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dimanche, 18 novembre 2018

La ravisseuse

Une nourrice Angèle-Marie 18 ans est engagée par un couple bourgeois comme ""nourrice sur lieu". On la prévient tout de suite : " Evitez d'avoir des petits sinon c'est la porte". Cet avertissement est une première amorce de ce que représentait la vie d'une nourrice. Celle-ci était plus qu'ingrate et peu enviable. On va le découvrir avec d'une part ce film d'Antoine Santana intitulé " La ravisseuse" et d'autre part avec un documentaire de Jacques Tréfouël " Le lait des autres".

Dans le film, Angèle-Marie va devenir comme une amie intime de la mère ce qui ne fait pas partie des coutumes de l'époque et qui va fortement déplaire au mari. Il faut dire aussi que cet homme est fortement troublé par Angèle-Marie. Quelles conséquences cela va t-il entraîner? Une amitié qui va finalement durer ou un renvoi de la nourrice?... Telle est la question. Un film bien fait avec un bel éclairage, une atmosphère intrigante et une musique douce et jolie. L'on voit bien la condition de cette jeune femme obligée d'abandonner son enfant et souffrant de cette situation. Obligée d'oublier, elle n'a droit ni de prendre des congés, ni de sortir, et son bébé décèdera sans qu'elle soit au courant...

Le documentaire explique comment de 1840 à 1920 les nourrices du Morvan ont du vendre leur lait, provoquant la mort de milliers de nouveaux nés. Très peu de rapports sexuels sont tolérés pour ces nounous par les médecins, car à l'époque on pensait que le sperme gâtait le lait de la femme. D'ailleurs, on regardait la poitrine et l'on goûtait le lait.

Les nourrices souvent gavées pour que leur lait soit de meilleure qualité atteignent parfois les 100kg. Les voilà alors contraintes d'élargir les tailles de leurs habits avec le temps qui passe… Censurées de toutes les mauvaises nouvelles, elles retrouvent souvent avec un grand chagrin leur bébé mort en quittant la famille. Le recours au lait des autres s'accroît en Picardie, Bretagne, Normandie mais de plus en plus au cours du siècle en Morvan. La stérilisation découverte par Pasteur transformera les biberons et entraînera de 1914 à 1918 une nouvelle génération de nourrices..

Ce que l'on a appelé l'"industrie nourricière" notamment à Paris est bien dépeinte et avant d'avoir vu ces images si l'on ignorait tout de la situation, c'était un peu difficile d'imaginer combien ce commerce fut désastreux à l'époque…

Agnès Figueras-Lenattier