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mercredi, 19 janvier 2022

Brigitte Simon

tennis,discussion,bâtons rompustennis,discussion,bâtons rompusBrigitte Simon est une ex joueuse de tennis professionnelle entre les années 1970 et 80. Elle a été n°1, 36ème mondiale et a atteint la demi-finale de Roland Garros. Actuellement elle coache des sportifs et donne des conseils sur le plan nutritif... 

 

Tout d’abord pour commencer cette interview, quel cursus scolaire as-tu suivi ?

J’ai passé mon bac en candidat libre.

 

Ce qui implique un certain courage !

Du courage et de la chance. En fait, j’ai arrêté en janvier l’année du bac car le proviseur de mon lycée ne voulait pas me laisser partir 1 mois ½ en Afrique du Sud. Une grève a eu lieu au sein du lycée pour me soutenir et finalement j’ai pu partir. Mais quand je suis revenue, je n’avais plus l’humeur à me retrouver à travailler entre quatre murs et j’ai passé mon bac sans dossier, sans rien.

 

 

As-tu participé aux cours de gymnastique à l’école ?

Quand j’étais à Dijon, j’en ai été dispensée avec un faux certificat médical prétendant que j’étais inapte à la gymnastique pour m’entraîner au tennis à la place.

 

Que penses-tu de la place du sport dans nos écoles et lycées français ?

En primaire par exemple c’est une catastrophe. En France, on n’a pas une culture du sport  très développée ; c’était vrai à notre époque et c’est toujours vrai actuellement.  Je verrais bien comme dans certains pays les études le matin et le sport l’après-midi.

 

 

Quelles étaient les matières que tu aimais à l’école ?
Je n’étais pas du tout maths, physique, chimie. J’aimais bien le français, l’histoire. Et la philosophie, ce qui ne veut pas dire pour autant que j’avais de bonnes notes…

 

Quels philosophes à l’époque t’ont marqué ?

C’était surtout une découverte, et l’on parcourait juste les grands philosophes sans vraiment approfondir. Cette année en terminale a éveillé ma curiosité et après mon goût.  Je suis surtout une autodidacte et par la suite j’ai lu pas mal de livres de philosophes. A l’heure actuelle, j’aime bien Luc Ferry, Frédéric Lenoir dont j’ai lu tous les livres. Michel Onfray j’apprécie aussi, mais je le trouve difficile à lire.

 

Tu aimes beaucoup Jean D’Ormesson !

J’ai lu quelques-uns de ses livres mais pas tout, loin s’en faut. Ce que j’appréciais chez lui c’était sa manière d’aborder les choses lorsqu’il était interviewé ou qu’il intervenait en vidéo. C’était un régal de finesse, d’intelligence, d’analyse et d’appréciation de la vie, et de la nature humaine. En plus, il avait de l’humour. Il avait tout pour lui.

 

Son style était un peu précieux, non ?

C’est vrai, c’était un aristocrate né avec une cuillère dans la bouche. C’est d’ailleurs sa femme qui avait de l’argent.  Mais c’est sa philosophie de vie qui était intéressante. Ce qu’il disait, ce qu’il pensait. Toujours avec légèreté, sans polémique, sans agressivité. Les mots étaient souvent très justes, je l’adorais.

 

 

Tu aimes aussi les polars !

Oui pas uniquement et un peu moins maintenant. Mais avec un bon polar on passe toujours un bon moment. Agatha Christie ? Oui, je l’ai beaucoup lue. J’aime bien aussi Douglas Kennedy, Laurent Gounelle, Mathieu Ricard. Tous ces gens là, ça me parle…

 

 

Tu aimes les citations. En voici une de Diderot: «  On avale à pleine gorgée le mensonge qui nous flatte et l’on boit goutte à goutte la vérité qui nous est amère. «  Es-tu plutôt pour dire la vérité ou éviter de blesser ?

C’est une très belle citation en tout cas. Toute vérité n’est pas bonne à dire mais j’ai beaucoup de mal avec cette phrase. Quand j’étais jeune j’étais vraiment cash et en vieillissant je le suis un peu moins. Mais selon moi le déni n’est pas très bon. Il faut être un peu diplomate mais la vérité a toujours intérêt à sortir et comme le dit Di∂erot à petite goutte pour que ce soit moins violent. Il y a aussi des gens incapables d’entendre la vérité et ce n’est pas la peine de les blesser inutilement. Mais quand  tu atteins un bonne complicité avec quelqu’un, la vérité peut faire progresser. A force de cacher la vérité, on se complait dans un système peu productif et au sein duquel on se renferme…

 

Connais-tu Deepak Chopra ?

Je suis ses méditations auxquelles j’ai vraiment commencé à m’intéresser vers l’âge de 55 ans… Et depuis j’en fais tous les jours plus ou moins longtemps dans mon lit. Ce n’est pas une discipline cartésienne et il existe des jours où c’est plus ou moins facile.

 

Et le yoga ?

J’ai essayé plusieurs fois mais cela ne me correspond pas. Je n’y arrive pas, je m’embête et j’ai définitivement rayé le yoga de mon vocabulaire… J’utilise aussi beaucoup la cohérence cardiaque au niveau de la respiration.

 

Penses-tu que si tu avais découvert toutes ces méthodes lors de ta vie de joueuse cela t’aurait aidé ?

Ah oui car cela te permet de te mettre dans ta bulle. La respiration c’est la base de tout

Et quand on fait du sport, c’est encore plus important pour calmer son stress, ses émotions. En outre, toutes ces techniques sont relativement simples, pas besoin d’avoir fait polytechnique pour y arriver. Cela ne résout pas tout mais pour le tennis, sport individuel, on a besoin de gommer un peu toutes ces choses parasites qui peuvent intervenir même à l’entraînement.  Je fais un peu de coaching mental avec des sportifs et quand je leur parle de la respiration, ils me rient au nez en se disant si elle n’a que ça à nous proposer ça ne va pas aller. Or, ils se rendent compte que la respiration représente la base de tout. Pour faire le vide mental, pour se focaliser, se concentrer. C’est un outil formidable et que l’on peut utiliser n’importe quand.  Christophe André en parle très bien dans ses livres.  Si j’avais eu recours à ces méthodes, j’aurais gagné Roland Garros ( rires… ).

 

 

De manière générale, tu t’intéresses aux médecines douces !

Oui étant dans la prévention santé. Depuis une dizaine d’années, la nutrition fait partie de mes centres d’intérêt. J’ai vu à titre personnel des thérapeutes travaillant dans ce domaine et également au niveau préventif. Comment éviter des maladies ? En se complémentant et en adoptant une bonne hygiène de vie même si la mienne n’est pas parfaite. J’ai également eu recours à la réflexologie…

 

Et l’homéopathie ?
Je n’y crois pas trop. J’en ai pris lors d’une opération. De l’arnica pour ne pas gonfler, mais de manière ponctuelle.

 

L’hypnose ?

J’en ai fait mais ça n’a aucun impact sur moi… En revanche, j’ai fait de l’EMDR qui m’a fait beaucoup de bien. Egalement de L’E.F.T de l’acupuncture par les doigts que tu fais toi-même avec un rituel en formulant une phrase qui te parle. Et qui correspond à ce que tu veux régler toi-même.Ca fonctionne bien pour l’anxiété, le stress. Mais au départ ça parait tellement cul cul qu’on a du mal à y croire. Il faut vraiment pratiquer pour ressentir les bienfaits. Et puis ça dépend des individus, chacun doit trouver ce qui lui convient.

 

Que penses-tu de la vieillesse ?
Vieillir apporte une sagesse non acquise auparavant. Mais c’est un sujet très ambigu pour moi car j’ai perdu ma mère lorsqu’elle avait 55 ans. Et quand tu perds ta mère assez jeune, tu n’as plus de points de repères. Et plus j’avançais en âge, plus je me rapprochais de l’âge de la mort de ma mère. Lorsque j’ai eu 45 ans ça allait mais à 50 ans, j’ai eu un problème et ce fut difficile à assumer. Mais c’était plus par rapport à ma mère que par rapport à mon cas personnel. Ensuite, j’ai eu 55,60 et maintenant je n’y pense plus.  De toute façon, vieillir on n’y échappe pas et l’important c’est d’être en bonne santé pour faire du sport à son rythme, bouger, ne pas être handicapé.

 

 

Quand on est très sportif, voir son corps être de moins en moins performant n’est pas facile à accepter !

Il existe des gens atteints de handicaps très tôt. Bien sûr que cela fait peur car n’importe quel souci peut survenir. C’est vrai que pour nous qui avons fait beaucoup de sport c’est encore plus difficile. J’ai un ami qui a 75 ans qui est en train de mourir. Il a été sportif toute sa vie et c’est à présent une personne très diminuée qui attend la mort dans son lit. Quelle cruauté !...Quant à la peur de vieillir, elle est liée aussi à la peur de mourir. Plus on avance, plus on se rapproche de l’échéance, ce qui ne fait pas plaisir.

 

 

Maintenant que tu as arrêté ta carrière t’estimes-tu accroc au sport ?

Non, car je n’ai pas un tempérament à être une «addict ». En revanche,faire du sport est vital  pour mon équilibre et j’ai besoin d’en faire 3,4 fois par semaine. Si je n’en fais pas, ce n’est pas un drame, mais je ne suis pas vraiment bien dans ma peau. Mais après ma carrière, je ne voulais plus souffrir physiquement, ni avoir des douleurs physiques. Donc c’est vraiment de l’entretien. Je cours un peu, joue au golf, au tennis de temps en temps avec mes enfants.  Le plaisir de bouger, de me dépenser pour garder la forme. Il y a quelques années j’avais l’idée de faire un marathon. J’en ai toujours rêvé et je n’ai jamais concrétisé. Pourtant j’avais le temps de m’entraîner. Mais mentalement, je ne parviens plus à souffrir , je ne peux plus dépasser un certain seuil. C’est mental et comme je n’ai pas envie de travailler mentalement là-dessus, j’ai finalement renoncé. C’est le regret de ma vie.

 

 

Comment te situes-tu par rapport aux animaux ?

J’aime bien les chiens, et j’en ai eu pendant 15 ans. Les chats j’en avais peur, mais comme mon fils m’a ramené ses deux chats, j’ai une meilleure relation avec eux. Je n’aime pas les animaux sauvages, et faire un safari par exemple ne me tente pas du tout. Je n’aurais aucune émotion. Le bien-être animal me parle, mais malgré tout émotionnellement je suis un peu bloquée.

 

Aimes-tu le cinéma ?

Oui, mais pas du tout la science-fiction. J’aime les comédies romantiques, et je pleure facilement. Richard Gere est un comédien que j’aime bien. On a tous été fans de « Pretty Women » . Et puis il a des engagements humanitaires intéressants.

 

 

Quels sont les humoristes qui te font rire ?
La plupart sont morts. Bedos, Devos. J’aime bien Murielle Robin, Anne Roumanoff et Patrick Timsit. Blanche Gardin ? Sans plus…

 

 

T’intéresses-tu à la politique ?

Oui ; mais il n’y a guère de prétendants que j’apprécie. Notre époque est d’une rare indigence à ce niveau là. Pour moi, le droit de vote est quelque chose d’important, mais pour les prochaines présidentielles je ne sais même pas si je vais me déplacer. Je ne sais pas pour qui voter… Que l’on soit de droite, de gauche ou du milieu, on nage en pleine impéritie…Ce n’est pas la politique qui mène le monde, mais les lobbies, la grande finance et les autres ne sont que des pantins. Il existe une vidéo comprenant une parodie sur le sujet avec la chanson de Christophe « Les marionnettes.

 

 

Crois-tu au hasard ?

Pas vraiment. Selon moi, quand on rencontre les gens ou quand il nous arrive quelque chose, ce n’est pas du hasard. Ca devait arriver. A nous de réfléchir et de se demander pourquoi telle chose est arrivée ou pas d’ailleurs. Il existe des signes avec de bons et de mauvais événements. Un peu comme une défaite ou une victoire dans un sport. C’est cela qui nous fait évoluer et nous permet peut-être de changer de direction. Si on ne réfléchit ni au bon ni au mauvais, cela veut dire que l’on ne sait pas où l’on va.

 

 

Le surnaturel est-il un domaine qui t »intéresse ?

Je m’intéresse à la vie après la mort. Est-ce que je crois à la réincarnation ? J’aimerais bien. Et si cela existe, trois vies me tenteraient : joueuse de golf, comédienne ou écrivain…

 

On va finir par un sujet actuel. Es-tu vaccinée ?

Oui.

 

Par conviction ou parce que ça permet d’être libre ?

Surtout pas par conviction…

 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

mardi, 16 novembre 2021

Isabelle Demongeot

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Isabelle Demongeot est une ancienne joueuse de tennis professionnelle. Elle a été n°1 française mais a subi un véritable traumatisme puisqu’elle a été violée pendant plusieurs années par son entraîneur Régis de Camaret. Lundi 22 novembre va être diffusée sur TF1 une fiction tirée de son histoire et de son livre « service volé «  écrit il y a déjà plusieurs années… C’est l’occasion de s’entretenir avec elle.

Mais avant écoutons Patrice Hagelauer ancien coach de Noah lors de sa victoire à Roland Garros parler d'elle :

" J'ai admiré la joueuse et à aucun moment sur le circuit on la sentait dans une situation aussi dramatique que celle qu'elle a pu vivre. Elle formait une petite équipe à l'époque un peu à part avec Nathalie Tauziat et leur entraîneur Régis de Camaret. Ce dernier essayait de mettre des barrières avec la fédération prétextant que personne ne savait enseigner correctement. C'était probablement une manière pour lui de rester à l'écart sans que personne ne vienne voir un peu ce qui se tramait. On allait les voir de temps en temps car les résultats étaient excellents mais les contacts étaient assez distants. On n'a jamais pu vraiment percer ce qui se passait derrière et lorsqu'on a appris la vérité on était tous effondrés. 

Le jeu d'Isabelle était pur, très complet; elle savait tout faire. C'était à la fois élégant et efficace, avec un sacré tempérament. Quand on la voyait jouer, on se disait " Le tennis c'est facile". 

C'est une personne rare et riche , très intelligente qui a envie et besoin d'enseigner et de transmettre ses connaissances et son expérience. Discuter avec elle a quelque chose d'exceptionnel car elle ne parle pas souvent ni de ce qui lui est arrivée ni de ce qu'elle voudrait ou pourrait faire pour le tennis. La fédération aurait tout intérêt à la prendre en considération.."

Deuxième avis celui de Florence de La Courtie ex n° 1 française et entraîneur reconnu : "C'est un coach extraordinaire. Mes petits fils dès que ça ne va pas vont la voir  alors qu'ils ne jouent pas si mal que ça. L'un est à O et l'autre à 2.6. Ils adorent être entraînés par elle. A chaque fois, elle est très dure sur le terrain mais elle leur donne la pêche  et ils sont vraiment heureux de travailler avec elle. Et tous les entraineurs n'ont pas ces qualités là!...

J'espère que ça va aller pour elle car c'est une fille qui a énormément de qualités et qui a beaucoup souffert. C'est vraiment regrettable qu'à l'époque la Fédération n'ait pas trouvé une solution avant que les problèmes n'éclatent. Car il y a quand même eu 20 filles qui ont témoigné contre Régis de Camaret.  Ce qui est dommage c'est qu' Isabelle soit  davantage connue pour ce qu'elle a vécu que pour son palmarès tennistique..."

 

                                                  Interview

Un film sur le drame que tu as vécu va être diffusé sur TF1 lundi 22 novembre. Que ressens-tu ?

Tout s’est un peu précipité et le film est sorti un peu plus tôt que prévu. Mais je m’y suis préparée et c’est la fin d’un processus après l’écriture de mon livre. J’ai trouvé que c’était intéressant de prendre un petit peu de recul par rapport à toute cette histoire en déléguant à une actrice Julie de Bona qui joue merveilleusement ce rôle. Et j’ai envie de dire que c’est quelque chose qui ne m’appartient plus.

 

Concernant le déroulement du film, as-tu laissé complètement libre cours à l’équipe ou es-tu intervenue quelque peu ?

Cela fait 3 ans que l’on est sur le projet et c’est Jérôme Foulon le producteur qui est venu à moi et qui m’a dit qu’il avait envie de tourner quelque chose. Et je dois dire que l’on a fait un bon travail ensemble. Il a écouté, fait quelques interviews de différentes personnes, est retourné sur les lieux. Pour moi, forcément c’est une forme de reconnaissance avec une chaîne de télé qui propose de montrer ce qui m’est malheureusement arrivée. C’est un projet dans lequel je me suis beaucoup investie. Cela se passe dans mon village, la partie que j’adore qui est le côté de La Ponche avec de très belles images du côté sauvage. On a tourné évidemment quelques scènes dans mon petit club et je précise que c’est une fiction adaptée de mon livre intitulé «  Service volé ».   Je ne suis pas allée tous les jours sur le tournage et n’ai pas assisté à toutes les prises de vue car l’actrice redoutait de devoir affronter mon regard quand elle jouait les scènes. Ce n’était pas simple pour elle. J’ai respecté totalement sa demande mais je ne pouvais pas tenir et il fallait que  je rencontre les acteurs et actrices , tout ce petit monde qui a d’ailleurs été extraordinaire  avec moi. Cela m’a permis de vivre des choses inconnues jusqu’alors et qui font du bien comme mon père qui prend la parole , qui dit être fière de moi à la fois comme une femme qui porte un message et qui dénonce des agissements et également comme joueuse de tennis.  J’ai ressenti de belles émotions et je me dis que c’est arrivé au bon moment et que c’était chouette.

 

Et maintenant que deviens-tu ?

Ma passion pour le tennis m’accompagne toujours. J’ai envie d’exprimer beaucoup de choses sur l’enseignement puisque cela fait des années que je suis dedans. Après mon expérience au centre d’entraînement avec Amélie Mauresmo et plusieurs autres joueurs et la création de mon association «  Tennis en liberté » dans les quartiers sensibles, j’ai souhaité toucher à l’aspect loisir et j’avoue que je m’y adonne  régulièrement à Ramatuelle un très bel endroit. J’ai beaucoup réfléchi à cet aspect d’accueillir un joueur de tennis qui a envie, peu importe son niveau, de ressentir des choses, d’évoluer, d’apprendre. C’est primordial qu’on le respecte de A à Z. Et qu’il puisse repartir avec quelques notions supplémentaires. J’y ai mis toute mon énergie comme si c’était une Amélie Mauresmo ou un joueur ayant envie de devenir pro.  Ayant exercé au sein d’un centre d’entraînement aves des joueurs et joueuses de haut niveau et d’un autre côté ayant goûté au tennis loisir, j’avoue mieux m’y retrouver dans le tennis loisir….

 

Pourquoi ?

Car une forme de reconnaissance s’installe. Déjà il règne beaucoup moins de pression, et il existe un véritable échange. A l’époque des joueurs n’ayant pas les moyens de payer me demandaient de leur faire des prix… C'était très peu financé, or l’entrainement se déroulait jour et nuit. C’est un encadrement total et qui est parfois épuisant. Sans compter que du jour au lendemain le joueur ou la joueuse est capable de nous quitter en deux minutes ayant envie de changer d’encadrement et d’entraîneur. A l’époque, lorsque j’ai monté mon centre d’entraînement, j’avais dans l’idée de faire en sorte que les enseignements soient sur une forme de turn over et que ce ne soit pas toujours le même entraîneur qui entraîne la même joueuse ou le même joueur. Que l’on puisse arriver à échanger ensemble et que chacun apporte sa petite pierre à l’édifice, afin que le joueur se développe totalement. Mon combat est là aussi. Il ne se borne pas à parler uniquement des femmes victimes et isolées. L’entraîneur, l’enseignant doit essayer d’adopter un comportement plus juste et ne pas aller à l’encontre de ce que l’élève souhaite aussi. C’est un vrai échange, partenariat et aujourd’hui c’est essentiel dans l’apprentissage. C’est à plusieurs que l’on pourrait former de nouveaux champions et championnes. Je ne crois plus à l’isolement d’un enseignant ou d’un prof qui pense qu’il a la science infuse et qu’il va réussir..

J’avais un peu d’avance dans les années 99-2000 puisque c’est là qu’Amélie Mauresmo a éclaté au plus haut niveau mondial. Mais les enseignants ou les coaches de ma structure n’ont pas réussi à échanger et à le mettre en pratique. Ainsi un Christophe Fournerie qui était détaché pour s’occuper d’Amélie Mauresmo pendant quelques mois, lorsque je lui ai demandé de s’occuper de joueurs et joueuses de la structure, et que je lui ai annoncé que ce serait Sophie Collardey qui reprendrait, il n’a pas supporté. A présent, l’enseignant ne doit absolument pas devenir indispensable à son joueur à tel point que celui-ci soit totalement emprisonné et sous la coupe de cet entraîneur. Plein d’autres personnes pourraient lui donner de bons conseils.

 

C’est un vrai travail d’équipe que tu proposes ?

Oui, j’y crois vraiment et l’on peut d’ailleurs s’en rendre compte  lorsque l’on observe les joueurs et joueuses de haut niveau. Il existe toute une équipe autour. Nadal, Federer se sont entourés d’anciens joueurs expérimentés et dotés d’une certaine approche. Une victime isolée, c’est très mauvais, un entraineur isolé aussi.  Et c’est là où je trouve que notre fédération a le plus gros travail à effectuer. Il faut arrêter de mettre les clubs ou les coaches en concurrence et qu’un joueur de Saint-tropez puisse aussi aller s’entraîner dans d’autres clubs aux alentours. Et pourquoi pas bénéficier de coaches travaillant sur place. C’est dommage d’avoir un joueur tous les jours en face de soi et de ne pas ouvrir le discours vers d’autres enseignants. Ce n’est pas du tout dans l’air du temps, et il faut changer les mentalités.  Je pousse vraiment dans ce sens là en essayant de créer une dynamique entre clubs, et que l’on soit capable de vivre différentes expériences..

 

 

Tu as eu l’occasion de travailler avec Mauresmo lorsqu’elle était junior. Que penses-tu lui avoir apporté et qu’avez-vous travaillé ensemble ?

Je dirigeais la structure et ne voulais pas partir sur les tournois. J’avoue qu’à cette époque là je n’avais totalement repris la confiance en moi que j’ai acquise à l’heure actuelle pour peut-être la mener au plus haut niveau. En tout cas, j’avais peur d’y aller et j’avais envie d’une pause voyage et de ne plus préparer mon sac. En revanche, j’ai essayé de faire en sorte de lui procurer des entraîneurs disponibles et motivés pour ce challenge. Quand on l’a récupérée, elle était championne du monde juniors et en quelque temps elle s’est retrouvée en finale de l’Open d’Australie. Elle savait que j’étais présente, j’encadrais, je surveillais et j’avais un œil sur l’entraîneur qui s’occupait d’elle. J’étais un peu comme une médiatrice par moment, et elle savait que si ça n’allait pas, elle pouvait me parler. Mais c'était compliqué car on avait une joueuse très talentueuse, qui en même temps était en train de vivre une vie amoureuse avec une de mes meilleures amies.  J’aurais aimé comme elle a su le faire après la guider vers plus de travail et d’assiduité à l’entraînement. Mais finalement c’est peut-être en Australie qu’elle a joué son meilleur tennis car elle était libérée psychologiquement. Effectivement, elle avait déclaré son homosexualité et je crois que ce fut un moment très fort aussi. 

C’’est un fait que j’ai joué surtout la carte avec Amélie de savoir comment elle allait pourvoir vivre avec cette particularité. Et ce n’était pas simple. On a d’ailleurs pu voir tout ce qui s’est passé en Australie. Elle avait un revers fantastique qui tuait littéralement ses adversaires sur place mais c’était dur de la motiver côté travail. On était encore sur son talent, ses acquis et le travail dépendait de sa bonne volonté. Je me suis battue un peu avec cette situation en lui disant que pour atteindre la plus haute marche, il s’agissait de s’investir davantage. Finalement, elle a décidé de quitter la structure et c’est ce qu’elle a fait après avec ses divers coaches. Que ce soit Alexia Dechaume ou Loïc Courteau. Ce fut une belle expérience, je ne regrette pas du tout mais il y avait de gros enjeux difficiles à gérer. C’ était une Amélie Mauresmo encore jeune et presque ado…

 

As-tu des idées vu le drame que tu as subi pour qu’il y ait moins d’agressions sexuelles ?

Mon idée repose surtout sur tout ce qui se rapporte à l’enseignement. Il faut que l’on arrive à faire pratiquer du beau tennis, de beaux gestes. Et l’on doit mettre les bouchées doubles lorsque l’on a affaire à de petites jeunes filles au sein de l’école de tennis et au mini-tennis. Pour moi c’est de là que ça part, c’est le starter. Nos meilleurs coaches doivent être dans cette palette là pour apporter le plus d’éléments possibles . Je dois dire que je me suis un peu embêtée par moment dans le tennis féminin avec un jeu trop stéréotypé et j’avoue être un peu nostalgique. Est-ce la faute des enseignants, des coaches, des joueuses ? On ne sait plus trop aujourd’hui qui est la meilleure au monde, ça change tout le temps et on n’a plus vraiment de repères.  Mon idée c’est de délivrer un peu de fun et de plaisir sur un court et je ne suis pas sûre que toutes ces joueuses soient dans cette dynamique là et ça me dérange. Il me semble que l’on a un gros travail à réaliser à ce niveau là. Au départ, le joueur doit effectuer un certain travail, c’est une évidence. Il doit être un peu besogneux pour acquérir toute une gamme de coups. Ce qui m’a fait plaisir en tout cas c’est qu’on vu revenir des coups comme le shop et l’amortie. Puis on a vu se développer davantage de joueurs dotés d’un revers à une main. On avait entendu à un moment donné certains joueurs qui disaient » Le revers à une main c’est fini, ce n’est plus à la mode, ça ne sert plus à rien, il ne faut plus enseigner que le revers à deux mains." Mais pour moi, le revers à une main reste le coup le plus magique et le plus beau du monde car il se joue totalement relâché. Et permet un jeu vers l’avant, vers la volée, vers le développement d’un jeu plus fin.

J’ai l’impression que tous ceux qui ont appris un jeu besogneux de fond de court, à faire des ronds, des lifts à outrance, aujourd’hui ont un peu décroché. Ils gagnaient peut-être quand ils étaient jeunes, mais plus après.  C’est un peu ce que j’ai subi avec ce monstre d’entraîneur. Il m’a empêchée de développer un tennis vers l’avant, or j’étais faite pour ça. Pour aller à la volée, pour avoir un chop de revers et pas un tennis de contre et de renvoi. Et c’est très important d’arriver à amener le joueur dans des zones où il se sent bien.


Que penses-tu des joueuses françaises d’aujourd’hui ?

C’est un peu compliqué en ce moment. Le Covid a aussi beaucoup terni le circuit. Des filles comme Mladenovic, Garcia sont en train de décliner un petit peu mais la concurrence est rude. Ont-elles fait les bons choix à un moment donné concernant leur entourage ? Caroline aurait pu ne pas avoir toujours comme accompagnateur son père et peut-être s’octroyer des coaches un peu plus renommés. Ou tenter une expérience avec des étrangers. Il n’existe pas que la technique française, il est bien d’aller piocher ailleurs. Actuellement, j’ai un jeune qui joue très bien, j’ai envie de lui dire » Va faire ton expérience en Espagne, va découvrir un peu tous les secteurs de jeux avec des terrains différents."  C’est cela qu’il faut absolument apporter. Nos jeunes joueuses comme Burel et autres sont intéressantes mais elles n’arrivent pas encore véritablement à percer. Pourquoi ? Je ne suis pas assez le tennis pour pouvoir véritablement répondre à cela, mais les derniers résultats de la Coupe Billie Jean King sont assez décevants. Il y a encore du boulot, un travail mental est nécessaire c’est une évidence. On n’a peut-être pas non plus assez la niaque qui consiste à passer des heures à peaufiner où à construire de nouveaux gestes. On n’est pas prêt à cela.

 

As-tu un rôle au sein de la fédération ?

Au nom de l’affaire Sarah Abitbol qui m’avait beaucoup touchée en 2020, j’avais fait un article dans l’Equipe où je disais espérer qu’un jour on tendrait la main à toutes ces victimes. Fin 2020, la fédération est enfin venue vers moi. Je suis prestataire de service et je réfléchis sur la thématique de la protection des mineurs mais pas uniquement. J’avais besoin aussi que l’on me respecte, que l’on me reconnaisse dans mes qualités d’enseignante. Et d’ancienne joueuse évidemment. Je joue encore aujourd’hui, je donne des leçons sur le terrain, frappe la balle et on m’a demandé comment relancer le tennis loisir. J’ai fait toute une étude là-dessus. Ainsi que sur le mur que j’ai demandé à remettre absolument au cœur de nos pratiques. A l’âge de 6,7,8,9 ans un enfant qui joue contre un autre enfant qui ne renvoie pas la balle est habité par une certaine frustration. Or s’il tape contre un mur, la balle revient toujours. J’ai développé toute une réflexion à ce sujet sur les sens et l’ouïe, le son de la balle et sa trajectoire contre un mur. Ce travail parle énormément aux enfants et les résultats sont concluants. La fédération a tout ceci en main aujourd’hui et j’espère que l’on va pouvoir développer  ensemble mes suggestions dans les prochains mois avec la nouvelle direction qui a envie d’évoluer. J’espère pouvoir continuer à leur côté pour faire en sorte d’approfondir et ça me plaît. J’aurais pu à l’époque en 90, arrêter ma carrière tennis et dire «  Il faut que je sorte de tout ça, que j’oublie toute cette période et couper avec le tennis. Et bien non. J’ai fait le choix de toujours y rester et je prends énormément de plaisir. C’est incroyable combien ce tennis m’anime encore en tout cas dans ma tête. C’est une remise en question comme quand j’étais joueuse. Je suis capable chaque soir de faire un bilan des joueurs que j’ai pu avoir en loisir et de me dire comment puis-je faire pour que ce soit encore mieux et faire passer des étapes à mes élèves.

 

C’est beau cette passion du tennis ! Tu joues encore pour toi-même ?

Je n’avais plus envie de faire de compétition, je ne voulais plus être restreinte à mettre la balle dans le cours, plus envie de compter les points. C’est quelque chose qui me permet de me défouler. J’ai pu faire une compétition pour les plus de 40 ans et suis partie en nouvelle Zélande où malheureusement on a subi un tremblement de terre. Mais la compétition pour moi ce n’est plus d’actualité. Récemment j’ai fait de la compétition dans une toute autre activité qui s’appelle le pickabull qui fait fureur aux Etats-Unis avec une balle en plastique. Une activité qui demande beaucoup moins financièrement en tout cas pour les clubs comparé à la mise en place d’un paddle . C’est une activité qui m’a beaucoup plu. J’ai fait les championnats de France et j’ai perdu en finale du double mixte. C’était très chouette et très convivial. Je joue encore très bien et par moment je me challenge.

Je vais raconter une petite expérience que j’ai vécue il n’y a pas longtemps avec un client. C’est un joueur américain en vacances à Saint Tropez qui m’a demandé de taper la balle. Il était dans le challenge, et avait envie de se préparer en vue d’un événement de double. Il m’a proposé de faire un match où il avait les couloirs de double et pas moi. Je ne sais pas si tu imagines mon cerveau qui pendant 40 ans n’allait pas chercher les balles dans le couloir et qui du jour au lendemain devait changer son fusil d’épaule. Il m’a fallu quelques jours pour que je conditionne et c’était un nouveau challenge. Côté enseignement, j’arrive toujours à me projeter sur un challenge personnel et c’était une belle expérience. On a bien rigolé ensemble après et je lui ai que ce qu’il me demandait m’avait obligé à retourner mon cerveau…

 

 

C’est une constante adaptation !

Oui c’est ça. J’ai envie de former des enseignants et leur dire « regardez », « écouter », « véhiculez une image positive. Il faut penser à l’énergie que l’on va déployer lorsque l’on donne un cours, sa voix et l’attention que l’on porte à l’élève. Je trouve qu’avec les enfants, trop d’enseignants s’en foutent. C’est dommage mais je ne veux pas parler de cette réalité. Je souhaite que l’on retourne dans les clubs à la base et il faut que l’on revalorise les coaches et qu’on leur redonne envie d’avoir envie.

 

 

Justement quels sont les erreurs que tu as pu constater chez les enseignants ?
Trop souvent c’est de la garderie avec trop d’enfants sur un court ; ce n’est pas possible. Il y a aussi trop de demandes des parents qui ne comprennent pas pourquoi leur enfant ne joue pas mieux. Il ne joue qu’une fois par semaine, donc… Nous lorsque nous étions enfants quand on jouait une première fois ,on rejouait à côté avec les copains ou contre un mur. Si l’enfant n’est pas demandé par l’enseignant à venir pour un cours, il ne revient pas de lui-même. Il y a toute une éducation à fournir avec un mode de vie qui a changé.  Je vois trop souvent les enseignants sur les portables, peu motivés pour faire progresser  l’enfant quelque soit son niveau. Il y a des enfants talentueux d’autres beaucoup moins ; il y en a qui sont en grande difficulté et ceux là il faut quand même s’en occuper. Donc l’enseignant qui est apathique  et qui ne bouge plus sur un court de tennis, pour moi c’est très néfaste pour notre sport.

 

Et la relation avec les parents. Comment un enseignant doit-il se comporter avec les parents ?

C’est un vaste sujet. Certains enseignants de clubs passent aussi beaucoup de temps à discuter avec les parents en dehors du court. C’est épuisant par moment et on nous demande aussi des résultats très rapides sans vraiment fournir des efforts à côté. J’ai enseigné il y a quelques années au Racing Club Lagardère et je dirigeais l’école de compétition. On demande beaucoup d’efforts aux coaches et je trouve que les générations d’aujourd’hui  ne sont pas prêtes à véritablement s’impliquer davantage. Je dirais que la séance service que j’ai demandée à beaucoup de  jeunes consistant à retravailler tout seul ce coup dans leur club, je  l’ai rarement vue reproduite. On ne peut pas faire de miracle. L’enseignement pour moi c’est de taper un maximum de balles pendant 1 heure. C’est notre objectif. L’objectif de l’école suédoise c’est je crois de taper au moins 200 balles dans l’heure, on en est loin en France. Rien qu’en regardant les sceaux de balles des enseignants où il y a à peine 20 balles dedans c’est significatif. Je ne voiis pas comment on peut s’en sortir pour obtenir plus de résultat. Même si on ne peut pas faire que des champions, si on renforce un peu notre base avec un certain nombre de joueurs qui jouent bien au tennis, qui ont une belle technique, c’est déjà satisfaisant . Un enseignant doit pouvoir amener son joueur au moins en seconde série. Avoir mis le cota d’un enseignant à 15/2 me paraît peu judicieux. Je n’ai rien contre ce niveau là mais je pense que quand on est enseignant, une bonne qualité de balle est nécessaire. Sinon, il ne peut pas donner du plaisir ni en prendre et inciter son joueur à en redemander.

On aurait d’ailleurs bien besoin de femmes et de mixité dans les clubs. Pour moi, une femme à 3/6 a toutes les possibilités de répondre à tous les niveaux de clientèle à entraîner.  Je suis passée comme directrice de l’école de tennis de Villiers Le Bel, à l’époque une activité très prisée, où je n’étais pas salariée à l’année. J’étais en libéral et si le joueur ne revient pas le lendemain, tu ne manges pas.. C’est aussi simple que ça. Les cours que tu donnes, les joueurs que tu approches, il faut leur donner envie de revenir.

 

On voit l’expérience de la sportive de haut niveau qui a travaillé dur !

Voilà oui, et je suis obligée de continuer à travailler dur. Mais mon corps fatigue, et je dois dire qu’à certains moments, je suis contente de pouvoir faire évoluer mon sport par le biais demes réflexions. Avec un peu moins de terrain quand même car parfois je fatigue. On vieillit ! 55 ans. Mais je prends un sacré plaisir à taper dans la balle et par moment c’est un pur bonheur.

 

Tu as une fille ?

Oui, ma petite Cloé sans H. Elle a 7 ans, est mignonne comme tout et c’est le centre de ma vie aujourd’hui. Je suis malheureusement séparée de ma femme et je m’adapte ; elle aussi. Ma fille est en train de me découvrir et ça fait du bien. Par rapport à tout ce que j’ai pu traverser c’est le bonheur de ma vie et quand je suis avec elle, je suis avec elle.

 

Elle joue au tennis ?

Oui mais rarement sur un court car j’ai eu un gros problème de santé à l’oreille, et je n’ai pas pu taper dans une balle pendant deux ans.  Je l’ai fait jouer dans l’appartement, sur une pelouse. Je mettais les filets un peu n’importe où et avec lors du confinement je suis partie à Porquerolles avec elle. Et on a fait des trucs incroyables. Elle a tapé contre un mur à genoux, avec les deux mains, avec raquette à gauche, à droite, avec plusieurs balles, en jonglant, en sautant, en employant des jeux d’adresse. L’enseignement des petits était sans doute le secteur que je n’avais pas abordé, elle m’a poussée à y réfléchir.  Les enfants ont changé, ils ne veulent plus être compétiteurs à tout prix, ils veulent jouer. Elle voulait me montrer comment il fallait jouer et je l’ai laissée faire. Il faut que l’on change notre approche sur cette nouvelle génération qui fait tout plus que tout, qui ne souhaite pas de challenge de compétiteur one to one mais qui veut jouer en équipe. A nous sans doute de redonner sa place au jeu de double, à retrouver le plaisir de jouer en famille, de partager des choses à plusieurs. Il m’arrive de faire des confrontations où ils sont 4 contre 4 . Parfois aussi je me dis "Pourquoi ne fait-on pas que des lobs? Pourquoi n’apprend t-on pas le lob à 6,7 ans. J’ai déjà joué sur deux terrains côte à côte avec un filet plus haut sur l'un des deux pour travailler le lob au-dessus du grillage. J’ai remis le lance-balles au goût du jour qui amène de la gaité. Ce n’est pas le coach, ce n’est pas un lancer ; c’est une improvisation d’un lancer et c’est rigolo.

Pour en revenir à ma fllle, elle  a peut-être envie de devenir prof. Sa maman a un magasin de crocodiles et de chemises lacoste, elle veut aussi tenir ce magasin. On verra bien plus tard. C’est une sportive, elle est sagittaire. Elle a plein d’idées ; elle est merveilleuse….

Agnès Figueras-Lenattier

mercredi, 03 novembre 2021

Amélie Oudéa-Castéra

fédération,tennis,objectifsActuelle directrice générale de la fédération française de tennis, Amélie Oudéa-Castéra a été championne du monde des moins de 14 ans en 1992, et 18ème joueuse française. Après une brève carrière dans le tennis, elle a bifurqué dans une autre vie en entamant de brillantes études ( Sciences Po, Essec,, Ena), puis a travaillé au sein de grands groupes comme Carrefour, Axa. Elle a été élue femme digitale de l’année 2020. A l'occasion du Rolex Paris Masters 2021, elle se confie sur sa politique tennistique :

 

Vous avez fait quelques années sur le circuit professionnel de tennis, une vie qui finalement n’était pas faite pour vous. Vous n’étiez pas heureuse !

C’est vrai. A 18 ans, j’ai senti que mon bonheur serait plus important ailleurs. Sur le circuit pro, c’est parfois très austère , très solitaire avec beaucoup d’attente dans les avions, les gares, les aéroports, les chambres d’hôtels. Une vie faite aussi de beaucoup de rivalité, parfois de jalousie et le sport de haut niveau, la haute performance ne compensait plus ces aspects qui me faisaient davantage souffrir. Et à l’occasion d’une blessure qui m’a empêchée de bien jouer ces mois-là, je me suis dit qu’il fallait finalement que je boucle un peu cette première vie dans le sport de haut niveau et lle tennis pour aller en conquérir une deuxième dans un environnement plus équilibrant : études, copains, classe, émulation et ouverture intellectuelle plus forte.

 

Vous avez été la compagne de Gustavo Kuerten lorsqu’il a gagné Roland Garros en 1977. Avez-vous quelques recettes à nous donner concernant la manière dont doit se comporter une compagne pour faire gagner un grand Chlem ?

En fait, c’était une situation et un contexte très atypique, car je le connaissais du circuit junior. On s’était rencontrés quand on avait 14 ans, on avait beaucoup sympathisé, on avait eu une petite histoire d’adolescents quand j’avais 15 ans et demi, 16 ans. Or quand j’ai arrêté Roland Garros l’été qui a suivi ma décision d’arrêter, c’était très difficile de ne pas y participer et pas possible pour moi. Pour combler ce manque, j’avais candidaté pour contribuer à l’organisation du tournoi. Le directeur général de l’époque Gilbert Ysern m’avait alors proposée un petit job au planning des courts, la gestion des balles, la relation avec les joueurs. C’est là que j’ai retrouvé Gustavo que je n’avais pas vu depuis environ 2,3 ans et on a très vite reconnecté, sympathisé. On s’est revus au fil de la quinzaine, et de plus j’étais proche de son entraîneur Larri Passos. De fil en aiguille Gustavo et moi avons discuté, pris un verre ensemble, puis son entraîneur m’a proposé de venir dîner avec eux. Et cette petite histoire d’adolescents a repris au fil du tournoi, même si Gustavo était extrêmement concentré sur sa réussite. Mais c’était justement très bien. Je participais au tournoi d’une manière différente, et je pouvais suivre son épopée au jour le jour. 

 

Une brasserie nommée " Victoria"

 

Nos petits rendez-vous qui consistaient à se retrouver dans une brasserie intitulée Victoria, la bien nommée… du boulevard Victor tout près de chez moi étaient devenus un petit rituel porte-bonheur. C’était merveilleux avec des moments de bonheur volés à droite et à gauche pour égayer le quotidien et se donner une forme de petit cocon de douceur dans ce monde très compétitif. Une sorte de petit dérivatif…

 

Lorsque vous avez bifurqué vers une autre vie avez-vous gardé un pied dans le tennis ?

Le tennis était complètement dans mon ADN, j’ai été constituée par lui. En effet, je suis née dans une famille de passionnés de tennis, toute ma famille joue et c’est un élément extraordinairement important pour nous tous culturellement. Donc il était impensable que je coupe vraiment avec ce sport. J’ai arrêté de jouer en compétition, mais j’ai toujours maintenu un lien avec certains amis du monde du tennis. Et puis, j’ai toujours été membre d’un club,  d’abord au TCP puis au Racing, puis les deux. J’y allais de temps en temps pour avoir le bonheur de taper un peu la balle ou de prendre un verre avec des personnes après une bonne séance de gymnastique. En outre, j’ai toujours maintenu un lien avec l’institution fédérale elle-même. En 1997, je me suis occupée d’un groupe de travail sur la reconversion des sporifs de haut niveau. M’a ensuite été proposée de faire partie d’une commission fédérale sur l’éthique. Je suis également entrée pendant un moment au Comité directeur de la Fédération sur l’initiative de Jean Gachassin alors président de la fédération et de Gilmbert Ysern. Cela m’a permis de m’investir dans cet objet fédéral, de continuer à me tenir au courant des politiques tennistiques à la fois localement et au niveau central.  J’ai beaucoup apprécié de garder ce lien avec les élus et les équipes fédérale

 

 

Maintenant que vous êtes directrice générale de la Fédération, quels sont vos divers objectifs ?

On se dit souvent avec  Gilles Morreton, l’actuel président que l’on a 5 +2 objectifs.
Le premier c’est de bien organiser nos grands événements notamment Roland Garros et le tournoi du Rolex Paris Masters 1000 du circuit ATP.

Le deuxième objectif c’est tout ce qui a trait au haut niveau. Comment aider la direction technique nationale à essayer de vraiment relancer le tennis français. Et de partir à la conquête de la haute performance que ce soit dans l’éducation et la formation des jeunes dans les territoires ou après dans leur formation vers l’élite avec tous les compartiments que cela peut représenter := préparation tennistique mais aussi tactique, technique, mentale, médicale. Faire des champions de demain et permettre à nos espoirs de libérer tout leur potentiel. Le 3ème objectif c’est  le développement de la pratique dans les territoires pour les familles, les enfants, un peu pour toutes les couches de la population. On a l’habitude de dire que le tennis est le sport de toute une vie. Cela commence à 2,3,4 ans jusqu’à un âge très avancé. Notre doyenne a aujourd’hui plus de 100 ans. Avec également le développement du padel avec comme leader Arnaud Di Pasquale. C'est  une discipline dont s’occupe la fédération depuis 2014. 

 

Une seule femme présidente de ligue

 

Le 4ème objectif vise les enjeux transversaux sociétaux : la lutte contre le dopage, la corruption, les paris sportifs manipulés. Egalement tout ce qui a trait à la gouvernance et le fait de féminiser les instances dirigeantes de la fédération un peu à tous les niveaux de responsabilité. Aujourd’hui on n’a qu’une seule femme présidente de ligue et faire accéder plus de femmes à des responsabilités dans la vie fédérale est donc quelque chose auquel on est très attaché. Le 5ème thème a pour but la modernisation de notre modèle économique. C’est là que rentre le fait d’organiser dans le stade Roland Garros toute une série d’événements culturels, de divertissements dans des secteurs comme la gastronomie, la mode. Mais aussi d’autres événements se rapportant à d’autres sports. Ainsi a-t-on organisé récemment une compétition de boxe et un événement pour la fête de la musique.. On essaye de développer l’utilisation du stade au-delà du tournoi pour diversifier nos recettes. On a en plus monté un fond de dotation, sorte de mini-fondation au sein de notre fédération pour essayer de lever des fonds. Y compris en terme de mécénat pour derrière renforcer les moyens que nous avons pour accompagner les associations par exemple en matière de prévention des abus sexuels. Toutes ces thématiques transversales alimentées par ce fond de dotation.
Et puis pour finir le +2 que j’ai évoqué au début : D’abord l’influence et la présence de notre fédération au niveau de la gouvernance internationale du tennis. Avec les autres tournois du Grand Chlem et les tours que sont L’ATP et la WTA qui représentent les joueurs et joueuses nous avons plein d’enjeux communs , afin d’essayer de pousser le rayonnement du tennis à l’international en engageant notamment davantage la communauté des femmes. Enfin,  nous nous attachons à développer une bonne gestion humaine de notre fédération. Je suis actuellement à la tête d’une équipe de près de 470 personnes et je veux qu’ils soient heureux, épanouis et très engagés dans leur mission au quotidien

 

Vous croyez beaucoup à l’approche multi sports pour faire vivre les clubs !

Absolument ! On vit aujourd’hui dans une société où il existe des sports qui font beaucoup de bien comme les pilates ou le yoga.  Ce sont des activités devenues importantes dans la vie des femmes car ça permet d’apprendre à mieux respirer, à être davantage à l’écoute de son corps, de compenser des vies parfois trop sédentaires qui peuvent faire naitre des problèmes de dos, aux articulations. Et je pense que de marier ces disciplines là avec le tennis dans les clubs, avec des cours de gym, des animations musicales fait partie de la façon dont les gens ont envie de faire du sport.  De bouger en rythme, d’avoir en même temps des instants de vrai calme et d’être un peu sur tous ces accords de manière un peu continue concentrés en un seul endroit afin de pouvoir passer de l’un à l’autre. Depuis 6 mois, je fais moins de pilates,, mais j’en ai fait très régulièrement ces dernières années. En revanche, le yoga est devenu un élément de ma vie quotidienne et je ne commence pas ma journée sans en faire un petit peu. Ca m’apporte énormément.

 

Vous disiez vouloir féminiser les instances fédérales. Etes-vous par exemple en pourparler avec de grandes championnes ?
Oui, on essaye de vraiment nous appuyer sur nos anciennes championnes. Cela nous fait un peu râler quand on nous dit que depuis Noah il n’y a pas eu de champion français. On a eu trois championnes qui ont gagné un voir plusieurs Grands Chlems : Amélie Mauresmo, Mary Pierce et Marion Bartoli. On cherche à travailler avec elles et c’est pour nous un élément de mentoring que l’on voudrait pouvoir donner à nos jeunes joueuses. On veut comprendre ce que ça implique de gagner un. Grand Chlem de l’intérieur. Leurs enseignements peuvent être super précieux pour la jeune génération. Saisir les exigences du haut niveau, les émotions, comment apprendre à les gérer ? Qu’est-ce que tout cela représente. Ces conseils et cette transmission ont trop souvent manqué par le passé  et on veut réussir cette fois-çi. Oui on est en discussion avec les trois et puis dans la perspective des JO de 2004 cette action de mentoring sera vraiment importante à mettre en place pour nos joueuses mais peut-être aussi pour nos joueurs. Nous discutons d’ailleurs avec des joueurs comme Pioline.

 

Que comptez-vous faire pour le padel 

On a un plan de développement très complet avec notamment l’accélération des équipements des clubs. On était récemment Arnaud Clément et moi avec le président de la République pour l’annonce du grand plan de développement des équipements sportifs de proximité par lequel l’Etat va co financer 500 nouvelles pistes de padel à l’horizon 2024. Ce volet équipement est très important car on a aujourd’hui 245.000 pratiquants dont 130.000 pratiquants réguliers. Mais qui ne se partagent que 955 pistes de padel sur l’ensemble de la France. Ce qui représente une piste pour 120, 130 pratiquants réguliers. Alors qu’en tennis il y a un court pour 25 joueurs. Il faut donc combler ce retard et ce soutien de l’Etat va beaucoup nous aider. Un autre volet est celui de la formation, de la création d’écoles de padel, du repérage de jeunes talentueux avec en perspective des délégués inter régionaux. Nous souhaitons nous rapprocher du Word padel tour au niveau de la fédération internationale pour essayer de créer des compétitions innovantes au plus haut niveau.  Enfin nous voulons bien faire connaître cette discipline et l’on a développé un guide du padel expliquant les caractéristiques et les exigences qu’elle implique. Par le biais d’une plus forte communication nous allons accompagner l’essor incroyable de cette discipline hyper ludique, très accessible et joyeuse..

 

Et pour le tennis en fauteuil ?

On fait déjà beaucoup de choses en essayant d’accompagner le mieux possible les clubs et les structures ; pour  faire connaître cette discipline y compris à travers nos relations avec l’éducation nationale. Avec un dispositif comme le pass sport, accessible aux jeunes enfants souffrant d’un handicap, on arrive à les faire s’intéresser au tennis. On fait en sorte de développer davantage de compétitions avec des enfants sourds ou malentendants pour que cela puisse vraiment créer du lien social. A Roland Garros on a des compétitions en tennis fauteuil et puis de quad que l’on souhaiterait faire monter en puissance dès la prochaine édition de Roland Garros. Il faut que cela permette de montrer le côté inspirant des grands champions. On a par exemple des joueurs comme Stéphane Houdet et Nicolas Pfeiffer qui ne l’oublions ont gagné la médaille d’or aux Jeux Paralympiques de Tokyo. C’est un énorme exemple pour nous de les voir se battre avec autant de courage et d’avoir su au mental gagner cette performance…

 

Pour finir avez-vous une explication sur le fait qu’en France nous avons des jeunes filles et des jeunes garçons qui gagnent souvent les championnats du monde juniors ou autres et qui après n’ont pas les résultats que l’on escomptait ?

Il y a plusieurs explications. D’abord une raison un peu culturelle : En France on a parfois un petit peu tendance à vouloir que l’on dise de nous que l’on a du potentiel, que l’on est talentueux plutôt que de dire qu’un joueur ou une joueuse a la gagne. Ce côté un peu romantique, un peu dans le panache plus que dans l’obsession de la victoire jusqu’au dernier centimètre est parfois un trait de caractère un peu français.  Il faut du reste que l’on se batte contre cette réalité car comme  le dit une célèbre marque «  Seule la victoire est belle ». C’est quelque chose qu’il faut retenir… Autre raison : On a une belle densité de compétition en France au début du circuit sénior et chez les juniors et quelquefois l’âpreté du circuit professionnel requiert un mental pas suffisamment aguerri, affûté chez nos jeunes pour vraiment serrer les dents, tenir et être rivé coûte que coûte sur sa passion pour le jeu. La mise en place à la DTN au niveau du pôle de préparation mentale des territoires et de filières de formation est quelque chose de très important.  Enfin, je pense qu’il existe un facteur générationnel.

 

L'effet de grappe

 

On a eu il y a peu ,une génération extraordinaire avec les Gasquet, Monfils, Tsonga, Simon qui étaient vraiment dans un mouchoir de poche  et qui se sont tirés vers le haut les uns les autres. J’appartiens à une génération où il y avait Mauresmo, Nathalie Dechy ; Emilie Loit, Anne-Gaëlle Sidot, Amélie Cocheteux, un vrai petit groupe d’élite à un moment donné. Selon moi, survient un effet de grappe. Quand il y en a un ou une qui commence à sortir la tête de l’eau, cela montre aux autres que c’est possible. Se développe alors un effet hyper stimulant du champion en train d’émerger. tous y croient à leur tour et ils se tirent la bourre au bon sens du terme. Nous sommes actuellement dans un moment de creux qui ne génère pas cette émulation mais cela peut changer très vite. On l’a d’ailleurs vu avec le dernier US Open avec les trajectoires fulgurantes de Leylah Fernandez et d’Emma Raducanu. Si on lève un certain nombre de difficultés, de freins pour accélérer le développement de la joueuse ou du joueur , cela fait surgir un effet d’entraînement qui peut emmener toute une génération au meilleur niveau…

Agnès Figueras-Lenattier

dimanche, 03 octobre 2021

"Jazz Ace"

Toutes les semaines, Agnès Figueras-Lenattier ex joueuse de tennis professionnelle (n°8 française) anime une émission intitulée " Jazz Ace" sur la radio Web " Jazz Box Radio International" qui passe tous les jours à 15h. Elle interroge soit une personnalité du tennis, soit un musicien qui joue au tennis et fait un parallèle entre ces deux disciplines. Avec entre les questions, des morceaux de jazz choisis spécialement pour l'occasion par le directeur de la radio Jacques Thévenet. Celui-ci possède une grande culture dans ce domaine et présente d'ailleurs une émission sur cette radio web dédiée au jazz "Jazz box" diffusée tous les jours à 17h. Cette même émission est diffusée sur la bande FM à Radio Aligre depuis Paris tous les samedis à 17h. Et c'est suite à cette aventure sur Radio Aligre que Jacques Thévenet passionné dès sa tendre enfance de radio et de jazz a décidé de prolonger l'aventure en créant cette radio web qui existe depuis 2015. Abyale très connue dans les années 90 dans le disco-funk et d'autres animateurs (trices) de talent y collaborent également….

www.jazzbox-radio.fr

 

 

09:15 Publié dans Culture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tennis, musique, émission

dimanche, 25 avril 2021

Michel Pastoureau

interview,tennis,michel pastoureauLes couleurs ont une réelle influence sur les zones de notre cerveau mais l’impact diffère si ce sont des couleurs froides ou chaudes. Ainsi, les couleurs froides comme le bleu sont apaisantes alors que le jaune couleur chaude est censée apporter une certaine énergie. En fonction de la couleur perçue, le cerveau secrète un certain nombre de messages qui vont agir sur l’organisme. Ceci est valable dans tous les domaines notamment dans les médecines traditonnelles chinoises et indienne. Là en l’occurence, il s’agit de sport et plus particulièrement de tennis.

 A Winbledon, le plus vieux tournoi du circuit, la couleur est proscrite depuis 1963. Il consacre ses champions dès 1877. On peut y voir les uniformes violet et verts des ramasseurs de balles, le gazon si vert, les costumes et les robes de gala. Les vêtement de tennis pour hommes apparaissent vers 1874-1876. Ce sont les  mêmes que pour le cricket. Seuls les hommes pratiquent le tennis : pantalon de toile, ceinture large de soie, chemise à manches longues, chapeau, chaussures de toile et cravate obligatoire avec le thé entre deux changements de côté. Le blanc  devient obligatoire dans les années 1890. Le short  apparaît seulement en 1933 avec Bunny Austin. Pas de blanc mais des rayures. Avec l’apparition de la compétition en 1877 les tenues changent. Lacoste en 1920 se lance dans le textile arrêtant la compétition pour raison de santé. Au tournoi de tennis des jeux de Londres à Winbledon, le blanc n’est pas de rigueur. 172 joueurs arboreront les couleurs de leur pays avec le rouge pour Federer «  Ce sera un peu bizarre mais ça ne me déplaît pas." La balle de tennis telle qu’elle est aujourd’hui a vu le jour en 1978. Certains joueurs et joueuses ont eu maille à partir avec la couleur : 

Eugénie Bouchard a eu  une pénalité car une bretelle de son soutien gorge trop noire dépassait.  Deux ans plus tard, le coach de Benoît Paire a été  prié de quitter le cours d’entraînement car  il portait une veste de survêtement noire.  Des joueurs et joueuses se sont distingués comme Ann White en 1985 avec sa tenue transparente en lycra blanc, Agassi en 1992 mode grunge. .   . Navratilova  à l'Open d’Ausrtralie  porte une robe éclatante et fleurie de Ted Tinling . Je l'aimais explique Navratilova car elle me ressemblait." S'incline contre Chris en une belle demi-finale. En 1981 devient plus féminine : " J'aimais bien jouer devant la foule des spectateurs dans mon nouvel ensemble orange avec un peu de couleur sur les pommettes. Maquillée, blonde, avec des vêtements qui m'allaient bien. J'aimais bien mon nouveau look."

J’ai eu une longue conversation avec Michel Pastoureau le grand spécialiste des couleurs qui s’exprime sur le sujet de manière brillante et précise. Ecoutons le parler d’un domaine qui visiblement le rend heureux quand il en parle et sur lequel il est incollable. Mais avant voici quelques témoignages de personnes qui donnent leur avis en fonction de leu vie et de leur personnalité. Voici tout d'abord l'argumentaire de    Alexandre Katenidis  qui a lu beaucoup de ses livres et qui donne ses impressions. Il fait des critiques sur le site " critiques libres" sous le pseudonyme de Veneziano. 

A propos des ouvrages de Michel Pastoureau, j'ai apprécié leur enrichissement historique, l'importance donnée à la charge symbolique de chaque couleur, aux conséquences psychologiques sur leur emploi. Ces livres me sont apparus très porteurs d'enseignements, et ils montrent l'apport "psycho-sociologique" d'un phénomène qui ne peut pas totalement rester rationnel. Comme réserve partielle, j'aurais apprécié un prolongement plus appuyé vers l'époque contemporaines, avec l'emploi des couleurs dans l'art contemporain, la publicité, les dessins animés, par exemple.

Sur ma perception des couleurs, j'ai toujours connu une préférence pour le jaune et l'orange, et une relative déception subséquente à la faible popularité de ces teintes. J'apprécie également l'ensemble des bleus, le violet vif, et avoue un attrait bien moindre pour le noir et les couleurs sombres, outre le rouge Hermès.
Je porte du bleu marine, du gris anthracite et du noir, par convenance sociale, regrettant le peu de choix chromatique réservé aux hommes en termes de choix de couleurs dans le domaine vestimentaire.
Je suis peu sportif et l'effort ne diffère pas des autres moments de détente ou extra-professionnels, pour le choix des couleurs, portant vers les couleurs vives et claires.
 

Trini Derbesse vient des Philippines. Elle est très croyante et retraitée. Elle  fait partie d’un groupe opérant bénévolement pour la paroisse Saint-Albert dans le 13ème arrondissement de Paris :

 

Croyez-vous à l’influence des couleurs :

Oui. J’adore le bleu depuis toujours; ça me donne un effet calmant. J’aime le blanc aussi car je trouve que c’est la couleur qui me va le mieux. Le vert ça va aussi. Le jaune et surtout le rouge. A chaque fois que je porte du rouge, j’ai du succès. Mais on ne peut pas porter cette couleur tous les jours. D’autant plus que je n’aime pas attirer le regard à chaque fois. Mais pourquoi pas les jours où il fait beau et où je suis en forme. A une époque, je portais beaucoup de blanc mais un peu moins maintenant si j’aime toujours beaucoup cette couleur. Je n’en mets pas l’hiver. J’aime beaucoup le jaune et j’avais une très robe de cette couleur quand j’avais 8 ans. Quand je vois ma tante, elle m’évoque toujours ce moment. 

 

 

Pourquoi le bleu? 

A cause du ciel et de l’océan. Lorsque je vais à Cannes, dès que j’arrive je regarde le bleu de la mer et ça a déjà un effet sur loi. La première nuit c’est déjà bien puis au fur et à mesure la mer est de plus en plus présente. La lumière envahit toute la vue. Dès que je suis en bas; c’est l’espace infini…

 

Et le blanc?

C’est beaucoup par symbolisme à cause de la Vierge Marie donc de la pureté. Mais rien de plus. Je regarde les choses sur le plan psychique et psychologique et en même temps pour le visuel. Le blanc c’est la lumière aussi. Dès que le soleil se lève tout change. 

 

 

Et quand vous pensez à Dieu quelles couleurs vous viennent à l’esprit?

Le blanc et le bleu; pas d’autres couleurs.

 

Et le rouge du sang du christ?

Je ne sais pas. J’ai été tellement habituée à voir sur le christ sur la croix depuis mon plus jeune âge. Et le rouge ne m’est pas apparu en fait. C’est plutôt l’effet du christ crucifié que le sang.   Il y a peut-être un de violence avec le rouge. Quand j’étais petite, dans la rue je voyais des enfants qui se battaient et dès qu’il y a du sang ça me glace un peu. 

 

Existe t-il pour vous une couleur de la souffrance?

Le noir. C’est triste, ténébreux. Ce que je regrette un peu c’est qu’en France en hiver tout est noir. C’est une couleur que je n’aime pas, mais j’en mets de temps en temps pour changer. Pour le Vendredi Saint par exemple j’étais presque toute en noir. J’avais juste un tee-shirt avec un petit peu de blanc. Il faut un peu doser pour le noir. J’ai été étonnée de la remarque d’une dame âgée de la paroisse qui m’a fait la remarque que j’étais habillée en noir. Ça veut dire que j’ai l’image de quelqu’un qui ne porte pas beaucoup de noir. 

 

 

Les gens qui vont à la messe quels couleurs portent t-ils? 

Le bleu marine, le gris et le noir. Les gens qui portent des couleurs sont rarement français. Il y a des Africains, des Asiatiques. Je connais une indonésienne qui adore le rouge et qui en en porte tout le temps. J’aime les couleurs suggérées mais pas vraiment éclatantes.

 

Pour la couverture de la Bible avez-vous une couleur préférée?

Non, ça m’est égal. Ce qui compte c’est ce que je lis et le message qui en découle. 

 

 

Vous dites ne pas trop aimer l’orange car vous l’avez beaucoup porté!

Lorsque j’étais jeune, je suis allée exprès acheter du tissu et je me suis fait une robe orange que j’ai beaucoup portée. Et je me suis lassée. Certains oranges sont violents, d’autres plus doux. La couleur mandarine par exemple ça me va et ça donne un peu de lumière. Le jaune j’aime beaucoup et il m’arrive d’acheter des vêtements juste pour la couleur. 

 

 

Etes-vous sensible à la grisaille parisienne?

Je suis habituée, mais comme je suis tellement dans ls spirituel que je vois la lumière dans ce que je vis. Et puis aussi avec les gens que je fréquente. On est tous dans la même direction; ça me porte. Et puis avec toutes mes activités, je n’ai pas le temps de penser à la grisaille parisienne.

 

 

Aux Philippines quelles sont les couleurs les plus répandues?

On adore la variété et les couleurs. On a été colonisé par les Espagnols qui étaient proches du Maroc. Les Philippines ont été aussi administrées par le biais du Mexique qui influence beaucoup notre pays. 

 

Pour les danses philippines?

Pas de couleurs particulières mais du multicolore. Au lieu de porter une couleur pour un costume on utilise plein de couleurs alors qu’en France c’est très rigoureux. Chez nous ce sont un peu des couleurs de la fête. 

 

 

Quand vous chantez quelle couleur adoptez-vous?

Si je dois chanter Ave Maria pendant la fête de la Vierge, je vais me mettre tout en blanc. Ou bien un blanc avec une touche de bleu… 

 

 

Quelle est la couleur de l’enterrement aux Philippines?

On se met en noir, de plus en plus de noir et de blanc. C’est devenu à la mode de porter du blanc en Asie, mais à mon époque c’tait très strict et tout était en noir. 

 

 

Côté sport, quel est le sport le plus important? 

Nous sommes des champions de boxe avec Mani Pacquiao qui est très connu. Il y a quelques années j’étais à New York et je suis allée faire une course. Quand on a vu que j’étais des Philippines on m’a parlé de ce boxeur. Il est tellement connu qu’il a présenté sa candidature pour être sénateur et il a été élu. Il continue à poser quand cela se présente. 

 

 

Vous avez fréquenté des metteurs en scène philippins? Ont-il des habitudes vestimentaires?

Ils ont une tenue noire spéciale quand ils vont à Cannes. Ils se distinguent des acteurs et actrices en s’habillant tout en noir ou tout en blanc. 

 

 

Et au Canada?

Les gens viennent d’un peu partout. En Amérique du Nord et aux Etats-Unis, la population est multi-raciale. Beaucoup portent des couleurs et c’est plus simple qu’en France où la rigueur est présente. Il y a un style et aussi un choix de couleurs. Au Canada, on regarde moins comment on s’habille. Les gens sont plus décontractés. Je suis moins regardante pour m’habiller qu’ici. Les gens sont choqués quand tu mets des couleurs qui flashent. 

 

Pour finir parlons de votre silhouette. Vous n’êtes pas très grande. Cela joue t-il dans votre manière de vous habiller?

Oui, j’essaye de porter une couleur toute droite sans trop de contrastes. Par exemple je ne mets pas du bleu et du rouge… 

 

Georges fonctionnaire 
Vous faites des arts martiaux depuis 30 ans. Quelles sont les couleurs spécifiques de ces disciplines?
Le blanc et le noir lorsque l’on a dépassé une certaine initiation. Quand on porte une ceinture noire, cela veut dire que l’on a été initié à un art martial. Il y a l’alpha et l’oméga. L’alpha c’est le blanc pour les débutants qui peut dans certains arts martiaux être la couleur de la maîtrise totale. Quand on est dans le noir; ça veut dire que rien n’est clair, que l’on maîtrise un peu l’art martial mais que l’on n’est pas encore abouti. Le blanc peut être à la fois l’alpha et l’oméga. 

 


Le noir ne représente donc pas le grade le plus haut!
Ca dépend des arts martiaux, au judo c’est le rouge. Ce sont les grands maîtres qui sont en rouge, une ceinture rouge. Je ne sais pas s’ils retournent au blanc. 

 


Quelles sont les tenues pour les arts martiaux? 
On porte une espèce de pantalon toujours bleu  le hakama pour l’aïkido et les broderies. Le haut pour les grands maîtres c’est blanc. 

 


Et au début que portiez-vous? 
J’avais une ceinture blanche avec un pantalon blanc et une veste blanche. C’est ce que portaient les paysans dans les rizières. Un pantalon qui monte jusqu’aux mollets et une veste dont les manches ne sont pas trop longues qui se terminent juste avant les poignets. Et quand on pense que tu es capable de poursuivre la discipline on t’autorise avec la ceinture blanche à porter le hakama. Ça correspond à la ceinture bleue au judo. L’équivalence entre chaque art martial ce sont les kyu. Le premier grand dam c’est le grade des débutants. Comme si tu avais appris à lire et que maintenant tu lis. Tu restes débutant tant que tu n’as pas quelques années de pratique. Le blanc signifie que tu as fait un tour. 

 


Pourquoi ces deux couleurs là? 
 Le blanc c’est la purification, le noir l’obcur. Plus tu montes, plus c’est difficile jusqu’au moment où tu a atteint un tel niveau que tu peux ouvrir ton école et faire des livres sur la discipline. Cela fait 30 ans que j’en fais et suis 3ème dan. Dans les arts martiaux, il y a les plus et les moins. Les plus se rapportent aux dans et les moins aux kyu. Les plus signifient que tu maîtrises les fondations de la discipline et que tu as pris conscience de la puissance respiratoire.  Le premier dan s’adresse à quelqu’un qui a saisi les fondations de l’aïkido et est capable de les mettre en pratique à une vitesse disons raisonnable. Avoir son 2ème dan c’est être capable de maîtriser la technique avec une vitesse un peu plus véridique.  Le 3ème dan implique que tu puisses dégager de l’énergie qui vient de ton ventre lorsque tu fais des projections.  Quant au 4ème dan cela représente une maîtrise technique plus élaborée avec des connaissances étendues. Et puis tu maîtrises également bien les armes. Kawashi maître japonais au judo a compris que pour les Occidentaux, il fallait créer des paliers et inventer un système basé sur l’éducation nationale. . Et que comme nous sommes cartésiens, il fallait nous faire progresser par étapes et successives. C’ est la raison pour laquelle il a créé des couleurs qui n’existaient pas au Japon. Il y avait la ceinture blanche, après une marron et après la noire. Kawashi  a crée en plus la jaune, l’orange, la verte, la bleue et la marron. C’est un traitre au Japon. Il s’est adapté à l’esprit européen alors que les Japonais estimeront toujours que le judo doit conserver son esprit japonais; cela fait partie de la culture japonaise. C’est considéré par certains orientaux comme une hérésie. C’est grâce à cette initiative que la compétition a pu se mettre en place dans le judo. On l’a vu avec David Douillet qui a remporté les jeux Olympiques face à un japonais et après Teddy Riner. J’ai connu un maître japonais qui après la ceinture noire est repassé à la blanche. C’est une ceinture blanche un peu plus épaisse, plus large. Ça veut dire qu’il a fait une spirale, un tour complet. 

 

Et le 4ème dan?
Il y a plus d’examens techniques et c’est une reconnaissance de ce que tu fais par la fédération. Après, cela consiste à aider la Fédération, à faire partie des jurys d’’examens. Avant d’atteindre l’initiation il faut du temps et il faut compter une année pour un kyu. Comme il y en a 6, il faut compter 7 ans pour être ceinture noire. C’est pour les arts martiaux modernes.

 

Dans la vie de tous les jours cette évolution vous porte t-elle?
C’est compliqué. L’aikïdo c’est destiné à faire évoluer l’être humain, les arts martiaux sont soi-disant faits pour éduquer l’homme, pour qu’il s’améliore. Donc si l’on parle d’éduquer l’homme, on parle d’école d’art martiaux. Une école où en fait il n’existe pas d’unité et où chaque professeur fait sa sauce dans son coin, prêche le bon enseignement à sa manière. Donc progresser au sein d’un club n’est pas évident. Un club ne consiste pas seulement à évoluer techniquement. Il doit aussi s’occuper des autres notamment des débutants, les aider à progresser. Cela implique d’être altruiste, de faire partie d’un jury d’examens pour faire passer les kyu ce qui demande du temps. Et pendant que tu t’occupes des autres tu ne progresses pas ou moins vite. De plus, il n’existe pas de concertation entre les professeurs pour donner des cours de haut niveau. Les gens qui possèdent un haut niveau sont peu nombreux et on ne peut pas faire spécifiquement des cours de haut niveau si seulement trois haut gradés sont présents. Des réunions de professeurs c’est possible mais cela demande encore plus de disponibilité si l’un habite à Paris, l’autre à Antony… Je ne suis pas dans une secte mais c’est devenu une entreprise. Napoléon l’a dit «  « Une association est une entreprise ». Je fais progresser les gens , je progresse à mon niveau. J’ai les genoux un peu abîmés à cause de l’arthrose et c’est vrai que si j’étais bien pourtant, je progresserai plus vite techniquement. Il arrive aussi un moment où il y a la vie professionnelle, privée, les loisirs et il faut faire la part des choses. J’ai également fait une introspection sur moi-même. Je me suis demandé ce qui a déclenché mon envie de faire de l’aïkido. En fait, je cherchais un sanctuaire de paix, à faire la paix avec moi-même car j’avais été déçu par des gens. Ou parce que j’étais dans un milieu où gravitaient des gens peu scrupuleux. Je sortais du milieu scolaire où j’avais fréquenté des potaches qui ne me plaisaient pas du tout, et le milieu professionnel où j’évoluais n’englobait pas forcément des gens altruistes. En tout cas, je ne pense pas que les arts martiaux soient une école de la vie même s’ils détiennent des fondations très hautes basées sur la loyauté, sur le code des samouraïs avec la politesse, la piété, la courtoisie, la fidélité. Un code par rapport aux autres maîtres qu’ils défendaient à l’époque et qui est toujours présent. Mais est-ce vraiment une école de la vie. Pas sûr. Est-ce que les grands maîtres ont réellement changé? Je pense qu’ils ont développé au sein d’eux-mêmes un instinct de conservation, mais ont-ils moins de défauts? L’instinct de conservation compense un peu leurs défauts et ils ont acquis une certaine souplesse, et plus d’anticipation . Pour ma part, j’ai acquis plus de souplesse avec les gens. Quand j’ai commencé j’étais habité par une petite misanthropie même si je ne suis pas quelqu’un de méchant ni d’agressif. Mais les vraies valeurs que je cherchais sont trop compliquées à mettre en oeuvre pour chaque école. C’est de plus en plus compliqué de faire évoluer les gens lorsqu’ils ont atteint un certain niveau. Ce que j’ai remarqué chez les gens qui pratiquent l’aîkido, c’est leur côté asocial. Je connaissais une femme assez haut gradée qui venait aux repas annuels de fin de saison. Il fallait tout le temps qu’elle vienne avec son petit copain. Et 95% du temps, elle ne parlait qu’avec lui. En revanche on trouve peu de caractériels. 

 

Vous pensez  qu’ils font de l’aïkido car au départ ils avaient ce côté asocial?
C’est très possible. Je connais quelqu’un d’hypocondriaque. Il n’ouvre jamais son téléphone car il a peur des ondes pouvant le rendre malade. Par contre en 29 ans d’aîkido, je n’ai jamais rencontré quelqu’un  de mysogine, ou qui rejetait les femmes. C’est un point positif. 

 


Les femmes aussi ont ce côté asocial?
Oui. Il y a cet instinct de protection destiné à se protéger. C’est vrai que quelqu’un de timide qui va affronter quelqu’un lors d’un combat va devenir plus courageux et sans doute moins timide. Mais jusqu’à quel niveau?  Personnellement, l’aîkido m’a rendu plus volontaire, et m’a quand même permis d’aller au devant des problèmes. 

 

Vous vous intéressez au surnaturel. Quand on parle de ce domaine, y a t-il des couleurs qui vous viennent à l’esprit plus particulièrement?
Le rouge. Si je mets trop de rouge, je peux devenir agressif, colérique. Si je mets du bleu, je me protège beaucoup. Pour moi, c’est une couleur de protection, le jaune  est une couleur de lumière mais je n’en mets pas souvent. Sinon je vais devenir un peu mégalomane. 

 

Et les couleurs susceptibles de jeter un mauvais sort?
Je ne suis pas sûr. Le noir protège des mauvaises influences; les banquiers y ont beaucoup recours. Mon ancienne banquière en portait tout le temps. Les prêtres aussi pour ne pas être influencés par les paroles des autres s’habillent en noir. Les Touaregs sont tout le temps en noir.  On ne les verra jamais en blanc. car c’est le noir qui les protègerait des rayons du soleil.  Je connais beaucoup de gens qui reçoivent du personnel qui sont en noir. Pour moi, la couleur de la communication c’est l’orange. D’ailleurs lorsque l’on joue aux cartes la couleur du facteur, c’est l’orange. C’est le valet de carreau. On t’apporte de la communication. On met de l’orange quand on est altruiste. 

 


Quelle est la ou les couleurs auxquelles vous pensez quand vous évoquez les hommes politiques?
Cela me fait penser à François Mitterrand qui dans le film de Georges Benhamou «  Le promeneur du champ de mars » disait que la couleur de la France c’était un gris couleur lavande. Chaque pays a sa couleur et pour moi la couleur de la France c’est le gris. 

 

Vous vous  intéressez aussi aux hommes politiques. Il paraît que Trump a souvent une cravate rouge. Qu’est-ce que cela vous inspire?
Il se met souvent en colère. Quelque part, c’est un négociateur et le rouge c’est la couleur de celui qui fonce. Face à la fermeture de la Corée, il leur est un peu rentré dedans.  C’est le seul président des Etats-Unis à avoir été invité en Corée du Nord. Il en impose et donne des coups de poing sur la table. Dans l’armée, les saints-cyriens sont toujours en pantalon rouge, c’est pour impressionner. Ils ont un costume qui impressionne.  En judo, il y a beaucoup de gens qui se blessent et qui sont obligés d’arrêter. En aïkido, il n’y a pas de compétition donc on se blesse moins. J’ai donné des cours à un judoka ceinture noire. Pourquoi faisait-il du judo? A cause de la compétition. Il avait un bureau de direction. Les arts martiaux sont faits pour utiliser les valeurs qu’ils prônent dans la vie de tous les jours et demandent une recherche personnelle de tous les jours. C’est un travail sur soi. Cet homme aimait les valeurs de la compétition dans le judo, et pouvait les transmettre dans la vie de tous les jours.  Mais le jour où il n’a plus pu faire de compétition, il est venu à l’aïkido pour acquérir d’autres valeurs et mettre en application une technique basée sur la droiture, la position des corps basée sur la respiration, le fait de garder ses distances. Mais il recherchait la compétition et l’on a arrêté.  La compétition existe aussi dans les entreprises , dans les start up. Il règne beaucoup de compétition dans les sociétés de service face aux autres entreprises. Pourquoi? C’est possible que l’entrepreneur qui  reçoit recrute en interne. Il va chercher le meilleur parmi les prestataires.  En aïkido, il n’y a pas de compétition; quelque part c’est une lacune. Mais en ce qui me concerne ça va peut-être m’avantager par rapport à mon poste de fonctionnaire où la compétition est moins rude… 

 

 

Jocelyne 

 

 Aujourd’hui, vous portez une veste rouge. Est-ce un hasard ou croyez-vous à l’influence des couleurs sur l’être humain ?

Non, pour moi ce n’est pas du hasard et le rouge représente la couleur de l’énergie. Quand je me sens fatiguée instinctivement, je mets du rouge. On sent les choses à l’intérieur de soi. Normalement, le rouge se porte en bas du corps car c’est une couleur qui correspond au chakra racine qui se trouve au niveau du périnée. Mais ça me fait du bien quand même… Même si l’on n’y croit pas, les couleurs jouent sur notre humeur. Les gens qui choisissent certaines couleurs le matin, même s’ils n’y connaissent rien et ne savent pas l’exprimer, ont besoin de cette couleur sur l’instant. On est né avec selon moi, et l’on est en liaison avec les couleurs plus ou moins tout au long de sa vie.

 

 

Que pouvez-vous dire sur votre rapport avec les couleurs ?

Quand j’étais plus jeune, il y avait des couleurs comme par exemple l’orange que je ne supportais pas. Et maintenant, ce n’est plus le cas. J’ai dû résoudre certains problèmes car les couleurs correspondent à des organes vitaux. L’orange correspond au système de reproduction le bas ventre et se rapporte au plaisir aussi bien sexuel qu’alimentaire. Tous les plaisirs. Je devais avoir un blocage de ce côté-là que je suis arrivée à surmonter.  Je me suis même achetée un ciré orange que je porte souvent lorsque je vais voir ma sœur à Cabourg et je suis bien dedans…Avant, je n’aurais jamais pu…C’était la même chose pour le vert, qui correspond au chakra du cœur, symbolisant l’ouverture, l’amour. Je ne pouvais pas mettre de haut vert. Je m’étais achetée plus jeune un beau chemisier vert et je ne l’ai jamais mis. Je ne sais pas exactement ce que j’en ai fait, peut-être l’ais-je vendu. Je ne sais pas vraiment pourquoi. A l’époque, je n’étais branchée comme maintenant. Quoi qu’il en soit, là aussi c’est bon actuellement. Cela prouve que l’on avance et d’un certain côté c’est rassurant. C’est comme une séance de psychothérapie, on un éveil de conscience.

 

 

Il n’y a donc plus aucune couleur que vous ne supportez pas !

J’ai encore du mal avec les hauts noirs. Beaucoup disent que ce n’est pas une couleur mais pour moi si. Moi qui aime bien communiquer ; je me sens enfermée.  J’ai une voisine plus jeune que moi, mais je ne pense pas que ce soit une question d’âge qui s’habille toujours en noir de la tête au pied. En plus, elle a de longs cheveux très noirs. Je le connais un peu mieux maintenant, et elle ne va pas bien du tout aussi bien physiquement que psychologiquement. Elle ne sait sans doute pas faire autrement. Ma fille avant s’habillait beaucoup en noir. Et depuis qu’elle est devenue maman, elle met davantage de couleurs. Un haut rouge, un beau vert… Il me semble que lorsque l’on est un peu renfermé, on porte du noir. On est comme dans une armure et on a l’impression que rien ne passe. C’est aussi la couleur du deuil, mais heureusement on en sort un peu ; tant mieux…  Il existe également des phénomènes de mode et dans les magasins parfois c’est tristounet. Beaucoup de couleurs sombres, noires, marrons. Je ne me vois pas m’habiller tout en marron, tout en gris, j’ai besoin de couleurs plus gaies. Le gris d’ailleurs ne correspond à aucun centre d’énergie et peut être le reflet d’une maladie. J’aime bien les bracelets de montre rouge. Mais la prochaine fois j’en achèterai un en métal, car avec la transpiration, il s’use assez vite…

Les chakras sont représentés par les couleurs de l’arc en ciel !

Oui, et par les notes de musique de la gamme de sol. On en a sept connus mais paraît-il qu’il en existe d’autres. Ils ont tous un rôle distinct jouant directement sur notre physique, notre système nerveux, notre comportement et nos émotions. Pour que les énergies circulent bien, ils doivent être ouverts et en parfaite synergie.  Le 1, le chakra racine  (jambes, pieds, système osseux) est représenté par le rouge, le deux le chakra lombaire (zone lombaire, abdominale, système de reproduction)  par l’orange. Le trois, chakra du plexus solaire (zone du plexus solaire) par le jaune la belle couleur du soleil. Lorsque l’on met du jaune, j’en mets rarement ; c’est que l’on rayonne, c’est magnifique.  Le 4  le chakra du cœur (zone thoracique) par le vert, le 5 chakra de la gorge (gorge, bras et mains) par le bleu ciel, le 6 le chakra du front (zone du visage) par l’indigo et le 7 le chakra couronne par le  mauve/ blanc.

 

On a chacun une aura et des couleurs à l’intérieur de soi ! Mais comment le savoir ?

Quelquefois quand je me concentre et que sur mes mains se profile une couleur un peu sombre, je vois un petit peu de verre. Cela veut dire qu’on possède cette couleur verte de guérison. On a tous en soi ce genre de choses même si c’est plus ou moins développé d’une personne à l’autre. Il paraît que les couleurs auriques changent constamment selon notre état d’esprit. C’est ce que disent les bouddhistes qui au fur et à mesure de la journée changent d’humeur. Quelquefois ce sont mes pieds qui dégagent du jaune...

 

 

Le vert c’est la couleur de la guérison n’est-ce pas ?

Contrairement à ce que l’on dit, l’amour n’est pas un sentiment ; c’est une énergie très puissante de guérison qui correspond au vert. D’ailleurs, on dit souvent que les gens ont les mains vertes et ce n’est pas par hasard. Ma fille par exemple a cette particularité. Lorsqu’elle est partie en vacances, je me suis occupée de ses plantes. Celle-ci se sont tout de suite portées beaucoup mieux quand elle m’a remplacée. Elle a une énergie guérison dans les mains, l’énergie de l’amour.

 

 

Le jaune est une couleur qui n’est pas très aimée !

A une époque, c’était une couleur assez répandue et elle revient un peu à la mode. Ne porter que du jaune n’est pas facile. L’autre jour j’ai vu une robe jaune avec de petites fleurs en magasin, qui me plaisait bien. Je l’ai mise devant moi, elle était magnifique, et pourtant je n’ai pas pu l’acheter. Elle ne me correspondait pas, ; comme quoi les couleurs ont bien une influence…

 

Au niveau des éléments, vaisselle ou autres avez-vous des couleurs préférées ?

J’avais cassé une assiette verte appartenant à ma fille et je lui en ai racheté. Elle n’en a pas voulu, j’en ai donc hérité et cela me fait plaisir de manger dans des assiettes vertes. Chez moi, j’ai acheté pour mettre dans mon salon une magnifique tapisserie avec des masques à dominante jaune. La coïncidence veut que j’ai repeint mon salon en jaune très pâle. Et je m’y sens très bien, j’ai l’impression par moment que ça rayonne. C’est dû aux couleurs que j’ai autour de moi. Ma chambre à l’origine est bleue et je n’ai jamais voulu changer.  La chambre de ma fille est orange, et j’ai plus de mal. La couleur des murs de la chambre influe sur le sommeil et il ne faut pas mettre n’importe quoi. Même si ça m’est arrivée d’avoir des draps rouges !... J’ai une amie qui a peint un mur chez elle en rouge. Personnellement, cela ne me viendrait pas à l’idée.  J’ai déjà pensé à peindre un mur chez moi mais en vert.

 

 

Y a t-il des atmosphères en France ou ailleurs qui vous ont séduite de par leurs couleurs ?

Quand j’étais dans le Sud-Ouest avec ma fille, pourtant je ne suis pas spécialement branchée ni curé ni messe, j’étais attirée par une belle église. Dans cette église, se trouvait une espèce de hublot où le soleil prenait parfois racine et j’éprouvais le besoin de m’y glisser. Comme je me sentais bien. .. J’y allais pratiquement tous les jours et je me dis que de belles énergies devaient être présentes. C’était un vrai ressourcement ; j’ai vécu de petites expériences de ce genre…

 

 

Au sein des Ehpad savez-vous s’il existe des couleurs particulières ?

Ma mère atteinte de la maladie d’Alzheimer vivait en Ehpad et les murs étaient saumon très pâle. Sa chambre aussi. C’est surement étudié et je ne pense pas qu’ils choisissent les couleurs par hasard. Psychologiquement, c’est important de bien choisir les couleurs pour les personnes âgées.  Tout est d’ailleurs calculé. Le rouge par exemple ; ça met en appétit. Il y a un restaurant près de chez moi qui était rouge avant et qui m’attirait beaucoup. Il a changé de couleur et mon attrait pour lui est beaucoup moins important maintenant.

 

 

Vous avez un petit fils de 3 ans.  Manifeste t-il déjà de réelles préférences au niveau des couleurs ?

Oui pour le jaune. Quand il doit choisir un vêtement, un jouet, il va tout de suite vers cette couleur. C’est gai, lumineux ; ça prouve qu’il a ça en lui. Le 4 est son chiffre préféré. Or dans le tarot de Marseille, cela correspond à l’empereur. C’est un homme assis confortablement sur son fauteuil, un pied en avant et un sceptre dans la main.. Il domine et est sûr de lui. Cela représente le symbole de la puissance. C’est étonnant à son âge. En tout cas, c’est un bon présage pour le futur…

 



 

Michel PASTOUREAU :

 

Avant de commencer à parler des couleurs dans le tennis pourriez-vous expliquer ce qui vous a donné envie de devenir historien des couleurs?

Je viens d’une famille de peintres et du côté de ma mère j’avais trois grands oncles artistes peintres. J’ai donc fréquenté les ateliers d’artistes quand j’étais petit garçon. Ce sont de très beaux terrains de jeux quand on est enfant. Et puis du côté de mon père, c’étaient ses amis qui étaient peintres.  Aucun d’ailleurs n’arrivait à vivre de sa peinture mais là aussi c’étaient des terrains de jeux magnifiques. J’ai grandi dans la peinture et les couleurs m’intéressent depuis que je suis enfant. Devenu étudiant et historien, j’ai décidé d’en faire mon sujet de recherche. 

 

 

Votre couleur préféré c’est le vert!

Oui, depuis que je suis tout petit, sans que je puisse dire réellement pourquoi. Mais c’est resté jusqu’à aujourd’hui. J’aime tous les verts spécialement les verts foncés. Une personne sue deux a le bleu comme couleur préféré et une sur cinq le vert. C’est la couleur qui vient en deuxième. 

 

Scientifiquement, y a t-il eu des études sur l’influence des couleurs sur le cerveau?

Il y en a eu, mais c’est toujours assez fragile ou en tout cas c’est très culturel. Ce qui peut être valable pour l’Europe ne l’est pas tout à fait aux Etats-Unis et plus du tout en Asie ou en Afrique Noire.  La couleur n’est pas universelle mais culturelle. On a cru remarquer en rugby par exemple qu’une équipe qui joue en rouge a dès le départ un certain avantage si elle affronte une équipe qui joue en bleu, le rouge contenant une espèce de forte agressivité. En revanche, ce n’est plus le cas si cette même équipe joue une équipe qui joue en noir comme la Nouvelle Zélande par exemple. Ce n’est pas absurde mais c’est un peu fragile comme explication d’autant que dans les sports d’équipe il y a toujours le problème de savoir qui reçoit, qui visite. 

 

 

Au départ comment s’est décidé le choix des couleurs dans le tennis?

C’est une évolution de longue durée. Le tennis vient de loin, et les règles pour le tennis moderne se stabilisent à la fin du XIXè siècle. Le tennis est vraiment institué  dans les années 80. Il ressemble tout à fait à celui d’aujourd’hui pour les règles mais il ne se joue que sur gazon. Il y a encore chez les britanniques des gens qui pensent que le tennis qui n’est pas sur gazon ce n’est pas du tennis. Il faudrait trouver un autre nom. Mais sur gazon, on peut pas jouer toute l’année, ça demande un entretien extraordinaire donc rapidement d’autres surfaces sont apparues notamment la terre battue un peu plus facile d’entretien quand elle est de qualité. Après il y a eu le tennis en salle  sur des parquets et puis des matériaux plastifiés goudronnés. Quand j’étais enfant, on jouait souvent sur du goudron, le même que pour les routes. Le terrain était dessiné sur ces surfaces. On se faisait drôlement mal quand on tombait et comme manquait de souplesse on se tordait facilement la cheville. 

 

 

Quel est la différence entre le tennis amateur et le tennis professionnel?

Dans le sport amateur, il faut distinguer le sport amateur organisé avec de petits règlements et des compétitions et puis le sport amateur de pur loisir. Là, on fait absolument ce que l’on veut à partir du moment où l’on n’abîme pas le terrain. On peut mettre tout ce que l’on veut sur soi. Quand on est amateur mais que l’on appartient à un petit club, il existe peu de correction demandée  ou de respect des habitudes. Pour le sport professionnel, il existe beaucoup plus de règlements et de contraintes. Tout est organisé, légiféré, sinon c’est invivable. 

 

 

Et pour les enfants?

C’est un sport magnifique pour les enfants. Ma fille cadette a eu un petit niveau quand elle était ado et pré ado et j’ai fait le chauffeur pour l’accompagner ici ou là pour des matches entre enfants. Il faut commencer tôt, et il faut absolument que l’enfant aime ça. Il ne faut surtout pas le forcer et que ce soit un plaisir. Que ça déborde un peu le simple fait de jouer. Que l’enfant s’intéresse au tennis des autres, des aînés et un peu à la mythologie de ce sport et à son histoire.

Quand les enfants sont affiliés à un club, ils sont fiers de porter les couleurs de leur club si celui-ci possède des couleurs emblématiques. Autrement, ils sont davantage habillés selon le goût des parents. Ça dépend quel âge ils ont. A l’adolescence, ils commencent à avoir des idées bien à eux et imitent souvent tel ou tel champion ou championne . Parfois au contraire, ils n’’imitent personne. Le goût personnel est plus affirmé et puis le paraître joue un rôle important. Quand on a un petit niveau convenable à 14,15 ans, évidemment la tenue compte, les accessoires aussi avec tel logo plutôt que tel autre. Tout cela m’échappe maintenant, mais je sais que cela existe. J’ignore quels sont les logos à la mode, et quelles marques de chaussure fonctionnent bien.

 

 

 

Vous avez pratiqué le tennis. Quels couleurs aimiez-vous porter lors de ces moments là?

Je suis d’une génération où l’on jouait en blanc. C’était assez rare que l’on porte une autre couleur sauf s’il faisait froid. On mettait alors un survêtement avec un pull bleu ciel ou bleu marine. Il n’y avait pas vraiment de règlement écrit pour le sport amateur si je puis dire mais c’était une tradition. Or le tennis est un sport de tradition, ce qui lui a permis de traverser des décennies. Même dans les petits clubs de stations balnéaires ou de vacances, l’usage était de jouer en blanc ou à dominante blanc. J’ai joué entre 1957 et 1980 environ et le double était en vogue à l’époque. Par exemple, dans les grandes compétitions, le double mixte avait davantage de prestige qu’aujourd’hui. Les Australiens et les Américains en étaient particulièrement friands. Quand mes filles ont commencé à me battre j’ai su que ma carrière était finie. Elles avaient 12,13 ans. 

 

 

Vous avez également fait d’autres sports. Etait-ce toujours du blanc?

 J’ai joué aussi au football et l’ on avait les contraintes des couleurs de l’équipe de football et le goal que j’étais devait se distinguer de ses camarades pour être reconnaissable. C’est encore le cas à l’heure actuelle. Pendant 7 ans bizarrement, nous avons joué en noir et blanc, les couleurs du lycée. Puis en classe préparatoire au lycée Henri IV, c’était jaune et noir. J’étais gardien de but de l’équipe de handball , et puis je faisais de l’athlétisme au PUC. Là c’était violet et blanc , les couleurs traditionnelles du PUC pendant plus d’un siècle. 

 

 

 

 

Concernant les balles, elles étaient blanches au départ!

Je me souviens des polémiques avec les balles au milieu des années 70 pour des raisons télévisuelles. Les balles blanches ont commencé à devenir jaunes et la plupart des joueurs et joueuses étaient contre. Borg par exemple qui ne disait jamais rien s’est mis à parler. Il était assez hostile au jaune, ce qui implique qu’aujourdh’ui encore les balles blanches sont tout à fait acceptées et acceptables. On peut jouer à Roland Garros avec des balles blanches. C’est pareil pour les femmes, et il n’’existe pas beaucoup de différence entre les deux sexes. Sauf à un moment donné pour les prix accordés aux femmes qui étaient vraiment désavantagées. On pensait que certaines tenues convenaient mieux aux dames pas tellement pour des questions de décence, de peau nue, mais de transpiration qui apparaissait davantage sur le blanc. Dans les années 20,30 le fait de transpirer n’était pas absolument indécent pour un homme mais desservait la femme et mieux valait ne pas la voir transpirer.  Tout ceci est un peu dépassé à l’heure actuelle, mais c’était encore un peu ainsi lorsque j’étais petit garçon. 

 

 

Pour le tournoi de Winbledon c’était un des arguments en faveur du blanc!

Oui. Actuellement, le blanc n’est pas obligatoire, mais il doit y avoir une dominante blanche. De la tenue du joueur ou de la joueuse devait émaner un contraste coloré avec la couleur de la surface. Ça reste un principe mais ce n’est pas une règle absolue.  Si le sol est foncé, il est préférable de jouer en clair. Si au contraire le sol est clair, la couleur saturée est plus adaptée. Au début, en compétition, le blanc était la couleur imposée pat l’hygiène. Il n’y avait pas de machine à laver et comme on se salissait beaucoup en sport, il fallait faire bouillir le linge et le blanc était de mise. car la couleur ne tenait pas.  Tous les vêtements étaient blancs, ainsi que toutes les tenues de sport. La machine à laver a changé pas mal de choses aussi. Quand j’étais enfant, on jouait tous en coton. Puis les tissus synthétiques se sont imposés.. 

 

 

Quelle a été l’évolution des couleurs pour les tournois du Grand Chelem?

Maintenant, les équipementiers ont pris les choses en main et l’on voit tout et n’importe quoi si je puis m’exprimer ainsi. Une liberté totale régnait même si des hurlements survenaient lorsque Vénus ou Séréna Williams se présentaient en combinaison.  Non pas que leurs tenues étaient indécentes, mais plutôt inhabituelles. Le tennis est vraiment un sport de tradition et ce qui va à son encontre est censé nuire au tennis. Ce sport tient surtout à cause de ses traditions et c’est pour cette raison que les nouveaux sports ont beaucoup de mal à se faire une place. Un sport se doit d’être ancien et s’il est ancien il a du mal à émerger aux Jeux Olympiques ou ailleurs. En ski par exemple, on a multiplié les disciplines . Par exemple, le ski alpin avec la descente, , le géant, le slalom ça va mais les autres formes de ski ont du mal à percer.  Les titres n’ont pas la même valeur, et être champion olympique dans des disciplines tout à fait récentes n’a pas beaucoup d’impact au niveau du grand public. Aux Etats Unis quand l’Open était encore à Forest Hills, on a vu un peu de couleur apparaître aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Ce n’était pas un logo, mais les couleurs de la marque étaient représentées.  Puis à partir des années 1980,  Agassi s'est mis à porter des tenues volontairement provocantes. Des shorts en jean déchirés etc mais ça n’ a pas apporté grand chose au tennis. On est revenu un peu en arrière et une période un peu hippie est apparue  et a progressivement gagné du terrain.  Cela a d’abord consisté en un tee-shirt tout blanc avec le bord des manches bleu marine puis le bas du tee-shirt , puis le bleu marine a tout envahi.  Sont apparues des couleurs sages et assez respectées dans le monde du tennis avant que ça ne devienne le bariolage complet.  Il y a eu le blanc, puis le bleu ciel et blanc, le bleu marine et blanc puis le vert et blanc. Toujours blanc plus une couleur. Puis une couleur acceptée et une couleur raisonnable en quelque sorte. Puis le bariolage complet avec des vêtements extravagants comme des shorts à carreau, des shorts léopard. Seul Winbledon résiste un peu.  Ce n’est pas tant les joueurs d’ailleurs qui sont demandeurs d’une grande variété de tenues, ce sont leurs équipementiers. De même que dans les sports d’équipe, il y a toujours des problèmes non pas pour les maillots mais souvent pour les chaussures. Il y a des rivalités incroyables entre les marques de chaussures.  Concernant la Coupe Davis et la Fed Cup il y aussi quelques règles puisque c’est par équipe nationale. Les joueurs sont obligés de porter une tenue choisie par leur fédération et qui évoque plus ou moins les couleurs du drapeau du pays concerné. . Cette tenue varie à chaque édition de l’un ou l’autre événement. Mais là l’équipementier habituel ne joue plus aucun rôle. C ’est l’équipementier de la fédération qui prend la place. 

 

Pour Roland Garros, la répartition des couleurs ça dépend des partenaires!

Oui des équipementiers selon que c’est Adidas, Lacoste ou autres marques. Chaque année, cela change et le contrat passé avec telle ou telle marque plutôt qu’avec telle autre est important. La couleur ne fait pas logo, et il n’y a pas vraiment de couleur emblématique comme il peut y en avoir dans d’autres  domaines. En tout cas, le crocodile Lacoste restera toujours vert mais les vêtements prendront toutes sortes de teintes. 

 

Il ya des modes!

Oui avec aussi la volonté de se distingue du concurrent et des enjeux économiques derrière qui nous échappent.  Des couleurs excentriques ou inhabituelles apparaissent parfois mais ça ne dure pas car le succès n’est pas au rendez-vous. Le monde du tennis en général reste assez attaché à une certaine forme de sagesse et s’autorise des transgressions de temps à autre. Si la marque Adidas entend dire que Lacoste l’année prochaine va lancer des maillots avec beaucoup de rouge, elle va faire exprès d’imposer le bleu pour se distinguer. Est-ce qu’il y a a des accords entre les marques, je ne saurais vous dire. Mais c’est très important pour eux car à partir de la tenue d’un champion ou d’une championne se déclinent toutes sortes de vêtements sportswear’s qui vont être vendus par millions d’exemplaires dans le monde entier. Il ne faut donc pas faire de bêtises et c’est pour cela que l’excentricité se vend mal.. La plupart des gens acceptent une certaine fantaisie mais sans trop d’excès quand même. 

 

 

Pensez-vous que les marques calculent si c’est un attaquant ou un renvoyeur? 

J’ignore si cela rentre en ligne de compte ou pas. Pour les marques, ce qui compte c’est de vendre beaucoup d’exemplaires des tenues. D’ailleurs y a t-il encore des attaquants dans le tennis, je me demande. Comparé à l’époque de mon adolescence; il y en a de moins en moins.  Mon honnêteté m’oblige à le reconnaître, mais c’est pareil partout. En football, on marquait beaucoup plus de buts que de nos jours. Le score le plus fréquent aujourd’hui c’est 1 à zéro. Or quand j’avais 15 ans, 4 à 3 ,  5 à 4 c’était fréquent. En tennis c’est pareil, service volée on ne voit plus tellement. 

 

 

Quelle est la marque qui rencontre le plus de succès au niveau de la couleur?

Je pense que lorsque l’on a une marque trop répandue, elle se fait du tort à elle-même car elle fait un peu plouf, et déploie une image assez vulgaire. Donc Adidas, Nike, Reebook sont moins chics que Lacoste.  En matière de raquette par exemple, Wilson est mieux qu’Adidas. 

 

 

Profitons-en pour évoquer l’histoire de la marque Lacoste! Le logo est toujours vert!

Il existe deux traditions sur l’histoire du crocodile Lacoste. Lacoste a été un très grand joueur , mais pas un attaquant. Il renvoyait tout, ne lâchait rien et on disait que son jeu s’assimilait aux mâchoires d’un crocodile qui s’accrochait, s’accrochait. Il n’y avait pas moyen de le faire décrocher et c’est vrai que lorsque l’on analyse les scores, Lacoste va fréquemment au 5ème set. A l’époque, il n’y avait pas de tie-break ce qui impliquait des scores astronomiques et le surnom de crocodile lui a été donné alors même qu’il était encore joueur. Quand il est devenu homme d’affaires, créateur de vêtements et de sport, il en a fait intelligemment son logo devenu l’un des plus célèbres au monde. Pas la peine d’écrire Lacoste en dessous lorsque la réputation est là. En plus, c’est un animal, ce qui est encore mieux. Une autre tradition mais moins répandue raconte l’histoire d’une valise en crocodile très chère que l’entraîneur de  Coupe Davis  au début des années 30 avait promis à Lacoste s’il remportait son match. Il était amateur à l’époque, et il aurait gagné cette valise. Je crois que le surnom de crocodile lui convient lui qui ramenait tout. Il a créé sa firme de vêtements et c’est une des plus belles histoires de reconversion du sport. En plus, sa fille a été une grande championne de golf et lui-même a été à Roland Garros jusqu’à un âge très avancé. Mais il avait une sorte de maladie qui faisait qu’il avait toujours froid. On le repérait facilement car la plupart du temps lors des finales il fait chaud et il avait quasiment un manteau de fourrure. 

 

 

Le bleu marine est une des couleurs les plus demandées chez Lacoste!

D’une manière générale c’est la couleur la plus portée pour le vêtement en Occident en tout cas. Ce n’est pas le noir et pour les polos et les tenues de sportswear c’est le polo bleu marine car c’est le plus passe-partout, le plus facile à marier avec le reste. Aussi bien pour les hommes que pour les femmes. 

 

 

Quelle était la première couleur de la chemise ?

Blanche. Actuellement, il y a beaucoup de coloris et l’on n’arrive plus à mettre un nom dessus. Mais elles ne sont pas toutes disponibles en même temps. Il y en a que l’on ne retrouve plus aujourd’hui et de nouvelles teintes apparaissent. On cherche à diversifier. Les goûts n’étaient pas les mêmes selon les marchés asiatiques, américains ou européens et certaines gammes se vendent mieux en Europe, d’autres en Asie.  Mais pour ne pas tomber dans la routine, les décideurs de chez Lacoste changent régulièrement les nuances. Bien sûr il y aura toujours du rouge, du jaune, du vert mais tous les deux, trois ans on change la nuance de bleu, de rose pour renouveler et attirer l’oeil. 

 

 

Avez-vous vous-même une chemise Lacoste?

J’en ai eu, je n’en ai plus. Je ne sais pas pour les femmes, mais il faut reconnaître que pour les hommes c’est très mal coupé. Je ne comprends pas pourquoi les manches sont si courtes et si resserrées. Il y a quelque chose qui ne va pas aux manches ou alors c’est moi qui par goût quand j’ai des manches souhaite qu’elles ne soient pas trop courtes et aillent jusqu’au coude. Mais à moins d’être très mince ça ne fait pas une jolie silhouette. Au niveau du col aussi, il y comme une sorte de défaut. Je n’ai jamais aimé beaucoup ces chemises mais lorsque j’étais adolescent dans mon milieu, les classes moyennes on était tous habillés pareil. Un jean, une chemise Lacoste et un pull bleu marine.

 

Pensez-vous que c’est étudié lorsque les joueurs ou joueuses mettent telle ou telle tenue!

Eux-mêmes ne sont pas libres pour les compétitions de s’habiller comme ils l’entendent puisqu’ils sont sous contrat. Ils doivent porter tel short, tel tee-shirt. On le voit bien d’ailleurs quand en cours de partie aux changements de côté, ils changent de maillot et reprennent le même. Ils en ont 5 ou 6 à disposition de la même taille et avec le même dessin. 

 

Par exemple quand Kuerten vainqueur 3 fois  de Roland Garros a arboré des tee-shirts orange qu’avait-il comme idée selon vous?

Il a porté une couleur inhabituelle sur un terrain de tennis. De l’orangé, une couleur peu tennistique. En plus à Roland Garros sur terre battue; ça s’accorde très mal; ça jure. L’orangé et la couleur rouge brique ça fait bizarre. Il a expliqué qu’il était sud américain et qu’en Amérique du Sud l’orangé se voyait beaucoup dans la vie quotidienne et qu’il n’avait pas le même statut qu’en Europe. Ce qui était vrai d’ailleurs.  Du coup, cela a fait naître une petite mythologie Kuerten.  Mais ça n’a pas suffi pour lancer la mode de l’orangé qui est quand même assez difficile à porter en sport. 

 

 

Et Agassi quand il a mis ses jeans?

C’était pour provoquer. Agassi était un grand transgresseur et quand il était jeune il portait des cheveux  très longs. Il n’était pas d’une propreté extraordinaire et il portait des tenues quelque peu hippies. Son équipementier jouait sûrement là-dessus. C’était tout à fait nouveau dans le tennis. Il y a des gens qui ont hurlé « Je n’ai jamais vu ça, ça devrait être interdit. » Il n’avait pas 20 ans, c’était un gamin. Ce n’était pas très habituel dans le tennis européen et australien, c’était plutôt américain. C’est assez amusant parce qu’avec l’âge, il est devenu extrêmement propre. Il s’est fait raser le crâne et est devenu connu pour son élégance.  

 

 

Pour celui qui est en face quel effet cela produisait-il? 

Quelques joueurs se sont plaints de la couleur portée par leur adversaire, notamment quand le soleil tape très fort. Il y a des couleurs qui renforcent le côté aveuglant de la lumière comme les couleurs vives.  De ce fait, les couleurs neutres passent en général pour plus sportives. C’est la raison pour laquelle lorsque l’on joue la couleur on joue la bichromie blanc plus une couleur. Les équipementiers c’est blanc et rouge, blanc et bleu, blanc et vert, blanc et noir. Quelqu’un qui joue entièrement en orangé déja ça a l’air excentrique et ensuite ça peut gêner l’adversaire. 

 

 

Vous disiez que le joueur devait s'habiller de telle façon. Mais il a quand même le choix entre quelques tenues!

Oui, il a 4,5 tenues dans lesquelles il doit puiser. C’est vrai pour les sports d’équipe aussi. Une équipe un peu importante dans un sport professionnel a toujours 3,4 possibilités de tenue selon les couleurs de l’adversaire, selon s’il fait chaud ou froid. Les superstitions jouent un rôle aussi et un sportif ne remettra ps forcément telle tenue avec laquelle il a perdu. C’est la même chose pour les sports d’équipe.  Une équipe qui a un peu de prestige dans un sport professionnel a toujours 3,4 possibilités de tenue selon les couleurs de l’adversaire, selon la météo, les superstitions et ses différents résultats.

 

Federer avait ralé lors d’un tournoi à Londres car on lui a interdit de porter des chaussures où il y avait un peu d’orange!

Ce n’est pas un problème de couleur, c’est un problème de crampon, de type de semelle qui abîme certaine surface ou qui donne un avantage aux joueurs par rapport aux autres qui n’en sont pas dotés. On accuse l’apparence, mais ce n’est pas ça le vrai problème. . C’est le fait de l’accorder à un joueur et pas à un autre. Je me rappelle les cordages dans les années 70 lorsque les raquettes se sont agrandies de manière illimitée avant que chacun ne puisse prendre une raquette à son idée. Elles étaient  beaucoup plus petites quand je jouais au tennis, en bois et petit tamis comme on dirait aujourd’hui. Très petit tamis comparé à maintenant. Je crois que je ne pourrais pas jouer avec une raquette grand tamis. 

 

Les joueurs qui jouent en double, pensez-vous qu’ils se consultent avant d’entrer sur le court?

Oui et non car là aussi ils ont des obligations individuelles par rapport à leur équipementier et il se peut très bien qu’ils forment une paire avec deux équipementiers différents.  C’est très fréquent qu’en début de tournoi un joueur soit délaissé par son partenaire et prenne quelqu’un de disponible qui veuille bien jouer avec lui. ILs ne se sont donc pas consultés auparavant. Ils ont peut-être des liens amicaux, mais  peuvent être tout à fait disparates sur le terrain en matière de tenue. Pareil d’ailleurs pour les deux en face. Que ce soit un double homme, dame ou mixte.

 

 

Et parmi les vainqueurs  que ce soit en simple ou en double y a t-il des couleurs qui reviennent plus fréquemment?

Quelques superstitions existent là aussi, mais il y a toujours une dominante blanche. Si vous regardez bien les joueurs dans les tournois du Grand Chelem c’est rare qu’ils ne portent pas du blanc quelque part en plus de la couleur.

 

 

Le noir n’a jamais triomphé en tennis?

C’est difficile d’imposer le noir sur un terrain pour des raisons de tradition, de visibilité. Les gestes se voient moins bien. Par exemple, j’aime beaucoup regarder le tennis féminin car les gestes sont davantage décomposés pour le spectateur.  Si les joueuses étaient toute en noir ce serait moins perceptible qu’en blanc. 

 

 

Quelles sont les couleurs que vous aimez chez un joueur ou une joueuse?

Des couleurs claires. Si c’est sur terre battue que ça fasse un contraste avec la couleur du terrain. C’est cela qui me semble important. Un joueur ou une joueuse qui aurait un polo , un short ou une robe rouge brique ça n’irait pas. Il doit vraiment y avoir un contraste avec le sol quelque soit sa couleur. Donc, si c’est de la terre battue traditionnelle , le blanc, le bleu ciel, le jaune se voient mieux que les couleurs foncées. Sur gazon c’est important aussi. J’ai lu récemment que la reine d’Angleterre  quand elle va aux courses où à un match de polo ne s’habille jamais en vert. Il faut qu’on la repère, donc pas de vert sur un terrain où le vert est très présent. 

 

Que pensez-vous du tennis actuel?

JJe m’élève contre une idée qui circule qui dit qu’avec Djokovic, Nadal, Federer et quelques autres joueurs jamais le tennis n’a eu autant de grands champions. Ça n’est absolument pas vrai. Dans les années 50 et 60, le nombre de grands champions du même âge était beaucoup plus grand et les compétitions bien plus acharnées qu’aujourd’hui. Ceci y compris dès les 8ème de finale. Ce n’était pas comme aujourd’hui où les 4 meilleurs se retrouvent systématiquement en finale. 

 

Au niveau des spectateurs comment se passe le rapport avec les couleurs?

Il existe une démocratisation du public et une variété de classe sociale plus importante qu’autrefois avec une impression bien plus colorée que quand j’étais jeune.   Le tennis n’était pas vraiment un sport snob mais disons de classe sociale un peu aisée aussi bien sur le terrain que dans les tribunes. Surtout lorsqu’il faisait beau l’été , on voyait beaucoup de blanc dans les tribunes avec des tenues relativement sobres avant que ça ne devienne bariolé. A un moment donné, les Etats-unis étaient en avance sur le reste du monde au niveau des couleurs, du bruit. Un grand tournoi était un peu comme une messe, on n’entendait rien.  Avec la circulation, les pop corns c'était tout à fait autre chose. 

 

 

`Analysons le court. Il y a d’abord le filet

Il est règlementé et doit être foncé avec une bande blanche. On ne dit pas noir, mais les règlements disent bien qu’il doit être foncé. Hauteur 91 cm, tout ça est bien précisé. 

 

 

Au niveau de l’arbitre?

Rien n’est précisé dans le règlement mais le bon usage veut que l’arbitre ait une tenue qui fait que d’une part on le distingue des joueurs et d’autre part qu’il y ait quelque chose qui souligne non seulement sa place sur la chaise mais aussi lorsqu’il descend voir une trace de balle etc… Mais pas d’autre règle. 

 

Il paraîtrait à ce sujet peut-être pas dans le tennis que les arbitres seraient plus sévères avec des sportifs portant telle ou telle couleur!

Je n’y crois pas beaucoup. En revanche inversement, je crois beaucoup que les arbitres qui étaient en noir pour des raisons télévisées et qui ont laissé tomber pour porter de la couleur ont perdu une grande partie de leur autorité. Sur un terrain de rugby, c’est vrai que quand on voit un arbitre habillé en jaune ou en rose il a l’air moins sévère que s’il était vêtu de noir. Ça marche un peu de cette manière. Le monde des arbitres est un monde mystérieux. Comment dans un sport d’équipe et même individuel un arbitre peut-il être totalement neutre?  C’est un mystère.  Ce serait étonnant qu’il n’ait pas une petite préférence pour tel ou tel joueur. Il n’est pas tout seul, il y a les juges de ligne, le public. Mais il a un rôle important et il doit se montrer le plus neutre possible. Ce n’était pas toujours facile dans ma génération mais ça doit être la même chose maintenant. Dans le tennis complètement amateur, ce n’est pas rare que deux joueurs aient un arbitre. Est-il complètement impartial? On ne fait que s’amuser, il n’y a pas d’enjeu mais quand même…

 

 

Et pour les ramasseurs, les ramasseuses?

Ils doivent être habillés pareil. Je ne sais pas qui choisit mais en général c’est l’organisateur du tournoi pour les Grands Chlems. Les ramasseurs si possible doivent porter une tenue que les joueurs ne porteront jamais afin qu’aucune confusion ne puisse survenir. 

 

Au niveau des couleurs concernant les retransmissions télévisées comment cela a t’-il évolué?

La télé a joué un grand rôle au niveau des changements. Pas seulement dans le tennis mais dans tout le sport en général. Pour des questions de visibilité, ce qui était bien visible en noir et blanc l’était moins en couleur. Il a fallu changer certaines choses , certains contrastes. En football par exemple, la séance de tir au but s’est imposé par la télévision pour que le match ne dure pas trop longtemps. Quand j’étais moins jeune, ce n’était pas rare qu’un match nul soit rejoué deux jours après, le nombre de fois qu’il fallait.  Quand j’avais 20 25 ans il y avait encore des gens qui disaient qu’à partir du moment où le sport était télévisé, ça n’était plus du sport. Quand des nouveautés se mettent en place, il y a toujours d’un côté des résistances et de l’autre côté des partisans des nouveautés quelles qu’elles soient.

 

Pour finir, si vous aviez du être un joueur de tennis qui auriez-vous aimé être?

J ’ai longtemps beaucoup admiré Rosewall. Il n’a jamais gagné Winbledon et a été finaliste en 54 et 74 à 20 ans d’intervalle.  Mais c'est Rod Laver avec ses deux grands Chlems que je choisirais... 

 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

 

 

 

 

 

 

lundi, 12 avril 2021

Christophe Bernelle

Un nouveau président Gilles Moreton a été nommé assez récemment. Mais que faut-il retenir de positif ou de négatif des années  Bernard Guidicelli?

Il attachait beaucoup d’importance aux résultats internationaux pour les très jeunes. C’était en quelque sorte son dada ce qui me semblait un peu exagéré. Il tenait beaucoup à ce que les moins de 14 ans soient dans les tous meilleurs dans l’épreuve Tennis Europe avec une course au point pour obtenir une bourse. Or l’important en moins de 14 ans c’est quand même de penser à améliorer son jeu même s’il faut faire des tournois.. Quelque chose a changé en junior ces dernières années c’est le classement ATP. Il est maintenant très important d’être le mieux classé possible surtout la dernière année junior. En effet, si un jeune est  dans les 20 ou 30 meilleurs mondiaux, il peut bénéficier de wild card pour les 15.000 dollars.  En revanche, s’il n’a pas ce classement là, il galère. Pour avoir ses premiers points, il doit passer un tour dans le tableau final et si les concurrents sont nombreux, il ne peut même pas s’inscrire dans les qualifications. Cela ne signifie pas pour autant  qu’il deviendra  très fort dans le futur mais il aura au moins la possibilité d’être sur le circuit pro. A une époque, très peu de choses étaient structurées dans les clubs et les ligues. Ensuite, ce fut au contraire le développement de pas mal de pôles et à un moment donné il y en avait trop. Sois tu allais en pôle, soit tu avais du mal à t’entraîner.  Avec l’arrivée de Bernard Guidicelli, c’était carrément l’inverse. Il voulait presque fermer tous les pôles pour que tout se passe près de la famille avec les entraîneurs de clubs et de ligues.  L’important, c’est que le jeune et sa famille puissent utiliser ce qu’il existe de mieux pour lui, pour son développement.  Certains joueurs préfèrent rester près de chez eux avec un bon entraîneur de club et de ligue sans faire trop de route. Ils peuvent ainsi continuer leurs études. Pour d’autres c’est plus compliqué car les distances sont très importantes. J’ai vu aussi des joueurs qui ne voulaient même pas rentrer le week-end chez eux, tellement le père était à fond derrière ne laissant même pas l’enfant se reposer.

 

Quel est le parent qu’il faudrait avoir pour que l’enfant devienne un champion?

Un parent doit être là surtout pour soutenir son enfant. On trouve surtout chez les filles des exemples assez extrêmes de parents très investis comme ceux de Marion Bartoli.  Mary Pierce aussi pendant un temps. Surtout chez les petits, la présence des parents joue un grand rôle. Généralement ce sont eux qui donnent aux enfants l’envie de jouer au tennis. La plupart du temps, l’un des deux parents  aime le tennis, fait jouer le gamin ou la gamine. Sinon, c’ést un frère ou une soeur qui joue. Le petit ou la petite suit, regarde puis très vite a envie de taper dans une balle. Ce premier désir de l’enfant, ce premier plaisir d’arriver à la remettre de l’autre côté du filet doit être partagé avec les parents. Quand on est enfant, on est super heureux d’avoir réalisé cela. C’est un peu comme un exploit que l’enfant a envie de renouveler et sans cesse. Quand ils commencent à vraiment s’amuser, la plupart du temps les enfants ne veulent plus sortir du court. Quelque chose d’important aussi c’est le mur.  Les jeunes qui commencent et qui sont mordus essayent de continuer à taper la balle contre un mur. Celle-ci revient tout le temps, tout le temps. De nombreux  joueurs et joueuses se font des films et c’est bien. Ils rêvent énormément, s’imaginent jouer contre leur idole, par le biais du mur. La passion est alors transmise. Et cela vient à 80% de la famille. Quand  Djokovic était petit,  il a eu un contact avec le tennis en regardant les cours que donnait une enseignante. Celle-ci l’a vu et lui a dit qu’il pouvait essayer. Il a dit oui, a tapé 2,3 balles et elle a vu qu’il était loin d’être maladroit. "Parle à tes parents, demande lui qu’ils viennent lui a t-elle conseillé. Si tu veux, tu pourras prendre des cours." C’est comme ça que tout a commencé. Il raconte que justement lors de son 1er cours, il est arrivé avec un sac très bien rangé. La prof a eu le malheur de lui dire «  Dis donc tu as un beau sac, tout est bien rangé, tes parents se sont bien occupés de toi.  Et Djokovic de rétorquer «  oh oh, c’est moi qui fait mon sac. «  l était super heureux et l’histoire est partie. Si les enfants deviennent vraiment motivés, les parents vont être énormément sollicités. Ils vont être amenés à trimbaler leur enfant de tournoi en tournoi, la plupart du temps l’entraîneur étant indisponible.  C’est là où le joueur  doit être vraiment son propre  supporter. Si les parents connaissent un peu la compétition et qu’ils en ont fait un peu eux-mêmes, c’est bien car ils savent la difficulté de ce sport. Notamment au niveau du mental. L’enfant doit vraiment être heureux de faire de la compétition. A ce sujet, j’ai une anecdote avec un petit qui était au centre de Potiers.. Un gaucher classé 15, 12 ans, le 2ème de France dans sa catégorie, disputait les poules sans élimination directe que les enfants à partir de 6,7 ans peuvent disputer. Il en parlait, avait encore des étoiles dans les yeux, et  évoquait  les bons goûters qui le motivaient.  D’où l’importance d’un bon état d’esprit, d’une bonne ambiance. Le plus important c’est que les jeunes passent un bon moment. Le nombre de matches qu’ils ont gagné doit être anecdotique. C’est surtout un rassemblement de jeunes, qui tapent dans la balle, avec une initiation de la compétition. Ce n’est pas pour rien que ce jeune a adoré tous ces rassemblements. Les parents sont là pour soutenir leurs enfants surtout ceux qui supportent mal la défaite. Ils doivent relativiser et se dire que le plus important, c’est de participer au tournoi, au rassemblement, de voir ses copains et d’ essayer de faire le mieux possible. S’il n’a pas réussi, il n’a pas réussi, il fera mieux la prochaine fois.  Il ne faut pas qu’il pense à  la victoire à tout prix comme le voulait Bernard Gudicelli  avec de l’argent pour les entraînements et d’éventuels contrats de marque .

 

La tentation de tricher

Qu’un enfant qui a absolument envie de gagner ait la tensation de tricher, c’est assez classique. Comme un enfant qui joue aux cartes, il a envie de gagner, il va être tenté de tricher. La plupart des enfants  le font pas mais le rôle des parents est super important. Certains parentls ferment les yeux, et vont même jusqu’à encourager l’enfant. Certains étrangers de Russie où des pays de  l’Est  n’hésitent pas à piquer des points parce qu’il faut gagner à tout prix. Les parent doivent être là pour éduquer leur enfant et leur faire comprendre que ce n’est pas comme ça qu’ils vont être forts mais en améliorant leur jeu, en travaillant. Evidemment, c’est un discours qui doit être repris par les entraîneurs qui généralement  ont le bon état d’esprit.  Par contre chez les parents, je pense que c’est plus rare car ils ont un peu plus de mal à avoir de la distance avec ce que vivent leur enfant de manière générale. Là encore c’est le rôle de l’entraîneur d’éduquer un petit peu les parents, de leur faire comprendre que c’est important que tout se passe bien. Qu’un match soit avant tout un moment plaisant…

 

Il faut souhaiter à l’adversaire un beau combat?

Oui comme le disent certains grands maîtres d’arts martiaux il faut souhaiter que l’adversaire soit en grande forme pour essayer de le battre à son meilleur niveau. Que ce soit un beau combat où les deux joueurs ou joueuses  ne sont pas loin de leur meilleur niveau. C’est là que se situent les plus beaux matches, les plus belles batailles. Ainsi lorsque l’ on a une balle de match souvent on est très tenté de souhaiter la double faute de l’adversaire. Or, il faut plutôt se concentrer sur le fait qu’il va faire une bonne 2ème balle et essayer d’anticiper cette 2ème. De visualiser l’endroit où l’on veut mettre un bon retour, pour essayer de prendre le jeu à son compte et gagner le point. C’est facile à dire et pas forcément facile à faire mais c’est important de l’avoir en tête. Si l’entourage, l’entraîneur et les parents l’inculquent à l’enfant jeune, c’est super…

 

Comment un parent doit-il réagir si l’enfant est très déçu après un match, qu’il pleure et qu’il va dans sa chambre!

Déjà, il  faut le laisser exprimer ses émotions très vite et arriver à parler avec lui. Et surtout lui montrer que ce n’est pas parce qu’il gagne un match ou qu’il perd que l’amour qu’il lui porte est chargé. Personnellement, c’est vrai que j’ai  ressenti à un moment donné quand le tennis a commencé à être sérieux pour moi, et que j’avais perdu un match, le soir mon père était moins content. Il était un peu fermé.  Un enfant le ressent forcément. C’est ce que l’on appelle du langage infra verbal. Ce n’est pas dit par le parent mais l’enfant ressent le visage d’un parent déçu parce qu’il a perdu un match. L’enfant a davantage de pression pour le match d’après, car il n’a pas envie de rendre malheureux ses parents. C’’est un peu la même chose quand on a une mauvaise note. Certains parents peuvent être très touchés par cela. Le parent doit surtout faire comprendre à l’enfant qu’ils peuvent en parler.  Déjà il faut dédramatiser  et c’est bien si on peut faire parler l’enfant «  Qu’est-ce qui a marché, qu’est-ce qui n’a pas marché? Est-ce que tu penses à ce qu’il faudra que tu fasses la prochaine fois? » On peut l’aider à voir clair par rapport à son match et le faire parler dessus. Et puis peut-être qu’il s’est mis trop de pression car c’est le cas de beaucoup d’enfants.  Ma mère était moins sensibilisé. Elle connaissait un peu plus le tennis mais c’était surtout lié à son caractère. Que je gagne ou que je perde, il n’y avait pas de grande différence.  C’était plutôt une chance. C’est évident que l’entourage est fondamental on en a de plus en plus conscience. Il faut arriver à aider les parents même si c’est difficile et l’on arrive plus facilement à faire comprendre des choses à des parents ouverts. Certains sont assez fermés et ont l’impression de tout savoir. Ils n’ont pas forcément envie d’écouter d’éventuels conseils.  Nadal ok il a des qualités physiques, du talent mais le mental  commence déjà par l’éducation et puis le côté très soutenant. Ça a vraiment bien fonctionné. Son oncle pouvait parfois être très dur à l’entraînement avec lui, il l’a dit, et Nadal pouvait revenir à la maison en pleurant. Forcément la mère de Rafa n’était pas très contente. Donc elle en parlait au père de Rafa et le père qui est le grand-frère de Toni allait parler à Toni pour qu’il aille un petit peu plus mollo.  C’est une dynamique familiale. Le père de Rafa ’était un peu le boss de l’équipe. C’est évident que si Rafa n’avait eu que Toni et qu’il n’y avait personne d’autre pour lui dire d’ y aller mollo de temps en temps il aurait pu casser Rafa. Il aurait pu le dégoûter d’autant plus que Rafa aimait bien le foot. En plus, il avait un oncle qui avait joué à Barcelone. Il aurait très bien pu envoyer balader son oncle, et faire du foot. Et on n’aurait pas eu Rafa.  La dynamique familiale au sens large est très importante. Avec d’abord les deux parents. 

 

 

Quelle est l’attitude idéale d’un parent quand son enfant joue? 

Pas simple d’être parent. Mon fils a fait une ou deux compétitions, ma fille l’aînée en a fait une. Je n’étais pas là, or c’est assez drôle. Elle était au CAM et avait 7 ans. Elle était à l’école de tennis,  aimait bien taper dans une balle sans plus. J’ai quelques souvenirs où je la faisais  jouer, c’était le soir, l’été. Elle pouvait quand même jouer jusqu’à 10h du soir, jusqu’à la tombée de la nuit même.  Quand tu es parent, tu dis c’est bien, tu es en train de transmettre une passion.  Après il y a eu le premier tournoi du club et des enfants de l’école de tennis.  Alizée ma fille n’avait pas trop envie de jouer, elle n’est pas compétition, elle le sentait déjà. Mais comme elle aimait bien Jacqueline Le Boubenec qui filait des bonbons aux enfants, elle lui a dit ok je vais faire le tournoi. Elle le fait, c’était un mercredi, et mon ex femme y était. Elle m’a raconté. Ma fille commence le match, l’autre joueuse sert, n’hésite pas à servir à la cuillère. On me raconte qu’il y a un jeu accroché, mais elle le perd. A elle de servir et elle ne voulait servir que par en haut. Et alors 1 puis 2 puis 3 puis 4 doubles-fautes. 2/O elle sort du court; c’est fini. C’est une artiste; ce n’était pas sa tasse de thé. Mon fils c’était un autre genre. Il est allé faire le tournoi de la ligue, du CAM à 7,8 ans. . Il perd, après il joue la consolante, il gagne deux matches par W0, je ne suis pas sûr qu’il gagne un match , je crois qu’il perd après et puis il se faisait tellement des films qu’il avait l’impression qu’il allait gagner le tournoi. J’ai du le regarder deux fois. Bien sûr tu as envie qu’il gagne, qu’il mette la balle dans le court. Mais j’avais quand même du recul et après il a joué beaucoup plus au basket. Il se mettait une pression . Il faut le soutenir et qu’il soit content d’aller faire son match. Et puis s’il perd ce n’est pas grave, il y aura un autre match après. Faut vraiment qu’il soit heureux d’être là surtout et tout faire pour qu’il soit content. Si possible, il faut éviter qu’il se rende compte que ça stresse les parents. 

 

Quelle attitude les parents doivent-ils avoir avec l’entraîneur?

Là encore l’idéal c’est qu’ils fassent énormément confiance à l’entraîneur sinon c’est compliqué. Ou alors  changer d’entraîneur, ce qui n’est pas toujours simple à l’intérieur d’un club. Tout le monde n’a pas l’argent pour payer un entraîneur privé. Un bon entraîneur va aussi aider les parents qui vont être amenés à accompagner leur enfant en compétition. Il va  les aider à avoir la bonne attitude; à essayer d’être actifs aussi mais dans le bon sens du terme. Il peut peut-être les inclure un peu, leur dire que leur enfant doit avantage attaquer, essayer dès que la balle est courte de se projeter et d’aller vers l’avant. Si l’entraîneur n’est pas là, il peut très bien confier une mission aux parents. Les parents vont alors regarder, vont peut-être compter les fois où il est allé à l’attaque, et les  fois où il aurait peut-être pu le faire et où il n’a pas saisi l’occasion. Et qu’ils ne soient pas centrés uniquement sur le score, je gagne, je perds. Les parents peuvent aussi  regarder les entraînements et voir si leur enfant arrive à refaire la même chose en match.

 

Si un parent prend trop de place!

C’est important que l’entraîneur soit psychologue. Dans le football, les joueurs vont au club, prennent le bus, vont à leur match et l’entraîneur ne rate aucun match. Par contre au tennis, on sait bien que les parents font partie de l’équipe. C’est un pilier important pour que le joueur ou la joueuse s’épanouisse à travers la compétition qui remue beaucoup de l’intérieur. Au niveau des émotions l’enfant est seul sur le court. 

 

Le tennis est un sport difficile car il met les nerfs en boule!

C’est un des sports les plus durs dans la tête. Déjà c’est un sport individuel. Dans un sport collectif, on peut gagner même si on joue mal à partir du moment où les autres joueurs ont bien joué. On peut même dire j’ai perdu parce que l’autre a été nul dans les buts, il a fait une merde. Au tennis,  on ne peut  se cacher. C’est un sport d’opposition différent du judo où il existe la notion du chronomètre. Dès que l’on a un avantage, il suffit de garder son avantage et l’on gagne. Au tennis ce n’est pas ça. Il n’y a pas de chronomètre et même si on a un avantage il faut quand même gagner le dernier point. Tant que le dernier point n’est pas fini, le match n’est pas fini. Alors qu’au judo, s’il reste 10 seconde et que l’on a un avantage on peut tout faire pour ne rien faire. On a juste à tenir, on n’a pas à jouer son meilleur judo. Au tennis au contraire si l’autre est vraiment un combattant, il ne va pas donner le match. J’aime bien cette image de Brad Gilbert qui disait que quand l’autre est mené, il est comme un ours blessé. Et cette image est interessante car l’ours blessé est encore plus dur à tuer. Il faut donc être sur ses gardes encore plus et essayer de jouer le mieux possible. Il ne faut pas dire que l’autre nous a donné le match au contraire. On sait bien que terminer un match c’est ce qu’il y a de plus dur au tennis. Par rapport au golf, un match de tennis  peut durer très longtemps. Il y a eu une finale Djokovic  Nadal à l’Australian Open qui a duré pas loin de 6h, Santoro Clement était aussi un très long match.  Et que dire du fameux match Mahut Isner 11h en 3 jours à Winbledon. Il faut être fort physiquement, mais il faut aussi être fort dans la tête pour jouer 11H. Il n’y a pas d’autre sport où un match peut être aussi long surtout en sport individuel. . Au golf, on est en concurrence indirecte avec les adversaires alors qu’au tennis on ressent vraiment directement l’adversaire. Le tennis c’est vraiment un combat, c’est pour ça que j’aime bien le comparer souvent à un art martial. Agassi le compare à la boxe aussi , c’est vraiment un  combat où l’on se donne des coups. Mais les coups sont dans la tête justement. Quand on prend un full ace et ensuite un 2ème derrière ça fait mal à la tête. L’exemple que j’ai en tête c’est quand Agassi gagne Winbledon en 1992 contre Ivanisevic. Il doit prendre une quarantaine de full aces. Même s’il touche la balle cela fait quand même point pour Ivanisevic.  C’est là où il faut être très fort dans la tête. Agassi prend un ace comme si de rien n’était, va se replacer de l’autre côté sans broncher et il est prêt à retourner. Il prend un autre ace, il fait la même chose. Comme s’il n’était pas atteint alors que l’on peut avoir envie de râler, de dire le mec est incroyable, injouable. Des phrases que l’on entend sans arrêt sur tous les courts de tennis en compétition voir même à l’entraînement. C’est là où il faut être vraiment fort dans sa tête, accepter de prendre des coups et juste être prêt à saisir à un moment donné ce match là.  Agassi a eu l’opportunité de passer devant et de gagner en 5 sets. 

 

 

Que dis-tu à ces jeunes lorsqu’ils affrontent un copain?

C’est arrivé lors d’un tournoi junior en Espagne. Ils étaient plusieurs français, ils se sont joués. C’est important de souhaiter que l’adversaire soit à son meilleur mais là il faut le souhaiter encore plus. C’est un copain, un ami et il faut que  tous les deux on soit en forme. Il faut souhaiter que son ami ait un gros niveau de jeu, que le combat soit magnifique, et puis le meilleur du jour gagnera. En plus, ils sont juniors et  il faut souhaiter qu’ils se se jouent aussi en senior  dans les gros tournois.  L’important c’est de progresser et d’espérer qu’ils se joueront dans des finales. Il faut dédramatiser l’enjeu du match, c’est juste une confrontation. De toute façon, il faut toujours être centré sur son jeu, et essayer de jouer son meilleur tennis  et encore plus contre un ami.  L’ami doit également se dire la même chose. C’est un ami, il est capable de très bien jouer et mieux vaut mieux s’attendre à ce qu’il joue bien, savoir exactement ce qu’il peut faire et anticiper. Si son ami adversaire n’est pas en forme ce jour là, ce ne sera pas un super match et normalement  il le gagnera mais au moins il ne sera pas surpris.  Mais il doit visualiser le fait que son ami va faire un super match. 

 

Tu dis que cela doit se passer normalement comme contre un autre. Mais ce n’est pas possible! 

Deux choses interviennent. S’il existe une vraie amitié, je dirais très souvent qu’il peut vraiment y avoir un grand match car il y a l’envie de montrer à son ami que l’on est fort et vice versa. Généralement ça fait des bons matches. Si on perd bien sûr on est déçu mais c’est notre ami qui va continuer le tournoi donc on est content pour lui. Si on gagne, on est content pour soi et comme c’est un ami il est un peu content pour nous aussi. Après il y a les copains, c’est un peu différent. Et puis cas encore plus important quand on joue quelqu’un que l’on n’aime pas du tout. Cela peut-être plus compliqué et l’ on a plus envie de faire de la vraie boxe. Si on commence à ne pas bien jouer, à rater on risque de se frustrer. On se dit je n’ai pas le droit de perdre contre lui, il est trop con. On rentre dans un cercle vicieux et cela engendre une situation difficile à vivre. Un homme ou une femme prévenu en vaut deux, et là aussi il faut être centré sur son jeu et faire abstraction de la personne qui est en face. On connaît le jeu de cette personne, on sait ses qualités, ses défauts, et il faut être centré uniquement sur son propre jeu à soi. Et  ce n’est pas évident d’arriver à faire abstraction de l’autre. Mentalement c’est difficile mais avec du travail c’est faisable et il faut éventuellement le préparer ce match là. Cela me fait penser à Djokovic  qui travaille énormément mentalement. La dernière finale de Winbledon contre Roger, il a été capable alors que le public était à fond  pour Roger et scandait son nom il a été capable de faire comme si les spectateurs criaient son nom à lui. il l’a dit, il y arrive. C’est incroyable. C’est très facile de se dire « fais chier, ils sont tous pour lui, c’est insupportable, pourquoi ils ne m’aiment pas." Lui il sait ce qui va arriver et arrive à transformer. la situation à son avantage.  Comme si les spectateurs  étaient là pour lui. C’est remarquable. 

 

Et si c’est une bête noire?

On le connait; on sait exactement comment il joue, et ce qui nous gêne.  Idéalement c’est important d’arriver à visualiser un peu sa tactique et de se voir faire des choses dont on pense qu’elles vont l’embêter.  C’est peut-être prendre plus de risques quitte à perdre mais d’une autre façon.  C’est important d’avoir une tactique claire dès le début pour essayer de faire en sorte de le battre. Il faut y croire et là encore il y a un travail mental à faire puisque la façon dont on rentre sur le court va conditionner la performance. S l’ on joue une bête noire contre qui on a toujours perdu, il faut vraiment avoir en tête une tactique à mettre au point et se persuader qu’elle peut vraiment fonctionner.  Et qu’ainsi on peut le battre. Il y a un conditionnement à faire et si l’on ne fait pas ce travail là, cela risque d’ être compliqué. On risque de retomber un peu dans les mêmes travers.  L’autre en face a forcément des faiblesses  sauf si c’est Nadal ou Djokovic.  Gérulaitis  avait perdu 16 fois contre Connors et à la 17ème fois il le bat. Et lors de l’interview il a dit «  Il faut savoir que personne ne peut battre Gerulaitis 17 fois de suite. Faut toujours y croire même si c’est sa bête noire. 

 

Important aussi l’humeur? Ce n’est pas la même chose si l’on est serein ou si au contraire on s’est disputé avec quelqu’un de son entourage!

Là on en revient une fois de plus à l’importance de l’entourage par rapport à un match qui plus est,  important. Je pense au clan Nadal et à son  entourage pour tous les Grands Chelems à chaque fois. Il ya vraiment son cercle proche. Ca fait partie de ces routines pour qu’il soit bien. Tout le monde autour est là pour que justement il dépense zéro énergie en dehors de ce sur quoi il se focalise. Là on parle d’un très grand champion  mais au niveau des jeunes qui sont à un niveau international c’est important que les parents  mettent aussi une certaine ambiance,  dédramatisent le match car le joueur est vraiment concentré dessus. Nadal la dernière fois que je l’ai vu à Bercy jouait aux cartes où à de petits jeux de société avec son coach. Ils sont là comme des gamins en train de rigoler et non pas entrain de se regarder dans le blanc des yeux dans les vestiaires.1h avant on rentre dans les vestiaires et  pour les plus jeunes une demi heure avant . Pas la peine de se préparer 5h avant non plus.. Une espèce de rituel d’avant match se met en place dès que l’on rentre dans les vestiaires, et l’on se réchauffe physiquement. Parfois, on tape un petit peu la balle avant où l’on peut faire une petite sieste…

 

Ces enfants dont tu t’occupes est-ce que tu essayes de les intéresser un peu à autre chose qu’au tennis?

J’essaye  mais  tout dépend de l’âge. Ceux qui sont en terminale, même en première, je peux tenter de leur parler un peu philosophie. On peut commencer à parler un petit peu des différents philosophes que ce soit ceux de l’Antiquité grecque ou asiatique. Faire passer un petit peu des messages de ce style. Les grands joueurs ou joueuses ont quand même des phrases assez proches des philosophes notamment Nadal.  Les joueuses surtout se font mal, et peuvent se taper la cuisse avec une raquette.  On ne peut pas tolérer qu’elles se fassent mal ainsi. Même à l’entraînement elles le font parfois. C’est important que les joueurs ou joueuses se respectent eux-mêmes et l’adversaire aussi. C’est un sport difficile mais qui va les aider à mieux se connaître. La plupart essayent quand même d’avoir leur bac vu la difficulté pour être professionnel. Hugo Humbert a son bac je pense que Lucas Pouille aussi, Fiona Ferro je pense aussi. La filière américaine après le bac est quand même super interessante. Un français qui joue pas mal en ce moment c’est Arthur Rinderknech qui est allé aux Etats-Unis. Il a 25 ans, il est 120ème, et a énormément  progressé après son retour des Etats-Unis. C’est beau…

 

Concernant le tennis féminin, j’ai  eu une conversation avec Christophe Bernelle mais je ne retrouve plus les papiers où j’avais retranscris cette interview. Comme si on ne voulait pas que les femmes soient également à l’honneur. Non pas que je sois féministe tel qu’on l’entend ainsi quand par exemple on écrit cheffe ça me révolte tellement c’est laid, mais j’estime que les femmes ont  droit au même sort que les hommes même si elles ne disputent pas 5 sets. Ce serait ridicule de vouloir que la femme soit l’égale de l’homme physiquement. Ce ne sera jamais possible. Vouloir l’égalité entre les deux sexes est vain selon moi. Chaque sexe a ses qualités, ses défauts, ses caractéristiques et c’est ce qui fait le charme de la vie. Pourquoi vouloir comparer? A ce moment là, il n’y a plus aucun repère et c’est la gabegie totale.  Je le dis d’ailleurs dans mon livre «  La raquette à l’encrier » pour lequel je n’ai pas trouvé d’éditeur pour l’instant que c’est une cause de divorce car plus aucun des deux sexes n’est à sa place. L’homme veut faire la femme et la femme veut faire l’homme. Cela dit, un homme peut très bien être père au foyer j’en connais un avec qui ça se passe très bien, s’il conserve son rôle de père et la femme celui de mère. C’est tout à fait possible si les choses sont faites intelligemment.  Ce petit intermède ayant été réalisé, voici donc ce qu’il ressort de ma conversation avec Christophe Bernelle. Je préfère ne pas faire de distinction entre ce qu’il m’a dit et ce que je pense et c’est un panaché des deux côtés que je réunis là. Suzanne Lenglen a été la première femme hommes compris, à devenir professionnelle et à gagner beaucoup d’argent. C’était une vraie star et de nombreuses personnes venaient la voir lorsqu’elle s’entraînait sur un mur confectionné par son père dans un garage. Elle faisait très attention à la manière dont elle s’habillait et c’est vrai que sur les photos elle est très apprêtée. Et elle a parfois des positions incroyables avec notamment une détente inouïe. A la volée, elle décolle totalement du sol. Comme elle était professionnelle, elle n’a pas eu le droit pendant un certain temps de disputer les Grands Chlems et ce n’est qu’en 68 qu’elle a pu y participer. J’ai entendu dire mais il faudrait vérifier, qu’elle prenait du café pour se doper. Dans le livre rédigé par un journaliste italien dont il faudrait retrouver le nom, il n’est pas question de mental ce qui est un peu dommage. Mais Bill Tilden lui en parle dans son livre et évoque  déjà l’importance  d’avoir un bon état d’esprit… 

Sélès est ensuite la deuxième joueuse dont nous avons parlé. Christophe Bernelle apprécie beaucoup cette joueuse et la trouve touchante même s’il reconnaît qu’elle pouvait en faire un peu trop à la manière américaine notamment en offrant des fleurs au public. Personnellement ses cris m’exaspéraient et je pense que c’était le cas de beaucoup de joueuses. Les spectateurs je ne sais pas. Elle détient le record de 8 grands chelems et elle sera dure à détrôner.  Son père qui était un homme intelligent avait compris l’importance de ne pas se poser de questions sur un court et pendant longtemps il lui a interdit de compter les points. Quand elle faisait des matches, c’est lui qui lui disait le score et lui indiquait quand il fallait tourner.  Ce qui faisait qu’elle tapait la balle très fort sans réfléchir. Lors de ses finales, c’est l’arbitre qui lui indiquait qu’il fallait tourner. Elle ne le savait pas. C’est sans doute une des clés de son succès. Ensuite elle s’est fait agresser et a eu beaucoup de mal à s’en remettre car elle a trouvé que le milieu ne la soutenait pas beaucoup. Parfois quand elle roulait en voiture sans but, elle avait envie de se jeter dans un arbre. Elle a encore gagné un Grand Chelem après. 

Troisième joueuse : Serena Williams. Aux Etats-Unis il y a deux sortes de courts les privés réservés aux gens fortunés et les municipaux pour ceux qui ont moins de moyens. La famille Williams très motivée arrivait très tôt le matin, attendait dans la voiture pour que les filles puissent avoir le court en premier et jouer autant qu’elles voulaient.  La mère avait un très bon état d’esprit et pensait avant tout au bonheur de ses filles. Ainsi quand elle regardait ses filles, elle ne cherchait pas à savoir si elles jouaient bien mais si elles souriaient.  C’est en regardant Navratilova recevoir un gros chèque que le père a eu envie de mettre ses filles au tennis. Il s’est dit super ce sport ça rapporte bien et il a eu comme ambition de faire de ses filles des championnes. Pari gagné! Vénus et Séréna étaient déjà très fortes à 14 ans et il aurait pu les envoyer disputer des tournois à cet âge là pour récolter de l’argent. Mais il a préféré qu’elles mûrissent et a attendu qu’elles aient 16 ans pour les envoyer sur les tournois. Et ce fut visiblement la bonne tactique car elles sont toujours là. Et c’est assez fou ce qu’ a réalisé Séréna revenir au plus haut niveau après une grossesse qui en plus s’est mal passé… Mais, cela démontre aussi que la relève est difficile et que peu de joueuses arrivent vraiment à sortir du lot. 

Agnès Figueras-Lenattier

 

 

vendredi, 19 mars 2021

Christophe Bernelle

psychiatrie,expérience globale,tennisLe docteur Christophe Bernelle actuellement responsable du pôle mental au sein de la Fédération française de Tennis  pour les jeunes de 12 à 20 ans a été n°13 français et 170ème » joueur mondial. Psychiatre, pédopsychiatre, il a d’abord travaillé dans le privé, puis a été responsable de deux CMPP.  Il fait part ici de sa riche expérience… 

 

 

A quel âge as-tu disputé ton premier tournoi?

J’ai disputé mon premier tournoi la coupe Ewbank à l’âge de 10 ans et cette année là, j’ai remporté tous les tournois auxquels j’ai participé. L’année suivante a été beaucoup moins fructueuse car je me suis mis trop de pression. Je me suis dit tu es benjamin 2, tu dois gagner ce tournoi, tu n’as pas le droit de perdre, tu l’as gagné l’année dernière. Tu as un an de plus, les autres sont plus jeunes. « C’est un raisonnement logique, mathématique, mais débile car tu te mets une pression de dingue. Et pour la petite histoire, j’ai perdu au 1er tour contre celui qui deviendra un grand ami Jean-Marc Piacentile avec qui j’ai joué Roland Garros en double. Je perds 9/8 en ayant très peur. Je vois qu’il joue très bien et j’’ai pensé que j’allais perdre. Il était plus petit que moi, c’était la honte. C’est rigolo comme je me suis mis la pression à 11 ans. Amusant en tout cas comme j’ai de bons souvenirs. Je sais exactement sur quels courts j’ai joué mon premier match officiel. En deuxième année minime, j’ai de nouveau fait une bonne saison, et à 19 ans j’ai remporté le circuit satellite au Portugal ce qui m’a permis de faire un grand bond au classement. J’étais -30 et 5,600 ème mondial, et suis devenu n°13 français et 170ème mondial. Début 1983, je gagne mon match contre Boris Becker qui deux ans plus tard remporte son 1er Grand Chelem… Je me souviens aussi très bien quand je suis allé à Roland Garros pour la 1ère fois en 72; j’avais à peine 10 ans. C’est quand même un choc… J’ai vu la demi-finale Proisy Orantès et après j’y suis allé énormément. J’ai assisté à la victoire de Nastase qui est devenu une idole pour moi et je suis content d’avoir joué en double contre lui en 83. Après, l’arrivée de Borg m’a donné envie de faire comme tous ces joueurs. Mais d’un autre côté aimant également le foot que je n’ai pas continué par la suite, je rêvais également de marquer des buts au futur Parc des Princes...Niveau scolarité, j’ai fait un sport études régional au Lycée Lakanal  à Sceaux. Mes parents habitaient juste à côté et contrairement à tous mes potes je n’étais pas interne.  J’ai eu la chance qu’Yves Hugon, mon entraîneur à l’INSEP soit le même que celui de mon club… Après l’obtention de mon bac, je suis parti aux Etats-Unis à l’Université de Miiami ayant obtenu une bourse complète. Je suis un des premiers joueurs français à l’avoir fait. Je suis resté là-bas juste 20 semaines, car j’ai du aller à l’armée que j’ai faite au bataillon de Joinville réservé aux sportifs. J’ai pu jouer beaucoup au tennis, et disputer des tournois à l’étranger, ce qui m’a permis de monter au classement et de jouer Roland Garros à 20 ans...

 

Parle nous de ce match contre Becker!

C’était lors du circuit allemand satellite. Il avait 16 ans, moi 20, c’était un de ses premiers tournois ATP. Il avait bénéficié d'une wild Card en tant que jeune allemand et l’on s’est joué sur moquette au 1er tour. J’étais tête de série de ce petit tournoi et j’arrive à gagner 6/4 au 3ème. Un match très accroché. Il était déjà avec son coach de l’époque Gunther Bosch et deux ans après il gagne Winbledon. Après ma victoire, j’arrive dans les vestiaires et je vois Becker souriant, parlant avec son coach. Il était tranquille, et j’ai même parlé avec lui. Son comportement m’a surpris car normalement quand on perd un match, on est un petit peu effondré. En prenant ma douche, je me suis dit «  Ce mec là, il est trop gentil, il n’y arrivera jamais. C’était l’époque Mac Enroe Connors, il fallait haïr, tuer son adversaire. Maintenant on n’entend plus ce genre de discours, et  heureusement une évolution s’est opérée. On peut être un gentleman comme Nadal et Federer et être encore plus fort que les joueurs de cette époque.  Bien évidemment, il faut être un grand compétiteur sur le court, mais on n’est pas obligé de mal se comporter. Le respect de l’adversaire est important car lorsque tu pars dans de grosses colères, tu te manques de respect aussi à toi. Pour moi le tennis représente de plus en plus un art martial et c’est important de bien se connaître.  Gilles Simon dit dans son livre que c’est important notamment dans la transition de junior à professionnel et je suis complètement en phase avec lui.  Il faut  arriver à prendre le tennis par le bon bout, un des sports si ce n’est  le plus dur mentalement et  arriver à comprendre que cette difficulté va nous aider à mieux nous connaître. Et à faire de nous un homme et une femme épanoui… Pour en finir avec Becker;, je le croise en 1989, 6 ans après, il est devenu n°1 mondial. Je ne l’avais pas revu depuis. Il était tout seul et je l’aborde pour lui raconter ce que j’avais pensé à l’époque.  Il se souvenait et cela l’a fait rire… 

 

 

Tu as joué contre Mats Wlander un peu plus tard dans l’année le 23 mai au 2ème tour de Roland Garros alors qu’il était tenant du titre. Quelle impression cela t-a t-il fait de jouer contre lui?

On m’avait donné une wild card, et j’’avais gagné mon 1er tout en cinq sets… J’ai du jouer le lendemain car à l’époque il n’y avait pas beaucoup de courts. Or j’aurais bien aimé avoir une journée de repos. J’étais bien content de le jouer. J’y croyais dur comme fer et je voyais déjà les gros titres le lendemain dans l’Equipe «  Bernelle bat Wilander. Mais en même temps au moment de l’échauffement, j’ai été habité par une sensation que je n’avais jamais connu : un bras qui tremblait si fort que j’avais l’impression que tous les spectateurs s’en rendaient compte.  Ça m’est tombé dessus; c’était fou. Je n’étais pas du tout préparé mentalement d’autant plus qu’après mes 18 ans, mon entraîneur de club Yves Hugon qui ne connaissait pas le tennis international ne s’est plus occupé de moi. J’étais donc seul sur le circuit. Heureusement que j’ai joué sur le 2 et non sur le Central.  Tout le début du match, je n’ai pas mis une balle dans le court, et je n’ai pas pu agresser Mats Wilander. C’était une machine, il ne ratait jamais. Il ne jouait pas très vite, mais avec beaucoup de longueur de balles. Il aurait fallu que je le bouscule un petit peu, c’était ça le plan. Je n’allais pas rentrer dans des échanges interminables. J’ai pris 6/1 6/1 dans les deux premiers sets mais il y avait quand même quelques échanges. Au 3ème set, je mène 3/1, j’ai des balles de jeux sur tous les jeux et je prends 6/3. 

 

Cela t’avait  déjà fait prendre conscience de l’importance du mental!

Oui, ce fut une expérience très importante à ce niveau là. Après je pars en Angleterre pour jouer sur herbe, surface sur laquelle je n’avais jamais joué. J’étais un peu seul car mon partenaire de double Jean-Marc Piacentile qui était dans le même club que moi a préféré la terre battue. J’avais envie de faire les gros tournois sur herbe avant Wimbledon. J’ai fait les qualifs du Queens, de Bristole et j’étais censé faire les qualifs de Wimbledon. Or c’est là-bas trois semaines après Roland Garros que j’ai décidé d’arrêter ma carrière de joueur. J’étais dans les lectures depuis avril 83. Je commençais à m’ouvrir au mental et à la psychologie, et je suis tombé par hasard sur le livre d’un psychiatre américain Alexander Lowen «  la bioénergie » . L’auteur faisait un peu une critique de la société du toujours plus des Etats-Unis ce qui m’a fait réfléchir sur mon propre vécu. Puis, finalement de bouquin en bouquin, je décide d’arrêter ma carrière de joueur de tennis et d’entamer des études de médecine pour devenir psychiatre. J’avais envie d’aider les autres car justement je suis bien placé pour me rendre compte que lorsque l’on voyage tout seul semaine après semaine et que l’on perd au 1er tour ce n’est pas simple. Et donc que l’entourage est fondamental pour rebondir et apprendre de ses défaites. On ne peut pas toujours gagner. Tsonga par exemple ancien n°10 mondial,  disait que sur une quarantaine de semaines, il gagnait maximum 2,3 tournois par an. 

 

 

Comment en es-tu arrivé à arrêter ta carrière de joueur?

 A l’époque, j’étais plutôt du genre très sérieux, à tout faire très bien. Me coucher tôt, bien m’entraîner. J’étais stressé, me mettais beaucoup de pression et j’étais dans une démarche d’essayer de me détendre avant les matches. Et finalement je suis allé dans l’excès de la détente, j’ai carrément arrêté. Et puis la critique de ce psychiatre du toujours plus chez les Américains m’a incité à faire un parallèle avec le classement ATP revu chaque semaine où l’on veut toujours monter.  L’année d’avant, j’étais beaucoup moins bien classé et j’ai fait un grand bond en avant. Et finalement, je me suis rendu compte que je n’étais pas si heureux que cela, et que je voulais toujours plus… Je m’étais entraîné à l’époque avec Vilas qui n’allait pas très bien moralement ,or c’était une de mes idoles. Son mal-être m’avait fait poser des questions, comme il est normal de s’en poser à 20 ans. Ces différentes lectures m’ont donné l’illusion que j’allais changer le monde en devenant psychiatre. Que j’allais notamment soigner les chefs d’entreprise et que tout irait mieux après pour les employés et le monde entier. Il y avait aussi ce côté tout ou rien  d’un jeune de 20 ans.  Sur le circuit, on ne pense qu’à soi, rien qu’à soi, à son tennis et je me suis dit «  il faut que je pense aux autres. Je vais être plus heureux ainsi. Je rêvais également d’avoir une vie un peu comme tout le monde avec une famille et des amis.  C’est un ensemble de choses qui a fait que j’ai pris cette décision assez rapidement pour me retrouver à la faculté de médecine en octobre. Heureusement que mes parents ont insisté pour que je passe mon bac...C’est important d’avoir des parents qui disent «  mets le bac dans ta poche » .  Ce qui a changé par rapport à mon époque c’est que les meilleurs jeunes de France peuvent signer des contrats avec des managers et donc des marques à 13,14 ans. Et s’ils commencent à avoir des résultats, il peuvent à 15 ans obtenir un contrat de 4,5 ans avec pas mal d’argent au bout. Mais ce ne sont pas non plus des sommes astronomiques pouvant réellement compenser s’il arrive un problème. Une fois de plus, il est important que ces jeunes s’épanouissent… 

 

 

 

 Puis tu as ouvert un cabinet privé pour adultes et adolescents! Tu essayais le plus possible de ne pas trop donner de médicaments…

Je ne suis pas contre bien évidemment car il existe des moments où il faut vraiment y avoir recours  pour des patients  en très mauvais état psychologique.  Mais pour moi l’idéal c’est d’aider le patient à cheminer et à comprendre son fonctionnement. A pouvoir petit à petit, même si cela prend souvent du temps changer un peu sa façon de voir les choses. Quelque part au niveau neurobiologie, il existe une  neuroplasticité qui permet au cerveau de se modifier. Je crois beaucoup à cela et jusqu’à la fin de nos jours, on peut toujours changer nos circuits neuronaux même si bien sûr c’est plus facile à 20 ans qu’à 80. Il faut essayer de saisir ce constitue la part de notre responsabilité dans notre vie et bien sûr il y a les traumatismes qui sont là, qui ont eu un rôle, qui nous ont façonné. Il faut parvenir à ce qu’ils aient moins de résonance en nous et qu’ils nous atteignent moins.  On sent quand un patient a une compréhension même au niveau affectif de son corps, de son vécu. De ce qui a pu disfonctionner. Si celui-ci y parvient, il va acquérir un gain d’énergie vraiment interessant et le ressentir vraiment de l’intérieur.

 

 

 

Quelle était ta manière de t’y prendre avec les patients?

Avec un adulte, la démarche de psychothérapie psychanalytique consiste surtout à partir des dires du patient, de ses envies. Si par exemple, un patient a été empêché par ses parents de faire de la danse ou de la peinture et qu’à un moment donné il ose faire une de ces activités, cette initiative va forcément lui faire du bien car il est en lien avec son enfance, avec ses contrariétés. A partir du moment où l’on est psychanalyste, c’est obligatoire de faire un travail personnel.  J’avais 27 ans quand j’ai commencé. J’étais étudiant en médecine et je faisais  3 séances par semaine. Pendant deux ans , je n’ai pas du tout parlé tennis alors que c’était une part très importante de ma vie. Je l’avais vraiment mis de côté, et deux ans après, avec encore  3 séances par semaine, je me suis remis à parler tennis, de mon arrêt de 6 années.  Cela a déclenché en moi l’envie de rejouer  et j’ai retrouvé un plaisir de gamin  sur un court… C’était en 89, et j’ai vraiment repris comme si j’étais un nouveau joueur sans me dire «  Avant je savais faire ceci, cela, je battais un tel ». C’était juste pour le plaisir de jouer,  de progresser, de faire aussi de la compétition, de retrouver cette adrénaline d’avant match et d’arriver à le surmonter.  J’avais même des rêves un peu fous de repartir sur le circuit.  Actuellement, cela fait plus de 30 ans que je suis dans le tennis et j’aime de plus en plus ce sport. J’ai vraiment retrouvé ce lien avec l’enfance et c’est très important de garder ce plaisir. Je fais tout pour symboliser la maxime du tennis français «  Le tennis, le sport de toute une vie ». Je ne me suis jamais autant amusé sur un court. C’est lié à mon approche du tennis qui pour moi est devenu comme un art martial. Donc, quand j’arrive sur le court, je fais tout pour devenir un maître du tennis  dans le genre un maître d’art martial.  On peut tout le temps essayer de progresser dans tous les domaines. Je n’aurai jamais plus  mon physique de 20 ans mais quelque part j’essaye de faire en sorte qu’il diminue le moins possible. Et j’ai cette chance d’avoir l’impression que j’ai encore 15 ans sur le court. J’arrive encore à bien bouger, à faire un peu ce que je veux et c’est super sympa. Et puis mentalement, je suis au sommet…

 

                                        Être heureux avant tout sur le court

 

On sent bien que si Federer a envie de rejouer après ses blessures, c’est qu’il est vraiment heureux de taper dans une balle. Et Nadal le dit aussi, là où il est le plus heureux c’est sur un court.  J'ai lu une interview  en avril 2019 où il raconte qu'il était à l'entraînement et qu'il a arrêté au bout de 5 minutes. Il déclare à Moya un de ses coaches qu'il ne peut continuer car il ne prend pas de plaisir sur le court. Avec son staff, ils ont été passer une semaine à la montagne, avec de la marche. A ce moment là, Nadal classé 1Oème mondial expliquait qu'il pensait peut-être mettre un arrêt sur sa saison histoire de souffler un peu. Finalement, après cette semaine, il a repris. Et en fin d'année, il gagne Roland Garros,  L'US open et il finit n°1 mondial... C'est beau je trouve autant d'enthousiasme après tant d'années passées sur le court. C'est incroyable. Mais on peut très vite perdre cet enthousiasme. D'ailleurs, plein d’adolescents arrêtent,. C’est vrai que le tennis de compétition c'est compliqué et c’est dommage car on n’a pas  aidé ces jeunes  à le faire dans un bon état d’esprit. 

 

 

Qu’est-ce qu’un bon psychanalyste?

C’est comme tout, il y a des patients plus ou moins capables de se laisser aller, de faire confiance et d’être capable de faire des liens entre les choses. Il faut s'adapter et ce n’est pas forcément facile à comprendre quand on n’est pas dans le métier. Un bon psychanalyste, c’est quelqu’un qui a une formation avec de préférence un diplôme d’état.  Qui a fait une analyse personnelle et qui a réglé ses propres problèmes. Avec une éthique importante et qui sera content si le patient devient autonome et arrête les séances.  Qu’il soit heureux de lui dire oui même si souvent il faut un petit laps de temps pour que tout s’arrête complètement. Et non pas qu'il fasse en sorte que les séances s’éternisent  par appât du gain. Si un patient a envie d’arrêter, il ne doit pas avoir peur de le dire…

 

 

Au sein de la Fédération française de tennis,  tu préconises la méditation, le yoga. Tu t’en servais déjà au cabinet?

Non pas du tout car j’ai arrêté mon cabinet en 2000 et j’ai commencé la méditation vers 2010. J’ai vraiment approfondi le sujet, même si j’avais déjà une appétence pour la philosophie grecque et asiatique. J’ai constaté le bien-être que cela me procure. Je fais ça tous les matins 1H30 avec méditation, gym, yoga comme le conseille Mathieu Ricard dans son petit livre «  L’art de la méditation ».   Je me suis occupé de moi, je me sens en pleine forme après une bonne douche et un bon petit déjeuner avec le sentiment que mon corps et mon esprit sont en symbiose. Je fais de la  gym aussi pour me maintenir en forme et jouer mieux au tennis qui est un sport très exigeant physiquement.  Il faut notamment avoir une bonne ceinture abdominale. J’essaye de faire comprendre aux jeunes que s’ils pouvaient faire 5mn  par jour  et que ça devienne pour eux une routine agréable, ce serait vraiment positif. La seule difficulté c’est de s’y mettre  et de le faire régulièrement. On peut toujours avoir de bonnes raisons pour ne pas le faire mais à partir du moment où l’on a pris l’habitude, si on ne le fait pas il manque un petit quelque chose… On sent que l’on ne s’est pas assez bien occupé de soi. Idéalement cela ne devrait pas être que pour faire des résultats. Il faudrait que les jeunes comprennent que si déjà ça leur fait du bien en tant que personne, bien évidemment ça les aidera aussi pour gagner des matches.  

 

 

 

Qu’est-ce que cela t’apporte véritablement?

Ça m'a notamment appris  à respirer. On ne s’en rend pas compte car respirer c’est naturel mais quand on est stressé on fait de toutes petites respirations, on prend très peu d’oxygène et pourtant c’est l’élément le plus important pour notre corps avec l’eau.. Si l’on sait faire de bonnes respirations avec une bonne amplitude, on se fait du bien. Et l’on voit bien le lien avec le tennis avec tous ces temps morts entre chaque point. Le fait  de bien respirer, de se détendre et encore plus aux changements de côté permet de mieux exploiter ces moments là. La méditation c’est être complètement dans ce que l’on fait et c’est forcément une démarche philosophique qui amène à la connaissance de soi. On est un peu en gratitude avec la vie au sens large du terme, moins dans son égo et donc davantage  en connexion avec les autres, la nature, les animaux. Je ne suis pas bouddhiste, mais j’aime bien le dalaï lama quand il dit «  « Soyez sympa avec les autres; ça vous fera du bien. Il a raison. Ne serait-ce qu’un sourire; ça fait du bien.  On sent bien quand on s’est mis en colère même si l’on a raison sur le fond que quelque part ça nous fait du mal.  Il y a peut-être un moyen de dire les choses plus calmement; c’est un exemple. Tous les grands sages de toutes les religions se rejoignent sur cette quête de sagesse, celle de faire du bien autour de soi. Selon moi, il n’y a pas d’autre chemin  pour être heureux, Si chacun apporte son petit caillou, ça peut petit à petit aboutir à changer le monde… Voici ce que disait Djokovic après sa victoire à l’Open d’Australie en 2021 :  "Pour affronter les moments chauds d’un match, je me concentre d’abord sur ma respiration. C’est probablement la chose la plus simple à faire, mais aussi la plus efficace. Il a fallu apprendre à accepter mes peurs, mes pensées négatives, et mon égo pour les utiliser de façon positive. Pour arriver à ce résultat, j’ai beaucoup travaillé sur la pleine conscience, ai fait de la méditation. Sur le court, mes émotions et certains traumatismes ont tendance à resurgir. . Maintenant, je parviens à les contrôler beaucoup plus rapidement »

 

 

 

 

Pour en revenir à l’époque avant ton poste au sein du pôle mental, comment se passait ton travail aux CMPP avec les enfants et les ados?

Les parents dans au moins 50% des cas, ne viennent pas de leur propre gré mais souvent à la demande des enseignants ou de l’école. Ça va des enfants inhibés en difficulté scolaire à des problèmes de comportement. Certains tapent les autres etc; il y a de tout. L’on a vraiment de la chance en France, d’avoir ces réseaux de CMPP et de CMP pour enfants et ado. Le CMP est public alors que le CMPP est associatif. C’est une petite différence administrative mais le travail est pratiquement le même. Il suffit que les parents appellent et ils ont un rendez-vous avec un spécialiste, soit un pédopsychiatre ou psychologue spécialiste pour enfants et tout est gratuit..

 

Présence de nombreux spécialistes

 

Ce qui est bien dans ce genre de centre, c’est la multiplicité des soignants. Des pédopsychiatres, des psychologues, des orthophonistes, des psychométriciens pour des thérapies plus corporelles, des éducateurs spécialisés, assistantes sociales. Ce sont des thérapies individuelles ou de groupes. Lorsque l’on accueille l’enfant avec ses parents, on essaye de faire le diagnostic et l’on propose un traitement. J’aimais bien ce travail d’équipe qui est fréquent en médecine mais qui est particulièrement développé en psychiatrie et en pédopsychiatre ou l’on échange beaucoup autour d’un enfant . On réfléchit ensemble pour voir ce que l’on pourrait améliorer dans la thérapie.  On est là aussi pour aider les parents à comprendre les choses et à mieux soutenir leurs enfants. Après comme dans toute institution, peuvent  survenir des conflits institutionnels entre thérapeutes, entre personnes. J’essayais toujours de les résoudre afin que chacun soit vraiment content de venir au travail. Je pense que pour n’importe qui c’est vraiment une priorité et quand on est en poste de responsabilité comme je l’étais, mon rôle consistait à ce que l’équipe se sente bien et ait envie de travailler ensemble.

 

 

 

Existe une grande différence dans les symptômes chez les enfants  ou dans la manière d’être avec les parents selon qu’ils viennent de leur propre gré ou pas!

Ah oui. Les parents pouvaient arriver et avoir la franchise de dire «  Cest l’école qui nous amène mais on ne comprend pas pourquoi. A partir de cela, j’ai un petit peu tout vu. Parfois ces propos peuvent être vrais et l’on peut très bien dire «  C’est l’école qui s’affole un peu trop et réconforter les enseignants en disant « Je vais revoir cet enfant, mais personnellement je n’ai pas l’impression qu’il y ait trop de problèmes. »   A d’autres moments, les parents prétendaient qu’il n’y avait pas de problème, alors qu’il pouvait y en avoir de gros. Ils étaient dans une sorte de déni de la pathologie de leur enfant. Là il  fallait essayer de faire en sorte  que les parents soient un peu moins dans le déni et que l’on puisse les aider et aider leur enfant. Si la psychose de l’enfant est vraiment importante, il aura forcément une vie compliquée. C’est parfois problématique quand les parents ont l’impression que leur enfant va pouvoir faire des études alors que c’est pratiquement compromis. Tout comme le relationnel et les contacts avec les autres enfants. Cela  va prendre du temps. On essaye de mettre en place un suivi qui parfois ne s’avère pas forcément suffisant. Il faut alors faire appel à un hôpital de jour, or les parents ne sont pas forcément toujours d’accord…

 

 

 

Quels genres d'outils utilisais-tu?

Dans mon cabinet de consultation quand je recevais l’enfant et les parents, ou l’enfant seul il pouvait dessiner. Il y avait aussi des jouets. On voit un petit peu comment l’enfant évolue. Est-ce qu’il va spontanément voir les jouets , est-ce qu’il a envie de nous inclure dans le jeu? Plein de choses très intéressantes à noter. En tant que médecin, j’accueillais les enfants, et après au fur et à mesure des consultations on peut mettre en place un suivi avec une psychologue, un orthophoniste, un psychométricien soit en individuel, soit en groupe.  On pouvait proposer jusqu’à trois séances par semaine pour l’enfant et bien évidemment à l’intérieur de chaque séance quelle qu’elle soit, thérapie psychologique, orthophoniste ou en groupe, là encore on utilisait  différents outils. Ça pouvait être des groupes jeux vidéo,  pas des jeux vidéos débiles mais justement ceux qui pouvaient aider l’enfant lors de jeux de rôle. Les ados pouvaient parler autour du jeu vidéo qu’ils étaient en train de créer. C'est interessant car cela demande une certaine construction, une sorte d’élaboration d’une histoire. Il y avait aussi  des groupes conte. Chaque thérapeute a ses outils. 

 

 

Y a t-il des différences dans la manière de soigner entre les enfants et les ados?

A la fois oui et non; ce sont davantage les outils qui diffèrent et l’on peut faire des groupes d’ados. Ceux-ci sont atteints de pathologies très différentes. Quand on a un adolescent qui a une psychose de l’enfance assez déficitaire, on va l’aider. Peut-être en orthophonie pour essayer de lui faire comprendre un petit peu le mécanisme des mathématiques. Il a beau avoir 16 ans, il a une compréhension mathématique de 8 ans. On s’adapte et on se met au niveau du jeune. Il y avait aussi  un peu de sport comme le ping-pong, le baby foot. 

 

 

 

Toi qui connais très bien le sport à quel niveau dans tes soins cela se retrouvait-il?

Un point était très important c’est lorsque les parents me disaient «  il n’a pas eu de bonnes notes, ou il s’est mal comporté, je lui ai fait arrêter le foot. J’étais contre et je leur répondais : «  Si vous voulez le punir, privez- le de consoles, de ce que vous voulez mais pas de sport. Ce n’est pas le truc que l’on enlève au contraire. Le sport va l’aider à se détendre, à comprendre aussi les règles notamment dictés par l’entraîneur.  On ne  fait pas n’importe quoi avec les partenaires, avec les adversaires ». Je crois énormément au sport au niveau éducatif, apprentissage au niveau corporel et psychologique et  connaissance de soi.  C’était mon leitmotiv. Je voyais les enfants quand ils arrivaient puis en moyenne une fois tous les trimestres pour faire le point. Je faisais des consultations pouvant être un peu thérapeutiques, mais le suivi chaque semaine c’était plutôt un psychologue qui s’en occupait. Ou une orthophoniste.

 

Une grosse responsabilité

 

Avec les deux centres, je suivais à peu près 600 enfants par an. Ça fait beaucoup et évidemment sur les 600, il y en avait qui allaient plutôt bien, et d’autres qui me tracassaient beaucoup. Fallit-il hospitaliser un enfant ou un ado ou pas? Est-ce qu’il va se suicider ou pas?  Est-ce qu’un enfant subit des attouchements de la part de ses parents?  Certains  cas me préoccupaient beaucoup. Les cas difficiles on essayait de les voir un peu plus fréquemment et l’on avait tendance à oublier les autres.  En équipe, on parlait très rarement des enfants qui vont bien.  En revanche, pour les enfants en difficulté, on réunissait nos cerveaux ensemble pour essayer que ça aille mieux.  Mais si un patient ou un enfant va mal ce n’est pas forcément parce que l’on a fait des erreurs, même si cela bien évidemment peut arriver. Par exemple, si l’on n’a pas hospitalisé suffisamment tôt un adolescent et qu’il fait une tentative de suicide. On a le droit de se remettre en question et de se dire" J’aurais du le faire hospitaliser avant qu’il ne passe à l’acte." Mais même s’il n’y a pas manquement de notre part, c’est vrai qu’en tant que médecin, j’étais  particulièrement responsable…

 

 

 

Des erreurs que tu ne referais pas?

Déjà sur ma carrière de près de 30 ans de psychiatrie, je n’ai eu qu’un patient qui s’est suicidé et qui est mort. En plus, j’ai des circonstances atténuantes car j’étais jeune médecin assistant. Je venais juste d’être diplômé, j’arrive en tant qu’assistant à l’hôpital psychiatrique et en tant qu’assistant on récupère les patients de l’ancien assistant. Je récupère cette patiente qui était compliquée, que je ne connaissais pas bien. Un peu toxicomane, un peu psychotique. Au bout de quelques mois on la retrouve morte chez elle et l’on ne sait pas trop si c’est un suicide, un peu trop d’alcool ou les médicaments. Elle avait aussi forcément des fréquentations un peu louches.  Mon chef de service a été super. Il a reçu les parents avec moi et a géré la situation. Il  connaissait le problème en tant que chef de service depuis plus longtemps que moi. . Ça a été une expérience malheureuse qui m’a marqué. Mais sinon, pendant 13 ans de cabinet privé, je n’ai eu aucun suicide.  A la fois j’ai eu de la chance, il en faut,  et ça veut dire aussi que je n’ai pas trop mal bossé… Le danger pour un psychiatre c’est vraiment au début . Quand un patient vient dans votre cabinet que vous ne connaissez pas bien. Lui n’a pas une grande confiance en vous et s’il va vraiment très mal, s’il est très déprimé, il existe un risque important que les choses se déroulent mal. Alors que si on le connaît depuis 6 mois, une relation plus profonde s’est installée et le patient sait qu’il peut éventuellement vous appeler s’il ne va pas bien, rajouter une séance et les risques diminuent beaucoup.

 

 

Tu es maintenant responsable du pôle mental à la fédération française de tennis et à Poitiers. Ce poste  tu le convoitais depuis longtemps?

J’ai eu un petit temps en tant que psychiatre à la Féderation  de 1995 à 1998, un tout petit CDD de 6h par semaine au centre national de l’époque. Le DTN de l’époque est parti, il n’y a pas eu renouvellement. C’est vrai que j’étais un petit peu déçu car j’aime ce milieu et j’avais envie d’aider. J’aurais aimé continuer pas forcément à plein temps et j’ai subi une petite frustration.  Là j’ai eu l’opportunité d’être responsable à plein temps du pôle mental pour les jeunes de 12 à 20 ans ceci depuis le 1er janvier 2020.  C'est la première fois dans l'histoire du tennis.  Il y a du boulot et j’avais envie d’être libre pour pouvoir aussi partir en tournoi avec les joueurs, joueuses, entraîneurs car ce sont des moments qui me paraissent importants.  Mais les pros peuvent aussi  venir me voir. J’ai un rôle à la fois de médecin si des problèmes psychologiques surviennent et aussi un rôle de préparateur mental… Le tennis est vraiment le sport individuel qui se joue dans le monde entier et de plus en plus. A mon époque dans les pays de l’Est le tennis était peu développé et en Asie il n’y avait rien. Et ce qui est super c’est que ce sport s’est mondialisé. J’ai entendu qu’en Afrique il y a avait un projet de faire une Académie à Dakar. En ce sens, le tennis a une place à part dans le monde avec énormément de joueurs partout qui rêvent de devenir des champions.  C’est aussi une façon de s’élever notamment dans ces pays un peu plus défavorisés.  D’où l’importance encore plus de travailler le mental  et d’acquérir ce bon état d’esprit car la concurrence  est rude. 

 

 

 

Existe t-il de grosses différence de comportements entre filles et garçons?

Le tennis et la difficulté sont les mêmes et pour moi ce n’est pas une différence de sexe. C’est plus une manière de fonctionner et une jeune fille peut se comporter de la même manière qu’un garçon.  Certains vont se mettre une pression de dingues, être très anxieux et se dire «  Il faut absolument que je fasse des résultats » .D’autres au contraire sont plus tranquilles, vont avoir du mal à être sérieux et ne comprennent pas qu’il faut un minimum de travail et de sérieux à l’entraînement.  C’est plus du cas par cas, un caractère, et il faut faire en sorte que chaque jeune se connaisse mieux et ait envie de progresser. 

 

 

Et la différence avec les jeunes de tous les jours du CMPP?

La différence c’est que les jeunes qui ont choisi de faire du tennis ont un but. Et en tant que jeune ado, si on a une vraie motivation, c’est super.  La question c’est est-ce que c’est vraiment son projet à lui?  Ça ne sera jamais du 100%, il peut y avoir l’influence de la famille, des parents mais c’est important que ce soit principalement le projet de l’enfant. Je suis là pour voir cela, et à un moment donné, l’on voit bien que l’on se dirige vers un échec. C’est important que je sois là avant l’éventuelle intégration notamment en internat à Paris ou Poitiers pour voir l’enfant, ses parents et après évaluer de qui vient le projet justement. Ça fait partie du processus. Même si au final ce n’est pas moi qui décide, je donne mon avis. 

 

 

Comment agir avec ceux qui semettent trop de pression? 

C’est important qu’ils comprennent qu’ils ne jouent pas leur vie, et les aider à prendre un petit peu de recul sur le prochain tournoi. Si l'on commence à dire » Je n’ai pas le droit de perdre au 1er tour contre elle etc… ça va être compliqué d’être bien sur le court et de jouer son meilleur tennis. C’est  de permettre à ces jeunes de mieux se connaître, de les ouvrir un petit peu au monde et à la philosophie.  Tout ça va avec la connaissance de soi-même. Il y en a qui sont plus ou moins réceptifs, comme certains entraîneurs, et ça va être plus simple si l’entraineur l’est pour que le joueur le soit aussi. Certains jeunes peuvent ressentir la pression dès l’âge de 9 ans, ce qui peut engendrer de sacrés dégâts. Ce sont des messages qu’il faut faire passer auprès des parents, des joueurs et des entraîneurs… 

 

 

Tu dis «  Le travail mental ça se travaille tous les jours comme le physique et le tennis!

C’est là où l’on a un petit peu de retard je pense en France. Ça vient mais ce n’est pas encore évident pour tout le monde. La préparation  mentale c’est aussi  et surtout l’entourage. Idéalement, c’est devenir un peu philosophe pour tendre à être le plus heureux possible; ce qui est quand même notre but sur terre. On y arrive plus ou moins bien.  Je n’ai jamais entendu Nadal dire qu’il a vu un spécialiste du mental. J’ai lu mais c’est à vérifier que Federer a vu un psychologue 2,3 ans.  Son entraîneur est mort d’une mort subite jeune, il avait des problèmes et jetait sa raquette. Djokovic on sait qu’il est intéressé par la méditation, le yoga aussi, grâce à sa femme, d’où l’importance de l’entourage. Au départ, il était un peu réticent, comme moi avant. Je pensais «  c’est peut-être pour les gens fragiles ».  Il est allé voir par curiosité, car c’est bien d’être curieux et de faire sa propre expérience. Et il s’est finalement rendu compte que ça lui faisait du bien en tant que personne. J’ai l’impression même s’il n’est pas parfait qu’il fait un travail sur lui pour devenir une meilleure personne même s’il peut en agacer certains avec ses propos.

 

"Humilité, passion, travail", le secret de Nadal

 

Nadal à priori n’est pas là-dedans mais il a son entourage. Cela commence par ses parents, le petit frère de son père son entraîneur. Son meilleur ami Tintin est son physio et kiné.  J’ai lu son bouquin «  Rafa », super interessant. Il a écrit ça il y a 10 ans, c’est incroyable comment il se livre alors qu’il est en pleine carrière , même ses failles, les peurs qu’il peut avoir.. Tout ça pour dire qu’il existe une philosophie. Tintin c’est un physio qui prône une thérapie holistique donc liaison du corps et de l’esprit. C’est très philosophique et Tony Nadal dit : «  Dans le clan Nadal, le leitmotiv c’est humilité, passion, travail ». S’il en manque un; ça ne va pas. Quand on est passionné par ce que l’on fait, quelle que soit l’activité, que l’on est humble et que l’on travaille c’est une certaine philosophie. Quand on arrive à avoir cela, finalement on est heureux.  Ces joueurs  ont beau être milliardaires;  c’est mieux s'ils sont passionnés par ce qu'ils font car généralement ils ont davantage envie de travailler, de progresser et de devenir meilleur. Nadal est né là-dedans dans cette philosophie d’humilité comme Obélix. Un jour, il va arrêter sa carrière, et le monde va continuer de tourner. C’est un super joueur de tennis, mais sur terre il se passe des choses plus importantes que le tennis.  Il a à la fois un recul énorme et à en même temps quand il est sur le terrain, il est dans son tennis. Il est dans son élément, et comme il le dit «  Ma seule passion c’est de bien jouer et non pas ma seule pression c’est de gagner. C’est aussi simple que ça, mais pas si simple que ça. 

 

 

Comment s’est passé travail pendant le confinement?

J’ai pu faire des séances par téléphone et l’on a justement travaillé un peu  sur ces notions de méditation, de visualisation. L’imagerie mentale c’est important pour automatiser les choses techniques, tactiques. C’est vrai qu’il était temps que ça s’arrête. Comme tout le monde, on a vécu une période un peu irréelle. On était tous un peu figés. Avec le couvre-feu, ils peuvent se réentraîner, moi je peux aller travailler. La seule chose qui manque à tous, entraîneurs, joueurs et moi-même ce sont les tournois.  C’est sans spectateur, juste l’entraîneur mais globalement, il y en a qui peuvent jouer. Certains sont en Amérique du Sud. 

 

 

Souvent les joueurs ou joueuses quand ils font une grosse perf perdent le tour d’après!

Je vais en revenir à l’humilité et à l’importance de prendre du recul à la fois dans l’échec et à la fois dans la victoire. Et là encore, il y a deux choses qui me viennent en tête. Gilles Simon parle de l’humilité de Nadal. il dit  que là où il est incroyable dans son humilité c’est qu’il arrive à oublier ce qu’il fait. Et il arrive à n’être que dans le présent. Il est arrivé à Roland Garros en septembre 2020, et il n’était pas en train de dire «  J’en ai gagné 12, je vais arriver tranquillement en quart parce que sur terre je suis injouable et puis on verra près, mais sûrement je vais gagner le tournoi. «  Pas du tout. Il se donne même le droit de perdre au 1er tour, s’il ne joue pas à son meilleur niveau. Il se focalise sur ses sensations, son jeu et uniquement là-dessus. Il a cette capacité d’oublier ce qu’il a fait, ça va avec l’humilité comme le dit Gilles Simon.  Finalement quand on gagne un grand tournoi,  on est heureux et on se dit" Comme j’ai fait cette grande performance là,  je n’ai pas le droit de perdre au 1er tour «  car il est beaucoup moins fort que moi. » Il faut être vigilant, ce que fait très bien Nadal qui ne commet pas ces erreurs là. Il est très conscient que c’est super de gagner un tournoi mais  immédiatement après, il faut repartir et  chercher de nouveau à progresser. C’est ainsi que l’on prend le plus de plaisir. Nadal le dit «  Si on ne cherche pas ça on est mort, et l'on n’a rien compris au tennis.  C’est cela qui donne envie d’aller sur le court et l’on a bien vu comment il a fait évoluer son jeu depuis le début de sa carrière. C’est impressionnant  comme il est beaucoup plus agressif qu’auparavant. Il a tout amélioré.  Personnellement, je suis vraiment content d’être là. Jai envie d’aider, de transmettre mes compétences pour que ces jeunes s’épanouissent dans ce sport compliqué. Il faut vraiment le prendre par le bon côté sinon il peut être bien prise de tête… 

 

Qu’as-tu envie de faire passer comme message au prochain français qui se retrouvera en finale d’un Grand Chelem? 

Je vais parler d’un joueur car les filles sont meilleures que nous ces derniers temps en terme de résultats. Si un français arrive en finale de Roland Garros,  j’espère que je serai encore là pour aider.  Il faudra qu’il imagine le scénario, avec les réactions de la presse; de son entourage. Tout le monde va lui dire  c’est incroyable ce qui t’arrive, une finale de grand chelem. C’est le match de ta vie, une finale  ça ne se perd pas. Si le joueur n’est pas prêt et n’a pas travaillé en amont, ça va être très compliqué. Il faut qu’il ait travaillé les questions suivantes : Qu’est-ce qui se passe si je perds ce match? Est-ce que c’est grave? Si tu réfléchis deux secondes non. Déjà tu auras vécu une finale de Grand Chelem,; l’autre a le droit d’être meilleur que toi. Tu vas réfléchir à ce match, tu vas l’analyser. Qu’est-ce qui t’a marqué? Ou dois-tu progresser pour le prochain Grand Chelem? «  Avec le recul, cette partie va l’aider à devenir un meilleur joueur. S’il fait cet exercice régulièrement et qu’il arrive à se dire qu’il est heureux sur le court,  qu’il a la chance d’être en finale, s’il arrive à se dire qu’il a le droit de perdre, qu’il prépare tactiquement son match, qu’il essaye de jouer chaque point à fond, la perspective ne sera plus la même.  Ce n’est pas certain qu’il gagnera mais au moins il sera à fond dans son match. Et c’est ça l’important. Après, il perd, il gagne…, on passe à autre chose.. C'est ainsi qu'a raisonné Guy Drut lorsqu'il a remporté la finale du 110 m haies lors des Jeux Olympiques à Montréal en 1976... Il faut que la tête devienne plus forte. Ce n’est pas un muscle mais ça doit se travailler de la même manière. Les exercices spirituels d’ado c’est un travail. Les stoïciens travaillaient tous les jours sur leurs pensées pour arriver à prendre du recul par rapport à ce qu’ils vivaient et c’est commun à toutes les philosophies. Travailler sur ses émotions pour arriver à relativiser… 

 

Il ya aussi la gestion de l'après victoire!

Oui et ce serait bien aussi si un français gagne Garros qu’il ne pète pas un câble derrière comme l’a fait Noah après sa victoire à Roland Garros. Il a expliqué  comment en octobre novembre il avait envie de se balancer sous un pont. C’est pour ça qu’il est parti à New York. Il était devenu une telle star. Philipe hatrier et le monde international après sa victoire l’ont interdit de jouer pendant 2,3 mois car il s’était barré lors de la Workink Cup ne disputant pas le match de la 6ème place. Il devient une star et il ne peut pas jouer. Ce n’est pas facile à vivre. Et puis, il n’était pas prêt à gagner. Même son entourage n’a pas réussi faire en sorte qu’il ne «  craque «  pas. Becker a dit que lorsque l’on gagne un grand chelem, isouvent il y a la dépression post Grand Chelem. Je fais un lien avec la fameuse dépression post coïdale. Tu rêves de quelque chose, tu l’atteins et après … Nadal en revanche gagne un grand chelem, ce n’est pas une fin en soi. Il faut toujours chercher à être meilleur au sens large, physique, tennistique, mental. Si tu ne vas pas dans cette voie là, tu n’atteins pas ton meilleur niveau. C’est pour ça que Noah ne l’a pas atteint. Il a déclaré que s’il s’ était  douté d’une telle situation, il aurait été un autre joueur… Cela me fait penser à ce que m’a raconté Emmanuel Planque l’entraîneur de Lucas Pouille jusqu’à ce qu’il devienne n°10 mondial. Il me disait qu’il était dans les vestiaires quand Nadal a gagné sa 1ère final à Roland Garros.  Il est avec un ami dans les vestiaires et Tony Nadal en face d’eux attend que le vainqueur ait fini de faire des photos. Et lorsqu’il s’adresse à Nadal, il lui dit immédiatement : «  C’est super tu as gagné, mais tu as quand même beaucoup de choses qui n’ont pas fonctionné. Il lui a parlé de tout ce qu’il fallait qu’il travaille pour devenir un joueur meilleur. Sinon cela risquait d’être compliqué é pour lui de gagner un autre Grand Chelem. Même Emmanuel Planque m’a déclaré «  Si mon joueur avait gagné Roland Garros, juste après je ne lui aurais jamais dit ça » … C’est presque excessif comme l’est d’ailleurs Tony Nadal…

 

Que penses-tu de cette croyance en Dieu à laquelle se raccrochent certains joueurs?

Elle a aidé notamment Chang et aide actuellement Djokovic. En fait, il faut trouver quelque chose pour relativiser le match tout en étant complètement concentré dessus. C’est ça le secret. Facile à dire, pas facile à faire… 

 

Agnès Figueras-Lenattier