. Je ne sais pas si ça leur fait plaisir et je me demande si elles auraient dit oui en étant conscientes. C’est important d’être dans le respect de la personne. 

 

Vous avez fait une licence de philo et donc étudié quelque peu l’histoire de la musique à travers le temps!

C’est effectivement une question qui m’intéresse beaucoup. J’ai même fait une maîtrise de philo mais comme je suis partie à Moscou, je ne l’ai pas soutenue. Donc je ne pouvais pas dire que j’avais le diplôme, mais j’ai fait 2 ans de maîtrise plus une maîtrise sur l’esthétique, philosophie de l’art. C’est incroyable d’ailleurs car les références à la musique remontent à la Bible. Chez les anciens Hébreux c’est la harpe et la lyre de David qui permettait d’apaiser les crises nerveuses de Saül le premier roi d’Israël. Les Grecs en ont beaucoup parlé aussi notamment Aristote. On dit d’ailleurs dans la mythologie qu’Asclépias donc Esculape considéré comme le dieu des médecins ordonnait souvent  à ses malades de lire des poésies et de chanter des chants. 

 

Est-ce que le fait d’avoir étudié cette histoire de la musique  peut aussi jouer dans votre manière de soulager ou pas?

En tout cas cela peut jouer dans ma façon de comprendre ce que je fais et d’essayer d’appréhender. J’ai passé beaucoup d’années à la Sorbonne, ai énormément aimé surtout la philosophie ancienne , la philosophie grecque aussi. Ma compréhension a grandi. Je ne sais pas si le fait d’avoir rédigé cette maîtrise en philosophie  de l’art  permet une relation soignante thérapeutique, mais c’est un enrichissement de ma personne et de mon rapport à ce que je fais. 

 

Vous avez un diplôme d’art thérapeute. Quelles sont les choses essentielles que vous avez apprises lors de cette étude?

J’ai appris à conceptualiser. Howard Buten m’avait fait jurer de ne rien apprendre, mais j’ai finalement levé cette interdiction avec sa bénédiction pour aller étudier. Cela m’a donné des outils pour une approche plus scientifique mais qui n’a pas changé ma façon de travailler. Mais avec ce diplôme j’ai des outils me permettant de pouvoir prouver, mettre en forme, et mesurer,avec une analyse, et des systèmes d’observation. Ça m’a permis de mener des recherches cliniques avec des professeurs et d’être invitée dans des congrès. Ceci pour pouvoir rendre compte de  mon travail de la façon la plus scientifique possible et  de montrer la difficulté de mesurer l’émotion. Cela m’a ouvert les portes des facultés de médecine puisque je suis appelée régulièrement pour donner des cours aussi bien aux étudiants qu’aux médecins dans plein de DU différents.  C’est une démarche qui peut rentrer dans un cadre soignant. C’est fondamental pour moi, non pas dans ma pratique mais dans la reconnaissance. Par exemple, je travaille maintenant avec un groupe lié aux soins palliatifs dans la reconnaissance de ce type d’apport dans  la loi Léonetti . Ça fait partie d’une approche globale en prenant en compte la sensation, l’émotion, la relation, l’expression, la communication.

 

Vous faites de concerts à travers le monde. Par rapport aux soins les différences?

Quand je suis auprès des malades, j’élargis beaucoup ma façon de jouer. J’adapte ma technique, mon volume, mon répertoire, je joue des extraits, des bouts de symphonie et je prends une grande liberté par rapport au répertoire pour que la musique devienne un pont vers la personne et non plus une réalisation artistique en soi. Quand je suis en concert,  je concentre mes forces pour être  dans une interprétation la plus proche possible du compositeur et de l’ensemble des personnes avec qui je joue. Toute cette pratique nourrit mon rapport à la musique, mon rapport en général à toute chose.

 

Que vous a apporté l’écriture de ce livre?

L’écriture représente la musique se trouvant dans les mots et c’est quelque chose qui me parle. J’aime énormément lire notamment de la poésie. Pour moi, c’était vraiment un cadeau de pouvoir mettre en mots toutes ces expériences et cela représentait également un énorme défi d’arriver à trouver l’angle juste.  Je l’ai écrit en 3 ans, je ne faisais plus que ça. Cela m’a apporté le bonheur de voir les lignes de force de ma vie plus clairement. 

 

Parfois lorsque vous êtes triste vous prenez votre violoncelle et ça va mieux!

Ça peut arriver. Mais c’est vrai aussi de la poésie, la musique du silence. J’aime particulièrement Christian Bobin. Il m’inspire beaucoup et quand je suis triste, je vais plus naturellement lire de la poésie en particulier Christian Bobin. Quand je joue du violoncelle, j’ai un regard critique, celui de la déformation professionnelle et je suis trop dans une analyse de ce que je fais, de ce qu’il faudrait améliorer. D’ailleurs quand il y a soi-disant des musiques relaxantes, je ne trouve pas du tout qu’elles le soient. Elles sont  tellement répétitives et j’analyse leur pauvreté. 

 

Ce qui est important aussi c’est l’humeur dans le soin!

Absolument. Mais je trouve aussi que la force de ce travail c’est que si par hasard je suis triste ou soucieuse, ce partage qui va vers un mieux-être de la personne  malade  m’aide aussi à me sentir mieux. Ce n’est pas quelque chose à éviter, c’est une gratification. C’est pour cela que je dis toujours merci et ce n’est vraiment pas par politesse car je suis toujours mieux même si je suis très fatiguée. Au terme d’une grande journée, j’ai reçu plein de lumière, de paroles et cela remet du sens à ma vie. C’est thérapeutique pour moi aussi. Howard Buten disait «  so good to be good »… 

 

Sinon y a t-il des choses que vous aimeriez faire, que vous n’avez pas expérimentées?

Certainement. Mais même s’il  y a beaucoup de paroles qui remontent et qui sont les mêmes dans la bouche de tous ces patients, je trouve que c’est nouveau à chaque fois. Je ne ressens pour l’instant aucune routine, aucune lassitude.  C’est un peu ma nature, je suis un peu comme ça dans la vie.  C’est pour cela que j’aime tellement Bobin, qui se réjouit aussi de choses très simples.  Même si bien évidemment, ce n’est pas toujours simple de jouer pour une personne qui va mourir…

 

 

Vous semblez ne pas avoir de frustrations!

Si quand je ne peux pas jouer ce que l’on me demande. Ça m’arrive régulièrement.  L’autre jour, il y a un patient qui m’a demandé de jouer du Rolling Stone. Un titre précis que je ne connaissais pas et je n’y arrivais pas. Parfois, je cherche aussi sur Internet pour voir si je ne peux pas trouver une partition. Ce qui me frustre c’est de ne pas connaître une musique alors que ça paraît évident. Souvent tout le monde se met à chanter, et moi je ne connais pas. Je n’ai pas une culture de la variété très développée, et je ne peux pas toujours répondre à une demande précise.  Mais en réalité, les gens sont toujours contents.  A ce propos une anecdote amusante me revient en tête . Un jour je n’arrivais pas bien à comprendre une patiente qui me disait à la fin «  Tcheklundi. » Je ne connais pas du tout lui ais-je rétorqué, mais je vais le marquer et la semaine prochaine je vous l’apporte. Elle éclate de rire et me dit «  Non, je vous demandais si vous veniez chaque lundi… " L’on a fait que rire pendant toute la séance tellement c’était drôle… 

 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

mercredi, 27 janvier 2021

Patrick Laure

grossesse,sport,interviewPatrick Laure est médecin de santé . Il a écrit plusieurs livres sur les bienfaits de l’activité physique et connaît bien le sujet  «  Activité physique et grossesse ». Il a organisé en collaboration avec des sages-femmes un premier colloque "Grand Est Activité Physique et grossesse" qui  a eu lieu en novembre 2018. Si la COVID le permet, un deuxième devrait avoir lieu en mai 2021. Patrick Laure évoque ce  sujet encore assez tabou de manière générale…

 

Vous développez des actions de promotion de l’activité physique pour la femme enceinte dans le Grand est. Quelles sont-elles?

Les femmes enceintes pratiquant une activité physique ne sont pas très nombreuses (environ 1 sur 5) et il est important de developper ce secteur. Il faut ensuite mettre en place un conseil auprès des professionnels de santé ce que j’ai fait en Martinique et dans le Grand Est auprès des sages-femmes. Et puis developper l’offre. Une femme enceinte doit pouvoir  faire une activité physique voire sportive encadrée au sein d’une structure. Mais c’est beaucoup plus compliqué à mettre en place qu’une offre pour le grand public. D’une part, la grossesse ne dure que 9 mois et d’autre part, souvent les femmes n'ont pas trop le temps de s’occuper d’elles-mêmes. Il faut donc s’adapter. Les femmes enceintes travaillent pratiquement jusqu’au bout et donc en journée elles ne peuvent se libérer.  Et lorsqu’elles le  peuvent en soirée,  souvent les créneaux sont déjà pris . Et puis, pendant ces neuf mois, il peut y avoir des freins à l’activité physique comme les nausées, les vomissements qui ne donnent pas envie aux femmes enceintes de bouger. Sans compter les réticences de l’entourage proche inquiet qui peut dissuader la femme enceinte de pratiquer…  Quelques endroits  existent comme à Obernai en Alsace, à la maternité de Nancy avec un club sportif qui propose une activité physique, à  l’hôpital universitaire de Strasbourg…

 

En novembre 2018, vous avez organisé le 1er colloque du Grand Est «  activité physique et grossesse ».  Comment s’est élaboré le projet?

Cela fait plusieurs années que je travaillais avec des sages-femmes notamment dans la Meuse. L’on avait élaboré un petit guide à la fois pour des professionnels de  santé, des acteurs du sport pour l’accueil des femmes enceintes et l’on voyait bien qu’il y avait des choses à faire dans ce domaine.  J’ai regroupé les sages-femmes que je connaissais avec d’autres et l’on a décidé d’organiser un événement ponctuel qui parle un peu du sujet. Et qui casse un certain nombre d’idées reçues. Il faut que la femme enceinte  bouge et le repos n’est absolument plus de mise y compris d’ailleurs dans la majorité des cas  lorsque la grossesse est compliquée.  Les universitaires doivent tenir ce genre de discours. 

 

Existe-il à l’heure actuelle des formations pour les sages-femmes? 

Dans le Grand Est, c’est une réflexion fortement en cours en sachant que l’on parlerait là de formation continue.  Le Collège National des sages-femmes a fait de l’activité physique l’un des thèmes centraux de ses 19ème journées nationales. .  L’université de Lorraine comprend un département de maïeutique avec un cursus de formation des étudiantes sages-femmes. Celui-ci comporte des heures d’enseignement consacrées spécifiquement à l’activité physique en périnatalité dont je suis chargé. 

 

Quelles sont les initiatives sur le sujet?

Actuellement,  pas grand chose. Il y a un an le Ministère des Sports voulait  développer ce domaine pour les sportives de haut niveau. J’avais été contacté à l’époque et j’avais dit "Sportives de haut niveau certes mais elles ne sont pas très nombreuses en France et il faudrait aussi faire un groupe de travail pour les femmes enceintes de tous les jours", ce qui a été fait. Il en est résulté un petit guide dédié aux femmes enceintes qui aurait du être distribué en septembre dernier mais le COVID a tout bloqué. Dès que possible, aura lieu une campagne de promotion de l’activité physique lors de la grossesse et  la diffusion de ce guide…

 

Il existe énormément d’idées reçues sur la grossesse sportive. Comme les fausses couches, la prématurité, la petitesse des bébés…

Ça n’est absolument pas avéré mais il faut parler d’activité physique, c’est à dire avec une intensité modérée.  On n’est pas dans du sport de haut niveau et l’on a d’ailleurs pour l’instant peu de données sur le sujet.  La majeure partie des études datent d’il y a une quinzaine d’années.  Du reste à la grande surprise de tout le monde, ces études ont montré qu’il existait au contraire tout un tas de bénéfices apportés par l’activité physique.  Notamment lorsque l’on  a des difficultés à concevoir avec une fertilité peu développée. En 2019  après avoir étudié des femmes en traitement pour infertilité ou syndrome d’ovaire politique, on a montré que les femmes actives avaient un taux de grossesse supérieure aux autres.   Le taux moyen de prématurité lorsque l’activité physique est modérée est exactement le même que dans la population générale.  Avec une constatation que chez les femmes enceintes obèses , le risque pourrait être diminué.  La taille de naissance n’est pas changée non plus et en outre, D’autre part, on a aussi pu vérifier l’impact de l’activité physique sur le nouveau-né. L’on a ainsi découvert qu’en matière de neuro-développement, les bébés de femmes actives à quelques jours de vie avaient  des capacités supérieures pour s’orienter et réguler leur état émotionnel après un bruit. Avec une plus grande capacité de discrimination sonore de mémoire auditive avec des scores psychomoteurs à 12 ans plus élevés.  L’activité physique, environ 30 mn par jour même s’il faut  l’adapter en fonction des trimestres permet un bon fonctionnement cardio-vasculaire, le maintien de la masse musculaire, améliore la qualité du sommeil avec un effet préventif sur la prise de poids ce qui permet de lutter notamment contre le diabète gestationnel. Les risques d'’hyper tension gravidique, d’incontinence urinaire, de pré éclampsie, de perte d’identité osseuse, de douleurs lombaires, d’anxiété sont moindres. On se rend compte depuis quelques années que lorsque les femmes enceintes sont obèses et atteintes d’un diabète gestationnel,  l’activité physique permet justement de servir d’adjuvant thérapeutique. Il n’y aura pas de guérison,  mais cela va permettre d’améliorer les effets d’un traitement médicamenteux. 

 

Tous les sports peuvent-ils être pratiqués?

Il existe deux courants de pensée. Certains vont vous dire que tel sport est formellement interdit, d’autres diront que chaque discipline peut être adaptée. Personnellement je me situe plutôt dans  la deuxième catégorie.  Par exemple le judo fait en général partie des activités à prescrire.  Or on peut dire à une femme judoka « Tu fais ce que tu veux au premier trimestre et après tu adaptes ton activité sous forme de tais qui est la forme adaptée du judo pour les femmes âgées, malades. »  Cela lui permet de monter sur le tatamis, de mettre son kimono, de rester dans son club et de ne pas se sentir exclue.  En revanche, dans certains cas, il peut y avoir des disciplines auxquelles il est préférable de renoncer. Ainsi une femme qui n’est pas sportive du tout qui viendrait en disant « Je veux faire du cheval pendant ma grossesse », j’aurais tendance à lui dire que ce n’est pas le moment. En revanche, une femme cavalière qui a un bon niveau, qui connaît son cheval, qui est expérimentée c’est différent. C’est vraiment au cas par cas.  Une interdiction formelle et majeure même si certains le réfutent un peu c’est la plongée sous-marine. C’est formellement interdit. Bien sûr, il faut mieux éviter les sports de contact, ou ceux englobant des risques de chute mais encore une fois tout  peut être adapté en fonction des possibilités locales, de l’expérience de la femme. Traditionnellement, on estime qu’au troisième trimestre  on va faire du stretching, des étirements, de la gym douce aquatique etc…

 

Selon vous, il n’y a donc aucun interdit?

Au cas par cas et avec les conditions que j’ai émises, il n’existe  à priori au sein de la population générale aucune contre-indication. Sauf maladie rare comme la maladie des os de verre. Ou si une femme a une rupture prématurée des membranes, ou une épilepsie non contrôlée. Pour une femme qui a des triplés pour l’instant on n’a aucune donnée.

 

La différence entre la sportive de haut niveau et la femme de tous les jours?

C’est un peu plus complexe pour la sportive de haut niveau  dans la mesure où elle peut avoir un objectif de compétition. Elle se retrouve enceinte et se dit « Dans deux mois j’avais prévu telle compétition importante » et elle doit gérer. cette situation. L’optique est totalement différente et la sportive de haut niveau a  l’idée après sa grossesse de  retrouver rapidement le niveau qu’elle avait avant ce qui n’est pas le discours de la femme lambda.

 

Pour une femme sportive, la relation mère enfant est -elle plus développée!

Les femmes actives sont souvent moins anxieuses, ont moins mal au dos, sont un peu moins déprimés. Les études ont montré par exemple qu’il existe une diminution du post partum après la grossesse même si l'on ne connaît pas tout encore. Pour toutes ces raisons effectivement, la relation mère enfant est meilleure.

 

Comment faire pour trouver les mots pour convaincre la femme de faire du sport?

Ce que l’on recommande en tout cas auprès des sages-femmes ou des médecins, c’est de penser à en parler ce qui est rarement le cas.  Mais on ne peut leur jeter la pierre car en consultation pré-natale, il y a beaucoup de choses à dire et le temps est conté. Il faut que le professionnel arrive à anticiper les prétextes pour ne pas bouger.  Pour les patientes déjà actives, on leur propose de continuer avec une activité aménagée.

 

Quel impact ont les relations sexuelles sur la grossesse?

Déjà on pourrait se demander si l’activité sexuelle est une activité physique. Tout dépend de ce que vous faites. Mais l’on sait qu’une activité sexuelle moyenne à courante représente à peu près 5 calories par minute ce qui en terme de dépense énergétique n’est rien du tout.  On sait aussi d’après un certain nombre d’études qu’une activité sexuelle régulière qui satisfait les deux partenaires diminue d’à peu près 2 à 3 fois le risque cardio-vasculaire donc on peut l’encourager. 

 

Au niveau de l’accouchement a t-on des études?

Très peu de choses sur le sujet existent  et l’ on ne sait pas encore si l’activité physique est favorable ou pas.  C’est un moment particulier souvent très privilégié et l’on a un peu de mal à mener des études sur ce court laps de temps. Certaines études disent que l'activité physique diminue les césariennes, d’autres disent que cela n’a pas d’impact. 

 

Normalement si le virus le permet, vous allez organiser un deuxième colloque « Activité physique et grossesse » en mai 2021. En quoi sera-t-il différent du premier? 

L’objectif du premier était de tordre le coup aux idées reçues et là on va entrer dans la pratique à proprement parler. On aura notamment en première partie de matinée quelques intervenants prestigieux pour actualiser les connaissances. Après tout se fera lors  d’ateliers par petits groupes en travaillant sur des sujets précis. Cela s’adresse surtout aux sages-femmes… 

 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

mardi, 17 novembre 2020

Fabienne Delacroix

peintre,art naïf,interviewFabienne Delacroix est la fille du peintre naïf Michel Delacroix et a repris le flambeau en trouvant sa voie avec selon les dires un brin de féminité en plus.  C'est une peintre émérite de la Belle époque, illustratrice, représentant des scènes de la vie parisienne ou campagnarde, les bords de mer, les châteaux de la Loire.  Elle a peint des séries comme les 24 vues de La Tour Eiffel, et a représenté les quatre saisons de Notre Dame de Paris.  Dotée d’un grand coeur,  contribuer à la collecte de fonds au profit de grandes causes a beaucoup de sens pour elle». Elle a par exemple soutenu l’action  contre le sida en partenariat avec l’AMFAR (American Foundation for Aide research) et la recherche contre le cancer en partenariat avec les joueurs de hockey de la NHL (National Hockey League… ). Ce qui a lui a donné l’occasion de rencontrer la famille Kennedy et Arnold Schwarzenegger. Possédant plusieurs cordes à son arc, elle a également un passé dans le domaine du théâtre et de l’adaptation de grandes oeuvres littéraires.  Elle a été présidente de plusieurs compagnies de théâtre, a collaboré à de nombreux spectacles à Paris et en province et à Madagascar où elle a habité de 2005 à 2014, elle a également été très présente théâtralement avec la création de la Compagnie Arts and Events et l’organisation de nombreux spectacles pour enfants et adultes…

 

C’est votre père peintre reconnu qui vous a initié à la peinture? 

Plus ou moins mais avec beaucoup de liberté. Je n’ai fait aucune école et suis complètement autodidacte.  Je me raccroche souvent à l’école des naïfs,  avec toutefois de petites nuances car l’on m’a qualifiée de « naïf raffiné « . En effet, la peinture naïve ignore la lumière, la perspective  et tout un tas de règles qui constituent l’art de peindre..  J’aime bien le terme «  figuratif poétique » …J’aime énormément cette idée de rêve, c’est d’ailleurs une époque un peu rêvée même si je n’ai évidemment pas de souvenirs. Je dis souvent que je rêve pour les autres… 

 

Pourriez-vous parler de votre manière de peindre?

C’est difficile d’expliquer, c’est un grand mystère d’inspiration.  Bien sûr je suis influencée par mes lectures, sur ce que je peux faire et puis l’inspiration vient  naturellement Je travaille avec des pinceaux très fins pour aller dans le détail.  J’ai peint à l’huile, mais pour des raisons d’odeurs très fortes;  j’ai basculé vers l’acrylique.  Cela sent très mauvais, et un jour j’ai été chez mon dentiste qui m’a dit «  Vous avez bu du white spirit ou quoi?  Je me suis rendue compte que j’inhalais cela à haute dose. Avec l’acrylique, l’on arrive maintenant à avoir un peu de matière ce qui n’était pas le cas il y a 30 ans. On ne trouvait pas toutes les nuances. Il n’y a aucune odeur et le séchage est instantané. Il m’arrive d’écouter des livres audio quand je peins notamment ayant rapport au sujet que je traite de manière picturale.  Par exemple, j’ai réalisé un triptyque, trois toiles qui communiquent entre elles autour du grand magasin «  Le Printemps » et j’ai réécouté «  Le bonheur des dames » de Zola . J’ai fait une affiche pour Annie Vergne directrice du théâtre du Guichet Montparnasse en liaison avec  son adaptation d’ » Une vie » de Maupassant, et j’ai réécouté l’histoire.  J’écoute aussi de la philosophie. et suis une philosophe de la joie… Spinoza et Montaigne par exemple sont des amis même si je n’ai pas forcément toutes les capacités intellectuelles et la patience de lire «  L’ »Ethique » . Quant à Montaigne  c’est un personnage si humain. Il existe des versions magnifiques comme l’enregistrement des essais de Montaigne par Michel Picolli.  Je suis dans la philosophie toute la journée et m’intéresse aussi à la littérature et à l’histoire. 

 

Est-ce vital pour vous de peindre?

Oui et quand je ne peins pas, cela me manque. J’en ai besoin; c’est ma vie et je suis heureuse car je fais vraiment ce que j’aime. Je suis comblée par mon travail et mes trois enfants.  Désirer ce que l’on a c’est cela le bonheur. Je suis complètement ailleurs, et il m’arrive de ne pas sortir pendant plusieurs jours. C’est mon petit chien en fait qui me force à sortir…  C’est tellement calme, j’ai la lumière, les plantes. Cela fait 25 ans que j’ai cet atelier et jamais je ne m’en séparerai.  Je me sens chez moi. Dans mes tableaux, ce que je cherche à faire ressortir, c’est la joie. Ma manière de peindre est tellement instantanée; rien ne transparaît à part  la joie. C’est d’ailleurs le retour que l’on me fait. Mes clients me disent qu’ils ont un rapport amical avec mes tableaux, que des fenêtres s’ouvrent qui les rendent joyeux et leur procurent du bien-être. Pour moi, ma mission est accomplie et contrairement à beaucoup de peintres, je n’ai aucune ambition particulière et ne cherche aucunement à faire passer des émotions ou des messages. Ma seule crainte c’est de ne plus pouvoir peindre. Quand j’étais plus jeune, j’ai eu des périodes où je n’arrivais jamais à rien. J’avais la toile blanche.  Il faut de la patience et de l’assiduité et je travaille tout le temps.  

 

Au niveau des couleurs vous avez forcément des préférences!

Oui, et je dois un peu me forcer à mettre du bleu. C’est un peu étrange d’ailleurs car c’est une couleur magnifique. Tout le monde aime le bleu, c’est le ciel, c’est l’infini. Quand on lit «  Le dictionnaire amoureux » de Michel Pastoureau, le bleu représente la couleur de l’infini.  Mes bleus sont plutôt pâles, je ne vais pas dans du cobalt, mais j’aime le ciel, la mer. Sinon je travaille toutes les couleurs, même si je ne suis pas dans les couleurs pop comme le violet. Mais c’est parfois amusant  de mettre un petit grain de folie. Une petite touche de couleur qui va faire toute la toile finalement dans un univers très uniforme. 

 

La musique vous inspire t-elle?

Mon rapport à la musique est totalement déconstruit et c’est l’art qui me donne le plus d’émotions soit dans les pleurs, soit dans l’allégresse.  En ce moment, vu mon état psychique personnel , la musique me fait trop d’effet et je n’arrive plus pour l’instant à en écouter. Je suis une modeste pianiste et j’ai quand même rapporté mon piano de Madagascar sur un bateau. Mais là aussi, je suis incapable de jouer en ce moment. 

 

Comment cela se passe t-il côté exposition?

J’expose environ 1fois par an et à chaque exposition,  c’est comme si je passais mon bac.. Je mets tout sur la table, et c’est ma seule source de revenus. Imaginez donc si mes tableaux ne se vendent pas…  Après cette exposition annuelle qui dure un mois,  je participe à une exposition collective.  Lors de mes expositions j’ai carte blanche mais les galeries aiment bien que je présente quelques vues de Boston ou de New York.  Maintenant que j’ai pris l’habitue de le faire; je le fais volontiers. A Boston et New York, j’ai une chance extraordinaire car là ou j’expose, ce sont des galeries magnifiques placées sur West Broadway, un emplacement de rêve. 

 

L’art naïf ne plait pas en France?

Je ne sais pas. Je pense que les Américains achètent avec leur coeur, alors qu’en France souvent on achète beaucoup avec ses oreilles. Il faut être simple et retrouver une âme d’enfant pour aimer l’art naïf.  Ce n’est pas une démarche forcément naturelle en France. J ’ai fait signe aux musées d’art naïf français notamment celui de Nice le musée Jacovsky. Mais ça ne s’est pas concrétisé pour l’instant. Nul n’est prophète en son pays; ce n’est pas très grave. 

Et en Europe? Je pense qu’il existe des possibilités en Allemagne et en Suisse. Aussi beaucoup en Europe de l’Est, c’est pour cela que je suis au musée en Bulgarie le Musée d’art naïf et intuitif à Belogradchik avec quatre toiles. Je fais partie de la collection permanente du Musée. 

 

Et au Canada?

Il y a un beau musée d’art naïf à Magog au Québec  (Mian Musée international d’Art Naïf), et j’en fais aussi partie avec deux toiles. Le directeur du Musée est très gentil avec moi et il est  d’ailleurs cité dans l'un de mes catalogues d'exposition.. «  Paris, jours heureux » C’est lui qui m’a qualifiée de » naïf évoluée » car il se demandait si en présence de mon oeuvre on était encore  dans l’ art naïf. Je suis un peu à la frontière de la peinture figurative traditionnelle et de l’art naïf. Il existe aussi une belle école d’art naïf canadienne par exemple. 

 

Vos influences?

Séraphine, le douanier Rousseau auquel on ne peut être indifférent, Henri Rivière qui était assez proche des estampes japonaises que j’aime aussi beaucoup, . Puis Bruegel, et les impressionnistes évidemment puisque c’est ma période, même si ma patte n’est pas du tout impressionnistes. On peut voir dans la manière dont je traite l’eau un peu de pointillisme. Personne n’échappe aux influences, on n’est que le produit de son passé, de son histoire  et des événements  auxquels on a été exposés. 

 

Vous avez sorti en 2018, un livre  édité chez Hervé Chopin  «  Paris, jours heureux ». Cet éditeur est-il de la famille du musicien. Et vous qui portez le nom de Delacroix êtes-vous de la famille d’Eugène Delacroix?

Non, Hervé Chopin n’a rien à voir avec le musicien. En ce qui concerne notre famille, , nous ne savons pas vraiment si nous sommes de la même famille qu’Eugène Delacroix. mais c’est possible. Comme il n’a pas eu d’enfants, c’est difficile de savoir.  Ce livre sur Paris est à la fois en français et en anglais. Cela me rend bien service et  me permet de vendre aux Etats-Unis.  J’ai aussi illustré  chez le même éditeur «  Les malheurs de Sophie » . C’est Sophie de Ségur arrière, arrière, arrière petite fille de la comtesse qui a signé la préface du livre. Ce qui donne donc Ségur, Chopin, Delacroix!… Quand j’étais enfant, je n’avais pas été particulièrement sensible à l’histoire des malheurs de Sophie mais plus récemment la rencontre avec la comtesse de Ségur a été comme une révélation. En tant que femme je me suis sentie finalement assez proche d’elle notamment lorsque je me suis rendue au musée de la comtesse. Elle a commencé à écrire à peu près à l’ âge que j’ai maintenant . Je vais vous confier quelque chose qui me tient à coeur. Concernant cette collection sur les malheurs de Sophie j’avais une trentaine de peintures et je ne savais pas quoi en faire. Les responsables du musée les ont gardés et je devais les exposer mais la Covid est arrivé et le musée a fermé. Ne voulant pas les vendre pièce par pièce, j’ai eu l’idée de faire une vente au profit de Madagascar où j’ai passé de longues années. L’argent récolté serait destiné à construire une petite école qui s’appellerait «  L’école de la comtesse de Ségur ».  Il me faudrait trouver un partenaire; j’ai deux ans pour ce projet; c’est le timing que je me suis fixée. J’ai des pistes de galeries, de ventes aux enchères.  C’est un projet qui me tient à coeur; c’est tellement pauvre là-bas.  Mais malgré le dénuement total, la joie est de mise . C’est  tellement différent de chez nous et de notre société de consommation.  C’est une belle leçon de vie et j’espère que ce projet verra le jour. Je compte retourner à Madagascar dans deux ans. Là-bas, il y a des gens que j’aime beaucoup, des gens très simples et pour mes 50 ans, je veux y retourner.   C’est le cadeau que je veux me faire...

 

y a t-il un écrivain que vous aimeriez illustrer?

Mon rêve est d’illustrer Marcel Pagnol qui est un amour de toujours et même si ça ne s’est pas encore réalisé, mon éditeur est tout à fait partant. J’ai même été en contact avec Nicolas Pagnol son petit fils, mais la famille a sa propre maison d’édition avec différentes versions.  J’espère vivement que ça se fera. . Au bout de 70 ans, cela tombe dans le domaine public et je ne quitterai pas ce monde sans avoir illustré Pagnol. Je suis née en 1972, il est mort en 73 ou 74 et j’attendrai 70 ans!…C’est un univers fait pour moi… Une différence entre la peinture et l’illustration? Pour moi c’est similaire même si parfois je me demande si je ne vais pas davantage du côté de l’illustration ou si je reste du côté de la peinture.  Je n’ai pas poussé intégralement la réflexion, mais parfois je suis entre les deux. Ça me va bien.

 

Il y a aussi les illustrations avec le chocolat de poche, les puzzles!

 Je fais ces projets surtout pour les rencontres même si l’on a tous besoin de sécurité et avec la Covid je diversifie. La peinture c’est très solitaire er rencontrer des gens est important pour moi. C’est enrichissant, et ça crée une émulation. Quand je travaille sur des projets collectifs, je travaille vraiment bien; ça me stimule. 

 

Le chocolat de poche est une histoire d’amitié!

Oui c’est un peu mon défaut , et je travaille  toujours ainsi.  J ’ai eu un coup de coeur pour le produit. Je trouvais ce chocolat  délicieux, et aimait la poésie qui en  émanait. J’aime beaucoup aller chercher des extraits pour illustrer des peintures; ça m’a emballée. Le créateur explique que tout le monde lui piquait ses tablettes, du coup il a eu l’idée de les cacher dans sa bibliothèque et s’est alors lancé dans la conception de tablettes dont l’emballage imite la couverture de livres. Ce sont des tablettes de chocolat qui se dévorent comme un livre, avec un pur beurre de cacao, sans OGM ni graisses hydrogénées. Il existe aussi une transmission de savoir en matière de gastronomie, d’art et de littérature. Le fondateur est  un grand passionné d’art, de littérature, de peinture qui a fait une reconversion. Il vient du milieu de la banque; il a pris les chemins de traverse et l’on s’entend très bien . On collabore régulièrement sur de nouvelles tablettes et puis on se stimule intellectuellement. Et c’est formidable.

 

Les puzzles

C’est une autre société située dans le 14ème arrondissement. «  Les puzzles Michèle Wilson ».   On a commencé avec deux sujets, c’est tout récent :  le château d’Azay-Le- Rideau et le Moulin Rouge. J e m’interroge parfois sur la valeur de mon travail : Est-ce que l’image est bien respectée, pas trop  banalisée? A partir du moment où le produit est un travail d’art en lui-même, c’est juste une chance de faire cela…

 

Vous avez aussi une carrière interessante dans le théâtre. Comment avez-vous débuté dans ce domaine?

Le théâtre a toujours été ma grande passion et monter des pièces que j'inventais, lorsque j'étais enfant constituait mon jeu préféré. Je tendais un rideau à un fil, quelques éléments de décor que je peignais et tout pouvait commencer. N'ayant  pas du tout le don du jeu. je laissais mes camarades jouer et préférais diriger… Puis à l'âge adulte le destin a provoqué de belles rencontres au sein de ce milieu. Je me suis formée sur le terrain comme c'est souvent le cas en étant assistante.

 

Votre séjour à Madagascar a favorisé cet amour du théâtre!

Oui, c’est là que  j'ai commencé "à voler de mes propres ailes" passant de l'écriture à la mise en scène. Rapidement les choses ont pris de l'ampleur grâce à un partenariat avec l'Institut Français. Je me suis tournée vers l’adaptation, car écrire pour le théâtre est un long travail qui suppose  une maturité que je n'avais pas et n’ai toujours pas.  Mais c'est une très belle aventure que de rentrer dans une œuvre de cette manière. Un mariage entre esprits avec l'auteur peut presque se mettre en place. Celui-ci  devient un grand ami, le compagnon de projet, on peut même dire de vie, au moins le temps de l'écriture. Et lorsque l’on est en expatriation, dans une culture toute autre, cela fait énormément de bien. Ce qui me tient le plus à cœur dans l'adaptation c'est la fidélité au texte.

 

Voyez-vous une ressemblance entre le théâtre et la peinture?  

Le théâtre est une peinture vivante. Un tableau qui se met en mouvement. Ce sont les mêmes ressorts créatifs qui sont à l'œuvre, la magie s'opère de la même manière. Dans un cas on passe du blanc de la toile à la couleur, dans l'autre du noir à lumière, mais c'est la même émotion de la création.

 

Que devient votre rapport au théâtre depuis que vous êtes revenue à Paris?

J’étais très abattue moralement suite à un drame personnel lorsque je suis revenue à Paris. Il fallait en plus que je me réhabitue à la vie en France après presque 10 ans à l'étranger et que je relève bien des défis. Mes contacts avaient poursuivi leur chemin, tout est en somme à recommencer. J’en ai alors surtout profité pour aller au théâtre selon mes envies, cela m'avait tellement fait défaut. Des rencontres ont eu lieu à nouveau comme cette belle amitié qui est née avec Annie Vergne directrice du Guichet Montparnasse. Les projets sont comme les désirs, ils existent toujours, notamment autour de Balzac et de Maupassant. Le contexte sanitaire va forcément les ralentir. Mais j’espère vivement remettre un pied dans le milieu du théâtre et peut-être faire encore plus se correspondre  les deux univers en  instaurant les toiles sur scène, à moins que ce ne soit la scène dans les toiles. 

Agnès Figueras-Lenattier

dimanche, 08 novembre 2020

Thierry Sajat

interview,poète,éditionThierry Sajat qui travaille au Ministère de l’Intérieur préside l'Académie de la poésie française depuis qu’il s’est installé à Paris .…Ayant écrit son premier poème à l'âge de 15 ans, il a publié de nombreux recueils et a obtenu plusieurs prix. Egalement éditeur et responsable de deux revues de poésie, c’est un homme passionné et généreux qui n’hésite pas à s’investir à fond dans ce qu’il fait…

 

En tant qu'amoureux des livres quel est le premier qui vous a marqué et quel âge aviez-vous?
Ce sont les deux premiers livres que l'on m'a offerts car avant je ne lisais pas. C'était Hervé Bazin avec " Vipère au poing" et " Lève-toi et marche". J'ai beaucoup aimé les deux , et par la suite je me suis mis à lire sans m'arrêter… J'avais 9,10 ans.


Vous avez écrit votre premier recueil à 19 ans, et votre premier contact avec un éditeur a été un échec!
Oui, je me suis fait escroquer , mais c'est un mal pour un bien car à partir de ce moment là, j'ai décidé d'être mon propre éditeur. Mais les débuts furent épineux et réalisés de manière artisanale. Je collais moi-même les ouvrages, les cousais. J'ai commencé par le faire pour moi, puis j'ai aidé un ami à faire son premier livre. Ensuite, d'autres personnes sont arrivées chez moi, et le côté artisanal a peu à peu disparu, le professionnalisme prenant le dessus. J'ai longtemps cherché un imprimeur compétent car les livres se décollaient, et je n'étais pas très content. C'est en province que j'ai trouvé.


Tous vos propres recueils sont donc publiés au sein de votre propre maison d'édition!
Oui, environ 24 ou 25 recueils dont des anthologies. J'en publie régulièrement et j'en ai d'ailleurs une en préparation sur Montmartre. C'est un bouquin qui devrait sortir dans deux ans et je recherche des poèmes d'aujourd'hui ainsi que des illustrateurs même si bien sûr nos aînés auront leur place. Quant à ma poésie, elle est classique, rimée…


Et les poèmes extérieurs que vous publiez sont-ils tous rimés?
Je m’occupe de deux revues. L'une « L’Albatros" revue de « l’Académie de la poésie française»  ne contient que des poésies rimées. Avec une poésie néo-classique admettant que certaines règles ne soient pas respectées comme les hiatus et autres. Alors que dans « Le Journal à Sajat » , ma propre revue, tous les styles sont présents. Je suis notamment très sensible à l'assonance lorsque je lis un poème. Je publie aussi parfois des romans, des nouvelles et des livres de photos. Je le fais généralement lorsque je connais l'auteur et ce qu'il fait. Sinon, il faut apprendre à le connaître, bien lire et accepter ou pas…


Pourriez-vous en dire davantage sur ces deux revues
On fête cette année les 70 ans de l'Albatros édité à 140, 150 exemplaires. En dehors des poésies, sont présents des articles sur la poésie en particulier, des critiques de livres. Louis Delorme qui nous a quittés récemment écrivait de magnifiques articles sur la poésie. Parfois également l’on retranscrit une conférence. Ainsi en a t-on par exemple publié une sur François Villon. J'ai également un site où généralement je publie le poème du mois et je cherche d'ailleurs quelqu'un pour s'occuper de ce site. Le journal à Sajat existe depuis 1983,84 et j’en suis au 117ème numéro. A l'époque, je travaillais dans un centre de tri postal et j'avais un collègue poète qui avait créé au sein de ce centre une revue intitulée « L’hippocampe" un très joli nom. Je commençais à correspondre avec des poètes de toute la France et j'avais moi aussi envie de fonder une revue. L'idée de départ c'était de publier sur un papier de journal mais je n'ai jamais réussi à le faire. Je cherchais un nom original et en attendant de le trouver on parlait du Journal à Sajat. C'est finalement resté. On peut dire que le titre comporte une faute mais je ne le considère pas comme tel. C'est juste une liberté.. Le tirage est de 300 exemplaires. avec 180 pages. J'en suis souvent un peu de ma poche mais étant le seul maître à bord, je me moque un peu de perdre de l'argent. Très peu de poèmes de moi se trouvent dans ces deux revues. Je laisse ma place et le fais surtout pour donner une chance à d’ autres.


Qu'est-ce que L'Académie de la poésie française?
C'est l'ancienne Académie des poètes classiques de France qui avait changé de nom avant que je ne la reprenne. Je l’ai reprise comme telle, j’ai juste ouvert au néo-classicisme sans oublier les classiques purs que nous avons toujours avec de très bons poètes classiques. Au début de mon arrivée, plus personne ne venait aux réunions et j'ai voulu essayer de faire venir d'autres personnes. Ce sont d’abord les montmartrois qui sont venus à l'Académie et grâce à eux, d'autres personnes nous ont rejoints. Nous organisons  une conférence d'une heure au café Le François Coppée sur un poète ou parfois sur un auteur tous les deuxièmes mercredis du mois puis nous terminons par une scène ouverte où chacun peut dire un poème. Si jamais nous n'avons pas de conférenciers, la scène ouverte dure deux heures…Il nous arrive aussi de faire une fois par an quand nous le pouvons un petit voyage. L'an passé nous étions allés chez Ronsard et cette année nous avons visité le château de Condé. Nous devions nous arrêter chez La Fontaine mais nous n'avons pas pu. Nous avons d'autres projets comme d’aller à Villequier l'année prochaine chez Victor Hugo. L'adhésion est de 40 euros par an et donne droit à recevoir les quatre numéros de l'Albatros et la possibilité de publier ses poèmes.


Vous faites aussi des rencontres à Montmartre!
Oui, mais cela ne fait pas partie du programme de l'Académie mais des amis de la poésie. Je suis en plus ambassadeur de la république de Montmartre qui s'occupe des vendanges et fait le bien dans la joie. De ce fait, je suis très présent là-bas, environ 2 à 3 fois par semaine. Nous organisons une rencontre de poètes chaque premier jeudi du mois à " La Crémaillère" de 10h à 12h et déjeunons ensemble après. On accueille aussi des chanteurs. Aucune conférence n’a lieu. On est juste tous ensemble, avec une scène ouverte dans un esprit montmartrois. Beaucoup qui viennent pour la première fois ne nous quittent plus ensuite… On veut simplement que ce soit de la poésie française et si c'est écrit dans une autre langue, on demande automatiquement la traduction. A Montmartre nous sommes une quarantaine et au François Coppée aussi.


Vous avez publié des gens comme Ferrat, Nougaro, Duteil
Oui j'ai eu la chance de publier Ferrat dans un numéro spécial sur l'enfance mais pas dans l'Albatros. Jean Ferrat avait écrit " Nul ne guérit de son enfance" et m'a permis de reprendre cette chanson. On a même signé un contrat à O francs car je n'avais pas les moyens de payer les droits d'auteur. Yves Duteil c'était au début quand je commençais. Quant à Nougaro c'était hélas l'année de sa disparition.


D'ailleurs Jean Ferrat a bercé votre enfance!
Ah complètement! Dès que je l’ai entendu chanter, notamment Aragon, ce fut un émerveillement. On ne peut pas être indifférent. Je me souviens aussi de Georges Moustaki, le premier que j'ai entendu. J'avais des professeurs qui nous avaient apporté "« Le métèque". Ah là là j'étais ébahi, déjà j'aimais les mots…


Refusez-vous parfois de publier certains poèmes? Si oui, pourquoi?
Oui, quand la qualité n'est pas vraiment là. Certains poèmes ne veulent rien dire se contentant d’aligner des mots les uns sur les autres. A l'Académie, un Comité de lecture (deux personnes plus moi) sélectionne les poèmes. C'est rare que l'on ne soit pas d'accord sur le choix d'un poème et cela constitue toujours un coup de cœur. Quand un poème n'est pas bon, je suis certain de le retrouver dans ceux qui sont mis de côté. Mais parfois je suis un peu plus tolérant surtout dans ma propre revue. Il arrive que l'on fasse retravailler l'auteur pour le numéro suivant et cela fonctionne très bien. J'ai besoin de regarder la prosodie, mais également l'émotion qui se dégage. Vous avez des poèmes très classiques qui sont très bien écrits mais sans dégager de véritable émotion … Il faut que je sois touché…


Quel est le ou la plus jeune et le ou la plus âgé que vous ayez publié?
La plus jeune il me semble est une jeune fille qui avait 14,15 ans; elle écrivait très bien. J'ai aussi publié des enfants dans ma revue. Quand un enfant m'envoie un poème, je ne dis jamais non. Le plus ancien, il est toujours là, il a 97 ans. Gérard Laglenne un poète très connu à l'Académie. On a des personnes très anciennes comme par exemple la vice-présidente Marie-Thérèse Arnoux 99 ans. On ne la voit pas souvent mais elle vient régulièrement à notre Assemblée générale. L'an dernier, elle nous avait concocté un poème pour ses 100 ans qu'elle n'a pas encore… Il y a je crois à peu près le même nombre d'hommes et de femmes mais je ne fais pas très attention à ce genre de choses. Cela dit, c'est vrai qu'avant la présence féminine était réduite par rapport à celle des hommes…


Voyez-vous une différence entre la poésie féminine et la poésie masculine?
Je n'en vois pas vraiment. Peut-être les thèmes, mais je ne me rends pas réellement compte. Parfois, une femme écrit peut-être avec davantage de finesse. Mais cela dépend surtout de l'émotion de chacun.


Vous êtes aussi membre de jurys de concours!
Plus maintenant, mais j'ai présidé pendant 5 ans un jury important à Maisons Laffite le prix Calliope, nom d'une muse. Je trouve d'ailleurs que trop de prix existent qui ne valent rien et partout où je peux j'écris que la poésie n'a pas de prix. Nous avons un prix au sein de l'Académie que nous décernerons pour la deuxième fois l’année prochaine.


Vous avez eu vous-même des prix notamment le prix Renaissance!
Oui et je le considère comme un vrai prix car c'est un prix que l'on ne demande pas et l'on ne présente rien pour l'avoir. Je vais vous dire pourquoi je suis réticent aux prix quelquefois. J'ai obtenu mon tout premier prix à 19 ans. Or l’on m'a demandé une certaine somme d'argent que j'ai envoyée et j'ai reçu une belle croix de bronze. Etait-ce réellement pour la qualité de ma poésie ou plutôt pour l’argent? Combien j'ai connu d'associations où l'on donnait le prix à la copine, au copain. Je sais que cela existe toujours.


En vous basant sur votre expérience, quels conseils pourriez-vous donner aux jeunes poètes souhaitant se faire publier?
Faire attention. Lorsque je suis arrivé à Paris à 19 ans, j'ai donc envoyé mon manuscrit à une maison d'édition que je ne nommerai pas et cité sur RTL tous les jours. On me demandait beaucoup d'argent pour me publier mais je n'avais pas les moyens. 6 mois plus tard, on m’a relancé et demandé la moitié de la somme. Je me suis déplacé pour avoir un entretien et l'on m'a affirmé que j'étais un très très bon poète. On me mentait, on évoquait mes grandes capacités, mais ce n'est pas ces qualités là que je rechercherais aujourd'hui dans mes poèmes. Il ne faut pas se faire avoir et il est important de venir à des réunions comme celles que nous organisons le mercredi et le jeudi. Les jeunes poètes peuvent alors nous montrer ce qu'ils font et dans les scènes ouvertes, on se rend bien compte si c'est de la poésie ou pas…

 

Où faut-il aller pour prendre des cours de poésie?
Nous avons quelqu’un au sein de l’association qui s’en occupe en Bourgogne. Personnellement je n'en serais pas capable, il faut pouvoir le faire. Mais avec elle, cela fonctionne très bien et nous allons d'ailleurs la couronner l'année prochaine. C'est comme pour les ateliers d'écriture, il faut vraiment un enseignement de qualité. J'ai parfois participé pour observer ce qu'il se passait et le résultat est parfois très moyen. Si la personne ne sait pas elle-même écrire un joli poème et qu'elle apprend aux autres, c'est un peu étrange. Mais cela existe et n’importe qui peut faire un atelier d'écriture ou apprendre à faire une poésie…


Les français apprécient-ils la poésie à sa juste valeur?
Oui, elle a bien sa place. Ce sont les médias qui ne la mettent pas en valeur. Dernièrement j'étais à Asnières , j'ai rencontré une amie qui habite en Province et nous sommes allés boire un verre dans un café. Un charmant couple était assis à côté de nous et cette amie qui fait partie de l'Académie leur a demandé s'ils aimaient la poésie. Elle avait un poème d'amour à leur dire. Ces jeunes étaient émerveillés. Les enfants aussi adorent la poésie. Un pays où la poésie est bien considérée c'est le Canada. En France, du fait que la presse n’en parle pas, c’est difficile de vendre , et l’on est beaucoup d'auteurs à donner nos livres.


Quels sont vos souhaits?


J'aimerais bien que l'on me propose une conférence sur la poète Marie Noël, et également sur Renée Vivien. Elle était homosexuelle mais quelle plume! De magnifiques poèmes d'amour… J'ai un projet mais je n'en parle pas de manière très précise car j'avais arrêté à cause du confinement. J'aimerais bien reprendre. Ce serait de créer dans un café parisien tout un dimanche une séance de dédicaces d'auteurs ayant publié chez moi uniquement, avec des animations musicales notamment. Si une dizaine d'auteurs venaient ce serait déjà très bien. Ils pourraient faire venir des amis et créer une véritable émulation… Je souhaite continuer car c'est un domaine qui m'est cher. J'aime ce que je fais et l'édition est devenue un plaisir, une passion. On rentre vraiment dans la vie de l'auteur, dans ce qu'il fait. En lisant un poème de cette manière, on discerne des choses que l'on ne verrait pas en étant simple lecteur. C'est merveilleux…

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

 

 

lundi, 11 décembre 2006

Une interview de Roxane Decorte

Nous poursuivons notre série d'interviews en direct autour du thème : "Ils / Elles font de la politique à Paris : rencontres..." Après René Dutrey, Président du groupe des Verts au Conseil de Paris et élu du XIVe, nous quittons la rive gauche pour la droite, au sens propre comme au figuré puisque nous avons reçu lundi dernier à 11h Roxane Decorte, élue UMP du XVIIIe arrondissement, proche de Françoise de Panafieu et candidate aux législatives face à Daniel Vaillant (PS) dans ce même XVIIIe arrondissement - donc future députée du XVIIIe ?

Le rapport avec le XIVe arrondissement ? Des problèmatiques communes et une volonté de vous faire découvrir quelle est la réalité politique parisienne, qui sont nos élus - toutes les décisions importantes sont prises au niveau du Conseil de Paris, le Conseil d'arrondissement n'étant souvent qu'une mise en scène locale...

Merci de votre attention !

Pierre

Plus d'info :
+ Prochaine invitée : Quitterie Delmas, 28 ans, membre du bureau politique de l'UDF, conseillère nationale de l'UDF...
+ Notre émission précédente avait pour invité René Dutrey. Vous pouvez la consulter ici.

vendredi, 25 août 2006

Une interview de Pierre Castagnou (Part. VI)

C'est bientôt la rentrée. L'occasion pour Paris14.info de faire le point sur les dossiers en cours dans notre arrondissement avec Pierre Castagnou, Maire du XIVe...

Aujourd'hui, subventions aux associations, accès aux équipements et services municipaux, finances de la Ville...

Paris 14 (P14) : Sur quels critères objectifs nos élus fondent-ils leur décision d'accorder une subvention à une association ou à une entreprise ? Existe-t-il un document type, une "grille d'analyse", permettant en fonction d'éléments prédéfinis (exister depuis plus d'un an, être domiciliée dans le XIVe, avoir X dizaines d'adhérents, avoir des statuts démocratiques, etc.) de demander une aide ou une subvention ? En l'absence d'un tel document, opposable à toutes et à tous, où s'arrête la décision politique souveraine et responsable ? Où commence le clientélisme ?
 
Pierre Castagnou (PC) : Autrefois, les subventions étaient attribuées sur simple demande d’un élu. Il suffisait d’être bien avec tel adjoint pour obtenir une aide !

Les demandes de subventions font désormais l’objet d’une véritable procédure. Il faut remplir un dossier (que chacun peut trouver sur le site de la mairie) et fournir un certain nombre d’éléments administratifs et comptables. L’importance est donnée au projet pour lequel l’aide est sollicitée. Les demandes sont instruites par l’administration municipale. Le dossier est alors transmis à l’adjoint au maire de Paris concerné qui, en lien avec la mairie d’arrondissement, décide de la suite à donner. Les subventions sont votées, après avis du Conseil d’arrondissement, par le Conseil de Paris. Elles sont versées par le trésorier payeur général qui exerce un contrôle sourcilleux. Les contrôles ont été renforcés pour mettre fin aux anciennes pratiques : Cour des comptes, Inspection générale des services de la Ville.

Ce qui prime, c’est bien évidemment l’intérêt pour la collectivité et pour les Parisiens. C’est totalement transparent ! La liste et le montant des subventions attribuées par la mairie de Paris sont d’ailleurs consultables sur le site Paris.fr
On est à mille lieux des pratiques clientélistes et des abus des anciennes équipes municipales.

P14 : Pourquoi les bibliothèques du 14e sont-elles fermées le dimanche ?

PC : La question est en fait celle de l’amplitude d'ouverture des services municipaux et de l’adaptation des horaires aux nouveaux horaires de la Ville.

P14 : Et les piscines, en particulier l’été en période de forte chaleur, le dimanche ou le soir…

PC : C'est une vraie question. C’est le sens de la création du bureau des temps.  Les choses ont commencé à changer : ouverture de bibliothèques entre 12 heures et 14 heures, fermeture plus tardive des piscines… Mais ouvrir davantage les équipements a un coût, car on peut sans doute mieux organiser les équipes, mais il faudra aussi embaucher. L’équipe municipale s’est engagée à ne pas augmenter les impôts.

P14 : Le budget de la Ville ne figure pas dans le document « compte rendu de mandat de Bertrand Delanoë » de l’année en cours. Il n’est pas disponible non plus sur le site de la Ville de Paris… Mais il paraît que le déficit de la ville augmenterait ?

PC : Non, il n’y a pas de déficit !  Contrairement au gouvernement, la Ville doit voter son budget en équilibre, c'est-à-dire que les dépenses ne peuvent pas dépasser les recettes. Par contre la Ville emprunte. C’est vrai. Mais il n’y a rien d’anormal à emprunter pour financer des investissements, qui seront amortis sur plusieurs années.

Le recours à l’emprunt reste extrêmement raisonnable et maîtrisé, Paris a l’un des taux d'endettement le plus faible parmi les grandes villes de France. Il y a aussi une gestion très active de la dette et de la trésorerie, qui permet d’économiser 10 millions d’euros par an. L’agence d’évaluation indépendante Standard & Poors vient à nouveau d’accorder la note "3A" à la Ville de Paris pour la qualité de se gestion.

P14 : Vos prédécesseurs vous ont donc livré des finances saines…

PC : …Disons plutôt qu’ils n’ont pas beaucoup investi ! Et puis les finances de la Ville sont grevées par le désengagement de l’Etat. Tout le monde le dit, même les collectivités de droite. Le gouvernement a confié de nouvelles compétences (RMI…), mais il s’est gardé une partie des crédits qui allaient avec ! Cela représente 150 millions d’euros par an.

P14 : Il a pourtant été inscrit dans la Constitution que tout transfert de compétences doit s’accompagner des ressources afférentes ?

PC : Ce n’est pas respecté. Sont concernés le RMI, la prestation handicapé, etc.…

P14 : L’opposition réclame un audit des finances de la Ville à mi-mandat par une agence indépendante. Pourquoi ne pas lui accorder ?

PC : Ce n’est pas sérieux. On fait des audit en début de mandat pour mieux connaître les choses, pas à mis parcours. La transparence existe. Il y a des débats budgétaires, une commission des finances : tous les chiffres sont disponibles à l’ensemble des élus. Ce n’est pas un audit qui permettrait d’accroître la transparence, ce n’est pas le but d’un audit.

Propos recueillis par Dan Krajcman et Pierre Vallet - cette interview a été relue par Pierre Castagnou

Plus d'info :
+ Transports en commun & déplacements, accessibilité, bilan de la mandature... Lundi prochain, suite et fin de notre interview de Pierre Castagnou.
+ Interview de Pierre Castagnou Part. I / II / III / IV / V...
+ Toutes nos dernières interviews - y compris vidéo.

lundi, 21 août 2006

Une interview de Pierre Castagnou (Part. IV)

C'est bientôt la rentrée. L'occasion pour Paris14.info de faire le point sur les dossiers en cours dans notre arrondissement avec Pierre Castagnou, Maire du XIVe...

Aujourd'hui, sans-abri, logement social, Loi SRU et spéculation immobilière...

Paris 14 (P14) : Venons en à la question des sans-abri. Deux groupes importants dans le 14ème, l’un devant la caserne des pompiers Marché Villemin, l’autre Avenue du Gal Leclerc devant Pier Import. D’ailleurs, à cet endroit, il y avait un banc, on a enlevé ce banc et maintenant ces sans-abri ont disposé là des chaises, des matelas, des canapés... Comment réagissez-vous devant cette situation ?

Pierre Castagnou (PC) : Nous avons mis en réseau tous les acteurs intervenant auprès des sans-abri : assistantes sociales, Emmaüs, SAMU social, Restos du cœur, BAPSA… Souvent ils travaillaient séparément. Nous avons chercher à mieux coordonner leur action, développer une synergie.

Les sans-abri sont une population très composite. Il y a de plus en plus de femmes, de plus en plus de jeunes. Il faut agir très vite, dès que les gens tombent dans l’errance, pour éviter la désocialisation, d’autant que beaucoup de sans-abri ont un emploi, ont un revenu…

Parfois les choses sont plus difficiles. Les gens vivent dans la rue depuis longtemps. Ils n’ont plus aucune attache et ne veulent pas avoir affaire aux institutions.
Une des réponses est la construction de résidences sociales, de taille modeste pour faciliter la réinsertion. Nous avons ainsi quatre projets dans l’arrondissement. Le chantier de la première résidence, rue de la Gaîté, vient de débuter.

P14 : Au bout d’un certain temps, il y a une exaspération des riverains

PC : Oui, le Samu social, la BAPSA qui dépend de la Préfecture de police [ndlr : Brigade d’Assistance aux Personnes Sans Abri] interviennent… On a récemment recensé une centaine de sans-abri dans le 14ème. La police intervient en cas de trouble de l’ordre public.

Le problème, c’est parfois que les sans-abri refusent d’aller dans des centres d’hébergement d’urgence parce qu’ils craignent la promiscuité ou la violence, refusent la contrainte, n’arrivent pas à renoncer à l’alcool…

J’en appelle aussi à la compréhension de chacun. Se retrouver sans toit peut arriver à tout le mode : on perd son boulot, on se sépare de sa femme ou de son mari, on perd son logement et on a vite fait de se retrouver à la rue. D’ailleurs souvent les gens aident les sans abris en leur donnant argent, matelas, couvertures…

P14 : Puisque nous parlons d'action sociale, qu’en est-il des problèmes de locaux du Centre social Didot Broussais menacé d'expulsion à l'hiver dernier ?

PC : Le problème est réglé. Il était impensable que l’AP-HP puisse mettre à la porte le seul Centre social du 14ème. Le centre restera sur Broussais. Il sera relogé par la ville dans le cadre de la reconversion du site. C’est l’engagement que j’ai pris et il sera respecté.

P14 : Le 2e centre social du quartier Porte de Vanves est programmé pour quelle date ?

PC : Eh bien les travaux ont commencé avec la démolition de l’ancien centre commercial. La livraison est prévue en 2008. Outre le centre social, il y aura une crèche, un relais d’assistantes maternelles, et des locaux d’activité.

P14 : Rue Morère, l’un des deux projets devait être une crèche, mais ce serait une résidence sociale du type de la rue de Ridder… Un projet qui a dynamité dans tout le quartier Didot l’action en faveur des personnes sans abri.

PC : Non, cela n’a rien  à voir avec la rue de Ridder, où il existe un centre d’hébergement du Samu social. Il s’agira d’une pension de famille de 10 studios, où les gens bénéficieront d’un accompagnement social.

Propos recueillis par Dan Krajcman et Pierre Vallet - cette interview a été relue par Pierre Castagnou

Plus d'info :
+ Suite de notre interview après-demain avec l'un des thèmes phares de la mandature : petite enfance & crèches.